Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 3
ARRÊT DU 02 FÉVRIER 2015
(n° 15/ , 15 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/01913
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juin 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/10378
APPELANTE
SA GAN ASSURANCES, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 6]
Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
Assistée de Me Patrice GAUD de l'AGMC Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque: P430
INTIMES
Monsieur [Y] [X], assisté de son curateur, Monsieur [V] [X], agissant en son nom personnel et en qualité de curateur suivant jugement de curatelle renforcée du 08 Juin 2007 du Tribunal d'instance de CHERBOURG
[Adresse 1]
Monsieur [V] [X], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de curateur de son fils [Y] [X]
[Adresse 1]
Madame [G] [X]
[Adresse 1]
Monsieur [P] [X]
[Adresse 1]
Représentés par Me Philippe GALLAND de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistés de Me Isabelle TETAZ-MONTHOUX, avocat plaidant pour le Cabinet Philippe LEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : C731
CENTRE HOSPITALIER PUBLIC DU [2] anciennement dénommé CENTRE HOSPITALIER [2], pris en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Laurence TAZE BERNARD de la SCP IFL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0042
Ayant pour avocat plaidant Me Thomas DOLLON, avocat au barreau de CHERBOURG
MUTUELLE NATIONALE DES HOSPITALIERS ET DES PERSONNELS DE SANTÉ (MNH), prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
Défaillante
CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 4]
Défaillante
CPAM DE LA MANCHE, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 7]
Défaillante
Monsieur [U] [S]
[Adresse 5]
Défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Décembre 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Régine BERTRAND-ROYER, Présidente, entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Régine BERTRAND-ROYER, Présidente
Madame Sylvie KERNER-MENAY, Conseillère
Madame Sabine LEBLANC, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Nadia DAHMANI
ARRÊT :RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Régine BERTRAND-ROYER, présidente et par Mme Nadia DAHMANI, greffier présent lors du prononcé.
****
Le 4 avril 2001, Monsieur [Y] [X] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Monsieur [U] [S] et assuré auprès de la société GAN ASSURANCES.
Son droit à indemnisation n'a pas été contesté.
Il a fait l'objet d'une expertise médicale ordonnée par le juge des référés et réalisée par le docteur [J]. Cet expert a déposé un rapport définitif daté du 26 novembre 2008.
Par jugement du 22 juin 2010, le tribunal de grande instance de PARIS a notamment:
- dit que le droit à indemnisation de Monsieur [Y] [X] est total;
- condamné in solidum Monsieur [U] [S] et la société GAN ASSURANCES à payer, en deniers ou quittances:
1) à Monsieur [Y] [X] assisté de son curateur Monsieur [V] [X]:
* la somme de 628.077,59€ en capital avec intérêts au taux légal à compter du jugement, en réparation de son préjudice corporel, hormis la perte de gains professionnels futurs et les frais de tierce personne;
* une rente trimestrielle et viagère au titre des pertes de gains professionnels futurs d'un montant de 5.400€ payable à compter du 10 avril 2009;
* une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d'un montant de 7.703,90€, payable à compter du 4 janvier 2010, qui sera suspendue en cas d'hospitalisation ou de prise en charge en milieu médicalisé spécialisé supérieure à 45 jours;
- dit que ces deux rentes seront payables à terme échu avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue et seront révisables chaque année conformément aux dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985, étant précisé que l'indexation n'interviendra et les intérêts ne seront exigibles qu'à compter du jugement;
* la somme de 6.000€ en application de l'article 700 du CPC;
2) à Monsieur [V] [X]:
* la somme de 25.000€ au titre de son préjudice d'affection;
* la somme de 3.000€ au titre de son préjudice économique;
ces sommes avec intérêts à compter du jugement;
3) à Madame [G] [H] épouse [X]:
* la somme de 25.000€ au titre de son préjudice d'affection;
* la somme de 170.701€ au titre de son préjudice économique;
ces sommes avec intérêts à compter du jugement;
4) à Monsieur [V] [X] et Madame [G] [H] épouse [X], la somme de 9.000€ au titre de leurs frais de déplacements, avec intérêts à compter du jugement;
5) à Monsieur [V] [X] et Madame [G] [H] épouse [X] ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur [D] [X] la somme de 12.000€ au titre du préjudice d'affection, avec intérêts à compter du jugement;
6) à Monsieur [P] [X] la somme de 12.000€ au titre de son préjudice d'affection, avec intérêts à compter du jugement;
- condamné in solidum Monsieur [U] [S] et La société GAN ASSURANCES aux dépens;
- accordé à Maître Philippe LEBOIS, avocat aux offres de droit, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du CPC.
La société GAN ASSURANCES a relevé appel du jugement.
L'affaire a été radiée par ordonnance du 21 septembre 2011à défaut de justification des créances actualisées de la Mutuelle Nationale des Hospitaliers et des Personnels de santé, de la CDC, du Centre hospitalier [2] et de la CPAM de la MANCHE. Elle a été rétablie au rôle de la cour, après accomplissement de ces diligences le 27 janvier 2014.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 2 juillet 2014, la société GAN ASSURANCES forme les demandes suivantes:
Déclarer Monsieur [Y] [X], Monsieur [V] [X], Madame [G] [H], Monsieur [D] et Monsieur [P] [X] ainsi que le Centre Hospitalier Public du [2], mal fondés en leur appel.
