La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/01/2015 | FRANCE | N°12/03701

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 20 janvier 2015, 12/03701


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 20 Janvier 2015



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/03701



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 10/15496





APPELANTE

Madame [H] [W]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en personne,

assistée de Me Christophe NOEL, avoca

t au barreau de PARIS, toque : D1535







INTIMEE

Société CABINET [R] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en la personne de [R] [K]

assistée de Me Laurent RUBIO, avocat au bar...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 20 Janvier 2015

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/03701

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 10/15496

APPELANTE

Madame [H] [W]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en personne,

assistée de Me Christophe NOEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1535

INTIMEE

Société CABINET [R] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en la personne de [R] [K]

assistée de Me Laurent RUBIO, avocat au barreau de PARIS, toque : K0042

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Novembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Christine ROSTAND, Présidente

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Frédérique LOUVIGNE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La société CABINET [R] [K] est un cabinet de conseil finance, en gestion et en organisation auprès des collectivités territoriales et autres entités publiques ou privées.

Madame [W], engagée par la société CABINET [R] [K] à compter du 4 septembre 1995, en qualité de consultante, a été licenciée, pour faute grave, par lettre du 18 novembre 2010, énonçant les motifs suivants :

'vous avez été convoquée, suivant lettre remise en mains propres en date du 4 novembre 2010 à un entretien préalable sur une éventuelle mesure de licenciement, fixé au 15 novembre 2010.

Lors de cet entretien qui s'est tenu en nos locaux et auquel a assisté Monsieur [F] [D] en sa qualité de directeur général, je vous ai fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre, à savoir :

la mauvaise exécution de vos obligations professionnelles,

l'instauration d'un climat polémique,

la tenue de propos excessifs, injurieux, diffamants et mensongers à l'encontre du pouvoir de direction

Lors de cet entretien, vous avez pris acte de ces récriminations sans chercher sérieusement et objectivement à vous en expliquer.

1 la mauvaise exécution de vos obligations professionnelles

lorsque vous être revenue au service de la société, le lundi 2 août 2010, après trois ans de congé parental, vous ont été confiés en tout et pour tout pour votre premier mois de reprise :

-une formation de deux jours à animer les 14 et 15 septembre (soit à horizon d'un mois et demi) et de surcroît avec un power point tout prêt puisque cette même formation avait déjà eu lieu trois fois depuis le début de l'année,

-un contrôle de délégataire à faire sur pièces avant fin septembre( soit à horizon de deux mois) et qui était facturé au client pour 3,5 jours de travail.

Début septembre vous a été confiée une autre session de formation pour le 21 du même mois avec là aussi un matériel pédagogique existant fourni par nos soins.

Nous avions effectivement tenu, à ce que votre retour se passe dans les meilleures conditions humaines possibles et, à ce titre, nous vous avions ménagé une très longue phase de transition qui n'était d'ailleurs pas encore achevée en vous confiant moins de travail qu'aux autres cadres de la société y compris des consultants juniors dont la rémunération et la participation au capital sont très loin d'égaler les vôtres.

Or, il se trouve que deux de ces interventions ont été bâclés sans qu'un quelconque motif légitime puisse le justifier, si ce n'est un manque d'implication professionnelle délibéré qui n'est pas concevable pour un cadre senior de 12 ans d'ancienneté rémunéré 67'000 € par an sans compter le commissionnement et l'intéressement (soit au total plus de 75'000 € par an sur vos dernières années d'activité).

En ce qui concerne la formation du 21 septembre 2010 à [Localité 2] dont le thème était 'jusqu'où et comment une collectivité peut-elle encore s'endetter'', l'ensemble des participants ont exprimé leur mécontentement et de vives critiques en soulignant que le programme prévu n'avait pas été respecté, que les questions posées sur le programme diffusé à l'inscription étaient restées sans réponse, certains d'entre eux allant même jusqu'à utiliser le terme 'mensonger' concernant le contenu de cette formation. Devant un tel tollé, l'organisme de formation nous a précisé par écrit avoir été dans l'obligation de ne pas facturer les participants afin de conserver la confiance de ses clients. Il nous a été notifié qu'il s'agissait à la fois d'un préjudice financier et d'un préjudice d'image, aussi bien pour eux que pour nous'

Pourtant l'ensemble des documents relatifs à la préparation de cette formation (power point d'une formation éprouvée qui s'était déjà déroulée plusieurs fois...) vous avaient été remis et permettaient de scrupuleusement respecter le programme prévu.

Vous avez néanmoins finalement reconnu avoir pris l'initiative de préparer à nouveau cette intervention sans vous en tenir au programme initialement prévu.

