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08/01/2015 | FRANCE | N°13/07511

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 08 janvier 2015, 13/07511


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 08 Janvier 2015



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07511



Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 07 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 12/00730





APPELANT

Monsieur [J] [R]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Katia BITTON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1543






INTIMEES

SOCIÉTÉ SERVICES CORRESPONDANCE PASSAGERS

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Anne LEPARGNEUR, avocat au barreau de TOULOUSE substituée par Me Yolande PALACIOS, av...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 08 Janvier 2015

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07511

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 07 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 12/00730

APPELANT

Monsieur [J] [R]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Katia BITTON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1543

INTIMEES

SOCIÉTÉ SERVICES CORRESPONDANCE PASSAGERS

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Anne LEPARGNEUR, avocat au barreau de TOULOUSE substituée par Me Yolande PALACIOS, avocat au barreau de TOULOUSE

SOCIÉTÉ CONNECTING GROUND SERVICES

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par Me Antonio SARDINHA MARQUES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0300

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 novembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Nicolas BONNAL, Président

Madame Martine CANTAT, Conseiller

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Nicolas BONNAL, Président et par Madame FOULON, Greffier .

Statuant sur l'appel formé par M. [J] [R] contre une ordonnance rendue le 7 juin 2013 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY (formation de référé) qui a':

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de l'intéressé visant à voir constater que son transfert de la société SERVICES CORRESPONDANCE PASSAGERS (ci-après dénommée SCP) à la société CONNECTING GROUND SERVICES (ci-après dénommée CGS) était régi par les dispositions de l'article L'1224-1 du code du travail, ordonner à cette dernière de lui communiquer subsidiairement le cahier des charges et en tout état de cause le mode de calcul de l'indemnité différentielle et constater qu'il relève du coefficient 165, et voir solidairement condamner les sociétés SCP et CGS à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaire, et ces deux sociétés et une société BGS à lui payer des sommes à titre de dommages et intérêts et de frais irrépétibles,

- rejeté les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé les dépens à la charge de M. [J] [R]';

Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience du 20 novembre 2014 pour M. [J] [R], auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant, qui demande à la cour, infirmant l'ordonnance déférée, de':

- constater l'existence d'un trouble manifestement illicite et l'absence de contestations sérieuses,

- constater le transfert sur le fondement des dispositions de l'article L'1224-1 du code du travail,

- subsidiairement en cas de refus par la société CGS, ordonner la communication du cahier des charges,

- ordonner en tout état de cause à la société CGS de communiquer le mode de calcul de l'indemnité différentielle,

- condamner la société CGS à lui payer à titre provisionnel, en constatant qu'il relève du coefficient 165, les sommes de':

- 3'665,12 euros à titre de rappel de salaire brut pour la période d'octobre 2012 à avril 2014,

- 366,51 euros au titre des congés payés correspondants,

- 650,90 euros à titre de rappel de salaire net pour la même période,

- 65,09 euros au titre des congés payés correspondants,

- dire qu'en cas de contestation, les rappels de salaire depuis le transfert s'effectueront en deniers ou quittances,

- condamner solidairement les sociétés SCP et CGS (les demandes visant la société BGS ayant été retirées à l'audience) à lui payer une somme de 2'000 euros à titre de provision sur dommages et intérêts pour préjudice moral et résistance abusive,

- assortir ces sommes de l'intérêt au taux légal du jour de la saisine,

- condamner solidairement les sociétés SCP et CGS (les demandes visant la société BGS ayant été retirées à l'audience) à lui payer une somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens';

Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience pour la société CONNECTING GROUND SERVICES (CGS), auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de cette intimée, qui demande à la cour de':

- confirmer l'ordonnance déférée, faute que les conditions de l'intervention du juge des référés soient réunies,

- condamner M. [J] [R] à lui payer une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens';

Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience pour la société SERVICES CORRESPONDANCE PASSAGERS (SCP), auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de cette intimée, qui demande à la cour de':

- dire qu'elle doit être mise hors de cause,

- condamner solidairement la société CGS et M. [J] [R], ainsi que deux autres salariés parties à des instances parallèles, à lui payer la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens';

SUR CE, LA COUR

Sur les faits constants

Il résulte des pièces produites et des débats que':