Réformer le jugement prononcé par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 22 juin 2010.
Vu la loi du 05 juillet 1985 et l'article 1382 du code civil.
Allouer à Monsieur [Y] [X] assisté par son curateur Monsieur [V] [X] une indemnité en capital de 545.693,06 € euros en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il a subi du fait de l'accident survenu le 4 avril 2001 ;
Allouer à Monsieur [Y] [X] assisté par son curateur Monsieur [V] [X], en réparation de ses besoins d'assistance actuels et futurs, une rente d'un montant annuel de 16.060 € due à compter du 04 novembre 2013.
Dire et juger que cette rente sera versée trimestriellement à terme échue, suspendue en cas d'hospitalisation supérieure à trente jours et révisable conformément à la loi.
Allouer à Monsieur [Y] [X] assisté par son curateur Monsieur [V] [X], en réparation de sa perte de gains professionnels à compter du 10 avril 2009, une rente d'un montant annuel de 16.060 €.
Dire et juger que cette rente sera versée trimestriellement à terme échue et révisable conformément à la loi.
Allouer à Monsieur [V] [X] une indemnité de 18.000 euros en réparation de son préjudice moral.
Allouer à Madame [G] [H] épouse [X] une indemnité de 18.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
Allouer à Monsieur [V] [X] et à Madame [G] [H] épouse [X] une indemnité de 9.000 en réparation de leur préjudice matériel ;
Allouer à Monsieur [D] [X] une indemnité de 8.000€ en réparation de son préjudice moral;
Allouer à [P] [X] une indemnité de 8.000€ en réparation de son préjudice moral.
Débouter Monsieur [Y] [X], Monsieur [V] [X], Madame [G] [H], Monsieur [D] et Monsieur [P] [X] ainsi que le Centre Hospitalier Public du [2] de toutes autres demandes.
Prononcer toute condamnation en deniers ou quittances.
Dire et juger que chacune des parties conservera la charge ses propres dépens. $gt;$gt;
Par dernières conclusions du 24 juillet 2014, Monsieur [Y] [X] assisté de son curateur Monsieur [V] [X], ce dernier agissant également en son nom personnel, Madame [G] [H] épouse [X], Monsieur [P] [X] et Monsieur [D] [X] devenu majeur, présentent les demandes suivantes:
- Recevoir la société GAN ASSURANCES IARD en son appel et l'y déclarer mal fondée.
- Confirmer le jugement rendu le 22 juin 2010 par la 19ème Chambre Civile du Tribunal de Grande Instance de PARIS en ce qui concerne :
d'une part, l'évaluation :
- des dépenses de santé actuelles,
- des dépenses de santé futures,
- des frais divers,
- du préjudice scolaire et de formation,
- des pertes de gains professionnels futurs,
- de l'assistance tierce personne future,
- du déficit fonctionnel temporaire,
- des souffrances endurées,
- du déficit fonctionnel permanent,
- du préjudice esthétique,
- du préjudice sexuel et d'établissement
et d'autre part :
- en ce qu'il était fait application du Barème de la Gazette du Palais des 7 et 9 novembre
2004.
- et en ce que les droits du blessé relatifs à l'acquisition et à l'aménagement de son logement futur étaient réservés alors que cette réserve de droits devra figurer dans le dispositif de l'arrêt à intervenir.
- Recevoir Monsieur [V] [X] agissant tant en sa qualité de curateur de Monsieur
[Y] [X] suivant jugement de curatelle renforcée rendu le 8 juin 2007 par le
Juge des Tutelles du Tribunal d'Instance de CHERBOURG, qu'en son nom personnel,
Madame [G] [H] épouse [X], Monsieur [P] [X] et
Monsieur [D] [X] en leur appel incident du jugement rendu le 22 juin 2010 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS, formé par les présentes écritures.
Statuant à nouveau,
- Procéder à l'évaluation du préjudice tant corporel que matériel de Monsieur [Y]
[X] sur la base du rapport d'expertise médicale du Docteur [J] en date du
2 juin 2008.
- Condamner in solidum Monsieur [S] et le GAN ASSURANCES à verser à Monsieur [V] [X] agissant en qualité de curateur de Monsieur [Y] [X], suivant jugement de curatelle renforcée du 8 juin 2007, la somme de 2.984.654,00 Euros (deux millions neuf cent quatre-vingt-quatre mille six cent cinquante-quatre Euros) en deniers ou quittances, en réparation de son préjudice tant corporel que matériel.
- Dire que le poste d'assistance tierce personne future représentant un montant capitalisé
de 1.118.287,56 €uros (un million cent dix-huit mille deux cent quatre-vingt-sept euros et cinquante-six centimes) sera servi sous forme de rente viagère d'un montant annuel de 29.640,00 €uros (vingt-neuf mille six cent quarante euros) payable trimestriellement à compter du 1er décembre 2014, date de la demande et revalorisée annuellement conformément aux dispositions de l'article 43 de la Loi du 5 juillet 1985.
