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16/12/2014 | FRANCE | N°14/20257

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 16 décembre 2014, 14/20257


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 16 DECEMBRE 2014



(n° 738 , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/20257



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 03 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS 01 - RG n° 2014030325





APPELANTES



SAS CITE DE LA MUSIQUE - [1] Agissant poursuites et diligences de ses représentants lég

aux

[Adresse 2]

[Adresse 2]



EPIC LA CITE DE LA MUSIQUE Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]





Représentés par Me Alain FISSE...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 16 DECEMBRE 2014

(n° 738 , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/20257

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 03 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS 01 - RG n° 2014030325

APPELANTES

SAS CITE DE LA MUSIQUE - [1] Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

EPIC LA CITE DE LA MUSIQUE Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

assistés de Me Thierry DAL FARRA et de Me Sébastien SEGARD de la SCP UETTWILLER GRELON GOUT CANAT & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque : P0261

INTIMEE

Madame [F] dite [B] [U]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

assistée de Me Olivier PARDO et de Me Jonathan SIAHOU de la SELAS PARDO SICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0170

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Nicole GIRERD, Présidente de chambre

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Madame Odette-Luce BOUVIER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public qui a fait connaître son avis

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Nicole GIRERD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.

L'Etablissement Public de la Cité de la Musique, établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial de l'Etat (ci-après l'EPIC Cité de la Musique ) a été créé par le décret n° 95-1300 du 19 décembre 1995 qui lui attribue notamment pour mission d'organiser des concerts et des manifestations culturelles.

La SAS Cité de la Musique - [1] (ci-après SAS Cité de la Musique) est une filiale de l'EPIC Cité de la Musique constituée en 2006 pour assurer la production, la représentation, la promotion et la commercialisation de spectacles notamment musicaux dans la [1].

La société anonyme Immobilière Daru Saint Honoré - IDSH (ci-après la société IDSH) a pour principaux actionnaires la société HMP constituée par M. [X] [T] et la société Fair INVEST, outre trois actionnaires minoritaires dont Mme [F] dit [B] [U]

L'EPIC Cité de la Musique a acquis de la société IDSH suivant acte authentique du 30 juin 2009 un immeuble comprenant la salle de spectacle dénommée '[1]' située [Adresse 2] (ci-après 'la [1]'). Puis il a décidé d'en réorganiser l'exploitation avec pour objectif d'assurer la cohérence de sa mission de service public avec celle de la Philharmonie de [Localité 2], qui ouvrira en janvier 2015, et de lancer à cette fin un appel d'offres le 22 mai 2014 ;

Mme [U] - invoquant un dommage imminent résultant de cette réorganisation, au regard de l'action au fond qu'elle a initiée le 11 juin 2009 afin d'obtenir l'annulation des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 18 mai 2009 ayant autorisé la société IDSH à vendre 'la [1]' à l'EPIC Cité de la Musique - a fait assigner en référé l'EPIC Cité de la Musique et la SAS Cité de la Musique devant le tribunal de commerce de Paris qui a rendu l'ordonnance du 3 octobre 2014 dont le dispositif est ainsi libellé :

'Vu l'article 873 du code de procédure civile :

- ordonnons l'interdiction de la concession de la [1] jusqu'au règlement définitif de l'instance pendante [au fond susvisée]

- ordonnons la mise sous séquestre des titres de la Cité de la musique - [1]

- condamnons la SAS Cité de la musique - [1] à payer à Mme [U] [F] dite [B] la somme de 10.000€, au titre de l'article 700 CPC, déboutons pour le surplus

- rejetons les demandes plus amples ou contraire des parties

- condamnons en outre la SAS Cité de la musique - [1] aux dépens (...)'.

L'EPIC Cité de la musique et la société Cité de la musique - [1] sont appelants de cette ordonnance suivant déclaration d'appel du 8 octobre 2014 et ont obtenu par ordonnance rendue le 17 octobre 2014 par le délégataire de Mme le premier président de cette cour, l'autorisation d'assigner Mme [U] à l'audience du 24 novembre suivant, ce qu'ils ont fait par acte du 21 octobre 2014 ;

Le 6 novembre 2014 le Préfet de la région [Localité 1], Préfet de [Localité 2] à transmis à M. Le procureur général de la cour d'appel de Paris un déclinatoire de compétence, aux termes duquel il le prie de bien vouloir :

- communiquer ce déclinatoire à la cour

- rappeler à la cour que si elle entend le rejeter, il lui incombe de surseoir à statuer, conformément aux articles 2 et 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828

- lui adresser, conformément à l'article 7 dudit texte, copie de ses conclusions ou réquisitions et de la décision à intervenir sur sa compétence.