En procédant ainsi, sans même m'en informer, vous n'avez pas respecté mes directives tout en générant de surcroît une charge inutile de travail et donc artificielle qui ne sert pas les intérêts de l'entreprise.

Un tel comportement n'est pas concevable à votre niveau de responsabilité et d'expérience dans ce milieu et ce d'autant qu'il n'est pas tolérable que l'on puisse modifier, sans en référer aussi au client, la teneur de la prestation prévue et qui lui avait été promise.

Vous avez ainsi gravement porté atteint au bon déroulement de cette formation que ce soit dans l'intention de délibérément nuire à la société ou bien par un comportement qui constitue une légèreté blâmable manifestement incompatible avec le professionnalisme que nous pouvions raisonnablement espérer d'une salariée de votre expérience.

Circonstance particulièrement aggravante, vous avez d'ailleurs tenté de dissimuler l'ampleur de cet incident puisque vous vous êtes abstenue de communiquer spontanément les évaluations des participants en prétextant ne pas les avoir. Ce n'est que sur l'insistance de Madame [Z] , responsable administrative de la société, qui vous a indiqué qu'elle se voyait contrainte de les demander directement auprès des participants que vous les avez finalement 'retrouvées' plus de trois semaines après, à savoir le 15 octobre, alors que la formation avait eu lieu le 21 septembre !!!

Or cette formation avait été si calamiteuse, que même en l'absence des évaluations qui avaient donné lieu à rétention d'information de votre part, l'organisme en a été directement informé par des clients qui lui ont écrit en réclamant d'être remboursés. C'est ainsi le cas de la mairie de [Localité 5], une grande collectivité pour laquelle nous n'avions pas travaillé depuis 2001 et à qui je venais précisément de vendre une petite mission en juillet 2010, pour la première fois donc depuis près de 10 ans'

En ne me communiquant pas ces évaluations écrites désastreuses, dès le lendemain de cette formation, vous m'avez donc empêché d'intervenir pour essayer de récupérer le client.

S'agissant du contrôle sur pièces du délégataire dans le dossier 'Manche numérique' pour lequel nous vous avions laissé deux mois jusqu'à fin septembre pour le préparer, nous n'avons pu que constater que votre travail n'était pas achevé le lundi 4 octobre et nous avons dû nous-mêmes effectuer 8 heures de travail dans la journée du mardi 5 octobre pour finaliser ce dossier.

Là encore un tel retard dans l'exécution de cette tâche ne peut s'expliquer et vous n'avez d'ailleurs pas daigné le faire.

En revanche, on s'explique mieux de tels comportements lorsque l'on sait que vous aviez ouvertement déclaré auprès de certains de vos collègues votre souhait de ne pas rester dans la société plus de quelques mois, cette période devant vous servir de transition pour créer votre propre structure.

Même si ce projet n'est pas avéré, de telles déclarations rapportées à votre comportement démontrent que vous n'êtes pas impliquée comme doit l'être un cadre de votre niveau et soulignent à tout le moins que vous n'exécutez pas les tâches professionnelles qui vous incombent comme l'impose la bonne foi qui préside à toute relation contractuelle.

2 l'instauration d'un climat polémique.

Malheureusement nous n'avons pu que constater que l'état d'esprit dont vous avez témoigné, s'inscrivait scrupuleusement dans le prolongement de celui préalable à la reprise de votre activité professionnelle lorsque vous prétendiez être victime de harcèlement moral.

Grief que vous avez réitéré lors de l'entretien préalable et qui transparaît dans certains de vos courriers sur lesquels nous allons revenir tant leurs propos qui y figurent sont inadmissibles.

Nous avons pu également constater qu'à la suite de la reprise de vos fonctions et après l'envoi de deux avertissements (7 avril 2010 et 27 juillet 2010) dénonçant de graves manquements, vous avez soudainement prétendu avoir effectué de très nombreuses heures supplémentaires et vous avez instauré une polémique dans des termes manifestement excessifs et outrageants.

En effet, à la suite de nos différents échanges, qu'ils soient écrits ou oraux, quant à la question du temps de travail, vous vous êtes permise de m'adresser un courrier le 8 octobre dernier tout aussi contestable sur le fond que sur la forme dans la mesure où vous ne vous contentez plus de revendiquer le paiement d'heures supplémentaires mais dans lequel vous teniez aussi certains propos inacceptables tout en proférant de graves accusations à mon encontre.