- Dire que le poste des pertes de gains professionnels futurs représentant un montant capitalisé de 814.919,40 €uros (huit cent quatorze mille neuf cent dix-neuf euros et quarante centimes) sera servi sous forme de rente viagère d'un montant annuel de 21.600,00 €uros (vingt et un mille six cent euros) payable trimestriellement à compter
du 1er janvier 2015, date de la demande et revalorisée annuellement conformément aux
dispositions de l'article 43 de la Loi du 5 juillet 1985.
- Réserver les droits de Monsieur [Y] [X] quant à l'évaluation de ses besoins
d'assistance en tierce personne dans l'hypothèse d'une modification de sa prise en charge actuelle au domicile parental alors que suivant les conclusions de l'Expert Judiciaire, la situation du blessé et notamment la nécessité de son assistance nocturne devrait être réexaminée.
- Réserver les droits de Monsieur [Y] [X] en ce qui concerne les frais d'aménagement de son logement futur.
- Constater que Monsieur [V] [X], Madame [G] [H] épouse
[X], Monsieur [P] [X] et Monsieur [D] [X] disposent, en leur qualité de victimes par ricochet, en application de l'article 6 de la loi du 5 Juillet 1985, d'un droit à indemnisation plein et entier du préjudice tant moral que matériel qu'ils ont subi à la suite de l'accident dont était victime Monsieur [Y] [X] le 4 avril 2001.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Monsieur [V] [X] et Madame [G] [H] épouse [X], parents de la victime, la somme de 50.000,00 euros (cinquante mille euros) pour chacun d'eux, en réparation de leur préjudice moral et affectif.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Monsieur [V] [X] et à Madame [G] [H] épouse
[X] la somme de 22.897,00 euros (vingt-deux mille huit cent quatre-vingtdix-
sept euros) en réparation de leur préjudice matériel.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Monsieur [V] [X] la somme de 30.450,15 euros (trente mille quatre
cent cinquante euros et quinze centimes) en réparation de son préjudice économique.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Madame [G] [X] la somme de 579.472,45 Euros (cinq cent
soixante-dix-neuf mille quatre cent soixante-douze Euros et quarante-cinq centimes), en réparation de son préjudice économique.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Monsieur [P] [X], frère du blessé, la somme de 20.000,00 euros
(vingt mille Euros) en réparation de son préjudice moral et affectif.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à payer à Monsieur [D] [X], frère du blessé, la somme de 20.000,00 euros
(vingt mille Euros) en réparation de son préjudice moral et affectif.
- Débouter la Compagnie GAN ASSURANCES IARD de l'ensemble de ses prétentions,
fins et conclusions plus amples ou contraires.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES à verser à Monsieur [V] [X] agissant en qualité de curateur de Monsieur [Y] [X], suivant jugement de curatelle renforcée rendu le 8 juin 2007 par le Juge des Tutelles du Tribunal d'Instance de CHERBOURG, la somme de 6.550,00 euros (six mille cinq cent euros) au titre de l'article 700 de Code de Procédure Civile.
- Condamner in solidum Monsieur [U] [S] et le GAN ASSURANCES en tous les dépens de la présente instance qui comprendront notamment les frais et honoraires de l'Expert Judiciaire, et ce, au profit de la SCP GALLAND VIGNES, Avocats
aux offres de droit, en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure
Civile.$gt;$gt;.
Dans ses dernières conclusions du 4 septembre 2014, le Centre hospitalier public du [2] demande à la cour de:
Vu les dispositions de l'article 11 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983,
Recevant le Centre Hospitalier Public du [2] en ses demandes, l'y déclarer bien fondé.
CONDAMNER la compagnie GAN ASSURANCES à payer au Centre Hospitalier Public du [2] la somme de 13 116,25 € au titre des traitements versés à Madame [X] durant sa période d'arrêt de travail provoquée par l'accident dont a été victime son fils [Y] [X].
CONDAMNER également et en toute hypothèse la compagnie d'assurances GAN au paiement d'une somme de 2 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.$gt;$gt;.
Monsieur [U] [S], assigné à sa personne ainsi que la CPAM de la MANCHE, la Caisse des Dépôts et Consignations et la Mutuelle Nationale des Hospitaliers et des Personnels de Santé, toutes trois assignées à personne habilitée, n'ont pas constitué avocat.
Par dernier courrier du 4 juillet 2014, la CPAM de Basse-Normandie a fait connaître qu'elle n'entend pas intervenir à l'instance et a communiqué le décompte définitif de ses débours constitués uniquement de prestations en nature, d'un montant total de 156.028,95€.
La MNH par lettre du 4 mars 2009, confirmée par lettre du 5 septembre 2013, a indiqué avoir pris en charge des dépenses de santé pour un montant de 2.931,68€.
La Caisse des Dépôts et Consignations a fait savoir à la société GAN ASSURANCES par courrier du 15 mars 2013 versé aux débats, qu'elle n'interviendra pas à la procédure n'ayant versé aucune prestation à la suite de l'accident.
Par courrier du 12 décembre 2014, le conseil des consorts [X] a demandé que l'affaire soit plaidée devant une formation collégiale. Il a toutefois expressément demandé, en accord avec les conseils des autres parties présents, que l'affaire soit retenue et plaidée à l'audience du 15 décembre 2014 devant un magistrat rapporteur.
CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :
Sur le préjudice corporel de Monsieur [Y] [X]:
Il ressort du rapport d'expertise médicale établi après examens du blessé réalisés en présence de ses parents ainsi que du docteur [M], assistant le blessé, et du docteur [B] représentant la société GAN ASSURANCES, qu'à la suite de l'accident Monsieur [Y] [X] a présenté un traumatisme crânio-encéphalique grave avec coma d'emblée et Glasgow à 3-4 ainsi qu'une fracture de la clavicule droite et des plaies de ripage de la cuisse et du genou.
L'expert a retenu les conclusions suivantes:
- Incapacité Temporaire Totale du 04.04.2001, jour de l'accident au 31.12.2002, date de sa sortie du Centre de Rééducation de la [Localité 2],
- consolidation le 10.04.2006, soit à son dix- huitième anniversaire,
- séquelles:
* une hémiparésie spastique gauche entravant la marche et empêchant l'usage de la main gauche dans toute activité normalement bi-manuelle,
* une hémianopsie latérale homonyme droite sans épargne maculaire avec un comportement de négligence de l'hemi-espace gauche,
* un déficit sensitif gauche, superficiel et proprioceptif qui aggrave le handicap moteur,
* des difficultés cognitives : syndrome frontal, difficultés mnésiques, lenteur intellectuelle,
* des troubles comportementaux : irritabilité, défaut d'initiative, apragmatisme,
- taux d'Incapacité Permanente Partielle: 75 % (le Docteur ([B] avait proposé 60 %),
- Tierce personne nécessaire: 4 heures par jour 7 jours sur 7, 'La présence d'une tierce personne la nuit ne paraît pas indispensable du moins à l'heure actuelle, contrairement à ce que pense le Dr [M]. Si le patient devait être amené à vivre seul (ce qui reste hypothétique à l'heure actuelle), la question mériterait d'être éventuellement reposée',
- pretium doloris: 6/7,
- préjudice esthétique: 5/7 (le Docteur [B] avait avancé le chiffre de 3,5/7).
- il y a un préjudice sexuel et un préjudice d'établissement (bien que Monsieur [X] puisse éventuellement vivre en couple),
- Il y a une perte de chance majeure sur le plan professionnel. Monsieur [Y] [X] est, en effet, totalement incapable d'avoir une activité en dehors d'un Centre d'Aide par le Travail. Son inaptitude professionnelle découle tout à la fois de son déficit sensitif et moteur (une activité bi manuelle quelconque lui est interdite), de son incapacité à rester debout, de son hémianopsie (avec négligence) qui lui interdit les taches visuelles et de ses séquelles neuropsychologiques (notamment d'ordre frontal).
Au vu de ces éléments et de l'ensemble des pièces versées aux débats, le préjudice corporel de Monsieur [Y] [X] qui était âgé de presque 13 ans (né le [Date naissance 1] 1988) lors de l'accident et était collégien, sera indemnisé comme suit, étant précisé que lorsqu'il sera nécessaire d'employer un barème de capitalisation pour déterminer les indemnités réparant des préjudices futurs, le barème de la Gazette du Palais publié en mars 2013 au taux de 1,20% qui apparaît le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, sera utilisé conformément à la demande des consorts [X] qui sollicitent dans le dispositif de leurs conclusions l'application du barème de la Gazette du Palais de novembre 2004 mais précisent dans le corps de leurs conclusions qu'il s'agit du barème 2004 'actualisé en cause d'appel sur la base du Barème publié à la Gazette du Palais les 27 et 28 mars 2013' au taux d'intérêts de 1,20%.
Préjudices patrimoniaux:
¿ temporaires, avant consolidation:
- dépenses de santé actuelles:
Elles ont été prises en charge par la CPAM pour un montant de 156.028,95€, par la MNH pour la somme de 2.931,68€ et les parties s'accordent pour fixer les dépenses de santé qui sont restées à la charge de la victime à la somme de.............................263,50€.
- frais divers:
Les parties acceptent les sommes allouées à ce titre par le tribunal à l'exception de celle accordée en remboursement d'un lit électrique acheté le 14 octobre 2008. En effet, la société GAN ASSURANCES soutient que l'expert n'ayant pas noté que ce lit était nécessaire au blessé, le lien de causalité entre cette dépense et le handicap n'est pas établi. Toutefois, le premier juge a justement retenu que ce matériel est de nature à améliorer le confort de la victime qui conserve un important handicap moteur de l'hémicorps gauche. L'acquisition de ce lit est donc une conséquence de l'accident qui doit être prise en charge par la société GAN ASSURANCES.
L'indemnité de.......................................................................................... 4.980,19€ fixée par le tribunal sera donc confirmée, les frais d'assistance médicale lors des opérations d'expertise ayant été pris en compte au titre de l'article 700 du CPC.
- tierce personne temporaire:
Constatant que les consorts [X] indiquaient que Madame [X] avait cessé d'occuper son emploi pour s'occuper de son fils blessé et qu'ils demandaient à la fois au nom de Monsieur [Y] [X], des indemnités au titre de l'aide d'une tierce personne qui lui a été nécessaire, et au nom de Madame [X], la réparation du préjudice économique résultant de la perte de ses gains professionnels, le tribunal a réparé le préjudice économique de Madame [X] mais a débouté Monsieur [Y] [X] de sa demande pour la période antérieure au 4 janvier 2010.