- M. [J] [R] était employé par la société SCP en qualité d'agent d'exploitation (coefficient 165), avec une ancienneté remontant au 18 octobre 2000 (selon les bulletins de paie, deux contrats de travail avec la société MANU-PISTE étant produits par les sociétés SPS et CGS, le premier du 18 octobre 2000 à durée déterminée et à temps partiel, jusqu'au 28 février 2001, puis le second à durée indéterminée et à temps complet du 27 février 2001), et était affecté sur le marché consenti par la société AIR FRANCE en vue de la manutention des bagages embarquements, départs, arrivées, correspondances (dit EDAC) de l'aérogare 2'F de l'aéroport de [1],

- il n'est pas contesté qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé,

- la société AIR FRANCE a avisé le 20 août 2012 la société WFS, dont la société CGS est une filiale, que sa proposition était retenue à compter du 1er octobre 2012 pour deux lots, dont le lot 2 dénommé «'traitement de l'EDAC du T2F'»,

- une société EUROPEAN FLIGHT SERVICES, autre filiale de la société WFS, en a, par lettre du 21 août 2012, informé la société SCP, lui demandant les informations prévues par la convention collective pour organiser le transfert des salariés,

- la dite convention collective, applicable dans les deux sociétés SCP et CGS, est la convention collective régionale concernant le personnel de l'industrie, de la manutention et du nettoyage sur les aéroports ouverts à la circulation publique du 1er octobre 1985, et spécialement ses articles 38 bis et 38 ter,

- la société SCP a réuni le 6 septembre 2012 son comité d'entreprise sur ce transfert, réunion au cours de laquelle des représentants de la société CGS ont exposé la nature de l'avenant qu'il serait demandé aux salariés de signer,

- le même jour, la société SCP a écrit aux salariés concernés, dont M. [J] [R], pour leur annoncer leur transfert, puis le 10 septembre 2012, elle a transmis à la société EUROPEAN FLIGHT SERVICES la liste des salariés concernés par le transfert, ces deux courriers visant les dispositions de l'article L'1224-1 du code du travail,

- le 28 septembre 2012, l'inspecteur du travail, saisi d'une demande du 18 septembre précédent de la société SCP d'autorisation de transfert des salariés protégés, ne mentionnant cependant pas M. [J] [R], en application de l'article 38 bis susvisé, a relevé que tous les salariés de l'établissement étaient concernés par le transfert et qu'il n'était en conséquence pas compétent, et a rejeté la demande,

- saisi par le comité d'entreprise de la société SCP, le juge des référés du tribunal de grande instance de BOBIGNY a, par ordonnance du 1er octobre 2012, dit que l'obligation de présenter l'avenant type des contrats de travail à ce comité pesait sur la société CGS en application de l'article 38 bis susvisé, et suspendu le processus d'information et de consultation de ce comité jusqu'à l'obtention de son avis, avant lequel aucun avenant ne pourrait être présenté à la signature des salariés,

- ce même 1er octobre 2012, M. [J] [R] a signé avec la société CGS un avenant à son contrat de travail faisant état d'un transfert conventionnel, signature donnée «'sous réserve de la bonne application de l'article 38 bis de la convention collective'» et des «'décisions judiciaires relatives aux actions collectives en cours'»,

- le 27 novembre 2012, M. [J] [R] a saisi le conseil de prud'hommes de BOBIGNY en référé de la procédure qui a donné lieu à la décision déférée.

Sur la nature du transfert

M. [J] [R] soutient que le transfert de son contrat de travail aurait dû s'effectuer conformément aux dispositions de l'article L'1224-1 du code du travail, et que le défaut d'application de ce texte par la société CGS constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser.

Il doit être rappelé, en effet, qu'aux termes de l'article R'1455-6 du code du travail, applicable au conseil de prud'hommes, «'la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite'».

La condition d'urgence n'étant pas imposée par ce texte, c'est en vain que la société CGS oppose aux demandes de M. [J] [R] le fait qu'elle ne serait pas caractérisée au cas présent.

L'article L'1224-1 du code du travail dispose que «'lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise'».

Ainsi que l'a dit pour droit la Cour de justice des Communautés européennes le 10 février 1988, puis encore le 11 mars 1997, doit être assimilé à la modification dans la situation juridique de l'employeur pour l'application de ce texte, même en l'absence de lien de droit entre les employeurs concernés, le transfert d'une entité économique ayant conservé son identité et dont l'activité a été poursuivie ou reprise, une telle entité économique devant être entendue, ainsi que le précise la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001, comme «'un ensemble organisé de moyens en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire'», le transfert d'une telle entité supposant, outre celui des personnes, celui de moyens propres, corporels ou incorporels, qui permettent la poursuite de l'activité transférée et qui lui conservent son identité propre.

Il appartient à M. [J] [R], qui soutient que ces dispositions sont applicables au transfert de son contrat de travail, de sorte que ce serait en violation de ce texte que la société CONNECTING GROUND SERVICES l'aurait contraint à signer un avenant au contrat de travail dont il bénéficiait avec la société SCP, d'établir que les conditions de cette application sont réunies.

Il doit être d'abord constaté qu'à l'exception de la société SCP, avant le 18 septembre 2012, toutes les parties au présent litige, y compris M. [J] [R], ont considéré que les dispositions légales susvisées n'étaient pas applicables. La société SCP, après avoir estimé, dans ses courriers des 6 et 10 septembre 2012 adressés aux salariés concernés et à la société CGS, que le transfert était régi par les dites dispositions légales, a en effet changé d'avis, le 18 septembre 2012, et a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de transfert des salariés protégés dans un cadre conventionnel.

L'inspection du travail n'a pas remis en cause cette analyse, étant observé que les dispositions de l'article L'2421-9 du code du travail visées par sa décision, qui limitent sa compétence aux cas de transferts partiels d'entreprise ou d'établissement sont applicables aux transferts conventionnels.

M. [J] [R] ne saurait davantage invoquer les décisions de l'inspection du travail des 10 et 22 octobre 2012 rendues relativement à l'autorisation de transfert de salariés protégés d'une société tierce, la société PPS, à la société CGS, à la suite du transfert du marché d'un autre lot attribué par la société AIR FRANCE, le lot 4, décisions qui ont retenu que ce transfert était régi par les dispositions de l'article L'1224-1 du code du travail, et qui ont été confirmées par jugement du tribunal administratif de MONTREUIL en date du 17 novembre 2014.

Contrairement à ce qu'il soutient, le principe de la séparation des pouvoirs ne contraint nullement la cour à suivre l'inspecteur du travail et le tribunal administratif, dès lors que le transfert dont elle est saisie, du lot 2 de la société SCP à la société CGS, n'est pas le même que celui à propos duquel ont été rendues ces décisions administratives, soit le transfert du lot 4 de la société SPS à la société CGS, le seul fait que le donneur d'ordre, la société AIR FRANCE, et la date de transfert du marché, au 1er octobre 2012, soient communs aux deux transferts étant à cet égard indifférent.

M. [J] [R] soutient que le cessionnaire a repris des «'moyens d'exploitation corporels (matériel, outillage, bâtiment, terrains, etc.) ou incorporels (licences, reprise de la clientèle, droit au bail, etc.) nécessaires à l'exploitation de l'entité économique'».

Outre que cette argumentation est imprécise, les énumérations qu'elle propose n'étant pas présentées comme exhaustives, elle laisse subsister une incertitude sur le fait de savoir si ce sont des éléments corporels ou des éléments incorporels, ou les deux à la fois, qui ont été repris.

Surtout, M. [J] [R] ne produit aux débats aucune pièce qui soit susceptible d'étayer son argumentation, alors même que la société SCP a elle-même reconnu, dans sa saisine du 18 septembre 2012 de l'inspection du travail, que dans le cadre de ce transfert, «'il n'y aura pas reprise du matériel et des locaux'».

Dans ces conditions, le trouble qu'il invoque n'est pas manifestement illicite, et il ne peut être dit que le transfert aurait dû être effectué conformément aux dispositions de l'article L'1224-1 susvisé.

L'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur ce point.

Sur la demande en communication du cahier des charges

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, «'s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'».

Ainsi qu'il résulte de ce qui précède, faute de verser aux débats la moindre pièce de nature à laisser penser que le transfert aurait été régi par les dispositions de l'article L'1224-1 susvisé, et alors que la seule partie qui l'avait un moment envisagé, la société SCP, l'a expressément exclu sur la base d'informations précises, M. [J] [R] ne produit aucun élément de nature à caractériser le dit motif légitime.

L'ordonnance déférée sera également confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé de ce chef.

Sur le transfert conventionnel

M. [J] [R] fait encore valoir, à titre subsidiaire, que la signature de l'avenant qui lui a été imposée est contraire à l'article 38 bis de la convention collective, ce qui caractérise encore un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge de faire cesser.

Il est stipulé à l'alinéa 7 de cet article que, «'dans tous les cas, la rémunération globale, l'ancienneté acquise, la qualification doivent être maintenues à un niveau équivalent pour chaque salarié concerné'», que «'cette équivalence est recherchée parmi les qualifications existantes chez le nouvel employeur'» et que, «'par rémunération globale, il est entendu la rémunération brute des 12 derniers mois hors éléments exceptionnels, sans toutefois perpétuer les libellés de ses composantes et ses modalités de versement'».

La convention précise encore, à l'alinéa 8, qu'«'il est procédé par l'entreprise entrante à un avenant au contrat de travail qui précisera expressément les points évoqués à l'article précédent, cet avenant type sera présenté aux comités d'établissement ou aux comités d'entreprise concernés'», et «'précisera l'éventuel avantage individuel du salarié transféré et les avantages collectifs en vigueur dans la nouvelle entreprise, les usages ou autres avantages individuels et collectifs en vigueur au sein de l'entreprise cédante n'étant pas transférés'».

M. [J] [R] fait grief à l'avenant qu'il a signé de modifier son coefficient et sa rémunération et de lui imposer une indemnité différentielle dont le montant diminuera en cas d'augmentation de salaire, ainsi qu'une clause de mobilité.

Il résulte de la comparaison entre la situation initiale de l'intéressé, telle qu'elle résulte du contrat de travail avec la société MANU-PISTE versé aux débats par les sociétés intimées et des derniers bulletins de salaire délivrés par la société SCP, et l'avenant qu'il a signé le 1er octobre 2012 avec la société CGS, qu'à la qualification d'agent d'exploitation au coefficient 165, l'avenant litigieux substitue la qualification d'agent d'exploitation au coefficient 156, que l'ancienneté du salarié est reprise, que le salaire mensuel est maintenu à la base mensuelle sans ancienneté, à laquelle s'ajoute la prime mensuelle d'ancienneté conventionnelle, et qu'«'aux fins de garantir le niveau de rémunération brute globale, il est instauré une indemnité différentielle mensuelle visant à maintenir le niveau de rémunération brute relative au taux horaire et à la prime d'ancienneté'», le montant de cette indemnité devant diminuer en cas d'augmentation du taux horaire brut.

Enfin, une clause relative au lieu de travail, qui n'existait pas dans le contrat initial, est stipulée à l'avenant signé avec la société CGS, prévoyant que le salarié «'pourra, en raison de la mobilité qu'impose la profession, être affecté par la société CGS à tout autre chantier que son chantier initial, actuel ou futur, dans la zone Paris Île-de-France, au sein de la société CGS ou de toute autre société du groupe EFS auquel elle appartient'».

Si une telle clause qui impose au salarié d'accepter toute mutation dans une autre société, même appartenant au même groupe, est irrégulière, il convient de relever que, sur le fondement subsidiaire de la violation de la convention collective, la demande faite à la cour par M. [J] [R], qui est la même que celle formée sur le fondement principal de la violation des dispositions de l'article L'1224-1 du code de travail, soit une demande tendant à voir condamner la société CGS au paiement de sommes provisionnelles à titre de rappel de salaire, ne tend à aucun moment spécifiquement à l'annulation de la clause de mobilité.

Par ailleurs, la convention collective autorise des modifications du contrat de travail, invitant à rechercher une équivalence entre l'avenant et le contrat initial, en termes de qualification, de rémunération globale et de qualification, et ce compte tenu des qualifications existantes chez le nouvel employeur, et autorisant également des changements dans les libellés des composantes et les modalités de versement de la rémunération globale.

Si la conformité aux stipulations de la convention collective du système de l'indemnité différentielle, qui ne compense que provisoirement la diminution de la rémunération brute liée au changement de coefficient, est discutable, aucune demande n'est spécifiquement davantage formée au titre de la structure de la rémunération.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé de ces chefs.

Sur les demandes en rappel de salaire

M. [J] [R] soutient subir une perte de salaire contraire au principe conventionnel du maintien de la rémunération globale. Il relève, par ailleurs, «'à toutes fins utiles'», que le salaire qui lui est versé serait inférieur aux minima conventionnels. Il sollicite la condamnation de la société CGS à lui payer la différence.

En application des dispositions de l'article R'1455-7 du code du travail relatif au conseil de prud'hommes, «'dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire'».

Le taux horaire conventionnel de 10,86 euros pour les agents ayant entre 12 et 15 ans d'ancienneté, est respecté par la nouvelle rémunération du salarié, dès lors que celui-ci a perçu, à compter du 1er novembre 2012, un salaire mensuel de base de 1'484,85 euros et une prime d'ancienneté de 163,33 euros, ce qui correspond exactement, pour 151,67 heures, au minimum conventionnel. Pour le mois d'octobre, les douze années d'ancienneté n'étaient pas encore acquises (la date d'entrée du salarié étant le 18 octobre 2000), de sorte que ce n'est pas en contradiction avec les minima conventionnels que M. [J] [R] n'a été rémunéré en octobre que sur la base d'un taux horaire de 10,57 euros, soit le taux garanti pour les salariés ayant entre neuf et douze années d'ancienneté.

Par ailleurs, la comparaison entre la rémunération perçue par M. [J] [R] avant et après le 1er octobre 2012 montre que l'indemnité différentielle et la prime d'ancienneté versées par la société CGS compensent exactement la diminution du taux horaire qui est passé de 11,67 euros à 9,79 euros, le total de ces trois postes en octobre 2012 étant égal à 1'769,99 euros, soit le montant du salaire de base versé par la société SCP au mois de septembre 2012, les montants reçus au titre de l'indemnité kilométrique ou de l'indemnité de panier avant et après le transfert ne pouvant utilement être pris en compte pour caractériser une éventuelle violation par l'entreprise entrante de ses obligations conventionnelles.

La demande en paiement formée par M. [J] [R] se heurte, en conséquence, en cet état de référé, à une contestation sérieuse.

L'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur ce chef de demande.

Sur la communication du mode de calcul de l'indemnité différentielle

Il résulte de ce qui précède que l'indemnité différentielle est calculée au centime près pour compenser la différence entre le «'salaire de base'» mentionné sur le bulletin de paie, tel qu'il était versé par la société SCP, et le total des postes «'salaire mensuel'» et «'prime ancienneté'» composant la rémunération versée par la société CGS.

Par voie de conséquence, il n'existe aucun motif légitime, au sens des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile rappelées plus haut, d'ordonner la communication par la société CGS d'un mode de calcul qui se réduit à l'opération qui vient d'être décrite.

L'ordonnance déférée sera également confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral et résistance abusive

Dès lors qu'il a été jugé que les autres demandes en paiement formées par M. [J] [R] se heurtent à une contestation sérieuse, qu'il ne résulte pas de ce qui précède que la société CGS a imposé à l'intéressé, «'sans motif légitime, un transfert en violation des dispositions légales ou conventionnelles'», et que la réalité de l'état anxieux ou dépressif invoqué n'est démontrée par aucune pièce versée aux débats, la demande en dommages et intérêts pour préjudice moral et résistance abusive se heurte également à une contestation sérieuse.

La décision déférée sera donc aussi confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

M. [J] [R], qui succombe en son appel, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel.

Il est par ailleurs équitable qu'il contribue aux frais irrépétibles engagés par les sociétés intimées pour se défendre devant la cour, à hauteur de 300 euros pour ce qui concerne la société SCP et de 200 euros pour ce qui concerne la société CGS, les autres demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [J] [R] à payer sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile les sommes de':

- 300 euros à la société SERVICES CORRESPONDANCE PASSAGERS (SCP),

- 200 euros à la société CONNECTING GROUND SERVICES (CGS)';

Dit n'y avoir lieu à autre application des dispositions de cet article';

Condamne M. [J] [R] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 13/07511
Date de la décision : 08/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-08;13.07511 ?
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