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20/11/2014 | FRANCE | N°14/00824

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 20 novembre 2014, 14/00824


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 20 Novembre 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/00824



Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 21 Octobre 2013 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 13/01555





APPELANTE

Madame [D] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jean-pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B098

2





INTIMEE

PARIS HABITAT - OPH

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Fanny SCHOENEWALD, avocat au barreau de PARIS, toque : J.0061











COMPOSITION DE LA COUR :



En...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 20 Novembre 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/00824

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 21 Octobre 2013 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 13/01555

APPELANTE

Madame [D] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jean-pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B0982

INTIMEE

PARIS HABITAT - OPH

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Fanny SCHOENEWALD, avocat au barreau de PARIS, toque : J.0061

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Nicolas BONNAL, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Nicolas BONNAL, Président

Madame Martine CANTAT, Conseiller

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Nicolas BONNAL, Président et par Madame FOULON, Greffier.

**********

Statuant sur l'appel formé par Mme [D] [E] contre une ordonnance rendue le 21 octobre 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS (formation de référé) qui a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes que l'intéressée avait présentées contre l'office public de l'habitat PARIS HABITAT OPH en paiement, notamment, de sommes à titre de dommages et intérêts et au titre d'heures supplémentaires travaillées entre les mois de mars 2010 et novembre 2012, et a laissé les dépens à la charge de Mme [E]';

Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience du 17 octobre 2014 pour Mme [D] [E], auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelante, qui demande à la cour, infirmant l'ordonnance déférée, de condamner PARIS HABITAT OPH':

- à lui payer les sommes provisionnelles de':

- 29'517 euros à titre de dommages et intérêts,

- 15'464,09 euros au titre d'heures supplémentaires,

- 1'546,41 euros au titre des congés payés correspondants,

- 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- aux dépens';

Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience pour PARIS HABITAT OPH, auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'intimé, qui demande à la cour de':

à titre principal,

- dire prescrite toute demande en paiement d'heures supplémentaires antérieures au 15 juillet 2010,

- dire n'y avoir lieu à référé, faute d'urgence et en raison d'une contestation sérieuse,

à titre subsidiaire,

- rejeter les demandes,

en toute hypothèse,

- rejeter la demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [E] sur ce même fondement à lui payer la somme de 2'000 euros et aux dépens';

SUR CE, LA COUR

Sur les faits constants

Il résulte des débats et des pièces produites que':

- Mme [D] [E] a été engagée, selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 22 février 2010, en qualité de «'chargée de missions droit social et administration du personnel'», par l'établissement public industriel et commercial PARIS HABITAT OPH, qui emploie habituellement onze salariés au moins,

- le contrat de travail précisait que le statut collectif du personnel de cet établissement public était régi par le décret du 17 juin 1993 portant règlement statutaire des personnels ne relevant pas de la fonction publique territoriale employés par les offices publics d'aménagement et de construction et portant modification du code de la construction et de l'habitation, ainsi que par l'accord collectif d'entreprise du 15 décembre 1994 et ses avenants,

- le 30 novembre 2012, Mme [D] [E] a été convoquée à un entretien préalable à une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'à un éventuel licenciement,

- par lettre du 21 décembre 2012, Mme [D] [E] s'est vu notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle avérée, avec dispense d'effectuer la période de préavis,

- après avoir obtenu de son ancien employeur les états individuels d'heures travaillées telles que ressortant du logiciel de pointage utilisé dans l'établissement, Mme [D] [E] a saisi, le 15 juillet 2013, en référé le conseil de prud'hommes de la procédure ayant donné lieu à la décision déférée.

Sur le fondement des demandes

Les demandes, portant uniquement sur le paiement de sommes provisionnelles, seront examinées au regard des dispositions de l'article R'1455-7 du code du travail relatif au conseil de prud'hommes, aux termes duquel, «'dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire'».

Il en résulte que c'est en vain que PARIS HABITAT OPH oppose aux demandes l'absence d'urgence, cette condition, requise pour l'application des seules dispositions de l'article R'1455-5 du même code, ne l'étant pas pour l'octroi d'une provision au créancier.

Sur la demande en dommages et intérêts

Mme [D] [E] fonde sa demande à ce titre sur le fait qu'à défaut pour son employeur de lui avoir laissé la possibilité de bénéficier d'une procédure conventionnelle de licenciement, la mesure prise à son encontre est sans cause réelle et sérieuse.

Elle invoque le non-respect des dispositions de l'article 38 du décret du 8 juin 2011 portant dispositions relatives aux personnels des offices publics de l'habitat, aux termes duquel':

«'Dans chaque office public de l'habitat, un salarié relevant du présent titre [dispositions particulières applicables aux personnels des offices publics de l'habitat qui n'ont pas la qualité d'agent public] peut saisir pour avis une commission disciplinaire de tout projet de sanction à son encontre qui a une incidence, immédiate ou non, sur sa présence dans cet office, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. Toutefois, elle ne peut être saisie d'un projet de mesure conservatoire de mise à pied. La commission se réunit à la demande du salarié, formulée au plus tard un jour franc à compter de la date d'entretien prévu, selon les cas, à l'article L'1232-2 ou à l'article L'1332-2 du code du travail et sur convocation de son président. Les convocations sont transmises huit jours au moins avant la date de la séance. Une convocation est également transmise, par la même autorité et dans les mêmes délais, au salarié concerné.'»

Elle fait grief à son employeur de ne l'avoir pas informée de sa possibilité de demander la réunion de cette commission disciplinaire.

Il résulte des pièces produites que la convocation à l'entretien préalable ne contenait aucune information sur ces dispositions réglementaires. Il n'est pas contesté que la salariée n'en a pas davantage été informée lors du dit entretien.

Or, la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition réglementaire ou conventionnelle, ou du règlement intérieur d'une entreprise, de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond qui oblige l'employeur à informer le salarié du recours dont il dispose, peu important que cette obligation d'information ne soit pas expressément édictée, et peu important la connaissance supposée, par le salarié licencié, des règles de la procédure.

Un licenciement prononcé sans que cette règle ait été observée est sans cause réelle et sérieuse. La créance dont se prévaut à hauteur de six mois de salaires Mme [D] [E], qui avait plus de deux années d'ancienneté dans l'entreprise, et ce en application des dispositions des articles L'1235-3 et L'1235-5 du code du travail, ne se heurte donc à aucune contestation sérieuse, à hauteur du moins de la somme de 29'138,22 euros, dès lors qu'il résulte des bulletins de paie produits aux débats que le salaire brut mensuel de l'intéressée au cours des six derniers mois s'élevait à 4'856,37 euros.

L'ordonnance déférée sera infirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur cette demande, et PARIS HABITAT OPH sera condamné à payer la somme provisionnelle de 29'138,22 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les heures supplémentaires

Il résulte des pièces produites, et notamment de l'avenant du 26 juin 1998 à l'accord d'entreprise, dont les termes ont été repris dans le contrat de travail, que l'horaire journalier au sein de PARIS HABITAT OPH est fixé à 7 heures et 33 minutes, et le temps de travail effectif sur une semaine de cinq jours travaillés à 37 heures et 45 minutes, diminué des jours de repos accordés au titre de la réduction du temps de travail.

L'article L'3245-1 du code du travail relatif à la prescription de l'action en paiement du salaire disposant que «'la demande peut porter [...] lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat de travail'», c'est en vain que PARIS HABITAT OPH oppose une fin de non-recevoir tirée de la prescription pour les demandes portant sur une période antérieure au 15 juillet 2010.

Aux termes de l'article L'3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié'; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles, de telles mesures ne pouvant toutefois être ordonnées par le juge des référés.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Au cas présent, la salariée produit les états individuels d'heures travaillées la concernant, telles qu'elles résultent du logiciel de pointage mis en place par son employeur, états qui lui ont été transmis par ce dernier à sa demande. Ces documents, établis depuis le 22 février 2010, date de l'arrivée dans l'entreprise de la salariée, jusqu'au 30 novembre 2012, montrent un total de 370 heures supplémentaires, correspondant, selon un calcul qui n'est pas contesté, à un salaire non versé de 15'464,09 euros.

La salariée produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

L'employeur se contente de faire valoir que ces heures supplémentaires n'auraient pas été effectuées à sa demande, que les formulaires de demande de paiement d'heures supplémentaires qui seraient en usage dans l'entreprise n'auraient pas été remplis par la salariée, et que le poste de celle-ci ne nécessitait pas d'heures supplémentaires. Il conteste spécifiquement que Mme [E] aurait pu effectuer des heures supplémentaires au mois d'août 2012 alors que son supérieur était absent et que l'activité était très réduite.

Il n'apporte cependant aucun élément au soutien de cette argumentation, et ne saurait sérieusement contester qu'il avait parfaite connaissance, au travers des états établis par son propre logiciel de pointage, des heures travaillées par sa salariée, qu'il ne lui a fait aucune observation à cet égard, et à plus forte raison ne s'y est pas opposé.

Au vu des éléments produits de part et d'autre, et en cet état de référé, la cour a la conviction que Mme [D] [E] a effectué les heures supplémentaires alléguées, de sorte que la créance dont elle se prévaut à ce titre ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes relatives au paiement des sommes dues au titre des heures supplémentaires. PARIS HABITAT OPH sera, en conséquence, condamné à payer à Mme [D] [E] les sommes provisionnelles de 15'464,09 euros en paiement des heures supplémentaires travaillées et de 1'546,41 euros au titre des congés payés correspondants.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a laissé les dépens à la charge de Mme [E].

PARIS HABITAT OPH sera condamné aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Mme [D] [E] la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés dans le cours de la procédure.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions';

Statuant à nouveau,

Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'acquisition de la prescription pour la période antérieure au 15 juillet 2010';

Condamne PARIS HABITAT OPH à payer à Mme [D] [E] les sommes provisionnelles de':

- 29'138,22 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 15'464,09 euros au titre des heures supplémentaires non payées du mois de février 2010 au mois de novembre 2012,

- 1'546,41 euros au titre des congés payés correspondants';

Condamne PARIS HABITAT OPH à payer à Mme [D] [E] la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne PARIS HABITAT OPH aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/00824
Date de la décision : 20/11/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°14/00824 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-20;14.00824 ?
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