Devant la cour, les parties s'entendent pour indemniser le préjudice subi par Monsieur [Y] [X] en raison de l'aide d'un tiers que son état a justifiée mais la société GAN ASSURANCES s'oppose à la demande maintenue par Madame [X] d'une réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de la cessation de son activité professionnelle. La demande en réparation de ce préjudice économique sera examinée au titre des préjudices subis par Madame [X] et le poste de préjudice relatif à l'aide d'une tierce personne sera indemnisé comme suit:
- pour la période du 22 mai 2001 au 18 décembre 2002 durant laquelle le jeune blessé a été pris en charge par le centre médicalisé '[1]', les parties s'accordent pour fixer à 215 jours les séjours passés par Monsieur [Y] [X] dans sa famille mais se séparent sur le nombre d'heures d'assistance qui a été nécessaire au blessé ainsi que sur le taux horaire devant être appliqué. La société GAN ASSURANCES forme son offre sur la base de 11€/h et de 4 heures par jour au vu des conclusions de l'expert judiciaire, en relevant que celui-ci ne fait aucune distinction entre les besoins passés et futurs du blessé. Les consorts [X] demandent une réparation calculée en fonction d'un taux horaire de 14€ et de 14 heures par jour. Durant cette période proche de l'accident, l'état du blessé avait, ainsi que le font observer Monsieur [Y] [X] et ses parents, nécessité selon le docteur [E], médecin-conseil de la société GAN ASSURANCES, l'aide d'un tiers durant 14 heures par jour, et le docteur [J] a par conclusions non critiquées, considéré que le blessé présentait alors un déficit fonctionnel temporaire total. La demande d'une réparation sur la base d'une assistance durant 14 heures par jour apparaît en conséquence, correspondre aux besoins du blessé. Compte tenu de la période, l'indemnité sera toutefois fixée en fonction d'un taux horaire moyen de 12€, charges patronales comprises.
Monsieur [Y] [X] recevra par conséquent la somme de: 36.120€ (215j x14h x12€);
- pour la période du 19 décembre 2002 au 2 janvier 2006 durant laquelle Monsieur [Y] [X] a été pris en charge en ambulatoire au domicile de ses parents et a été scolarisé de septembre 2003 à juin 2005, soit 1.110 jours comme l'indiquent les consorts [X] et non 3 ans et 2 jours comme le note la société GAN ASSURANCES: il sera alloué en fonction d'un taux horaire moyen de 13€ et d'une aide nécessaire non contestée durant 4 heures par jour, la somme de 57.720€ (1.110 j x 4h x 13€);
Conformément à la demande commune des parties et eu égard au décompte des séjours passés par Monsieur [Y] [X] dans sa famille établi par l'Institut 'La GRILLONAIS' pour la période du 2 janvier 2006 au 3 juillet 2008, la période du 3 janvier 2006 au 10 avril 2006 bien qu'antérieure à la consolidation, sera prise en compte au titre des préjudices permanents.
Total du coût de l'aide d'un tiers jusqu'au 2 janvier 2006: (36.120€ + 57.720€)..93.840€.
-préjudice scolaire et de formation:
Monsieur [Y] [X] était élève de 6e lors de l'accident, il n'a pu ensuite reprendre une scolarité normale malgré une tentative de rescolarisation en milieu médicalisé. Le tribunal a exactement apprécié l'indemnité devant revenir à la victime à ce titre et celle-ci sera confirmée:..............................................................................20.000€.
¿ permanents, après consolidation:
- dépenses de santé futures:
* prises en charge par la CPAM :
La Caisse ne fait état d'aucune prestation future.
* à la charge de la victime:
¿ les frais d'optiques:
La société GAN ASSURANCES conteste à tort devoir prendre ces frais en charge dès lors que l'expert, même s'il n'a pas noté que le blessé devra porter des lunettes, a conclu qu'il conserve en raison de l'accident, des troubles ophtalmologiques.
Sur la base d'une dépense annuelle à la charge de la victime de 108,15€, l'indemnité viagère due, capitalisée à compter de la consolidation conformément à la demande de Monsieur [Y] [X], s'élève à la somme de 4.503,25€ (108,15€ x 41,639);
¿ canne avec dragonne:
Ce matériel est également nécessaire au blessé, contrairement à ce que soutient la société GAN ASSURANCES, eu égard à l'hémiparésie gauche qu'il présente, avec hyperextension du membre inférieur et pied en équin qui affecte la marche. En revanche, Monsieur [Y] [X] qui ne justifie que d'un seul achat en mars 2009, ne démontre pas qu'un renouvellement de cette canne soit nécessaire tous les deux ans. En fonction d'un renouvellement tous les cinq ans, soit pour la première fois en mars 2014 alors que le blessé était âgé de 25 ans, il sera alloué la somme de 245,93€ [28,44€ + (28,44€/5 x38,237];
¿ agenda électronique, dont la nécessité, le coût (218,90€) et la fréquence de renouvellement (3 ans) ne sont pas contestés: 3.081,45€ ( 218,90€ + [(218,90€ / 3) x 39,231)].
Total du coût des aides techniques à la charge de la victime: (4.503,25€ + 245,93€ + 3.081,45€)..............................................................................................................7.830,63€.
