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20/11/2014 | FRANCE | N°14/05604

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 20 novembre 2014, 14/05604


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 20 NOVEMBRE 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05604



Décision du 02 Août 2013 prononcé par la 4ème Chambre civile du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 12/02679





APPELANTE



SARLCARRE PROD

immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 504 127 309

ayant son siège [

Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



représentée par Me Laurence APITZ de la SELARL DOUBLE SIX, avocat au b...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 20 NOVEMBRE 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05604

Décision du 02 Août 2013 prononcé par la 4ème Chambre civile du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 12/02679

APPELANTE

SARLCARRE PROD

immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 504 127 309

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Laurence APITZ de la SELARL DOUBLE SIX, avocat au barreau de PARIS, toque : R166

ayant pour avocat plaidant Me Céline BRAKA, de la SELARL DOUBLE SIX, avocat au barreau de PARIS, toque : R166

INTIMÉE

Madame [G] [Y]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel AVRAMESCO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0134

INTIMÉ

Monsieur [H] [R]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel AVRAMESCO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0134

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Octobre 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur François FRANCHI, Président chargé du rapport et Madame Christine ROSSI, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Madame Christine ROSSI, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY

MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au Ministère Public.

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY, greffier présent lors du prononcé.

*

La société CARRE PROD, immatriculée le 13 mai 2008 auprès du Greffe du Tribunal de commerce de Bobigny, a été fondée au mois d'avril 2008 par quatre associés :

- Monsieur [B] [K], détenteur de 28 parts sur 100 composant le capital social ;

- Monsieur [P], détenteur de 28 parts sur 100 ;

- Madame [A] née [T], détentrice de 28 parts sur100 ;

- Monsieur [R], détenteurde16 parts sur 100.

Son capital évoluait de la façon suivante :

- le 8 décembre 2008, Mme [A] cédait à Monsieur [P] ses parts sociales.

- le 15 octobre 2010, Monsieur [P] cédait ses 56 parts à Monsieur [B] [K] (9 parts), Monsieur [R] (10 parts) et Monsieur [T] (37 parts) ;

- le 4 novembre 2011, Monsieur [B] cédait ses parts à Monsieur [T] qui détenait alors 74 parts sur 100.

*

La société CARRE PROD a pour objet l'impression numérique sur tous supports, création et pose d'enseignes, la création de concept, le graphisme, la décoration d'intérieur, la pose et dépose de matériels divers ainsi que toute autre activité liée à la mise en avant de divers produits

Monsieur [H] [R], qui y était salarié en qualité de Directeur Technique, en était désigné gérant aux termes d'une assemblée générale du 29 mai 2009, à la suite de la démission de Monsieur [L] [B] [K] et de la sortie du capital de la société de Madame [V] [A], soeur de Monsieur [T].

Il explique qu'il animait la politique commerciale de l'entreprise afin notamment de conserver la marge de l'entreprise et qu'en raison de congés maladie de deux salariés de la société sur quatre,, il a, en plus de ces fonctions et de son mandat, pris en charge le traitement informatique de l'image et le travail d'impression

Madame [G] [Y] vivant maritalement avec lui a été engagée au sein de la société CARRE PROD par contrat de travail à durée déterminée d'une durée d'un an à compter du 1er avril 2011 et aux termes de son contrat de travail, était chargée de reprendre la comptabilité de la société aux fins de mise en place d'une comptabilité interne; à ce titre, Madame [Y] s'occupait notamment de la mise à jour du journal des ventes. Toutefois, la société CARRE PROD soutient qu'elle n'a jamais exercé de fonctions salariées en son sein.

La société a connu une hausse de chiffre d'affaires conséquente, passant de 356.410 euros à 536.206 euros entre les exercices 2008 (bilan au 31 mars 2009) et 2009 (bilan au 31 mars 2010) et cette progression s'est poursuivie sur l'exercice 2010, le bilan au 31 mars 2011 faisant ressortir un chiffre d'affaires net de 509.411,44 euros dont 274.201,27 euros entre les mois de juillet et d'octobre 2011.

Alors que la société CARRE PROD s'était adjoint, depuis le mois de juillet 2009, les services du cabinet d'expertise comptable Otsar, dont le dirigeant est Monsieur [J] [X], cousin de Madame [V] [A], Monsieur [R] décidait, le 23 septembre 2011, de mettre un terme à la mission de ce cabinet à compter du 1er octobre 2011, à la suite de plusieurs «erreurs» commises par le cabinet Otsar, dont l'une a eu pour conséquence un redressement fiscal de 21.750 euros pour fausse déclaration de TVA.

*

Postérieurement,

1 - monsieur [R] expose que :

- le 5 octobre 2011, soit moins de trois semaines après la lettre de fin de mission adressée au cabinet Otsar, la société CARRE PROD a reçu sa première lettre de mise en demeure de la société LBF CREA, dont est associée Madame [A] et dont le gérant est Monsieur [O] [T], associé de la société CARRE PROD,

- les 17 octobre et 8 novembre 2011, Monsieur [T] a mis en demeure, Monsieur [R] de convoquer une assemblée générale afin d'approuver les comptes 2009 et 2010.

Les comptes ayant été déjà approuvés et régulièrement déposés auprès du Greffe du Tribunal de commerce de Bobigny (pièce n°10) selon Monsieur [R], il n'a pas estimé utile de répondre à ces lettres.