Il soutient :

- au visa de l'article 4 de l'ordonnance du 1er juin 1828, que ce déclinatoire de compétence est recevable

- et, au visa des dispositions d'ordre public de l'article L2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, que le présent litige relève de la compétence exclusive des juridictions de l'ordre administratif en ce qu'il tend à empêcher la conclusion d'un contrat portant occupation du domaine public, et que tous les litiges relatifs à un tel contrat, administratif par détermination de la loi, relèvent de la compétence du juge administratif.

Par conclusions régulièrement signifiées le 19 novembre 2014, Monsieur Le procureur général près la cour d'appel de Paris fait connaître l'avis du ministère public selon lequel seul le juge judiciaire est compétent pour ordonner les mesures adéquates pour prévenir l'éventuelle commission d'une voie de fait et estime en conséquence que les juridictions judiciaires sont compétentes pour connaître de la demande de Mme [U] d'interdire la concession de la [1].

Il soutient :

- que le déclinatoire de compétence du Préfet de la région d'[Localité 1], préfet de [Localité 2] est recevable

- que l'injonction prononcée par le juge des référés de première instance ne concerne pas un litige relatif à la passation d'un contrat comportant occupation du domaine public qui relèverait des juridictions administratives en vertu de l'article L2331-1 du Code Général de la Propriété des Personnes Publiques, mais 'un litige relatif au titre de propriété de la [1] dont seul le juge judiciaire peut connaître', en ce que 'le juge des référés a, en effet, voulu prévenir qu'une atteinte soit portée au droit de propriété dans l'hypothèse où le juge du fond serait amené à décider de la nullité de la vente de la [1]'

- que 'dans cette hypothèse, la décision de l'EPIC Cité de la Musique de passer un contrat comportant occupation du domaine public, alors que la [1] n'appartiendrait plus au domaine public, ne saurait se rattacher à un pouvoir lui appartenant', que 'de plus, selon la durée de la concession accordée, le droit de propriété de la société IDSH pourrait être considéré comme vidé de son contenu équivalent ainsi à l'extinction de son droit de propriété', qu' 'il serait alors question d'une voie de fait telle que définie par le Tribunal des conflits'.

L'EPIC Cité de la musique et la SAS Cité de la musique, par conclusions transmises par voie électronique le 21 novembre 2014, demandent à la cour :

'Vu les articles 900, 901 et 917 et suivants du Code de procédure civile,

Vu l'Ordonnance de référé du Tribunal de commerce de Paris du 3 octobre 2014,

Vu la déclaration d'appel du 8 octobre 2014,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu les articles 74 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques,

Sur l'incompétence de la juridiction judiciaire à l'effet d'interdire la concession de la [1]

- Dire et juger que l'exception d'incompétence soulevée par l'EPIC de la Cité de la Musique et la SAS Cité de la Musique ' [1] au profit du Tribunal administratif de Paris, concernant la demande d'interdiction de la concession de la [1], n'a pas été soulevée tardivement, qu'elle est par suite recevable et bien fondée ;

In limine litis

- Dire et juger qu'en tant qu'elle demande d'interdire la concession de la [1],

l'action de Madame [F] [U] relève de la compétence ratione materiae des juridictions de l'ordre administratif, et non des juridictions de l'ordre judiciaire, ce faisant,

- Infirmer l'ordonnance de référé du 3 octobre 2014,

- Dire et juger que la demande de dommages intérêts formulée en appel contre la Cité de la musique relève de la compétence ratione materiae de la juridiction administrative,

Statuant à nouveau et en tout état de cause,

- Déclarer le Tribunal de commerce de Paris incompétent au profit du Tribunal administratif de Paris pour statuer sur la demande et l'action tendant à interdire la concession de la [1],

- Renvoyer les parties à mieux se pourvoir,

Sur les autres dispositions de l'ordonnance du 3 octobre 2014 et sur les demandes de Mme [U] :

Vu l'article 873 du Code de procédure civile,

Vu les articles 31 et 32 du Code de procédure civile,

Vu l'assignation en référé du 26 mai 2014,

- Dire et juger Madame [F] [U] irrecevable ou à tout le moins mal fondée en l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- Infirmer l'Ordonnance de référé du 3 octobre2014,

Statuant à nouveau,

- Dire et juger n'y avoir lieu à référé,

En tout état de cause :

- Infirmer l'ordonnance de référé du 3 octobre2014 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- Dire et juger n'y avoir lieu à référé,

- Débouter Madame [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, notamment sa demande de dommages intérêts,

- Condamner Madame [F] [U] dite [B] [U] à payer à l'Établissement Public de la Cité de la Musique et la société Cité de la Musique ' [1], chacune, la somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG prise en la personne de Maître Alain FISSELIER, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC'.

L'EPIC Cité de la Musique et la SAS Cité de la Musique soutiennent pour l'essentiel sur la compétence,

- que l'exception d'incompétence qu'ils ont soulevée concernant la demande d'interdiction de la concession de 'la [1]' est recevable et, pour les mêmes raisons que celles énoncées dans le déclinatoire de compétence et ci-dessus visées, qu'elle est bien fondée

- que, pour le surplus, l'action en référé de Mme [U] est sans objet puisque la [1] n'est pas à vendre

- et que l'action engagée au fond par Mme [U], qui n'a fait valoir aucun droit à leur encontre dans une procédure au fond, est sans incidence sur la validité de la vente de la [1],

Mme [U], intimée, aux termes du dispositif de ses conclusions transmises électroniquement le 21 novembre 2015, demande à la cour :

'Vu les articles 31 et suivants,56, 58,74,114,526,700,873,et 917 et suivants du Code de procédure civile,

Vu la procédure pendante par devant le Tribunal de commerce de Paris sous le numéro RG 2009042752

Vu le dommage imminent,

Vu l'appel d'offre,

Vu les pièces produites,

[Madame [B] [U] sollicite de la Cour d'appel de Paris :]

A TITRE LIMINAIRE : sur l'exception de nullité tirée de la nullité de la procédure à jour fixe :

- DIRE ET |UGER que la procédure à jour fixe n'a pas été respectée ;

- DECLARER la procédure à jour fixe nulle et de nul effet ;

En conséquence,

- RENVOYER la procédure au Conseiller de la mise en état ;

A TITRE LIMINAIRE : sur l'exception d'incompétence soulevée par les appelants - DECLARER IRRECEVABLE l'exception d'incompétence soulevée par les appelants ;

- SE DECLARER compétent,

Subsidiairement,

- REJETER L'EXCEPTION d'incompétence soulevée par les appelants ;

- SE DECLARER compétent,

A TITRE LIMINAIRE : sur la nullité de l'assignation pour défaut d'objet

- DECLARER IRRECEVABLE la nullité pour défaut d'objet de la demande soulevée par les appelants

A TITRE PRINCIPAL :

DIRE ET ]UGER Madame [U] recevable et bien-fondée en ses demandes fins et prétentions,

En conséquence, ORDONNER toutes mesures conservatoires visant à garantir Madame [U] dans ses droits et notamment;

INTERDIRE la concession de la [1] jusqu'au règlement définitif de l'instance pendante par devant le Tribunal de commerce enrôlée sous le numéro RG: 2009042752;

ORDONNER la mise sous séquestre des titres de la SAS CITE DE LA MUSIQUE - [1] ;

En conséquence :

CONFIRMER l'Ordonnance du Président du Tribunal de commerce de Paris du 03 octobre 2014 en toutes ses dispositions

Y ajoutant :

ORDONNER la publication de la présente décision à intervenir sur les registres du service de la publicité foncière;

ORDONNER la publication de la présente décision à intervenir au Bulletin officiel ;

ORDONNER la publication de la présente décision aux services des impôts des entreprises dont dépendent la CITE DE LA MUSIQUE - [1] et l'EPIC de la CITE DE LA MUSIQUE ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

REJETER l'ensemble de demandes fins et prétentions de la CITE DE LA MUSIQUE - [1] et de l'EPlC de la CITE DE LA MUSIQUE ;

CONDAMNER la CITE DE LA MUSIQUE - [1] et l'EPIC de la CITE DE LA MUSIQUE à payer, chacun, à Madame [U] la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNER la CITE DE LA MUSIQUE - [1] et l'EPIC de la CITE DE LA MUSIQUE à payer, chacun, à Madame [U] la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER la CITE DE LA MUSIQUE - [1] et l'EPIC de la CITE DE LA MUSIQUE aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL INGOLD-THOMAS;'

Mme [U] soutient, pour l'essentiel :

- que la procédure à jour fixe est irrégulière et lui fait grief

- que, comme soutenu par le ministère public et pour les mêmes motifs, le litige relève de la compétence exclusive du juge judiciaire

- que son intérêt à agir se déduit de ce que la reconnaissance d'un abus de majorité peut conduire la société IDSH à introduire une action en nullité de la vente

- que la perte de valeur de la [1] suite à l'interdiction envisagée, pendant une durée de 15 à 20 ans, de toute programmation de concerts classiques constitue manifestement pour elle comme pour l'ensemble des mélomanes et des parisiens un dommage imminent.

La cour renvoie, pour plus ample exposé du litige, à l'ordonnance entreprise et aux écritures ci-dessus visées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

Sur la nullité alléguée de la procédure à jour fixe

Considérant qu'en application des article 917 et 918 du code de procédure civile, si les droits d'une partie sont en péril, le premier président de la cour d'appel peut, sur requête, fixer le jour auquel l'affaire sera appelée par priorité ; que la requête doit exposer la nature du péril, contenir les conclusions sur le fond et viser les pièces justificatives ; qu'une expédition de la décision ou une copie certifiée conforme par l'avoué doit y être jointe et que copie de la requête et des pièces doit être remise au premier président pour être versée au dossier de la cour;

Considérant que l'article 919 du même code précise: 'la déclaration d'appel vise l'ordonnance du premier président, les exemplaires destinés aux intimés sont restitués à l'appelant, la requête peut aussi être présentée au premier président au plus tard dans les huit jours de la déclaration d'appel' ;

Considérant que Mme [U] soutient, d'abord, que l'irrégularité de la procédure à jour fixe résulte de ce que la requête n'est ni signée ni datée, de ce que n'y est pas jointe une expédition de la décision ou une copie certifiée conforme par l'avocat et de ce qu'elle se voit opposer des pièces adverses non produites en première instance (n°19 à 21) ainsi qu'une pièce produite postérieurement à son assignation à jour fixe mais antérieurement à ses conclusions d'intimée (pièce 23, déclinatoire de compétence); que Mme [U] soutient, ensuite, que cette irrégularité lui cause nécessairement un grief la privant du bénéfice de l'exécution provisoire de droit de l'ordonnance entreprise et l'obligeant à prendre connaissance sans délai de pièces complexes; qu'elle en déduit, enfin, que l'affaire doit être renvoyée au conseiller de la mise en état ;

Considérant toutefois qu'il résulte des pièces de la procédure, d'abord, que la requête à jour fixe a été valablement adressée par le cabinet d''avocats AFG, constitué dans la procédure d'appel, via RPVA, le 14 octobre 2014, en ce qu'elle porte signature électronique de celui-ci et que la date du message électronique établit qu'elle a été faite dans le délai de 8 jours à compter de la déclaration prévu à l'article 919 susvisé, étant rappelé, en tout état de cause, que le non-respect de ce délai ne peut être sanctionné que par le refus du premier président d'autoriser l'assignation à jour fixe et que l'ordonnance qui a autorisé les appelantes à assigner à jour fixe est une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours, ensuite, que si une simple copie signée de l'ordonnance entreprise a été jointe à la requête (pièce 16), il n'est invoqué aucune erreur de reproduction de la minute et en conséquence aucun grief à ce titre et, enfin, que toutes les pièces produites par les appelantes sont visées dans leur requête - peu important que certaines d'entre elles n'aient pas été produites en première instance - à l'exception de la production, en pièce 23, le 7 novembre 2014, du déclinatoire de compétence régularisé la veille par le préfet d'[Localité 1], préfet de [Localité 2] et donc déjà versée aux débats de sorte que la mise à l'écart des débats de cette pièce 23 comme irrégulièrement produite, fût-elle fondée, serait inopérante ;

Considérant que la présente procédure à jour fixe est donc régulière et que l'exception de nullité de celle-ci doit être rejetée ainsi que la demande, subséquente, de renvoi de l'affaire au conseiller de la mise en état, au demeurant non désigné dans le cadre d'une procédure de référé ;

Sur le déclinatoire de compétence

Considérant que ce déclinatoire est régulièrement présenté en cause d'appel conformément à l'article 4 de l'ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative; qu'au demeurant, sa recevabilité n'est pas contestée ; qu'il doit donc être déclaré recevable ;

