La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/12/2014 | FRANCE | N°13/06019

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 04 décembre 2014, 13/06019


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 Décembre 2014

(n° 9 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06019



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Novembre 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES section commerce RG n° 09/148





APPELANT

Monsieur [Z] [G]

Cabinet de Maître Philippe ACHACHE

[Adresse 1]

[Localité 1]>
comparant en personne, assisté de Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 238





INTIMEE

SAS BELFOR FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 Décembre 2014

(n° 9 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06019

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Novembre 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES section commerce RG n° 09/148

APPELANT

Monsieur [Z] [G]

Cabinet de Maître Philippe ACHACHE

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 238

INTIMEE

SAS BELFOR FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Nicole TIBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0369

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 octobre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Murielle VOLTE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente et par M. Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

M.[Z] [G] a été embauché en qualité d'intérimaire par la société Manpower et par la société Adecco pour être mis au service de la société Belfor Coutheillas en qualité de technicien haute pression, technicien karcher, technicien bâtiement et technicien après sinistre, en vertu de plusieurs contrats de mission entre le 16 mars 2004 et le 30 avril 2006. Il a été engagé en qualité de technicien après sinistre, niveau 3, statut employé, par contrat à durée indéterminée du 17 mars 2006.

M.[G] a saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges aux fins de voir requalifier ses contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée, obtenir le paiement de rappels de salaire liés à cette requalification, ainsi que des dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et pour utilisation de produits dangereux.

Par jugement du 12 novembre 2009, notifié le 16 novembre 2009, le conseil l'a déclaré irrecevable en ses demandes.

M. [G] a interjeté appel de ce jugement le 27 novembre 2009.

Il demande à la Cour de :

- déclarer nulle la clause n°1 de son contrat de travail du 17 mars 2006 et le déclarer recevable en ses demandes,

- condamner la société Belfor à lui verser les sommes de :

.5.085 euros à titre d'indemnité de requalification sur le fondement de l'article L. 1251-40 du code du travail,

.8.000 euros à titre de rappel de salaire suite à cette requalification et celle de 800 euros à titre de congés payés afférents,

. 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la durée du travail,

. 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour utilisation de produits dangereux,

. 1.500 euros au titre de l'article 700 du code du travail,

- ordonner la remise sous astreinte de 15 euros par jour de l' attestation Pôle Emploi et des bulletins de travail conformes.

Il fait valoir que le contrat de travail prévoit que le salarié embauché après de multiples contrats de missions temporaires a la possibilité de bénéficier d'une reprise d'ancienneté mais doit en contrepartie renoncer à toute action à l'encontre de son employeur au titre de la conclusion, l'exécution ou la rupture des contrats d'interim ; que cette clause, qui s'analyse en une transaction, est nulle car ne respectant les prescriptions de l'article 2044 du code civil ; qu'en outre le contrat de travail ne peut prévoir une telle clause de renonciation.

Il soutient que son embauche était permanente et régulière, correspondant à l'activité normale de la société utilisatrice, ainsi que l'avait justement constaté l'Inspection du travail en 1999 en indiquant qu'il y avait un recours abusif de l'entreprise à l'interim qui pouvait s'apparenter au délit de marchandage ; que la règle du tiers temps de l'article L. 1251-36 du code du travail n'a jamais été respectée, la durée d'emploi a dépassé le maximum autorisé de 18 mois par l'article L. 1251-12 du code du travail, que les contrats de mission étaient établis a posteriori compte tenu des modalités de conclusion des contrats et du volume très importants des contrats conclus et lui étaient soumis à la signature parfois la mission terminée, que l'activité de l'entreprise n'entre pas dans les secteurs d'activité de l'article D. 1251-1 du code du travail, autant d'éléments qui justifient la requalification de son contrat.

Il forme en conséquence des demandes de rémunération et d'indemnités liées à cette requalification.

La société Belfor (France) issue de l'absorption en juillet 2003 par la société Belfor Coutheillas de ses filiales situées en province, et appartenant au groupe Belfor Europe, demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris,

- condamner M. [Z] [G] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle qu'elle est spécialisée dans l'intervention de sauvetage après sinistre et plus précisément dans l'intervention de décontamination, assainissement, assèchement et la réhabilitation de lieux sinistrés ; que son activité consiste donc à intervenir uniquement et exclusivement dans un cadre d'urgence caractérisée par la survenance de sinistres, lesquels sont par définition imprévisibles, pouvant se manifester tant au sein d'entreprises qu'auprès de particuliers, hôtels, musées et autres ; que la spécificité de son activité a pour conséquence qu'elle ne peut être rattachée à aucune convention collective, et que c'est la raison pour laquelle elle a fait le choix d'appliquer un accord collectif d'entreprise, négocié avec l'ensemble des partenaires sociaux et plus favorable aux salariés, conclu le 29 avril 2004 et entré en vigueur le 1er juin 2004, déposé conformément aux dispositions de l'article L. 2231-6 du code du travail auprès de l'Inspection du travail et du conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges le 5 mai 2004, qui prévoit en son article 8.02 intitulé 'Ancienneté' une reprise d'ancienneté, sur la base du volontariat, en contre partie d'une renonciation par le salarié à toute action à l'encontre de l'entreprise relative à la conclusion, l'exécution et la rupture des contrats d'interim précédents ; qu'elle était tenue d'appliquer les dispositions de l'accord d'entreprise et a donc proposé à M. [G], qui l'a acceptée, cette reprise d'ancienneté qui est stipulée à l'article 1er de son contrat de travail du 17 mars 2006 ; que ce contrat est légal et lui est opposable conformément aux dispositions des articles L. 2254-1 du code du travail et 1134 du code civil ; que d'ailleurs il a été appliqué puisqu'il est mentionné sur tous les bulletins du salarié une reprise d'ancienneté au 16 mars 2004 ; que l'article 8.02 de l'accord d'entreprise prévoit bien des concessions réciproques : le salarié renonce à toute action judiciaire, et l'employeur s'engage à reprendre son ancienneté au premier jour de ses missions d'interim ; que rien n'interdit à un salarié de renoncer (y compris pendant le cours de son contrat de travail) à un droit qu'il tient d'une législation présentant un caractère d'ordre public, pourvu que celui-ci soit né ou acquis, les principes généraux applicables en la matière imposant seulement qu'une telle renonciation intervienne après l'événement ou le fait donnant naissance au droit abdiqué.

Elle soulève en outre in limine litis et à titre principal l'irrecevabilité de l'action en paiement de salaire qui se prescrit par cinq ans en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, et demande à titre subsidiaire sa mise hors de cause en rappelant que les indemnités consécutives à une requalification incomberaient aux entreprises de travail temporaire Manpower et Adecco.

A titre subsidiaire elle fait valoir qu'elle a eu recours à l'interim au regard de ses impératifs de fonctionnement sans méconnaître les règles légales, tout comme le font les entreprises concurrentes et conteste le bien fondé des réclamations de M.[G] à titre de rappel de salaire et d'indemnités.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'un accord d'entreprise a été conclu le 29 avril 2004 entre la société Belfor France et les organisations syndicales CGT et CFTC ; que dans le cadre des dispositions relatives à l'emploi, une clause 8.02 dite d'ancienneté prévoit la possibilité pour les salariés ayant exercé une activité continue et exclusive pour l'entreprise en qualité d'intérimaire de bénéficier d'une reprise d'ancienneté en contre partie de la renonciation par le salarié à toute action judiciaire à l'encontre de la société au titre des relations contractuelles antérieures ;

Attendu que le contrat de travail à durée indéterminée conclu entre les parties le 17 mars 2006 stipule :

' MONSIEUR [Z] [G] ayant travaillé pour le compte de la Société, dans le cadre de contrats temporaires avant proposition du présent contrat à durée indéterminée, d'un commun accord entre les parties, il est fait application des dispositions de l'article 8.02 de l'Accord d'Entreprise, lesquelles prévoient :

'Pour une durée de travail continue et exclusive à l'égard de l'Entreprise sous contrat d'interim supérieure à 18 mois (les arrêts de travail liés à la maladie, aux accidents de travail et maternité n'étant pas considérés comme interruptifs) il sera intégré dans l'ancienneté du contrat à durée indéterminée une reprise d'ancienneté équivalente à la durée totale des contrats d'interim à la condition qu'aucune interruption de plus de trois mois ne soit intervenue avant la conclusion du contrat à durée indéterminée'.

La société reprend en conséquence à MONSIEUR [Z] [G] qui l'accepte expressément une ancienneté fixée au 1er janvier 2004.

En contre partie de cette reprise d'ancienneté, MONSIEUR[Z] [G] reconnaît n'avoir subi aucun préjudice du fait de la situation antérieure et renonce en conséquence expressément à toute action judiciaire à l'encontre de la Société et notamment celle relative à la conclusion/exécution/rupture/requalification de relations contractuelles précédant le présent contrat' ;

Attendu que cette clause ne s'analyse pas en une transaction, aucun différend ne préexistant entre les parties à sa conclusion ; qu'il n'y a donc pas lieu de répondre aux moyens soulevés par M.[Z] [G] relatifs à sa nullité sur le fondement des dispositions de l'article 2044 du code civil qui lui sont inapplicables ;

Que cette clause s'analyse en une renonciation à des droits, qui, au demeurant, ne suppose pas nécessairement une contrepartie ; qu'une telle clause est licite dès lors qu'elle a pour objet des droits dont le salarié a la libre disposition, même s'ils trouvent leur source dans des dispositions d'ordre public, et qui sont déjà constitués ; que tel est le cas en l'espèce où M.[Z] [G] a déclaré renoncer, en contrepartie d'une reprise d'ancienneté à la date de sa première embauche, à toute action relative aux contrats d'interim antérieurement exécutés ; que le non respect par l'employeur de son engagement au titre de la reprise d'ancienneté invoquée ne serait en tout état de cause pas passible de la nullité de ladite clause ;

Attendu dans ces conditions que le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de M.[Z] [G] ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour

Confirme le jugement entrepris ;

Dit n'y avoir lieu à faire bénéficier la société Belfor France des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M.[Z] [G] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/06019
Date de la décision : 04/12/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°13/06019 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-04;13.06019 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award