- frais de logement adapté:
Il n'y a pas lieu de donner acte de réserves qui ne confèrent aux parties aucun droit. Les consorts [X] qui ne forment aucune demande d'indemnité à ce titre, pourront présenter une demande s'ils l'estiment opportun, sous réserve de la prescription.
-tierce personne à compter du 2 janvier 2006:
Les parties acceptent les conclusions de l'expert fixant à quatre heures par jour les besoins du blessé en assistance mais elles différent sur les taux horaires devant rémunérer cette aide. En tenant compte des charges patronales et des périodes considérées, ce poste sera indemnisé comme suit:
* du 2 janvier 2006 au 3 juillet 2008, période durant laquelle Monsieur [Y] [X] a été pris en charge à l'Institut 'La GRILLONAIS' et est revenu au domicile familial durant 388 jours selon attestation de cet établissement, il sera alloué en fonction d'un taux horaire moyen de 14€, la somme de (388j x 4h x 14€)........................ 21.728€.
* du 4 juillet 2008, date du retour de Monsieur [Y] [X] au domicile de sa famille, au 4 janvier 2015: sur la base de 410 jours demandée afin de tenir compte des congés payés dont doit bénéficier la tierce personne, et d'un taux horaire moyen, toujours charges comprises, de 16€, soit une indemnité annuelle de 26.240€ (410j x 4h x 16€), Monsieur [Y] [X] recevra pour cette période de 6,5 ans, la somme de........................................................................................................................ 170.560€.
* à compter du 5 janvier 2015 et de façon viagère, l'indemnité due sera fixée en fonction d'un taux horaire moyen, charges comprises, de 18€ et allouée, afin de préserver l'avenir du blessé, sous la forme d'une rente viagère annuelle de 29.520€ (410j x 4h x 18€), payable à compter du 5 janvier 2015 dans les conditions qui seront précisées au dispositif.
L'expert ayant déterminé les besoins du blessé au vu de sa situation lors de son examen en précisant qu'ils pourraient évoluer si celle-ci devait se modifier, il sera dit que cette rente pourra être revue si Monsieur [Y] [X] devait vivre de façon indépendante ou, au contraire, être pris en charge dans un établissement médicalisé.
-perte de gains professionnels futurs:
La société GAN ASSURANCES propose d'indemniser ce poste sur la base du SMIC en faisant observer que Monsieur [Y] [X] pourrait exercer une activité dans un centre par le travail. Toutefois, il ressort du rapport d'expertise que le blessé présente non seulement des séquelles neurologiques qui lui interdisent de travailler debout, d'effectuer des déplacements, d'utiliser sa main gauche et de réaliser des tâches nécessitant une vue correcte, mais aussi des troubles cognitifs et comportementaux. Ses chances d'occuper un poste rémunéré, même dans un cadre protégé, sont donc extrêmement limitées et il justifie par diverses attestations, n'avoir jamais exercé une activité professionnelle malgré ses recherches d'emplois.
Monsieur [Y] [X] était élève de 6e lors de l'accident, il peut être considéré qu'il aurait pu se situer dans la moyenne des français et percevoir un salaire mensuel moyen de l'ordre de 1.500€ durant les premières années de son activité professionnelle puis une rémunération mensuelle moyenne durant l'ensemble de sa carrière, de 1.800€.
Il a donc perdu une chance de recevoir ces rémunérations qui sera évaluée à 90% de ces montants.
Il lui sera par conséquent alloué pour la période du 1er janvier 2009, alors qu'il était âgé de 20 ans, au 31 décembre 2014: la somme de [(1.500€ x 90%) x 72 mois):....97.200€.
A compter du 1er janvier 2015, Monsieur [Y] [X] sera indemnisé en fonction d'une perte mensuelle de 1.620€ (1.800€ x90%) et cette indemnité sera allouée sous forme de rente afin de préserver son avenir, soit une rente annuelle de 19.440€, viagère pour compenser les pertes de droits à la retraite et payable à compter du 1er janvier 2015 selon les modalités qui seront précisées au dispositif.
Préjudices extra-patrimoniaux:
¿ temporaires, avant consolidation:
- déficit fonctionnel temporaire:
L'incapacité fonctionnelle totale ou partielle subie par la victime durant la maladie traumatique pour la période antérieure à la date de consolidation ainsi que sa perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante et la privation de ses activités privées souffertes durant cette même période ont été justement indemnisés par la somme de.......................................................................................................................... 35.000€.
-souffrances:
Elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis, cotées à 6 /7, elles ont également été à juste titre, indemnisées par la somme de .................40.000€.
¿ permanents, après consolidation:
-déficit fonctionnel permanent :
Les séquelles décrites par l'expert et conservées par Monsieur [Y] [X] après la consolidation de son état, entraînent non seulement des atteintes aux fonctions physiologiques mais également des douleurs ainsi qu'une perte de qualité de vie et des troubles dans les conditions d'existence, personnelles, familiales et sociales. Elles seront indemnisées, s'agissant d'une victime âgée de 18 ans lors de la consolidation de son état et conformément à sa demande, par la somme de..............................................387.500€.
-préjudice d'agrément:
Monsieur [Y] [X] pratiquait le cyclisme et participait à des compétitions. Il est désormais privé de toute activité sportive. Ce préjudice justifie l'indemnité allouée par le tribunal:........................................................................35.000€.