Considérant, qu'il est constant que, suivant contrat du 30 juin 2009, la société IDSH a vendu 'la [1]' à l'EPIC Cité de la Musique; qu'il en résulte que 'la [1]' est un bien du domaine public affecté au service public qu'il a pour mission de gérer ;

Considérant que le litige dont la cour est saisie en référé tend à voir 'ordonner toutes mesures conservatoires visant à garantir Mme [U] dans ses droits' et notamment :

- interdire la concession de la [1] jusqu'à l'issue de l'instance en cours devant le tribunal de commerce de Paris, enrôlée sous le numéro RG : 2009042752

- ordonner le séquestre des titres de la SAS Cité de la Musique

- condamner celle-ci et l'EPIC Cité de la Musique à lui payer des dommages-intérêts;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques,'sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : 1° aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires'; que l'attribution légale de compétence résultant de ces dispositions vise tous les litiges les concernant sauf dans le cas de la voie de fait ;

Considérant, quant au litige en cours susvisé, que par acte du 11 juin 2009, Mme [U], se prévalant d'un abus de majorité ayant conduit à l'adoption des résolutions votées lors de l'assemblée générale extraordinaire du 18 mai 2009 ayant autorisé cette vente, a fait assigner la société IDSH, M. [X] [T] la société HMP et la société FAIR INVEST devant le tribunal de commerce de Paris afin de voir, au visa des articles L235-1, L225-251 et suivants du code de commerce et en substance :

dire et juger que (...) M. [X] [T], la société HMP et la société FAIR INVEST ont commis un abus de majorité

dire et juger que, (...), M. [X] [T] a commis des fautes de gestion dont il doit réparation à la société IDSH;

'en conséquence,

annuler [ces résolutions],

annuler, si elle devait être réalisée en force, la vente des immeubles détenus par la société IDSH au profit de l'EPIC Cité de la Musique,

faire interdiction à la société IDSH de conclure les conventions [projetées]

Si la vente dont le projet était soumis aux actionnaires de IDSH devait néanmoins intervenir,

condamner M. [X] [T], la société HMP et la société FAIR INVEST à [indemniser] la société IDSH (...); '

Considérant que cette procédure initiée depuis le 11 juin 2009 ne caractérise pas le risque allégué d'annulation du titre de propriété de l'EPIC Cité de la Musique dès lors que Mme [U] reconnaît dans ses conclusions (p. 34 in fine -35 in limine) ' il est vrai que Mme [U] ne peut seule intenter l'action en nullité de la vente, mais peut conduire la société IDSH à introduire une action en nullité de la vente au regard de la décision à intervenir actant l'abus de majorité'et ne conteste pas utilement l'affirmation adverse selon laquelle aucune action en annulation de cette vente à laquelle l'acquéreur soit partie n'a été initiée ; qu'ainsi Mme [U] convient expressément qu'à supposer que la décision à intervenir au fond 'acte l'abus de majorité' allégué, cette action pendante devant le tribunal de commerce à laquelle l'acquéreur n'est pas partie, ne saurait avoir, en elle-même et sans préjudice de la décision au fond à intervenir, aucune incidence sur le titre de propriété de celui-ci ;

Considérant qu'il ne résulte donc pas de tout ce qui précède que le présent litige est, comme allégué, 'un litige relatif au titre de propriété de la [1] dont seul le juge judiciaire peut connaître';

Considérant qu'ainsi 'la [1]' dont l'EPIC Cité de la Musique est propriétaire fait partie du domaine public, indépendamment du sort de l'instance en cours susvisée et qu'il appartient à la juridiction administrative de connaître du litige opposant celui-ci à Mme [U], relatif à la 'convention d'occupation du domaine public ayant pour objet de concéder le droit d'occuper, et ce, à titre précaire et révocable, une emprise du domaine public de la Cité de la Musique en vue d'exploiter et valoriser la [1]', envisagée suivant appel d'offres du 22 mai 2014, à l'interdiction sollicitée de la 'concession de la [1]' et à la séquestration demandée des titres de la SAS Cité de la Musique, en ce qu'il tend à prévenir la conclusion d'un contrat portant occupation du domaine public, sans qu'y fasse obstacle le caractère commercial de l'EPIC Cité de la Musique et de sa filiale, la SAS Cité de la Musique, en charge de sa gestion ;

Qu'il appartient également à la juridiction administrative de connaître de la demande en réparation du dommage prétendument subi par Mme [U] à l'occasion de la présente procédure dès lors que l'attribution légale de compétence résultant de l'article L 2331-1 susvisé vise tous les litiges concernant un contrat portant occupation du domaine public, et que cette demande d'indemnisation est une demande accessoire à la demande principale ;

Considérant que l'EPIC Cité de la Musique a été créé par le décret n° 95-1300 du 19 décembre 1995 dont les articles 2 et 3 lui donnent mission d'organiser des concerts et des manifestations culturelles ; qu'il a acquis 'la [1]', a décidé d'en réorganiser l'exploitation avec pour objectif d'assurer la cohérence de sa mission de service public avec celle de la Philharmonie de [Localité 2], qui ouvrira en janvier 2015 et a lancé à cette fin l'appel d'offres susvisé ;

Considérant que, contestant cette vente et s'opposant à la réalisation de cet objectif, Mme [U] soutient que la convention d'occupation de 'la [1]', prévue par cet appel d'offres pour une durée de quinze à vingt ans et sans que puissent y être organisées des manifestations de musique classique, de même que toute mesure équivalente qui pourrait être prise, alors qu'est pendante l'instance susvisée devant le tribunal de commerce de Paris, serait un acte de l'administration insusceptible de se rattacher à un pouvoir lui appartenant et aboutirait à une extinction du droit de propriété de cette salle qu'elle viderait de sa substance et constituerait donc pour elle une voie de fait qu'il appartiendrait au seul juge judiciaire de prévenir ;

Considérant qu'il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la réparation, que dans la mesure où l'administration, soit, a procédé à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l'extinction d'un droit de propriété, soit, a pris une décision qui a les mêmes effets d'atteinte à la liberté individuelle ou d'extinction d'un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'avis de marché du 22 mai 2014, la convention en cause d'occupation du domaine public a pour objet de concéder le droit d'occuper, et ce, à titre précaire et révocable, une emprise du domaine public de la Cité de la Musique en vue d'exploiter et valoriser la [1]; qu'elle est limitée dans le temps et n'emporte pas possession à titre de propriétaire ; qu'il n'est en outre ni justifié ni même allégué qu'elle ne pourrait être remise en cause si la nullité de la vente de celle-ci par la société IDSH à l'EPIC était prononcée ;

Qu'il s'ensuit que ce projet que l'EPIC envisage pour remplir la mission de service public que le décret qui l'institue lui a confiée - même s'il devait avoir été poursuivi sans titre et à supposer même qu'il procède d'un acte de l'administration manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir lui appartenant - n'aboutirait pas à l'extinction du droit de propriété de ce bien immobilier, au demeurant vendu par la société IDSH et non Mme [U], demanderesse à la présente instance ;

Que Mme [U] ne saurait donc se prévaloir de la voie de fait alléguée de sorte que ses demandes ne relèvent pas de la compétence du juge judiciaire ;

Qu'à cet égard, le juge administratif dispose d'un pouvoir d'injonction de l'administration en vertu de la loi no 95-125 du 8 février 1995 et, sur le fondement de l'article L521-2 du code de justice administrative relatif au référé-liberté, des pouvoirs nécessaires pour suspendre l'exécution d'une décision dont la légalité est sérieusement douteuse et pour prendre « toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale» ;

Qu'enfin, dans le cas d'une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif compétent pour statuer sur le recours en annulation d'une telle décision et, le cas échéant, pour adresser des injonctions à l'administration, l'est également pour connaître des conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative, hormis le cas où elle aurait pour effet l'extinction du droit de propriété ;

Considérant qu'il convient en conséquence d'inviter les parties à mieux se pourvoir ;

Considérant que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes du dispositif de l'arrêt ;

Considérant que Mme [U], partie perdante, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable et régulière la procédure à jour fixe,

Rejette, en conséquence, l'exception de nullité de celle-ci et la demande subséquente de ce chef,

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Se déclare incompétente au profit des juridictions de l'ordre administratif

Invite les parties à mieux se pourvoir

Condamne Mme [U] à payer à l'Etablissement Public Cité de la Musique et à la SAS Cité de la Musique - [1], chacun, la somme de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/20257
Date de la décision : 16/12/2014

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°14/20257 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-16;14.20257 ?
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