- par exploit d'huissier en date du 18 novembre 2011, Monsieur [T] a assigné la société CARRE PROD et Monsieur [R], pris en sa qualité de gérant, afin que soit nommé un mandataire ad hoc ayant pour mission de convoquer une assemblée générale devant notamment statuer sur la révocation du gérant et son remplacement.

- le 25 novembre 2011, toujours selon Monsieur [R], les serrures de la société ayant été collées, empêchant ainsi l'accès de quiconque aux locaux de l'entreprise, il a fait changer les serrures mais dès le lendemain, les serrures avaient de nouveau été changées, à son insu et s'est ainsi vu interdire l'accès de son lieu de travail.

- le 26 novembre 2011, à la suite de dégradations sur son véhicule personnel dans l'enceinte de la société CARRE PROD et du piratage de sa boîte de courriels professionnels l'empêchant d'y avoir accès, Monsieur [R] déposait une main courante au Commissariat de [Localité 5].

2 - Monsieur [T] expose que :

- le 4 novembre 2011, Monsieur [B] [K] lui a cédé 37 parts sociales et est donc sorti du capital de la société et il est ainsi devenu associé majoritaire de la société à hauteur de 74 parts sur 100.

- le 18 novembre 2011, il faisait signifier au gérant qui n'avait pas répondu à ses mises en demeure, une assignation en référé aux fins de désignation d'un administrateur provisoire, expliquant que l'activité de la société Carré Prod avait nécessité à l'origine de très lourds investissements en matériel et en machines et qu'elle commençait, à peine quatre ans après sa création, à devenir bénéficiaire, lorsqu'elle avait été victime des agissements de son gérant, perpétrés avec la complicité de sa compagne, Madame [Y]; il ajouta que Monsieur [R] n'aVAIT jamais tenu informé ni rendu compte à ses associés de sa gestion et s'était soustrait à l'ensemble des obligations légales qui lui incombaient en sa qualité de gérant, allant jusqu'à déposer auprès du greffe du Registre du commerce et des sociétés de Bobigny pour l'exercice 2009 et l'exercice 2010, les comptes annuels, le rapport de gestion et le texte des résolutions «'prétendument'» soumis à des assemblées générales d'approbation des comptes.

- le 21novembre 2011, son conseil a avisé Monsieur [R] qu'il avait pris la décision de confier à une personne le soin de se rendre tous les jours chez Carré Prod pour s'assurer de la protection de l'intérêt social contre ses agissements et le sommant de rapporter, sous48heures, sur son lieu de travail, tous les outils de travail qui avaient été mis à sa disposition et les documents appartenant à Carré Prod qu'il conservait chez lui ou ailleurs.

la semaine suivant l'envoi de cette mise en demeure, les locaux de Carré Prod ayant subi une tentative d'intrusion, les serrures étaient remplacées à son initiative.

*

Puis les parties décidaient de se rapprocher dans le cadre d'un protocole d'accord en date du 29 novembre 2011, au terme duquel :

- Monsieur [H] [R] cède sa participation dans la société, démissionne de son poste de Directeur Technique et de son mandat social afin, notamment, de mettre un terme aux relations tendues entretenues avec son coassocié, Monsieur [O] [T], détenant 74% du capital

- [M] [S], cessionnaire des parts de Monsieur [R], est désigné gérant de la société en date du 29 novembre 2011,

- Messieurs [T] et [S] s'engagent à renoncer à « toutes poursuites tant sur le plan civil que pénal à l'encontre de Monsieur [R], mettant ainsi fin à la procédure pendante devant le Juge des référés du Tribunal de commerce de Bobigny.

Il apparaît ainsi que la société CARRE PROD n'est pas signataire du protocole.

*

Cependant, Monsieur [T] soutenant que dans les jours suivant la signature du protocole, Monsieur [S], ès qualité de gérant de la société, avait découvert de nouveaux agissement commis par Monsieur [R] dans le cadre de ses fonctions, «'une fois encore susceptibles d'être constitutives d'infractions pénales commises au détriment de la société et qui n'avaient nullement été visées par le protocole'», par requête du 28 décembre 2011, sollicitait par le biais de la société CARRE PROD le Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Créteil pour être autorisée à faire pratiquer des saisies conservatoires sur les comptes bancaires de Monsieur [H] [R] et de Madame [G] [Y] pour sûreté et conservation d'une prétendue créance de 54.810,90 euros.

Les préjudices invoqués étaient les suivants :

- le versement à Madame [G] [Y], de la somme de 19.509,71 euros à titre de salaires ;

- la cession gratuitement à cette dernière d'un véhicule de marque Renault Scénic, immatriculé [Immatriculation 1] appartenant à la société ;

- la violation de l'obligation conventionnelle de non-concurrence sur le fondement de laquelle les associés de la société CARRE PROD lui ont versé la somme de 3.000 euros ;

- la perception indue de sommes à titre de salaires pour les mois de septembre, octobre et novembre 2011 pour un montant total de 10.069,24 euros,

- l'octroi indu de la somme de 7.292 euros en remboursement de frais professionnels divers.

Sur le fondement de l'ordonnance obtenue le 30 décembre 2011, la société CARRE PROD a fait procéder, le 30 décembre 2011, à deux saisies conservatoires.