-préjudice esthétique permanent:
Les parties acceptent l'indemnité fixée par le premier juge:.....................25.000€.
-préjudice sexuel et d'établissement:
L'expert a conclu à l'existence d'un préjudice sexuel et d'établissement tout en notant que le blessé pourrait éventuellement vivre en couple. La société GAN ASSURANCES ne conteste pas la réalité de ces deux préjudices et offre en réparation de chacun d'eux la somme de 15.000€ tandis que les consorts [X] demandent la confirmation de l'indemnité globale de 75.000€ allouée par le tribunal.
Monsieur [Y] [X] ne présente pas d'atteinte aux fonctions sexuelles et toute vie de couple ne lui pas interdite toutefois les séquelles de l'accident, tant physiques que psychologiques, limitent ses possibilités de faire des rencontres et réduisent fortement ses chances de fonder une famille alors qu'il n'était âgé que de 18 ans lors de la consolidation de son état. L'ensemble de ces préjudices a été justement indemnisé par la somme de......................................................................................................... 75.000€.
TOTAL: 1.013.902,32€ en capital outre les rentes .
Monsieur [Y] [X] recevra ainsi, en réparation de son préjudice corporel, une indemnité totale de 1.013.902,32€, en deniers ou quittances ainsi que deux rentes viagères, l'une au titre des pertes de gains professionnels futurs d'un montant annuel de 19.440€, payable à compter du 1er janvier 2015 et l'autre au titre de l'assistance d'une tierce personne, de 29.520€ par an, payable à compter du 5 janvier 2015.
Sur les préjudices des proches de Monsieur [Y] [X]:
* les préjudices moraux (ou d'affection):
Le très grave accident subi par Monsieur [Y] [X] ainsi que les séquelles qu'il conserve entraînent pour ses proches un préjudice moral qui a été exactement indemnisé par le tribunal. Les sommes allouées à ce titre seront donc confirmées.
* les préjudices patrimoniaux:
¿ les frais de déplacement exposés par Monsieur et Madame [X]:
Au vu des attestations produites, l'indemnité due de ce chef sera portée à la somme de 20.000€.
¿ les pertes de rémunérations et de droits à la retraite des parents du blessé:
Monsieur [X] qui exerce la profession de responsable de chantier, indique qu'il a cessé son travail en raison de l'accident dont son fils a été victime, du 6 avril au 10 juin 2001 et qu'il a subi durant cette période, une perte de 450,15€. Il fait valoir qu'il a en outre perdu tout intérêt pour son travail, refuse désormais tout déplacement et prise de responsabilité, ce qui entrave la progression de sa carrière et il demande à ce double titre la somme de 30.450,15€.
Madame [X], qui occupait lors de l'accident un poste d'aide soignante au Centre Hospitalier [2], expose qu'après un arrêt de travail durant plusieurs mois, elle a repris un emploi à temps partiel le 2 octobre 2001 puis a sollicité sa retraite à compter du 1er janvier 2003 afin de s'occuper de son fils. Elle demande au titre de ses pertes de salaires et de droits à la retraite la condamnation in solidum de Monsieur [U] [S] et de la société GAN ASSURANCES à lui verser la somme de 579.472,45€, après déduction des salaires maintenus par le Centre Hospitalier [2] du 4 avril 2001 au 31 décembre 2002 pour un montant de 20.728,50€ et des pensions que lui verse sa caisse de retraite qu'elle fixe à 158.739,90€.
La société GAN ASSURANCES conclut au débouté des époux [X] en faisant observer que faire droit à leurs prétentions aboutirait à une double indemnisation d'un même préjudice puisque les besoins du blessé en assistance d'une tierce personne ayant été indemnisés, les pertes de rémunérations des parents résultent de leur propre décision de cesser leur activité professionnelle et ne sont pas en relation de causalité directe avec l'accident.
Il résulte des pièces produites et des écritures des parties que les deux parents de Monsieur [Y] [X] ont été placés en arrêt de travail pour maladie à la suite de l'accident. Monsieur [X] a repris son poste le10 juin 2001 tandis que Madame [X] n'a repris un emploi à temps partiel que le 2 octobre 2001 avant de faire valoir ses droits à la retraite. Il y a lieu de constater que la gravité des blessures de l'enfant était de nature à affecter la santé physique et psychique de ses parents durant quelques mois, toutefois, après cette période dont le terme sera fixé, au vu des pièces produites, à la fin juin 2001, le lien de causalité directe entre l'accident et l'état de santé de Madame [X] nécessitant un arrêt pour maladie, n'est pas démontré. En effet aucun élément médical ne fait état d'une telle relation de causalité et Madame [X] indique dans ses conclusions avoir cessé son travail pour s'occuper de son fils et non en raison de son état de santé. Dès lors, les pertes de gains professionnels ou de droits à la retraite subis ultérieurement par Madame [X] n'apparaissent pas être la conséquence de la dégradation de son propre état de santé dû à l'accident mais résulter de sa décision d'assister son fils. Or, les consorts [X] ayant demandé et obtenu l'indemnisation des besoins du blessé en assistance d'un tiers, la société GAN ASSURANCES soutient à bon droit que faire droit en outre à la demande de Madame [X] au titre de ses pertes professionnelles et de retraite, mettrait à sa charge l'obligation d'indemniser doublement la même assistance d'une tierce personne. Il appartient en effet à Monsieur [Y] [X] assisté de son curateur, d'embaucher et de rémunérer la tierce personne qui lui apporte son aide, qu'elle soit étrangère à la famille ou un proche.