Avant d'en arriver aux propos litigieux et impardonnables dont vous vous êtes prévalue dans ce courrier, il me semble indispensable de préciser les éléments suivants :

En premier lieu, il n'a jamais été question pour moi de refuser de vous payer, pas plus qu'à l'un de mes autres collaborateurs, d'éventuelles heures supplémentaires.

Il ne m'a pas échappé que vous considériez que la convention forfait jours prévue par la convention collective ne vous était pas personnellement opposable et que vous estimiez donc être soumise aux 35 heures.

Je n'ai pas souhaité polémiquer sur cette question, pas plus que de persévérer dans le refus de vous payer, le cas échéant, vos prétendues heures supplémentaires s'il devait effectivement exister une difficulté sur la législation du temps de travail qui vous est applicable.

Il n'en demeure pas moins que les décomptes que vous m'aviez adressés étaient en l'état, comme vous le saviez, notoirement insuffisants en tant que tels pour pouvoir considérer votre décompte comme légitime et surtout parfaitement contestables pour plusieurs raisons.

La première raison est que les heures supplémentaires s'effectuent à la demande de l'employeur ou avec son accord même implicite ce qui n'a pas été le cas.

La deuxième raison est que les tâches qui vous avaient été dévolues étaient très loin de demander une charge de travail importante ou impliquant un éventuel dépassement du temps légal de travail, comme nous l'avons précédemment indiqué, notre souci ayant été de vous préserver.

À simple titre d'exemple, sur le mois d'août 2010 où vous n'avez rigoureusement eu aucun déplacement à effectuer, aucun rapport à réaliser, aucune contrainte client immédiate( tout était à horizon d'au moins six semaines), vous nous avez pourtant présenté un décompte de 38 prétendues heures supplémentaires.

Cette situation a perduré sur les mois de septembre et d'octobre 2010, périodes pendant lesquelles vous n'avez toutefois eu respectivement que trois jours et aucun jour de déplacement en province, ce qui est, vous en conviendrez, un traitement privilégié dont nous avons tenu à faire bénéficier la jeune mère de famille que vous êtes, au regard des caractéristiques de notre métier qui est d'être consultant auprès des collectivités locales, France entière, métier que vous connaissez bien pour l'avoir exercé pendant 12 ans.

Or sur ces mois de septembre et octobre 2010 vous vous êtes également permise d'invoquer un nombre d'heures supplémentaires qui n'était pas sérieusement compatible avec les tâches qui vous avaient été dévolues.

Malgré ce fait, à aucun moment, vous n'avez cru bon de justifier en quoi vos missions vous auraient imposé une charge de travail nécessitant de dépasser le temps légal, vous contentant uniquement de produire des photocopies de votre agenda.

Plus préoccupant encore, il s'avère que les relevés de votre agenda étaient contredits à plusieurs reprises, soit par les constats de vos heures de départ ou d'arrivée relevés par vos collègues, soit par les horaires de convocation figurant sur les courriers reçus des organismes de formation pour lesquelles vous êtes intervenue.

La portée de vos propres relevés de temps de travail est également affaiblie par l'existence de plusieurs courriers personnels relatifs à vos affaires privées, que vous avez cru bon de rédiger et de scanner pendant vos heures de travail et qui ont été reçues sur les boîtes mail de l'ensemble de l'entreprise.

En dehors de ces explications qui ont toute leur importance quant aux difficultés auxquelles me confrontaient vos relevés et sur lesquels je n'ai pas reçu plus d'explicitation lors de notre entretien, rien ne vous autorisait au demeurant ou en tout cas légitimait la manière dont vous avez formulé vos reproches et critiques, et ce d'autant plus qu'au regard de votre statut de cadre vous êtes tenue à des obligations renforcées de loyauté, de bonne foi et de réserve.

Il vous incombe, par voie de conséquence, d'observer un comportement exemplaire vis-à-vis de votre direction.

Vous êtes en effet permise d'indiquer que :

'vous ignorez volontairement les règles contractuelles qui nous lient'

' Cette situation peu commune s'explique par 'l'usage' dans l' entreprise, si on peut le qualifier ainsi, qui est d'allonger au maximum la durée du travail (presque tout le monde travaille régulièrement plus de 45 heures par semaine), sans offrir de réelle contrepartie'

Si j'ai subi cette situation pendant 15 ans, j'ai décidé d'y mettre un terme et de préserver dorénavant mes droits et accessoirement ma santé.

J'ajoute que le défaut de paiement de ces heures vous expose à des sanctions civiles et pénales au titre du travail dissimulé'

Vous ne pouvez en aucun cas continuer d'ignorer l'accomplissement de mes heures supplémentaires. Il s'agit là d'un non-respect flagrant de vos obligations ».

S'il eut été concevable que vous puissiez indiquer dans des termes appropriés et mesurés que vous aviez des griefs à formuler à l'encontre de la société rien ne justifiait que vous vous permettiez de porter atteinte à la bonne foi et à l'honneur de votre hiérarchie en soulignant qu'elle violait délibérément les dispositions légales en ayant ni plus ni moins instauré un véritable système pour ce faire (l'emploi du terme 'usage' ne pouvant être considéré comme neutre).

3 la tenue de propos excessifs, injurieux, diffamants et mensongers

vous avez ostensiblement précisé par écrit que j'étais passible de poursuites pénales, ce qui suppose, comme vous le savez pertinemment, qu'à les supposer établis, les prétendus manquements soient intentionnels, ce qui est totalement impossible et au demeurant contredit par les réponses que je me suis efforcé de vous adresser.

Vous vous êtes donc permise de tenir des propos diffamants, accusant votre employeur de pratiques illégales.

De tels reproches sont d'autant plus inappropriés, et donc critiquables, que vous avez été déléguée du personnel de 2005 à 2007 et que si vous aviez été effectivement victime de tels 'usages' comme vous le prétendez pour la première fois aujourd'hui, vous n'auriez pas manqué de les dénoncer.

Il convient encore d'ajouter qu'il est tout aussi inacceptable de souligner qu'en ce qui concerne la question du report des congés payés , 'j'aurais été inspiré de me référer à une jurisprudence de la cour de justice de l'union européenne' pour savoir si votre réclamation était ou non fondée.

Ce ton est irrévérencieux et très péjoratif à l'encontre du pouvoir de direction, et ce d'autant plus que, pour le moment, ni le code du travail ni la Cour de Cassation n'autorisent un salarié de retour de congé parental d'éducation à prendre ses congés acquis et non pris à l'expiration de la période de référence et que de surcroît la société avait pris par courrier du 21 septembre une position extrêmement consensuelle à votre égard qui était de vous accorder un droit allant au-delà des textes aujourd'hui en vigueur.

Il était donc contestable que vous puissiez affirmer de manière aussi véhémente et crânement qu'il s'agisse d'un droit acquis.

Enfin, nous avons reçu le 8 novembre un nouveau courrier de votre part dans lequel vous avez à nouveau soutenu des propos totalement intolérables et mensongers, avec de surcroît la circonstance aggravante de la publicité que vous avez ostensiblement donnée à cette missive en la scannant sur le réseau informatique de la société, ce qui fait qu'elle est arrivée sur les boîtes mail de tous les collaborateurs.

À cet instant, il nous semble important de souligner que ce courrier faussement daté du 3 novembre (soit prétendument antérieurement à votre convocation à l'entretien préalable en date du 4 novembre) n'a été en réalité envoyé que le 5 novembre, le cachet de la poste faisant foi.

En toute hypothèse, il est particulièrement grave et indéfendable, d'oser insinuer que je vous aurais menacée, intimidée, utilisé des propos des scandaleux, allant même jusqu'à prétendre que je vous aurais demandé de démissionner lors d'une entrevue du 28 octobre. Tout ceci est totalement faux, il s'agit d'accusations mensongères parfaitement intolérables.

Les termes de vos courriers en date des 8 octobre et 8 novembre ont dépassé la limite des propos qu'un employeur peut tolérer d'un salarié, leur violence et leur caractère délibérément outrancier, injurieux, diffamant, mensonger étant excessifs, remettant en cause le pouvoir de direction et cherchant à créer des tensions au sein de l'entreprise.

Vous aviez d'ores et déjà été alertée par l'envoi de deux avertissements les 7 avril 2010 et 27 juillet 2010 sur la nécessité de contenir vos propos, de ne pas en tenir des mensongers ainsi que de respecter l'autorité hiérarchique de votre supérieur et vous n'en avez volontairement pas tenu compte.

Pour l'ensemble de ces raisons et dans la mesure où les explications que vous avez pu avancer n'étaient pas fondées, je vous avise par la présente et ce conformément aux dispositions de l'article L 1232 ' 2 du code du travail, de votre licenciement pour faute grave lequel prendra effet dès réception de la présente sans préavis ni indemnité'

Par jugement rendu le 21 février 2012 par le conseil de prud'hommes de Paris, Madame [W] a été déboutée de ses demandes.

Madame [W] a régulièrement interjeté appel de ce jugement

Par conclusions visées au greffe le 25 novembre 2014 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Madame [W] sollicite l'infirmation du jugement susvisé et la condamnation de la société CABINET MICHEL KLOPFER à lui régler les sommes suivantes :

5980 € à titre d'heures supplémentaires pour la période du 2 août au 19 novembre 2010 et 598 € à titre des congés payés afférents

33'600 € à titre d'indemnité forfaitaire prévue à l'article 8223 ' 1 du code du travail

28'000 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

16'800 € à titre d'indemnité de préavis et 1680 € au titre des congés payés afférents

134'400 € à titre d'indemnité pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse

15'000 € à titre de dommages-intérêts au titre de l'exécution fautive du contrat de travail par l'employeur

4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens .

Par conclusions visées au greffe le 25 novembre 2014 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société CABINET [R] [K] demande la confirmation du jugement sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à ses demandes relatives à la condamnation de Madame [W] au paiement des frais relatifs à l'article 700 du code de procédure civile, le rejet des prétentions de la salariée et sa condamnation à lui régler la somme de 10'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

-Sur l'exécution du contrat de travail

- sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Madame [W] sollicite en l'espèce le paiement d'heures supplémentaires pour la période du 2 août au 19 novembre 2010 ;

La société CABINET [R] [K] lui oppose sa carence à fournir des éléments de nature à étayer sa demande, l'inopposabilité à la salariée d'une convention de forfait n'étant plus discutée dans le cas d'espèce ;

Madame [W] verse aux débats des décomptes d'heures de travail tirés jour après jour de son agenda professionnel pour les mois d'août à octobre 2010 ainsi que les courriers adressés à son employeur sur leur base le 8 septembre, 8 octobre et 3 novembre 2010 ;

Elle produit des courriels échangés avec son entreprise et des clients avant 9 heures du matin ou après 18 heures le soir, des billets de train relativement à des déplacements en province dont notamment un déplacement de [Localité 4] à [Localité 1] effectué à compter de 7h12 au matin le 16 septembre et de [Localité 3] à [Localité 4] à compter de 18 h le 17 septembre et un autre de [Localité 4] à [Localité 2] le 21 septembre à compter de 6h54 le matin ;

Elle communique également une attestation de Madame [G] , employée par la société CABINET [R] [K] du 27 septembre 1999 au 6 août 2007, visant le dépassement d'usage dans le cabinet du temps de travail légal par les consultants ainsi qu'un courriel de Madame [O] ( pièce93) ancienne salariée visant son état de surmenage au travail avant sa démission,

Ces pièces produites par l'appelante, justifiant d'un emploi du temps chargé et d'horaires usuels dépassant les 35 heures, nécessitent de la part de l'employeur la production de justificatifs concernant les heures réellement effectuées par la salariée ;

La société CABINET [R] [K] mentionne ici que Madame [W] n'a effectué que trois jours de déplacement sur 71 travaillés, qu'elle a pris 7 jours de congés, que sur ses 62 jours au bureau, elle a uniquement assumé la préparation de sessions de formation, un travail de suivi et de contrôle sur pièces de délégation, la réalisation d'une analyse financière, d'une note de conjoncture, le suivi d'un dossier d'assistance financière;

L'employeur produit également des attestations de salariés visant les préoccupations extérieures à son travail de Madame [W], sa gestion de ses affaires personnelles (copropriété, dépenses personnelles) au bureau ;

La cour dispose également de la part de la société CABINET [R] [K] d'un relevé relatif au mois de septembre 2010 visant les missions professionnelles de Madame [W] vis-à-vis de clients (Vosges, Manche numérique, Cour des Comptes, expert territorial, commune Leforest) sans cependant d'énoncé précis des heures effectuées;

Etant ici observé que l'agenda professionnel de la salariée ne comprend cependant qu'un nombre limité de déplacements, que les éléments susvisés justifient d'un agenda allégé au mois d'août, qu'il n'est pas communiqué l'agenda du mois de novembre 2010, les pièces communiquées dont dispose la cour conduiront à faire droit à la demande de la salariée à hauteur de 3980 euros outre 398 euros à titre de congés payés afférents ;

- sur le travail dissimulé

En application de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour l'employeur notamment de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier, un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli. L'article L 8223-1 du code du travail sanctionne le travail dissimulé d'une indemnité forfaitaire allouée au salarié égale à 6 mois de salaire, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable.

En l'espèce, les attestations des salariés produites par l'employeur aux débats justifient de la souplesse donnée à chacun pour gérer son temps de travail dans la société ;

Madame [W] ne justifie pour sa part d'une demande relative à des heures supplémentaires que dans un premier courrier du 8 septembre 2010;

Ces éléments ne permettent pas de se persuader du caractère intentionnel d'une dissimulation par l'employeur d'emploi salarié et la demande indemnitaire sur le fondement de l'article L 8223 -1 du code du travail est rejetée.

- Sur le harcèlement moral

En application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Lorsque survient un litige relatif à des faits de harcèlement au sens de l'article L 1152 - 1 du code du travail, le salarié établit, conformément à l'article L 1154 - 1 du code du travail, des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement . Au vu de ces éléments, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Madame [W] fait valoir qu'elle a subi des pressions de la part de son employeur dès le mois de mai 2007 depuis son domicile alors même qu'elle était en arrêt maladie du 21 mai au 10 juillet puis en congé maternité du 10 juillet au 30 octobre 2007, qu'elle a également fait l'objet de pressions pour céder ses parts pendant son congé parental entre le 30 juillet 2007 et le 30 juillet 2010, qu'elle sera dans l'obligation dans ce contexte de répondre à de nombreux coups de téléphone et d'accepter des rendez-vous avec son employeur au mois de septembre et octobre 2009 ainsi que juin 2010, qu'elle a fait l'objet d'un avertissement avant même la fin de son congé parental le 7 avril 2010 pour une raison inopérante liée à une attestation légitimement produite en justice, que le 27 juillet 2010 elle a fait l'objet d'un second avertissement non justifié, que son employeur a manifesté un comportement irrespectueux à son égard au mois d'octobre 2010;

Il doit cependant être observé que la proposition faite le 1er mars 2008 par la société CABINET [R] [K] à Madame [W] relativement au sort de ses actions pendant la suspension de son contrat de travail reste subordonnée à son 'accord', tandis que le courriel du 29 mars 2008 de l'employeur reste explicatif quant aux raisons pour lesquelles il sollicite le rachat temporaire des titres;

Par jugement du 29 avril 2011 le tribunal de commerce de Paris a débouté, dans ce cadre, Madame [W] de ses demandes de nullité des assemblées générales du 28 juin 2007 et du 13 février 2009;

Le courrier recommandé du 7 avril 2010 adressé par l'employeur se borne à rappeler à l'intéressée ses obligations de loyauté, de bonne foi et de réserve à l'égard de l'entreprise au regard d'une attestation rédigée le 18 février 2010 par la salariée dans le cadre du litige prud'homal opposant la société CABINET [R] [K] à Madame [G] sans que l'employeur ne remette cependant en cause le droit de Madame [W] de produire une telle attestation en justice ni ne tienne de propos menaçants ou dissuasifs à son égard ;

Les pièces produites ne justifient pas non plus d'une pression de l'employeur afin de forcer l'intéressée à démissionner alors qu'il envisage dans un courrier du 27 juillet 2010 les conditions de son retour ;

La délivrance de deux avertissements, au surplus espacés dans le temps, ne permet pas en elle-même d'établir des faits de harcèlement;

Il n'est pas enfin justifié d'instructions précises de travail de l'employeur durant le congé maternité et le congé parental de l'intéressée;

Ces éléments justifient de rejeter les demandes du chef de harcèlement moral et la nullité du licenciement sollicitée sur ce fondement .

-Sur la rupture du contrat de travail

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ;

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié . Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables ;

En l'espèce, aux termes de la lettre de licenciement en date du 18 novembre 2010, qui fixe les limites du litige, l'employeur reproche à Madame [W] une mauvaise exécution de ses obligations professionnelles, l'instauration d'un climat polémique et la tenue de propos excessifs, injurieux, diffamants et mensongers à l'encontre de son employeur ;

- sur l'exécution des obligations professionnelles

L'employeur fait état de ce que la formation dispensée par Madame [W] le 21 septembre 2010 à [Localité 2] dont le thème était ' jusqu'où et comment une collectivité pourra t elle encore s'endetter '' s'est très mal déroulée en raison de la négligence de la salariée laquelle n'a pas respecté le programme prévu et a amputé celui-ci de plus d'un tiers sans l'en avertir et en le lui dissimulant ;

Madame [W] fait valoir que ce travail lui a été confié tardivement le 10 septembre, que son employeur ne pouvait ignorer qu'elle avait adressé à l'organisme de formation un support modifié alors que les boîtes mails des consultants sont accessibles à tous, que néanmoins elle s'est comportée en professionnelle rigoureuse lors de cette journée et a, en tout état de cause, remis les fiches d'évaluation à son employeur ;

Les évaluations relatives à la formation dispensée, produites aux débats, justifient d'un degré de satisfaction 'bon ou moyen' des participants relativement aux qualités du formateur mais d'un contenu décevant en inadéquation avec la prestation attendue ce que regrette également la ville de [Localité 5] dans un courrier du 22 septembre 2010;

L'imputabilité à la seule salariée chargée de la formation de l'inadéquation entre les attentes des participants et le contenu enseigné n'apparaît cependant pas fondée étant observé qu'à l'origine, la formation devait être assurée par Monsieur [I] [V], salarié du cabinet, ainsi qu'en atteste la fiche d'information diffusée par Territorial Groupe ( pièce 57), que pour sa part, Madame [W] avait déjà en charge une formation à la Cour des Comptes relative à 'la dette structurée des collectivités locales' les 14 et 15 septembre pour laquelle elle n'a fait l'objet d'aucune critique , qu'elle a fait un déplacement professionnel à [Localité 1] les 16 et 17 septembre , qu'elle était, dans le même temps en charge de questions par le syndicat mixte Manche Numérique ( pièces 21) , que cet emploi du temps était difficilement compatible avec la durée nécessaire pour préparer une intervention d'un haut niveau technique, qu'elle a néanmoins adressé le support de formation qu'elle allait développer à [Localité 2] le 13 septembre à Madame [T] de la société Territorial Group sans observations de la part de celle ci sur son insuffisance manifeste avec l'enseignement demandé ;

Il n'est pas non plus justifié d'une dissimulation par la salariée à son employeur des évaluations données par les participants à cette formation, les évaluations ayant en tout état de cause été données le 15 octobre;

La société CABINET [R] [K] reproche également à Madame [W] de ne pas avoir achevé son travail sur le dossier Manche numérique concernant la rédaction d'un rapport prévu initialement pour la mi-septembre et devant être finalement remis le 4 octobre alors qu'il lui avait été confié dès le 2 août et qu'elle travaillait, en collaboration avec [R] [K], sur la base d'un précédent rapport établi en 2009 par le cabinet ;

Madame [W] fait valoir ici qu'elle a transmis le rapport à son employeur le 5 octobre au matin lequel a été retransmis au client par Monsieur [K] quelques heures plus tard, que le courriel que lui a adressé le 6 octobre 2010 son employeur relativement à ce dossier ne comporte aucun grief quant à un retard ;

Madame [W] établit en effet avoir transmis un rapport le 5 octobre 2010 à 9h37 à Monsieur [K] lequel a adressé pour sa part un document au client le même jour à 12h23 sur lequel il mentionne dans les présents débats avoir du beaucoup retravailler;

La lettre de licenciement qui circonscrit le litige ne fait cependant ici état que du retard de Madame [W] dans la transmission de ce rapport ;

Or, les pièces susvisées sont insuffisantes pour justifier de celui-ci à la date du 5 octobre, aucun reproche du client adressé à l'employeur n'étant non plus justifié de ce chef ;

Les éléments susvisés ne permettent donc pas de retenir une violation par la salariée de ses obligations professionnelles susceptible de fonder un licenciement,

- Sur l'instauration d'un climat polémique et la tenue de propos excessifs, injurieux, diffamants et mensongers

Aux termes de la lettre de licenciement, l'employeur reproche à Madame [W] les termes litigieux de son courrier du 8 octobre 2010 sollicitant le paiement d'heures supplémentaires et relève à cet égard que la salariée a porté atteinte à la bonne foi et à l'honneur de sa hiérarchie ;

Il convient cependant d'observer que la cour a fait droit partiellement à la demande en paiement au titre des heures supplémentaires ;

Le courrier du 8 octobre 2010 aux termes duquel la salariée 'fait suite au courrier du 21 septembre dernier qui (l') a profondément choquée'.... ' rappelle à son employeur les termes exacts de la convention collective'... fait état de ses droits et des textes légaux, indique à son employeur qu'il ne peut 'en aucun cas continué d'ignorer l'accomplissement de ses heures supplémentaires' rompt manifestement avec les termes jusqu'ici utilisés par la salariée lorsqu'elle s'adressait à son employeur et associé mais ne comprend pas cependant de propos excessifs, diffamatoires ou injurieux portant atteinte à la bonne foi et l'honneur de la société CABINET MICHEL KLOPFER, Madame [W] se contentant de revendiquer des droits ;

La société CABINET [R] [K] reproche également à Madame [W] d'avoir ostensiblement précisé par écrit qu'il était passible de poursuites pénales, d'avoir utilisé un ton irrévérencieux et très péjoratif à l'encontre du pouvoir de direction, que dans un courrier adressé le '5" novembre 2010 reçu le 8 novembre, la salariée a tenu des propos totalement intolérables et mensongers avec la circonstance aggravante d'avoir scanné sa lettre sur le réseau informatique de la société la faisant, de ce fait, arriver sur les boîtes mails de tous les collaborateurs alors que Madame [W] avait déjà été alertée par l'envoi de deux avertissements les 7 avril 2010 et 27 juillet 2010 sur la nécessité de contenir ses propos;

Les faits reprochés à la salariée sont postérieurs à ceux visés dans les avertissements;

Le courrier incriminé par l'employeur daté du 3 novembre est ainsi rédigé par Madame [W] : 'je constate pour la troisième fois que vous refusez de me régler mes heures supplémentaires. Vous trouverez ci-joint mon décompte d'heures pour octobre 2010 qui laisse apparaître 174 heures. Cette situation anormale me contraint à saisir l'inspection du travail. Par ailleurs, votre comportement lors de notre entrevue du jeudi 28 octobre au cours de laquelle vous avez semble-t-il perdu toute maîtrise et m'avez littéralement menacé en expliquant notamment que si la situation actuelle ne me convenait pas et que je m'entêtais à demander le règlement de mes heures supplémentaires, je n'avais qu'à démissionner, n'est pas tolérable ni dans une entreprise ni ailleurs du reste. J'essaie de rester digne mais je trouve ce procédé scandaleux'

Si les termes utilisés par la salariée justifient de revendications et d'une ferme opposition au décompte fait par la société CABINET [R] [K] de ses heures de travail , ils ne peuvent cependant être qualifiés d'injurieux ou de diffamatoires à l'égard de l'employeur;

S'il ressort par ailleurs d'une note du 20 décembre 2011 signée par 12 salariés de la société que Madame [W] aurait diffusé l'information relative à ses différends avec la société CABINET [R] [K] en envoyant sur la boîte mail professionnelle commune du cabinet la copie de ses courriers à la direction, il convient d'observer que les courriers du 8 octobre et du 3 novembre ne sont pas rédigés sur support électronique et que la preuve n'est pas rapportée par l'employeur de leur diffusion sur un tel support;

Etant par ailleurs observé que dans un courriel du 22 septembre 2010 et malgré les différends l'opposant à la société CABINET [R] [K], Madame [W] fait état à Monsieur [S], de la Cour des Comptes, de 'l'excellent ouvrage' de [R] [K] et le lui conseille chaleureusement, sa déloyauté à l'égard de son employeur ne peut être retenue;

Les éléments susvisés ne permettent donc pas de retenir à l'encontre de la salariée les griefs énoncés par l'employeur;

Ils conduiront à infirmer le jugement du conseil de prud'hommes et à retenir que le licenciement de Madame [W] est intervenu sans cause réelle et sérieuse

- sur les demandes en paiement

Sur la base des dispositions de la convention collective SYNTEC, il est du à Madame [W] une somme de 16'800 € au titre de l'indemnité de préavis outre 1680 € au titre des congés payés y afférents ainsi qu'une somme de 28'000 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

Eu égard à l'ancienneté de Madame [W] dans la société, de son salaire brut moyen d'un montant de 5600 euros par mois , mais sachant que la salariée ne justifie pas précisément aux débats de sa situation depuis 2010, il lui sera alloué à titre de dommages et intérêts à raison de son licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 38 000 € ;

Le harcèlement moral n'ayant pas été retenu dans le cas d'espèce non plus que la violation intentionnelle des règles concernant la durée du travail et étant observé que les circonstances de la rupture n'établissent pas un préjudice distinct de celui d'ores et déjà indemnisé au titre du défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement, la demande de dommages-intérêts sollicitée par Madame [W] sur le fondement de l'article 1382 du Code civil sera rejetée

Enfin, l'équité commande d'allouer à Madame [W] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés au soutien de son appel.

La société CABINET [R] [K] sera pour sa part déboutée du chef de cette demande en première instance comme en appel et condamnée aux entiers dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la société CABINET [R] [K] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société CABINET MICHEL KLOPFER à payer à Madame [W] les sommes suivantes :

3980 € au titre d'heures supplémentaires et 398 € au titre des congés payés afférents

16'800 € au titre de l'indemnité de préavis ainsi que 1680 € au titre des congés payés afférents

28'000 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

38'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute Madame [W] de ses autres demandes,

Déboute la société CABINET [R] [K] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société CABINET MICHEL KLOPFER aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/03701
Date de la décision : 20/01/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°12/03701 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-20;12.03701 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award