- l'une a été pratiquée entre les mains du Crédit Agricole à Paris et a permis à la société CARRE PROD de bloquer les comptes de Madame [Y], de Monsieur [R] ainsi que leur compte joint pour un montant total de 29.603,22 euros (pièce n°26 : procès-verbal de saisie conservatoire de créances de Maître [F] [E]).

- l'autre a été pratiquée entre les mains du Crédit Agricole de [Localité 3] et a permis à la société CARRE PROD de bloquer les comptes de Madame [Y] pour un montant total de 54.518,90 euros (pièce n°27 : procès-verbal de saisie conservatoire de créances de Maître [C] [Q]).

- soit un montant total de 84.122,12 euros, soit près de 30.000 euros de plus que la somme autorisée le 30 décembre 2011 par le Juge de l'exécution.

Et le 4 janvier 2012 que la société CARRE PROD a déposé, entre les mains du Procureur de la République de Créteil, une plainte simple contre Madame [Y] et Monsieur [R] des faits de faux, abus de confiance, abus de biens sociaux et recels de ces infractions mais cette plainte ne s'est vue, à ce jour, donner aucune suite par les services du Parquet de Créteil.

*

Puis, autorisés à assigner à bref délai la société CARRE PROD en mainlevée des saisies conservatoires pratiquées sur leurs comptes bancaires, par exploit d'huissier en date du 7 mars 2012, Madame [Y] et Monsieur [R] ont assigné la société CARRE PROD devant Madame le Juge de l'exécution de Créteil afin de dénoncer les saisies abusives.

Le 22 mai 2012, le Juge de l'exécution de Créteil a ordonné la mainlevée des saisies conservatoires réalisées par CARRE PROD au motif que l'ensemble des griefs invoqués à l'encontre de Madame [Y] et de Monsieur [R] ne permettaient pas d'établir la simple apparence d'une créance.

Madame [Y] et Monsieur [R] ont alors demandé, le 15 juin 2012, aux conseils de la société CARRE PROD de faire procéder, dans les plus brefs délais, à la mainlevée des saisies conservatoires ainsi qu'à l'exécution spontanée de sa condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Si les mainlevées ont bien été réalisés, la société CARRE PROD ne s'est en revanche pas exécuter sur la condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ce qui a conduit Madame [Y] et Monsieur [R] à mandater un huissier de justice afin de procéder au recouvrement de cette somme.

*

Afin de ne pas voir les saisies conservatoires être déclarées caduques, la société CARRE PROD, se trouvant encore dans le délai d'un mois prévu par l'article 215 du décret du 31 juillet 1992, a, le 27 janvier 2012, assigné Madame [Y] et Monsieur [R], pris en sa qualité de gérant, devant le Tribunal de Grande Instance de Créteil sur les mêmes fondements que sa plainte pénale.

CARRE PROD a sollicité leur condamnation à lui verser :

- 76.565,92 euros correspondant à son prétendu préjudice commercial et financier ;

- 80.500 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice commercial financier et moral ;

- 5.000 chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement rendu le 2 août 2013, le Tribunal de Grande Instance de Créteil a rejeté la plus grande partie des demandes, condamnant Monsieur [R] à payer à la société Carré Prod la somme de 7.900 euros à titre de dommages et intérêts, outre 3.000euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le Tribunal de Grande Instance de Créteil a, notamment, jugé que :

- « Une relation de travail salarié a bien existé entre la société CARRE PROD et Madame [Y] » et qu'à ce titre, « le versement d'un salaire (') étant justifié, aucune faute ne peut être reprochée aux défendeurs de ce chef » (Jugement, page 5).

- « Madame [Y] a payé la somme de 5.000 euros pour acquérir le véhicule de la société » alors même que « la valeur vénale du véhicule à la date de la vente peut être fixée à la somme de 4.800 euros ». Dès lors, « aucune faute ne peut donc être reprochée aux défendeurs de ce chef » (Jugement, pages 5 et 6).

- « la société CARRE PROD ne démontre pas que Monsieur [R] aurait complètement abandonné la gérance de la société à compter du mois d'août 2011, qu'il ne peut donc lui être reproché de s'être versé la rémunération qui lui était due en sa qualité de gérant pour les mois d'août à novembre 2011 » (Jugement, page 6).

- « le versement de la somme de 2.392 euros entre les mains de maître [Z] ne peut non plus être considéré comme fautif puisqu'il correspond à la rémunération de la prestation effectuée par ce dernier, pour le compte de Monsieur [R] mais également pour celui de la société, dans le cadre de la procédure intentée par Monsieur [T] devant le Tribunal de commerce de Bobigny » (Jugement, page 6).

- « le fait pour Monsieur [R] de s'être attribué une rémunération supplémentaire injustifiée, sans y être autorisée par l'assemblée générale des associés, constitue une faute de gestion de nature à engager sa responsabilité ; qu'en revanche aucune faute ne peut être reprochée à Madame [Y] de ce chef » (Jugement, page 6).

- « Monsieur [R] a violé non seulement son obligation de loyauté et de fidélité à l'égard de la société CARRE PROD mais également l'engagement pris, dans le cadre du protocole d'accord conclu avec Messieurs [S] et [T] et dont la société CARRE PROD peut se prévaloir même si elle n'est pas partie à cet accord, de ne pas travailler directement ou indirectement, pendant une durée de six mois, pour tout client de la société CARRE PROD et notamment pour KFC » (Jugement, page 6).

- « la société CARRE PROD ne démontre pas avoir subi une perte de chiffre d'affaires, une atteinte à son image ou des pénalités de retard en raison de la concurrence déloyale à laquelle Monsieur [R] s'est livré ; (') qu'aucun élément ne permet par ailleurs d'imputer la situation financière difficile de la société à la concurrence déloyale de Monsieur [R] ; qu'il n'est même pas établi que ce dernier a réussi à détourner une partie de la clientèle et que la société CARRE PROD a perdu, de ce fait, des commandes ; que la société demanderesse ne démontre pas non plus qu'elle aurait versé à son nouveau gérant, en contrepartie du temps passé pour reconstituer la facturation et la comptabilité de la société, une rémunération supplémentaire de 8.000 euros » (Jugement, page 7).

La société CARRE PROD a interjeté appel de cette décision.

***

La société CARRE PROD demande à la Cour de :

- infirmer le jugement sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [R] à rembourser les sommes de 4.900 euros correspondant aux versements indus e 3.000 euros correspondant au paiement de la clause de non concurrence.

Statuant à nouveau pour le surplus :

- condamner solidairement Madame [G] [Y] et Monsieur [H] [R] d'avoir à lui verser la somme de 76.565,92 euros correspondant au montant du préjudice commercial et financier ;

- le condamner en outre à lui verser la somme de 80.500 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice commercial financier et moral subi du fait de ses agissements ;

- les condamner à verser à Carré Prod une somme de 6.000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

- les condamner aux entiers dépens de l'instance.

Sur les détournements

La société CARRE PROD soutient que la réalité des détournements commis par Monsieur [R] et Madame [Y] est basée sur les pièces suivantes :

- les deux fiches de paye frauduleusement établies au bénéfice de Madame [Y] pour un montant total brut de 14.521,52 euros qui ne correspondent à aucun emploi effectif, la copie des chèques adressées à cette dernière et l'attestation de l'expert comptable (pièces n°16-17&21)

- les chèques sans aucune justification établis à l'ordre de Madame [Y] pour un montant de 5.832 euros (pièce n°20),

- la copie de la déclaration de cession du véhicule SCENIC de la société à Madame [Y](pièce n°18)

- le protocole transactionnel signé en fraude des droits de Carré Prod le 29novembre2011, sur la base de déclarations mensongères de Monsieur [R](pièce n°12)

- les chèques injustifiés établis à l'ordre de Monsieur [R] et de son avocat pour un montant de 7.292 euros (pièce n°26)

Elle considère ainsi que son préjudice est à ce jour de :

- 20.521, 52 euros, correspondant aux sommes versées frauduleusement à Madame [Y] ;

- 11.250 euros, correspondant à la valeur du véhicule SCENIC de la société;

- 3.000 euros, correspondant au montant de la transaction dolosive;

- 10.069,24 euros, correspondant aux salaires perçus par Monsieur [R] au titre des mois de septembre, octobre et novembre 2011, alors qu' il ne travaillait plus pour Carré Prod et avait crée une société dénommée CARRE PROD France, destinée à encaisser frauduleusement les chèques destinés à Carré Prod et à détourner la clientèle de celle- ci en utilisant la confusion crée dans l'esprit des clients par la similarité des deux noms;(pièces n°23-24&25)

- 7.292 euros correspondant aux remboursements de frais indus à Monsieur [R] et aux honoraires de son avocat.(pièce n°26)

soit un total de 54.518,90 euros.

Et la société Carré Prod Certes a certes déposé une plainte pénale mais elle ne peut attendre la fin de l'enquête pénale, toujours en cours, afin de solliciter et d'obtenir l'indemnisation de son entier préjudice.

Elle ajoute, s'agissant de Madame [Y], qu'elle n'a pu ignorer qu'elle bénéficiait, grâce à son concubin, de sommes indument perçues et que sa responsabilité doit être retenue sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, puisqu'elle n'est pas liée à Carré Prod par un contrat.

Mais il convient que la condamnation soit solidaire.

Sur les autres préjudices

La société CARRE PROD invoque d'autres préjudices nés des agissements de Monsieur [R] et de sa compagne lesquels se décomposent en:

1 ' un préjudice financier d'un montant de13.747euros TTC, relatifs :

- à hauteur de 10.240 euros HT, soit encore 12.247 euros TTC pour les honoraires d'avocat ayant dus être assumés,

- à hauteur de 1.500 euros relatifs aux frais d'huissiers.

2 ' un préjudice financier évalué à un montant de 8.000 euros, du fait du temps passé par le gérant pour tenter de reconstituer la facturation et la comptabilité de la société et tracer les détournements de fonds commis par Monsieur [R] avec la complicité de sa compagne (30 heures de travail moyennant un taux horaire de 250 euros de l'heure, prix habituellement pratiqué par un expert comptable parisien).

Soit une somme de 76.265,90 euros

Ces deux préjudices sont imputés à Monsieur [R] uniquement.

3 ' un préjudice financier d'un montant de 50.000 euros, correspondant à la perte de chiffre d'affaires et de clients résultant de l'abandon par Monsieur [R] à compter du mois d'août 2011 de ses fonctions de gérant et de son refus d'honorer les nouvelles commandes lui ayant été adressées par les clients de Carré Prod.

4 ' un préjudice financier d'un montant de 5.500 euros, correspondant aux pénalités de retard et agios qui ont dus être assumés par la société Carré Prod tant auprès de ses fournisseurs que de ses banques du fait de l'absence de paiement par Monsieur [R], alors qu'il était gérant et le seul à disposer en cette qualité de la signature bancaire de la société des factures de celle-ci.

5 ' un préjudice d'atteinte à l'image et à la réputation de Carré Prod auprès de ses clients, fournisseurs et même de son bailleur évalué à un montant de 25.000 euros.

Enfin la société Carré Prod sollicite que Monsieur [R] et Madame [Y] soient condamnés à lui verser une somme de 6.000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

*

Monsieur [H] [R] et Madame [G] [Y] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 2 août 2013 (RG n°12/02679) par le Tribunal de Grande Instance de Créteil en ce qu'il a :

- Condamné Monsieur [H] [R] à payer à la société CARRE PROD la somme de 7.900 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Condamné Monsieur [H] [R] à payer à la société CARRE PROD la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Rejeté la demande de Madame [G] [Y] et de Monsieur [H] [R] visant à la condamnation de la société CARRE PROD à leur verser à chacun la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des procédures abusives menées à leur encontre ;

Statuant à nouveau sur ces chefs de demande :

- débouter la société CARRE PROD de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Monsieur [H] [R] et de Madame [G] [Y] ;

- juger, en revanche, que la société CARRE PROD a exercé, à l'encontre de Madame [G] [Y] et de Monsieur [H] [R], un véritable harcèlement judiciaire ;

- condamner la société CARRE PROD à verser à chacun des Intimés la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des procédures abusives menées à leur encontre

Pour le surplus :

confirmer le jugement rendu le 2 août 2013 (RG n°12/02679) par le Tribunal de Grande Instance de Créteil ;

En tout état de cause :

- condamner la société CARRE PROD à verser à chacun des Intimés la somme de

20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société CARRE PROD aux entiers dépens.

Ils soutiennent que :

Sur les détournements

- le reproche relatif à un prétendu refus d'honorer toute nouvelle commande de clients, adressé à Monsieur [R] en sa qualité de gérant de la société, est non seulement contredit par le journal des ventes tenu à jour par Madame [Y] (pièce n°5) et le chiffre d'affaires réalisé par la société à cette époque (pièce n°46) mais, ne repose, de surcroît, sur aucun élément probant. Il sera donc purement et simplement rejeté.

- La société CARRE PROD fait grief à Monsieur [H] [R], en sa qualité de gérant de la société, d'avoir frauduleusement versé à Madame [G] [Y], la somme de 19.509,71 euros à titre de salaires. Le Tribunal de Grande Instance de Créteil l'a débouté de cette prétention au motif qu'« une relation de travail salarié a bien existé entre la société CARRE PROD et Madame [Y] » et qu'à ce titre, « le versement d'un salaire (') étant justifié, aucune faute ne peut être reprochée aux défendeurs de ce chef ».

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Madame [G] [Y] était bien salariée de la société CARRE PROD depuis le 1er avril 2011 et touchait à ce titre un salaire d'environ 1.400 euros nets par mois, établi sur la base d'un taux horaire (pièce n°4), ce qui justifie qu'elle ait reçu la somme de 5.561,86 euros nets pour la période couvrant les mois d'avril à juillet 2011 et 6.792,10 euros pour la période d'aout à novembre 2011; et ces salaires ont d'ailleurs été déclarés par Madame [Y] dans sa déclaration de revenus 2011 (pièce n°49: déclaration de revenus 2011 de Madame [Y]) et sont ainsi naturellement entrés dans l'assiette de calcul de son impôt sur le revenu pour cette année.

- Madame [G] [Y] a bel et bien versé à la société CARRE PROD, par chèque, la somme de 5.000 euros en contrepartie du véhicule Renault Scénic et il a été versé aux débats la copie d'un chèque et un relevé du compte bancaire de la société CARRE PROD desquels il ressort que Madame [Y] a payé la somme de 5.000 euros pour acquérir le véhicule de la société » et le rapport d'expertise produit par la société CARRE PROD n'est pas de nature à remettre en cause cette estimation dès lors que ce rapport a été établi à partir de la seule carte grise, sans que l'expert ait pu examiner le véhicule, et que sa force probante s'en trouve en conséquence particulièrement altérée

- si le Tribunal de Grande Instance de Créteil, aux termes du jugement qu'il conviendra d'infirmer sur ce point, a considéré que Monsieur [R] se serait livré à des actes de concurrence déloyale et a, ce faisant, violé son obligation de loyauté et de fidélité à l'égard de la société CARRE PROD ainsi que l'engagement pris dans le cadre du protocole d'accord conclu avec Messieurs [T] et [S], la société CARRE PROD tente de bâtir une histoire sur le fondement de pièces totalement sorties de leur contexte et insusceptibles d'établir un quelconque grief à son encontre car :

- la société CPF dont le siège opérationnel est à [Localité 4] a pour représentant légal Madame [Y],

- les sociétés CARRE PROD et CPF n'ont pas la même activité, cette dernière ayant une activité de conseil pour les affaires et autres conseils de gestion (code APE 7022Z), tandis que la première intervient en matière d' « impression numérique, création et pose d'enseignes, création de concept, décoration, pose et dépose de matériels liées à la mise en avant de divers produits » (code APE 1813Z),

- la société CARRE PROD n'étant qu'imprimeur, elle ne détient aucun droit sur les logos utilisés et constatés aux termes du procès-verbal de constat de Maître [I].

Et en tout état de cause, la société CARRE PROD n'établit aucunement avoir subi de préjudice faisant état que d'une « tentative de détournement »

- si la société CARRE PROD fait grief à Monsieur [H] [R] d'avoir indûment perçu des sommes à titre de salaires pour les mois de septembre, octobre et novembre 2011 pour un montant de 10.069,24 euros et de s'être également indûment octroyé la somme de 7.292 euros en remboursement de frais professionnels divers, il rappelle être logiquement demeuré salarié de la société CARRE PROD jusqu'au 29 novembre 2011, date de sa démission; et deux salariés étant alors en arrêt maladie (pièce n°9), le chiffre d'affaires de la société entre le 1er juillet 2011 et le 31 octobre 2011 ressort à 274.201,27 euros toutes taxes comprises (pièce n°46 : journal des ventes et chiffre d'affaires de CARRE PROD entre le 1er juillet 2011 et le 31 octobre 2011) à comparer avec le chiffre d'affaires entre le 1er juillet 2010 et le 31 octobre 2010 se montant à 189.825,74 euros toutes taxes comprises (pièce n°47 : journal des ventes et chiffre d'affaires de CARRE PROD entre le 1er juillet 2010 et le 31 octobre 2010), il ne peut donc sérieusement être argué de son absence à son poste durant les trois mois ayant précédé sa démission.

Au surplus, il a d'ailleurs déclaré l'intégralité des salaires lui ayant été réglés par la société CARRE PROD en sa qualité de salarié, ce qui a été pris en compte par l'administration fiscale afin de déterminer son impôt sur les revenus de l'année 2011.

Sur les autres préjudices réclamés par la société CARRE PROD,

- les frais d'avocats et d'huissiers ont, en très grande partie, été réellement supportés par Monsieur [T] et la société LBF Créa agissant à l'encontre de la société CARRE PROD, et non par la société CARRE PROD elle-même qui ne saurait dès lors se prévaloir de frais engagés par ses actionnaires en leur nom propre.

- les frais pour reconstituer la facturation et la comptabilité de la société ne reposent sur aucun élément et aucune justification n'est apportée sur le taux horaire et le temps passé, ni d'ailleurs l'absence de tenue de la comptabilité de la société.

- la perte de chiffres d'affaires et de clients à compter du mois d'août 2011 n'est démontrée par aucun élément pas plus que le lien de causalité avec le mandat de Monsieur [R],

- les pénalités de retard et agios assumés par la société CARRE PROD auprès de ses fournisseurs et de ses banques ne sont pas justifiés ni le lien de causalité avec Monsieur [R] ;

- le préjudice d'atteinte à l'image et à la réputation auprès des clients, fournisseurs et bailleur n'est pas justifié.

Sur les dommages intérêts pour procédure abusive et l'article 700 du code de procédure civile :

Les intimés écrivent que :

«'Outre le présent appel devant la Cour d'une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de Créteil au fond, la société CARRE PROD n'ayant pas hésité à déposer une plainte entre les mains de Monsieur le Procureur de la République de Créteil et à faire pratiquer deux saisies conservatoires au préjudice de Monsieur [H] [R] et Madame [G] [Y], alors même, selon les propres termes du Juge de l'exécution, qu'elle ne disposait pas d'une créance fondée en son principe,

Ainsi, alors même que CARRE PROD ne détient aucune créance à l'encontre des intimés et que le travail de Monsieur [R] s'est, notamment, traduit par une hausse du chiffre d'affaires de la société dans une conjoncture économique des plus difficiles, CARRE PROD n'hésite pas, depuis la signature du protocole transactionnel, à harceler les intimés en représailles de la gestion indépendante des intérêts de la famille [T] menée par l'ancien gérant.

A ce titre, il est manifeste que la société CARRE PROD s'évertue, par le biais de moyens dilatoires, à faire durer la procédure d'abord devant le Tribunal de Grande Instance de Créteil puis devant le Cour d'appel de céans dans l'espoir d'épuiser, tant moralement que financièrement, les Intimés. C'est ainsi qu'elle a attendu le dernier moment (26 novembre 2012 à 16h56 pour une audience de clôture le 27 novembre 2012 à 9h00) pour conclure en réplique aux conclusions en réponse de Monsieur [R] et de Madame [Y] ne produisant, à l'appui de ses écritures, que des pièces'd'ores et déjà versées dans le cadre de la procédure devant le Juge de l'exécution'».

Ils ajoutent que «'la répétition des contrevérités de la société CARRE PROD pour faire valoir une apparence de créance devant le Juge de l'exécution et le maintien de ces contrevérités devant le Tribunal de Grande Instance de Créteil puis devant la présente Cour sont caractéristiques de la mauvaise foi avec laquelle agit CARRE PROD'», d'autant que «'Monsieur [R] et Madame [Y] avaient leurs comptes encore bloqués du fait des saisies conservatoires pratiquées abusivement'».

«'Au vu des mensonges répétés et grossiers de la société CARRE PROD, la Cour ne pourra qu'être convaincue que la forfaiture et la mauvaise foi ne sont pas à trouver dans le camp de Monsieur [R] et de Madame [G] [Y]'».

«'Dans ces conditions, il est incontestable que CARRE PROD a fait dégénérer en abus son droit d'ester en justice. Cet abus a causé un préjudice à Madame [Y] et à Monsieur [R] en les soumettant "aux tracas et inconvénients d'une instance judiciaire" (CA Paris, 2 juillet 1999, Bull. Joly Sociétés 1999, n°11, p. 1099), abus renouvelé l'appel interjeté et initié par les saisies conservatoires réalisées par le Demandeur et en les empêchant de pleinement se concentrer, dans un contexte économique difficile, sur la seule poursuite de leur activité professionnelle'».

«'Cette action a également causé un préjudice moral à Madame [Y] et à Monsieur [R] puisqu'elle vise à remettre en cause leur probité et leur honneur. Cette mise en cause est d'autant plus douloureuse qu'elle est initiée alors que ces derniers se sont pleinement investis dans CARRE PROD afin de lui permettre d'obtenir de meilleurs résultats commerciaux en période de crise'».

«'En conséquence, eu égard au comportement de CARRE PROD, les Intimés sont fondés à solliciter l'infirmation du Jugement entrepris et à demander la condamnation de l'Appelante à leur verser, à chacun, la somme de 30.000 euros en application de l'article 32-1 du Code de procédure civile qui sanctionne « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive ».

En outre, Madame [Y] et à Monsieur [R] exposent qu'ils ont du faire face à des frais irrépétibles afin de faire respecter leurs droits et demandent à la Cour de condamner CARRE PROD à payer à chacun d'eux la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

***

SUR CE,

La cour observe liminairement que:

1 - Monsieur [T] même s'il prétend que son activité principale étant d'être gérant d'un atelier de bijouterie, s'est toujours intéressé à la société CARRE PROD dont il devenait d'ailleurs associé majoritaire dès lors que :

- il a fourni via la société LBF CREA, alors qu'il n'était pas encore associé de la société CARRE PROD' une garantie à première demande au bailleur de la société,

- il a choisi l'expert comptable de la société qui était son cousin,

- il a souhaité confier le soin à sa soeur, Madame [A], de veiller au respect de ses droits d'associé et d'être sa représentante vis à vis de la gérance et des autres associés de la société en lui donnant une «'délégation de (tels) pouvoirs'» en expliquant la chose par le fait qu'elle exerçait son activité professionnelle dans les locaux de la société Carré Prod en sa qualité de salariée de la société LBF CREA, sous-locataire de la société Carré Prod, dont il est le gérant.

- Monsieur [R] produit divers courriels montrant son implication dans la société CARRE PROD même s'il ne démontre pas «'une véritable et incontestable gestion de fait de Madame [A] (pièce n°12, 13 et 44), comme le courriel du 28 octobre 2011 où elle explque avoir donné depuis 3 ans des directives de gestion à Monsieur [R]

- elle était convoquée aux réunions d' «associés» (pièce n°14).

2 - dans le cadre du protocole du 29 novembre 2011, Messieurs [S] et [T] acceptaient de renoncer à toutes poursuites tant civiles à l'encontre de Monsieur [R] relatives à la gestion adoptée par celui-ci de la société CARRE PROD et à l'exercice par celui-ci de son contrat de travail et notamment pour des faits allégués portant sur :

- le défaut de convocation et de réunion d'assemblée générale des associés ;

- l'abus de biens sociaux et notamment l'octroi de rémunérations non approuvées par les associés ainsi que le remboursement par celui-ci de frais fictifs;

- le faux et usage de faux;

- les fautes de gestion diverses et tentative de détournement du client de la société KFC,

faits contestés par Monsieur [R].

Monsieur [R] renonçait à son mandat social et à son contrat de travail, cédait pour un euro à Monsieur [T] le nom de domaine CARRE PROD, faisait son affaire personnel de toute réclamation susceptible d'être formulée par sa compagne pour le travail administratif susceptible d'avoir été accompli par celle-ci en ses lieux et place et à garantir la société CARRE PROD de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre judiciairement à la demande de celle-ci, s'engageait contre la somme de 3000 € à ne pas travailler directement ou indirectement pour tout client de la société CARRE PROD et notamment KFC pour une durée de 6 mois à compter du 25 octobre 20011.

3 ' l'assignation est diligentée par la société CARRE PROD, par l'intermédiaire de son gérant, actionnaire et signataire du protocole du 25 octobre 2009 avec l'actionnaire principal, lesquels se ont engagés à renoncer à 'toutes poursuites tant sur le plan civil que pénal à l'encontre de Monsieur [R].'

4 - l'article 9 du Code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et à défaut, la partie n'ayant pas apporté la preuve dont elle avait la charge à l'appui de ses prétentions, ne pourra qu'en être déboutée.

Sur les détournements

La cour observe que les 54.518,90 euros de détournements imputés à Monsieur [R] et Madame [Y] correspondent à des faits antérieurs au protocole d'accord à l'exception de :

- la violation de l'obligation conventionnelle de non-concurrence sur le fondement de laquelle les associés de la société CARRE PROD lui ont versé la somme de 3.000 euros ;

- la perception indue de sommes à titre de salaires pour les mois de septembre, octobre et novembre 2011 pour un montant total de 10.069,24 euros,

- l'octroi indu de la somme de 7.292 euros en remboursement de frais professionnels divers.

D'ailleurs, si l'appelant soutient qu'ils ont été découvert postérieurement à la signature du protocole, il n'est pas contesté qu'ils auraient été commis avant et certains figurent en toutes lettres dans le protocole rappelé plus avant.

S'agissant des détournements antérieurs, la Cour observe que le gérant et associé et le principal associé qui a repris le contrôle de la société à Monsieur [R], ont renoncé à toutes poursuites tant sur le plan civil que pénal à l'encontre de celui-ci.

L'article 7.2 du protocole prévoit que: ' en raison du caractère absolument défintitif qu'elles entendent donner au présent accord, les parties déclarent expressément qu'il est de leur intention que cet accord constitue une transaction aux termes des articles 2044 et suivants du code civil de sorte qu'il aura entre les parties l'autorité de chose jugée en dernier ressort et qu'il ne pourra être remis en cause par l'une ou l'autre des parties pour quelque motif que ce soit et notamment pour erreur de fait ou de droit.'

Le protocole ajoute que les parties s'engagent à l'exécuter de bonne foi et que Monsieur [R] a cédé ses parts le 29 novembre 2011, démissionné de son mandat social et de son contrat de travail.

Elle considère que les dispositions du protocole engagent les deux actionnaires de la société CARRE PROD et son gérant, tous signataires, à titre personnel, ainsi que la société CARRE PROD dès lors que non seulement le protocole concerne directement la société mais encore :

- il porte des engagements pris pour elle,

- les intervenants à ce contrat sont l'ancien et le nouveau gérant et donc ses représentants légaux et les détenteurs de 100 % de son capital qui, en l'occurrence, s'exprimaient pour elle puisqu'il transigeaient sur ses droits dès lors qu'elle était la victime des faits (gestion adoptée par celui-ci (Monsieur [R]) de la société CARRE PROD et à l'exercice par celui-ci de son contrat de travail (au sein de la société) - abus de biens sociaux - fautes de gestion diverses et tentative de détournement du client de la société ' renonciation à engager ou poursuivre des actions en son nom ' adoption d'une clause de non concurrence ' garantie donnée pour la société...).

S'agissant de la mise en cause de Mme [Y], vraie ou faux salarié, sur la base de l'article 1382 du code civil, au-delà du fait qu'une juridiction a déjà souligné qu'il n'est pas rapporté la preuve qu'il se soit agi d'un salarié fictif, la cour considère que celle-ci n'est pas envisageable puisque :

- soit elle est salariée et il s'agit d'une faute justifiant un licenciement qui n'a pas été mis en 'uvre et/ou une infraction pénale de complicité ou recel d'abus de biens sociaux commis par le gérant, faits apparemment dénoncés mais restés sans suite et n'intéressant pas la procédure actuelle,

- soit elle n'est pas salariée et elle ne saurait être attraite que sur une répétition de l'indu ou une plainte pénale dans les termes rappelés dans le précédent paragraphe.

S'agissant de la concurrence déloyale, des salaires et frais indus, la cour considère que les premiers juges ont parfaitement répondu aux arguments développés et motivé leur décision et la confirmera.

Sur les autres préjudices

La cour observent que leur existence n'est non seulement pas établis mais que le lien de causalité avec les fautes reprochées ne l'est pas davantage.

Sur la demande de dommages intérêts des intimés pour procédure abusive

La cour y fera droit considérant que si l'existence de multiples procédures parallèles initiées contre les intimés par l'appelant ne justifie pas la demande, l'engagement de l'assignation à leur encontre et de l'appel sur une décision particulièrement motivée démontrent une forme d'acharnement alors qu'ils interviennent au terme pourtant d'un protocole d'accord passé entre les parties intéressées au sens économique du terme et ayant pour objet de permettre à la société CARRE PROD, partie utilisée pour agir, de poursuivre ses activités malgré une dissension entre associés conduisant inéluctablement à sa déconfiture et au blocage de son fonctionnement.

Et cette faute est bien en lien avec le dommages subis, lesquels ne se limitent pas au frais de procédures engagées par les intimés, la cour arrêtant le préjudice en résultant à la somme réclamée de 15 000 € pour chacun.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Au regard de ce qui a été développé avant, il ne sera fait droit qu'aux demandes des intimés.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de CRETEIL en date du 2 août 2013 en ce qu'il a condamné monsieur [H] [R] à payer à la société à responsabilité limitée CARRE PROD la somme de 7 900 euros à titre de dommages et intérêts ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Constate l'autorité de chose jugée de la transaction résultant du protocole d'accord signé entre les parties le 29 novembre 2011,

Condamne la société CARRE PROD à verser la somme de 15 000 euros à Madame [G] [Y] et la même somme à Monsieur [H] [R]

Condamne la société CARRE PROD à verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Madame [G] [Y] et la même somme à Monsieur [H] [R],

Condamne la société CARRE PROD aux entiers dépens de l'instance, lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Xavier FLANDIN-BLETY François FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 14/05604
Date de la décision : 20/11/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°14/05604 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-20;14.05604 ?
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