Il ressort de l'attestation de son employeur que Monsieur [X] a subi, durant son arrêt pour maladie du 6 avril au 11 juin 2001, une perte d'indemnités de 450,15€. Cette somme lui sera donc allouée. Le surplus de la demande de Monsieur [X] sera rejeté dans la mesure où les pièces qu'il verse aux débats au soutien de sa demande ne font état d'aucune perte de rémunération ni de chance de progression de sa rémunération.
Madame [X] qui ne conteste pas avoir bénéficié du maintien par le centre hospitalier [2] de son salaire jusqu'à la fin juin 2001, n'établit pas avoir subi une perte de rémunération avant cette date. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande en réparation d'un préjudice économique.
- Sur la demande du Centre hospitalier [2]:
Celui-ci demande le remboursement de la somme de 13.116,25€ au titre des traitements
versés à Madame [X] durant sa période d'arrêt de travail provoquée par l'accident tandis que la société GAN ASSURANCES conclut au rejet de cette demande aux motifs que ce Centre n'a pas la qualité de tiers payeur puisqu'il n'a versé aucune prestation au profit de Monsieur [Y] [X], que sa demande formée pour la première fois en appel, est nouvelle au sens de l'article 564 du CPC et que le préjudice allégué n'est pas un préjudice direct.
Toutefois, le Centre hospitalier soutient justement d'une part, que n'ayant pas constitué avocat en première instance, il ne peut se voir opposer les dispositions de l'article 564 du CPC, d'autre part qu'il dispose en vertu de l'article 29-4 de la loi du 5 juillet 1985 d'un droit à recours sur les salaires et accessoires du salaire maintenus par l'employeur pendant la période d'inactivité consécutive à l'événement qui a occasionné le dommage et que dès lors que Madame [X] a droit à la réparation de son préjudice par ricochet y compris celle de ses pertes de salaires, les traitements qui lui ont été maintenus durant ses arrêts de travail consécutifs à l'accident sont soumis au recours de son employeur.
Le centre hospitalier est donc bien fondé à réclamer le remboursement des traitements maintenus à Madame [X] lors de ses arrêts de travail mais à la condition que ces arrêts soient en lien de causalité directe avec l'accident. En l'espèce, la période d'arrêt due à l'accident ayant été limitée à la fin juin 2001, les traitements versés par le Centre hospitalier à sa salariée seront évalués au vu des bulletins de paie de Madame [X] à défaut de production par l'employeur d'un décompte détaillé, à la somme de 5.717€ qui sera allouée.
- Sur l'article 700 du CPC
Il serait inéquitable de laisser à la charge des victimes et du Centre Hospitalier [2] l'intégralité des frais et honoraires exposés par eux et non compris dans les dépens. La somme fixée de ce chef par le premier juge sera confirmée et il sera alloué en cause d'appel, la somme complémentaire de 5.000€ à Monsieur [Y] [X] et celle de 1.500€ au Centre hospitalier.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement à l'exception de ses dispositions relatives au droit à indemnisation, à la réparation des préjudices d'affection des parents et frères de Monsieur [Y] [X], à l'article 700 du CPC et aux dépens ;
Et statuant à nouveau, dans cette limite :
Condamne in solidum Monsieur [U] [S] et la société GAN ASSURANCES à verser:
- à Monsieur [Y] [X], assisté de son curateur Monsieur [V] [X] :
* la somme de 1.013.902,32€ en capital en réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions et somme versée en vertu de l'exécution provisoire non déduites, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus;
* une rente viagère au titre de la tierce personne d'un montant annuel de 29.520€, payable trimestriellement à compter du 5 janvier 2015, à terme échu et avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue, indexée selon les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et qui sera suspendue en cas de prise en charge de la victime en milieu médicalisé, à partir du 46e jour de cette prise en charge;
* une rente viagère au titre des pertes de gains professionnels futurs d'un montant annuel de 19.440€, payable trimestriellement à compter du 1er janvier 2015 à terme échu et avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue, et qui sera indexée selon les dispositions de la loi du 5 juillet 1985;
Dit que la rente allouée au titre de la tierce personne pourra être révisée en cas de modification des conditions d'hébergement de la victime;
* la somme complémentaire de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du CPC;
- à Monsieur [V] [X] en son nom personnel, la somme de 450,15€ au titre de ses pertes de rémunérations;
- à Monsieur et Madame [X] [V] et [G] la somme globale de 20.000€ en remboursement de leurs frais de déplacement;
-au Centre hospitalier [2] :
* la somme de 5.717€ en remboursement des traitements maintenus au profit de Madame [X] en conséquence de l'accident;
* la somme de 1.500€ en application de l'article 700 CPC;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Dit n'y avoir lieu de donner acte des réserves demandées;
Condamne in solidum Monsieur [U] [S] et la société GAN ASSURANCES aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE