Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 08 JANVIER 2015
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/17812
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/06881
APPELANTS
Monsieur [L] [W]
Maison d'arrêt de [Localité 3]
[Localité 3]
Représenté par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148
SCP BROUARD-DAUDE,
pris en son nom personnel
[Adresse 4]
[Localité 4]
Représentée par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205
Représentée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R44
INTIMES
Monsieur [I] [Q]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Représenté par Me Faye TADROS-FISCH de la SELARL YDES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037
Monsieur [H] [Q]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Représenté par Me Faye TADROS-FISCH de la SELARL YDES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037
Monsieur [A] [Q]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Représenté par Me Faye TADROS-FISCH de la SELARL YDES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037
Monsieur [M] [Y]
représenté par son tuteur GERANTO SUD
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Représenté par Me Faye TADROS-FISCH de la SELARL YDES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037
SCP BROUARD - DAUDE,
pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CLEDELLE
[Adresse 4]
[Localité 4]
Représentée par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205
Représentée par Me Ivan MATHIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R44
SA FINANCO
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN/KAINIC/HASCOET, avocat au barreau d'ESSONNE
Assistée de Me Jean-Pierre HAUSSMANN de la SELARL HAUSSMANN/KAINIC/HASCOET, avocat au barreau d'ESSONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Octobre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre
Madame Caroline FÈVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : Madame Marie GIRAUD
ARRET :
- Contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.
****************
Selon deux bons de commande en date du 1er mai 2007, Monsieur et Madame [Q] ont commandé à la société Les Cledelles, dont le gérant est Monsieur [L] [W], un chalet mobile à livrer au camping de [Localité 7] au prix de 66.500 euros et un mobil-home avec terrasse à livrer au camping d'[Localité 6] au prix de 30.000 euros, plus 2.000 euros pour la terrasse, tous les deux destinés à la location.
Selon deux offres de crédit accessoire à une vente du même jour, la société Financo a consenti à Monsieur et Madame [Q] deux prêts d'un montant respectif de 66.500 euros, remboursable en 144 échéances mensuelles de 755,52 euros, et de 32.000 euros, remboursable en 144 échéances mensuelles de 363,55 euros.
Par actes sous seing privé en date des 1er juin et 13 juin 2007, la société Les Cledelles et les époux [Q] ont conclu deux conventions de mise à disposition d'emplacement de camping pour accueillir les mobil-home sur les communes de [Localité 7] et d'[Localité 6].
Les 6 et 18 juin 2007, la société Financo a confirmé aux emprunteurs avoir réglé directement le vendeur du prix des biens commandés.
Par actes sous seing privé du 1er octobre 2008, Monsieur [Q] a donné mandat à la société Les Cledelles de vendre le chalet et le mobil-home.
Par acte sous seing privé du 22 février 2009, Monsieur [Q] et la société Les Cledelles ont signé une promesse de vente du chalet et du mobil-home au profit de la société Les Cledelles qui a promis de les racheter au prix du montant du crédit à rembourser au jour du rachat au plus tard le 28 février 2010, donnant entre-temps l'usage exclusif des biens au promettant qui s'est engagé en contrepartie à faire un virement mensuel de 1.119 euros, correspondant aux échéances des deux prêts, à compter du mois de mars 2009 au profit de Monsieur [Q].
Par jugement en date du 4 novembre 2010, le tribunal de commerce de Paris a placé la société Les Cledelles en liquidation judiciaire en fixant la date de cessation des paiements au 4 mai 2009 et a désigné la SCP Brouard-Daude en qualité de liquidateur.
Par acte d'huissier en date du 10 avril 2012, Monsieur [I] [Q], Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur [U] [O], Monsieur [H] [Q] et Monsieur [A] [Q], héritiers de Madame [F] [P] épouse [Q] décédée le [Date décès 1] 2010, ont fait assigner la S.A.R.L. Les Cledelles, représentée par la SCP Brouard-Daude es qualité, la SCP Brouard-Daude personnellement, Monsieur [L] [W] et la société Financo.
Par jugement en date du 20 juin 2013, le tribunal de grande instance de Paris a dit que la SCP Brouard-Daude, la S.A.R.L. Les Cledelles et Monsieur [L] [W] ont commis des fautes engageant leur responsabilité envers les consorts [Q], fixé à la somme de 94.145,04 euros la créance de Messieurs [I], [H] et [A] [Q] et Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur Geranto Sud, au passif de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. Les Cledelles, condamné in solidum Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude à leur payer la somme de 94.145,04 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 avril 2012, rejeté les demandes formées à l'encontre de la société Financo, débouté la société Financo de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire et atteinte à son image et de sa demande en application de l'article 700 du Code de procédure civile, condamné in solidum Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude à payer à Messieurs [I], [H] et [A] [Q] et Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur Geranto Sud, la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens, rejeté toutes autres demandes, ordonné l'exécution provisoire.
La déclaration d'appel de Monsieur [L] [W] a été remise au greffe de la cour le 6 septembre 2013.
La déclaration d'appel de la SCP Brouard-Daude a été remise au greffe de la cour le 9 septembre 2013.
Par ordonnance du 11 mars 2014, le magistrat de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 20 mars et 23 juillet 2014, Monsieur [L] [W] demande de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, lui donner acte de ce qu'il émet toutes réserves sur la validité de l'assignation dans l'attente de sa communication, l'infirmation du jugement et à la cour, statuant à nouveau, de :
- débouter Messieurs [I], [H] et [A] [Q] et Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur Geranto Sud, de toutes leurs demandes à son encontre,
- subsidiairement, dire que le préjudice subi ne saurait être supérieur à 26.989 euros et débouter les consorts [Q] du surplus de leurs demandes ;
- condamner les consorts [Q] au paiement de la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 4 décembre 2013, la SCP Brouard-Daude demande de :
- dire les consorts [Q] irrecevables en leurs demandes,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée personnellement,
- subsidiairement, dire que les consorts [Q] ne rapportent la preuve d'aucune faute qui lui soit imputable, ni d'aucun préjudice en lien causal avec la faute qui lui est imputée, débouter les consorts [Q] de l'ensemble de leurs demandes et infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à titre personnel,
condamner la partie succombante à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Dans leurs dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 19 mai 2014, Monsieur [I] [Q], Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur en la personne de Geranto Sud, Monsieur [H] [Q], Monsieur [A] [Q], (ci-après consorts [Q]) demandent la confirmation du jugement déféré et, y ajoutant, de condamner in solidum la SCP Brouard-Daude et Monsieur [L] [W] à leur verser la somme complémentaire de 10.011,18 euros au titre de l'ajustement du montant de leur préjudice arrêté au 30 avril 2014, sur la base des tableaux d'amortissement des deux emprunts ainsi qu'à leur verser la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre leur condamnation aux dépens.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 914 du code de procédure civile, signifiées le 30 janvier 2014, la SA Financo demande de :
- constater que la SCP Brouard-Daude est la seule à l'avoir intimée,
- constater qu'aucune demande n'est formée à son encontre,
- constater qu'elle a été intimée avec une légèreté blâmable et préjudiciable,
- condamner la SCP Brouard-Daude à lui payer, personnellement, la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2014.
CELA ETANT
LA COUR
Considérant que Monsieur [L] [W] se prévaut de la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée à l'adresse de la société Les Cledelles qui n'est pas la sienne ; qu'il soutient qu'il n'a pas été destinataire de cet acte et qu'il ne peut pas être jugé sans avoir été dûment appelé ; que l'assignation est nulle ainsi que le jugement subséquent ; qu'à titre subsidiaire et au fond, il prétend que Monsieur [Q] a conclu un contrat avec la société Les Cledelles et qu'il n'a aucun lien contractuel avec Monsieur [Q] ; qu'en sa qualité de gérant, il n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité personnelle ; que la signature de la promesse de vente destinée à éviter à Monsieur [Q] de payer les mensualités des prêts n'est pas fautive ; que, si la société Les Cledelles n'a pas été en mesure de lever l'option d'achat faute de détenir les fonds suffisants, elle a continué à payer les échéances des prêts jusqu'à sa liquidation judiciaire ; que cette modalité de paiement du prix de vente du chalet et du mobil-home a été acceptée par Monsieur [Q] et qu'elle ne pouvait plus payer à compter de sa liquidation judiciaire ; que la la revente des biens par la société Les Cledelles, qui en était devenue propriétaire, n'est pas davantage fautive ; qu'il ajoute qu'il n'est justifié d'aucun préjudice puisque Monsieur [Q] n'a jamais estimé utile de réceptionner les biens mobiliers achetés et de donner mandat à la société Les Cledelles de les louer ; que la valeur du chalet et du mobil-home acheté au prix de 96.500 euros le 1er mai 2007 ne peut être supérieure à 48.250 euros compte tenu d'un abattement de vétusté de 50 % et que la société Les Cledelles ayant réglé la somme de 21.261 euros au titre des échéances des prêts de mars 2009 à octobre 2010, la perte financière subie est au plus de 26.989 euros ;
Considérant que la SCP Brouard-Daude soulève l'irrecevabilité de la demande des consorts [Q] visant à obtenir la réparation d'un préjudice qui n'est pas distinct du non paiement de leur créance déclarée au passif sur le fondement de l'article L.622-20 du code de commerce ; que, subsidiairement sur le fond, elle soutient que sa responsabilité ne peut être engagée que sur le fondement de l'article 1382 du code civil et qu'aucune faute ne lui est imputable ; qu'il n'y a aucun préjudice, ni aucun lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice injustifié ; qu'elle souligne que le liquidateur judiciaire n'est pas responsable des actes de la société débitrice antérieurs à la liquidation judiciaire, ni de ceux de son gérant et qu'il ne peut pas être condamné pour ne pas avoir répondu aux courriers de Monsieur [Q] n'ayant aucune obligation de répondre aux courriers des créanciers et aucune obligation de conseil à leur égard ; qu'il ne peut pas non plus lui être reproché une absence d'information sur le sort des biens litigieux alors qu'elle en ignore le sort et qu'elle n'avait pas à entreprendre des diligences pour rechercher les biens vendus avant la liquidation judiciaire dans l'intérêt exclusif d'un créancier ; qu'elle estime que le préjudice subi par les consorts [Q] est imputable à leur négligence dans la mesure où ils ont acquis les biens en 2007 sans se préoccuper de leur livraison et de leur réception, ni entreprendre aucune démarche pour les récupérer avant de donner mandat à la société Les Cledelles de les vendre, puis de signer avec elle une promesse de vente avec option d'achat au 28 février 2010 reportée verbalement au mois d'octobre 2010 ; qu'elle prétend que le préjudice des consorts [Q] ne peut pas être constitué par la charge des crédits contractés auprès de la société Financo qui résulte d'un engagement contractuel ; que, même si elle avait pu identifier l'actuel possesseur du chalet et du mobil-home et en informer les consorts [Q], ces derniers n'auraient pu engager une action en restitution à son encontre qu'à la condition de lui rembourser le prix payé et qu'il n'est pas acquis que les sous-acquéreurs étaient de mauvaise foi ;
Considérant que les consorts [Q] font valoir que l'assignation délivrée à Monsieur [W] l'a été à sa dernière adresse connue résultant d'un courrier de ce dernier du 7 novembre 2011 indiquant le camping [1] à [Localité 5] comme étant désormais son adresse personnelle ; que l'assignation est ainsi régulière et valable ; qu'ils soulignent que, malgré les investigations menées auprès des mairies de [Localité 7] et d'[Localité 6], le chalet et le mobil-home n'ont pas été retrouvés et qu'ils ont appris, par un courrier du 8 juin 2011 de Monsieur [L] [W] sur un papier à en-tête d'une société 'Foncière de Camping', que la société Les Cledelles avait vendu le chalet et le mobil-home en vertu d'un mandat et que le paiement du prix s'était fait par mensualités jusqu'à la liquidation judiciaire, que le camping d'[Localité 6] avait été repris par la société '[Adresse 6]' dont le gérant est Monsieur [L] [W] ; que toutes leurs demandes auprès du mandataire judiciaire pour obtenir les justificatifs de cette vente n'ont pas abouti et sont restés sans réponse ; qu'ils expliquent que Monsieur et Madame [Q] ont fait l'acquisition du chalet et du mobil-home afin de les louer la plus grande partie de l'année et d'en profiter le reste du temps en vue de leur retraite ; qu'ils n'ont jamais réceptionnés les biens, que la société Les Cledelles n'avaient pas le pouvoir de les vendre et qu'il n'y a jamais eu d'accord sur le prix et les modalités de cette vente faite à leur insu ; que l'identité de l'acquéreur demeure inconnue de même que la date de la vente et son prix ; que la promesse de vente unilatérale avec option d'achat n'a jamais été levée de sorte que Monsieur et Madame [Q] en sont restés les propriétaires ; qu'ils prétendent que Monsieur [W] s'est intentionnellement soustrait à ses engagements en profitant de la détresse de Monsieur [Q] confronté à la maladie de son épouse et à son décès, en lui faisant signer une promesse de vente qu'il savait ne pouvoir aboutir compte tenu de la situation financière de sa société, et qu'il l'a trompé sur la solvabilité de l'entreprise pour le faire patienter et vendre les deux hébergements à son insu sans jamais en reverser le prix dont il a dû tirer un profit direct ou indirect ; que les fautes commises par Monsieur [W] sont incompatibles avec l'exercice normal de ses fonctions de gérant et engage sa responsabilité délictuelle ; qu'ils estiment que la responsabilité de la SCP Brouard-Daude est également engagée sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; que Monsieur [Q] lui a écrit trois fois les 30 novembre, 29 décembre 2010 et 7 février 2011 pour l'interroger sur le sort des biens achetés à la société Les Cledelles et pour obtenir les documents relatifs à leur vente en vain de sorte que, sans les documents, il a été impossible d'agir contre les sous-acquéreurs ; que le liquidateur a fermé les yeux sur l'organisation particulièrement douteuse de la reprise de l'activité de la société Les Cledelles par des sociétés du groupe de Monsieur [W] ; qu'ils subissent un préjudice particulier pour avoir été privé de la possibilité de rechercher la responsabilité délictuelle des sous-acquéreurs de mauvaise foi et d'obtenir la restitution des biens vendus aux torts du vendeur et des sous-acquéreurs ou bien l'indemnisation de leur préjudice ; que le silence du mandataire judiciaire constitue une négligence, voire caractérise une complaisance envers Monsieur [W] ; que cette faute est en lien direct avec le préjudice subi ; que le comportement de la société Les Cledelles, de Monsieur [L] [W] et de la SCP Brouard-Daude les a conduit à une situation dans laquelle les biens achetés n'ont jamais été réceptionnés, ni identifiés et ont été revendus sans leur accord alors qu'ils doivent rembourser les prêts afférents à ces achats jusqu'en juillet 2019 sans aucun espoir d'obtenir la restitution des biens ou du prix de leur vente ; qu'ils estiment que le préjudice subi est constitué par le montant des mensualités réglées depuis le mois d'octobre 2010 jusqu'au mois d'avril 2014 au titre de chacun des prêts et du capital restant dû pour chacun d'eux à compter de cette date, soit une somme totale de 104.156,22 euros ;
Considérant que la société Financo fait valoir qu'il n'y a aucune demande à son encontre ; que le fait de l'intimer est abusif et vexatoire ; qu'elle demande à être indemnisée de son préjudice par l'allocation de dommages-intérêts d'un montant de 2.000 euros, outre la prise en charge de ses frais irrépétibles ;
Considérant qu'il est exact qu'aucune des parties ne fait de demande à l'encontre de la société Financo ; que cependant il n'y a aucune faute lourde équivalente au dol ou malveillance de la SCP Brouard-Daude à son encontre ; que sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive doit être rejetée ;
Considérant qu'il ressort de l'assignation délivrée le 10 avril 2012 à Monsieur [L] [W] demeurant à Camping [1] à [Localité 5] qu'elle n'a pas été remise à personne en l'absence momentanée du destinataire de l'acte et qu'elle a été remise à Monsieur [X] [T], personne présente et employée du camping qui a accepté de la recevoir ; que l'huissier instrumentaire a laissé un avis de passage et a adressé la lettre prévue par l'article 658 du code de procédure civile ;
Considérant qu'il est établi par un courriel de Monsieur [L] [W] en date du 7 novembre 2011 en réponse à un courrier de l'avocat de Monsieur [Q] du 10 octobre 2011 qu'il a indiqué que son adresse personnelle est désormais située Camping [1] à [Localité 5] ; qu'il n'est pas justifié qu'il a changé d'adresse avant la délivrance de l'acte incriminé, ni qu'il en aurait informé Monsieur [Q] ou son conseil ; qu'il est ainsi mal fondé à contester la régularité de l'assignation délivrée à sa dernière adresse connue le 10 avril 2012 ;
Considérant que les consorts [Q] agissent à la fois contre Monsieur [L] [W] et contre la SCP Brouard-Daude sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour leur avoir fait perdre les biens achetés le 1er mai 2007 à la société Les Cledelles et payés par la société Financo qu'ils remboursent ; qu'il ne s'agit pas d'un préjudice inhérent à la procédure collective portant sur la créance déclarée non recouvrée, mais d'un préjudice personnel et distinct de celui des autres créanciers inhérent à la disparition de leurs biens revendus sans leur accord par leur propre vendeur qui en conservé le prix ; que leur demande est recevable et la SCP Brouard-Daude est mal fondée en son exception d'irrecevabilité fondée sur l'article L.622-20 du code de commerce ;
Considérant qu'il ressort des pièces produites que la société Financo a débloqué les fonds prêtés les 6 et 18 juin 2007 directement entre les mains de la société Les Cledelles qui n'a jamais justifié et ne justifie toujours pas de la réception des biens vendus par l'acheteur ; qu'il n'y a jamais eu de mise en location des hébergements qui auraient été mis en place depuis le mois de juin 2007 pour le mobil-home et depuis la mi-octobre 2007 pour le chalet selon le courrier en date du 12 septembre 2007 adressé par Monsieur [W] à Monsieur [Q] sans aucun justificatif ; que le 1er octobre 2008, Monsieur [Q] a signé un mandat de vente d'un an portant sur le chalet au prix de 49.000 euros et un autre mandat de vente d'une durée de six mois portant sur le mobil-home au prix de 37.000 euros, dont 2.000 euros de commission incluse pour la société Les Cledelles, lesquels n'ont pas été fructueux et sont devenus caducs ; qu'à la suite d'une proposition du 26 janvier 2009 de la société Les Cledelles, les parties ont signé une promesse de vente, le 22 février 2009, aux termes de laquelle la société Les Cledelles a promis de racheter le mobil-home et le chalet en remboursant le crédit de la société Financo ayant financé l'achat des biens au plus tard le 28 février 2010 au prix du montant du crédit à rembourser au jour du rachat pour chacun d'eux qui sera versé directement au prêteur et bénéficie pendant la durée de la promesse de l'usage exclusif des hébergements en contrepartie de quoi elle payera la somme de 1.119 euros correspondant au montant des échéances de deux prêts à compter du mois de mars 2009 ; qu'au terme de la promesse le 28 février 2010, la société Les Cledelles n'a pas levé l'option d'achat et pas davantage au mois d'octobre 2010 s'il est admis que la promesse a été prorogée verbalement jusqu'à cette nouvelle date puisque le promettant n'avait pas les moyens de financer le rachat des crédits ; qu'il n'est justifié d'aucun accord des parties sur un échéancier du paiement du prix et qu'au contraire, le courrier de Monsieur [Q] du 13 février 2010 et son mail du 22 novembre 2010 démontrent son inquiétude sur la levée de l'option et le paiement du prix par la société Les Cledelles qui lui a demandé de patienter encore le temps de la restructuration de la société, alors qu'elle était déjà en liquidation judiciaire ;
Considérant qu'il est établi que la promesse de vente est devenue caduque avant la liquidation judiciaire de la société Les Cledelles intervenue le 4 novembre 2010 qui n'est pas devenue propriétaire des hébergements ; que, par courrier du 8 juin 2011, Monsieur [W], sur un papier à en-tête de la société Foncière de Camping, a cependant indiqué avoir vendu le mobil-home et le chalet en vertu des mandats qui lui avaient été confiés, bien qu'ils soient tous caduques, et avoir reversé le prix selon l'échéancier convenu qui n'a jamais existé ; que les biens appartenant aux époux [Q] ont disparu par une vente faite à leur insu et sans leur accord, ce qui constitue un détournement de biens et engage la responsabilité personnelle du gérant qui a excédé ses fonctions et commis une faute détachable de ses fonctions en vendant le bien d'autrui, tout en conservant le produit de cette vente dont il se garde bien de préciser la date et le prix ;
Considérant que cette faute engage sa responsabilité personnelle et l'oblige à réparer le préjudice subi par les consorts [Q] ;
Considérant que le liquidateur de la société Les Cledelles interpellé par Monsieur [Q] sur le sort de biens vendus par l'entreprise afin qu'ils lui soient restitués, puis sur la vente des biens réalisés par la société Les Cledelles selon les propres dires de son gérant ne lui a pas répondu, ni fourni la moindre précision sur la présence des biens ou du produit de leur vente dans les actifs de la société en liquidation judiciaire, bien qu'il entre dans sa mission de déterminer les biens composant l'actif du débiteur de même que d'agir contre le gérant s'il y a eu un détournement d'actif et de lui demander de rendre des comptes de sa gestion ; que la négligence de la SCP Brouard-Daude est ainsi fautive et engage sa responsabilité personnelle l'obligeant à réparer l'entier préjudice subi par la victime ;
Considérant que le préjudice des consorts [Q] est constitué par la perte de deux biens mobiliers constitués par un chalet et un mobil-home qu'ils ont payés par un crédit générateur d'intérêts et qui ont disparu à la suite de la vente par la société Les Cledelles sans que le prix leur soit reversé ;
Considérant que la société Les Cledelles, Monsieur [W] et la SCP Brouard-Daude doivent indemniser les consorts [Q] de leur préjudice constitué des mensualités qu'ils ont dû continuer à payer pour des biens dissipés par le gérant de la société Les Cledelles, depuis le mois de septembre 2010, date à laquelle la société Les Cledelles a cessé ses versements juste avant sa liquidation judiciaire, jusqu'au 30 avril 2014, outre le capital restant dû au titre de chacun des prêts à cette date, soit une somme totale de 104.156,22 euros ; qu'il n'y a aucun coefficient de vétusté à appliquer pour un bien revendu par une personne sans droit sur eux qui en a conservé le prix, ni aucune faute des consorts [Q] abusés par leur cocontractant ;
Considérant que la créance des consorts [Q] sera fixée à l'égard de la société Les Cledelles en liquidation judiciaire ; que Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude seront condamnés in solidum à leur payer la somme de 104.156,22 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 10 avril 2012 ;
Considérant que le jugement déféré sera confirmé, sauf sur le montant de la créance des consorts [Q] ;
Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge des consorts [Q] le montant de leurs frais irrépétibles d'appel ; qu'il convient de condamner Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude à leur payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que la SCP Brouard-Daude sera également condamnée à verser à la société Financo la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude, qui succombent tous les deux sur leur prétentions respectives, supporteront leurs frais irrépétibles et les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré, sauf sur le montant de la créance des consorts [Q],
Statuant à nouveau quant à ce,
Fixe la créance de Monsieur [I] [Q], Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur [U] [O], Monsieur [H] [Q] et Monsieur [A] [Q] au passif de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. Les Cledelles à la somme de 104.156,22 euros,
Condamne in solidum Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude à payer à Monsieur [I] [Q], Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur Geranto Sud, Monsieur [H] [Q] et Monsieur [A] [Q] la somme de 104.156,22 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 avril 2012,
Condamne solidairement Monsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude à payer à Monsieur [I] [Q], Monsieur [M] [Y], représenté par son tuteur Geranto Sud, Monsieur [H] [Q] et Monsieur [A] [Q] la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne solidairementMonsieur [L] [W] et la SCP Brouard-Daude aux dépens d'appel, avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT