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13/11/2014 | FRANCE | N°13/06856

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 13 novembre 2014, 13/06856


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 13 NOVEMBRE 2014



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/06856



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2013 - Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 12/05273





APPELANTE



SARL AEROBAG

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Pascal GEOFFRION

de la SELARL DGM & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0027, avocat postulant

Représentée par Me Laure ARNAIL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0027, avocat plaidant







INTIMEE

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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 13 NOVEMBRE 2014

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/06856

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2013 - Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 12/05273

APPELANTE

SARL AEROBAG

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Pascal GEOFFRION de la SELARL DGM & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0027, avocat postulant

Représentée par Me Laure ARNAIL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0027, avocat plaidant

INTIMEE

UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AEROPORT DE PARIS

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675, avocat postulant

Représentée par Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 octobre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Nicolas BONNAL, Président

Madame Martine CANTAT, Conseiller

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Nicolas BONNAL, Président et par Madame FOULON, Greffier .

**********

Statuant sur l'appel formé par la société AEROBAG contre un jugement rendu le 14 mars 2013 par le tribunal de grande instance de MEAUX qui, saisi par l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, a':

- déclaré irrecevable la demande relative aux heures supplémentaires prévues par l'article 15 de la convention collective de la manutention et nettoyage sur les aéroports de la région parisienne,

- dit que la société AEROBAG doit, depuis le 1er juin 2011, procéder au décompte des congés payés en jours ouvrables (souligné dans la décision) conformément au code du travail, dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par infraction et salarié courant pendant une durée de 24 mois, astreinte dont le tribunal s'est réservé la liquidation,

- dit que la répartition du temps de travail sur une période de quatre semaines à l'initiative de l'employeur n'a pas valablement été mise en 'uvre à compter du 21 février 2011,

- ordonné en conséquence à la société AEROBAG, tant qu'elle n'aura pas obtenu l'accord individuel des salariés ou tant qu'elle n'aura pas signé d'accord collectif, d'organiser le temps de travail de ses salariés sur la semaine (souligné dans la décision) civile et ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par infraction et par salarié commençant à courir deux mois après la signification du jugement et pendant une durée de six mois, astreinte dont le tribunal s'est réservé la liquidation,

- dit que la société AEROBAG est tenue de rémunérer les salariés ayant travaillé le dimanche 1er mai 2011, conformément à son engagement du 19 mars 2008, et de leur régler une prime d'une valeur de sept heures, la prime de jour férié attachée à cette journée et la prime de dimanche,

- rejeté la demande de dommages et intérêts formée par l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS,

- condamné la société AEROBAG aux dépens et à payer à l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS la somme de 3'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les demandes plus amples ou contraires';

Vu les dernières conclusions transmises à la cour le 4 juillet 2013 par la société AEROBAG, auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelante, qui demande à la cour de':

- confirmer le jugement sur l'irrecevabilité de la demande d'interprétation de l'article 15 de la convention collective de la manutention et du nettoyage sur les aéroports,

- infirmer le jugement en ses autres dispositions,

- dire que la demande de versement au profit des salariés des indemnités relatives au 1er mai 2011 est irrecevable,

- rejeter l'ensemble des demandes de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS,

- condamner cette dernière à lui payer la somme de 1'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, avec distraction au profit de son avocat';

Vu les dernières conclusions transmises à la cour le 24 septembre 2013 par l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'intimée, également appelante à titre incident, qui demande à la cour de':

- infirmer le jugement et dire que les heures supplémentaires visées à l'article 15 de la convention collective de la manutention et du nettoyage sur les aéroports de la région parisienne (dispositions spécifiques aux ouvriers effectuant des travaux de manutention) doivent s'entendre de toute heure supplémentaire réalisée par un salarié alors qu'elle n'était pas prévue sur son planning de travail,

- ordonner à la société AEROBAG de se conformer à cette interprétation sous astreinte de 15'000 euros par infraction constatée et par salarié,

- condamner la société AEROBAG à lui payer la somme de 5'000 euros à titre de dommages et intérêts compensatoires du préjudice porté à l'intérêt collectif des salariés,

- confirmer le jugement déféré en ses autres dispositions,

- condamner la société AEROBAG à lui payer la somme de 3'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction en application des dispositions de l'article 699 du même code';

SUR CE, LA COUR

Sur les faits constants

Il résulte des débats et des pièces produites que':

- la société KEOLIS, qui l'a sous-traité à sa filiale, la société AEROBAG, s'est vu attribuer à compter du 1er février 2014, le marché du chargement et du déchargement des bagages des passagers empruntant les autocars de la société AIR FRANCE assurant la liaison entre [Localité 3] et les aéroports d'[1] et de [2],

- ce marché était précédemment attribué à la société CARBAG qui appliquait la convention collective régionale concernant le personnel de l'industrie, de la manutention et du nettoyage sur les aéroports ouverts à la circulation publique,

- les 76 salariés concernés ont été repris par la société AEROBAG,

- la société AEROBAG a consulté son comité d'entreprise sur sa volonté de dénoncer plusieurs usages, y compris celui relatif au décompte des jours de congés payés uniquement sur les jours de travail prévus au planning, lors de la réunion du 4 février 2010,

- ce projet ayant suscité des oppositions, marquées par des arrêts de travail et l'engagement d'une procédure judiciaire, la société AEROBAG a informé le comité d'entreprise, lors d'une réunion du 8 septembre 2010, qu'elle suspendait la procédure de dénonciation des usages,

- elle a repris cette procédure et a informé et consulté le comité d'entreprise lors d'une nouvelle réunion du 26 janvier 2011 sur sa «'décision de suppression de l'usage concernant les décomptes et les modalités de prises des congés'» et l'a informé «'sur la date de mise en place des décomptes de temps sur 4 semaines'»,

- la société AEROBAG a également informé le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la dénonciation de l'usage sur le décompte des congés payés lors d'une réunion du 25 février 2011,

- elle a informé individuellement les salariés, par lettres du 25 février 2011, de la suppression, au 1er juin 2011, de l'usage «'consistant à décompter les congés payés des salariés uniquement sur les jours de travail prévus au planning'», qui avait «'pour incidence d'octroyer plus de 5 semaines de congés aux salariés'», dès lors que ceux-ci «'travaillent en moyenne moins de 5 jours par semaine compte tenu de leur roulement'», et du fait que, dorénavant, «'les congés payés seront strictement décomptés en fonction des dispositions légales, à savoir 5 jours ouvrés par semaine de congé (quel que soit le nombre de jours de travail prévus au planning, soit au total 5 semaines de congés pour une année pleine d'acquisition'»,

- ont été également évoquées entre le syndicat et la société les questions de la rémunération du dimanche 1er mai 2011 et du paiement des heures supplémentaires en violation de l'article 15 de la convention collective (en fait de son annexe I, concernant les «'dispositions particulières aux ouvriers effectuant des travaux de manutention'»), ainsi qu'il résulte notamment d'un courrier adressé le 4 août 2011 par l'inspection du travail à la société,

- le 21 novembre 2012, l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS a engagé devant le tribunal de grande instance de MEAUX, selon la procédure à jour fixe, l'action qui a donné lieu à la décision déférée.

Sur la recevabilité de l'action relativement aux heures supplémentaires

L'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS soutient, comme elle l'a fait devant les premiers juges, que la société AEROBAG ne respecte pas les stipulations de l'article 15 («'majorations pour heures supplémentaires exceptionnelles'») de l'annexe I («'dispositions particulières aux ouvriers effectuant des travaux de manutention'») de la convention collective concernant le personnel de l'industrie, de la manutention et du nettoyage sur les aéroports ouverts à la circulation publique, article ainsi rédigé': «'les heures supplémentaires effectuées exceptionnellement au-delà de l'horaire habituel de travail, par le personnel des catégories 1 à 8 du barème «'Travaux de manutention'» définies à l'article 8-II ci-dessus, sont majorées de 100 p. 100'».

L'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS fait grief, à cet égard, à la société AEROBAG de n'appliquer cette majoration qu'aux heures supplémentaires prévues sur les plannings des salariés, alors que, selon elle, cette majoration doit également concerner les heures supplémentaires que sont amenés à effectuer les salariés alors qu'elles ne figuraient pas sur leur planning de travail initial et n'étaient donc pas incluses dans leur planning habituel.

Comme l'ont à bon droit retenu les premiers juges, les parties diffèrent donc sur l'interprétation de cette stipulation de la convention collective.

C'est dans ces conditions à juste titre que la société AEROBAG oppose aux demandes de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS sur ce point une fin de non-recevoir tirée du non-respect des stipulations de l'article 40 de la convention collective, qui institue une commission régionale de conciliation, et prévoit que, en matière d'«'application de la convention et différends collectifs'», «'cette commission doit être obligatoirement saisie de tout différend collectif survenu sur un point quelconque du territoire mettant en cause l'application d'une ou plusieurs dispositions de la présente convention'» et qu'«'elle a seule qualité pour préciser le sens et la portée des dispositions contestées'».

Il n'est pas contesté que cette commission n'a pas été saisie.

La convention collective a ainsi organisé une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont le non-respect constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge, dès lors qu'elle est soulevée.

Les premiers juges ont à bon droit retenu cette fin de non-recevoir, à l'encontre de laquelle l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS ne développe aucune argumentation devant la cour.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS irrecevable en ses demandes relatives à l'application de l'article 15 de l'annexe I de la convention collective.

Sur le décompte des congés payés

Il n'est plus contesté devant la cour que la société AEROBAG a régulièrement dénoncé à effet du 1er juin 2011, ainsi que l'avaient à bon droit retenu les premiers juges, l'usage antérieurement institué dans l'entreprise, qui consistait à décompter les congés payés uniquement sur les jours de travail prévus au planning.

Il n'est pas davantage contesté qu'aucun accord collectif n'est intervenu sur ce point postérieurement à la dénonciation, de sorte que les règles fixées par le code du travail doivent s'appliquer.

C'est cependant en vain, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, que l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, qui soutient que le système mis en place par la société depuis la dénonciation est illicite, en déduit que cette dénonciation est ainsi privée d'effet, et demande, dans les motifs de ses conclusions, le retour à l'usage qui avait été néanmoins régulièrement dénoncé.

L'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, tout en développant cette argumentation, sollicite en fait seulement, dans le dispositif de ses écritures, la confirmation du jugement, lequel a, ainsi qu'il a été rappelé, dit que la société devrait procéder, à compter du 1er juin 2011, au décompte des congés payés conformément au code du travail, en jours ouvrables.

La société AEROBAG, qui soutient que le décompte en jours ouvrés, auquel elle procède unilatéralement depuis la dénonciation, est licite, demande pour sa part l'infirmation du jugement sur ce point.

Il doit donc être rappelé que l'article L'3141-3 du code du travail dispose que «'le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur'», de sorte qu'il institue un décompte des congés payés en jours ouvrables, étant rappelé que sont réputées ouvrables toutes les journées de la semaine, même non effectivement travaillées, à l'exception de celles qui sont consacrées au repos hebdomadaire (généralement le dimanche) et à l'exception des jours reconnus fériés par la loi et habituellement chômés dans l'entreprise.

L'employeur peut décider unilatéralement de décompter les congés payés en jours ouvrés, sans que les salariés ne puissent s'y opposer, mais à la condition qu'un tel décompte n'aboutisse pas à un résultat moins favorable que s'il avait été effectué en jours ouvrables.

Lorsque les congés sont décomptés en jours ouvrables, la durée des congés acquis est indépendante tant de la durée du travail prévue au contrat de travail que des rythmes et des modes d'organisation du travail. Lorsqu'au contraire, les congés sont décomptés en jours ouvrés, c'est concrètement, en tenant compte des rythmes et modes d'organisation du travail, qu'il convient de s'assurer que ce mode de calcul est au moins aussi favorable pour les salariés concernés que celui en jours ouvrables.

Contrairement à ce que soutient la société AEROBAG, qui reproche à l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS de ne pas démontrer que le mode de calcul qu'elle a adopté serait défavorable au salarié, c'est à l'employeur qui a choisi de recourir à un décompte en jours ouvrés, malgré les dispositions de l'article L'3141-3 susvisé, qu'il incombe d'établir que les salariés bénéficient au moins du nombre de jours ouvrables auxquels ils ont droit en application de ce texte.

La société AEROBAG manque à apporter cette démonstration, qui admet qu'elle décompte cinq jours ouvrés par semaine de congé, quel que soit le nombre de jours prévus au planning. Elle ne réplique pas davantage à l'argumentation de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS qui fait valoir que la règle, qui découle des dispositions susvisées, selon laquelle le point de départ du congé payé est le premier jour où le salarié aurait dû travailler, n'est pas respectée par la société lorsqu'elle décompte les congés payés en jours ouvrés.

Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné à la société AEROBAG de procéder, depuis le 1er juin 2011, au décompte des congés payés en jours ouvrables, sous astreinte, les conditions de celle-ci étant précisées dans le dispositif du présent arrêt.

Sur le décompte du temps de travail par périodes de quatre semaines

Les premiers juges ont exactement relevé que':

- la société AEROBAG, au sein de laquelle le travail est organisé en continu, les salariés travaillant du lundi au dimanche, a mis en place par décision unilatérale, sans qu'aucun accord collectif n'ait été conclu en ce sens, une organisation de la durée du travail sous forme de périodes de travail d'une durée de quatre semaines, dans les termes des articles L'3122-3 et D'3122-7-1 du code du travail,

- cette organisation pluri-hebdomadaire conduit, ainsi qu'il résulte des articles D'3122-7-2 et D'3122-7-3, à un décompte des heures supplémentaires moins favorable au salarié, dont les conséquences concrètes pour les intéressés, au sein de la société AEROBAG, ne sont l'objet d'aucune contestation,

- à défaut d'accord collectif, et ainsi qu'il résulte de l'article L'3122-6 du code du travail, la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié,

- les contrats de travail des salariés ne comportent aucune clause acceptant expressément une répartition des horaires sur une période de quatre semaines.

C'est donc à bon droit et par des motifs pertinents, qui ne sont pas utilement critiqués par la société AEROBAG au soutien de son appel et que la cour adopte, que les premiers juges en ont déduit que que l'organisation du temps de travail sous forme de périodes de travail d'une durée de quatre semaines n'a pas été valablement décidée ni mise en place par l'employeur, et ont ordonné à la société d'organiser le temps de travail de ses salariés conformément aux dispositions de l'article L'3121-10 du code du travail, sur la base de la semaine civile, sous astreinte.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point, les modalités de l'astreinte étant précisées au dispositif du présent arrêt.

Sur le 1er mai 2011

La société AEROBAG demande d'abord l'infirmation du jugement en ce qu'il a estimé recevable la demande de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS relative au paiement de la journée du dimanche 1er mai 2011.

L'article L'2132-3 du code du travail autorise les syndicats professionnels à exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent. Ces organisations ne peuvent en revanche agir, en application de ce texte, pour faire reconnaître des droits qui sont exclusivement attachés à la personne de salariés déterminés.

Au cas présent, l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS agit pour faire respecter un engagement unilatéral de l'employeur s'agissant des modalités de paiement d'un jour férié. Le fait que son action, en cas de succès, puisse bénéficier à l'ensemble des salariés, dont l'identité n'est pas connue dans le cadre du présent litige mais peut être déterminée et qui ont travaillé la journée considérée et n'auraient pas reçu le salaire que l'employeur s'était engagé à leur verser, n'est pas de nature à faire perdre au manquement reproché à l'employeur son caractère de fait susceptible de porter un préjudice à l'intérêt collectif de la profession.

C'est dans ces conditions à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir opposée par la société AEROBAG à l'action de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

L'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS se prévaut d'une lettre adressée le 19 mars 2008 par le directeur de la société AEROBAG aux délégués syndicaux, qui confirme que «'le 1er mai est bien un jour férié chômé'», que «'tout salarié de l'entreprise bénéficie pour cette journée d'une «'prime de 1er mai'» (journée chômée) d'une valeur de 7 heures'» et que cette prime «'se rajoute pour les agents travaillant ce jour-là':

- à la prime de jour férié attachée à cette journée (journée fériée),

- à une éventuelle prime de dimanche ou de jour férié supplémentaire si le 1er mai tombe l'une de ces journées'».

Le 1er mai 2011 était un dimanche.

Les parties diffèrent, comme elles l'avaient fait en première instance, sur l'interprétation à donner aux bulletins de paie produits aux débats.

Les premiers juges avaient justement relevé que la lecture de ceux-ci, qui mentionnent le paiement de sommes au titre du travail le dimanche, ne permet pas, faute que le planning de travail des salariés considérés pour le mois de mai 2011 ait été produit aux débats, de déterminer si ces sommes correspondent au dimanche 1er mai ou à un ou plusieurs autres dimanches travaillés pendant le mois de mai 2011.

Ils en ont déduit qu'il leur appartenait seulement de rappeler la règle découlant de l'engagement unilatéral de l'employeur, dont il n'est plus contesté devant la cour par la société AEROBAG qu'il n'a pas été dénoncé, et qu'il reviendrait à chaque salarié éventuellement concerné de faire valoir ses droits devant le conseil de prud'hommes.

La société AEROBAG, qui a relevé appel de cette décision, se contente de faire valoir à nouveau l'argumentation soutenue en première instance, sans produire aux débats les éléments, pourtant en sa possession, qui viendraient au soutien de son argumentation aux termes de laquelle la journée du 1er mai a été payée triple pour les salariés qui ont travaillé, de sorte que ceux-ci ont donc été remplis de leurs droits.

Le jugement déféré sera dans ces conditions, ainsi que le sollicite à bon droit l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, confirmé.

Sur la demande en dommages et intérêts

Les atteintes de la société AEROBAG à l'intérêt collectif de la profession représentée par l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, telles qu'elles résultent de ce qui précède, ont causé un préjudice à cette organisation qui sera justement réparé par la condamnation de la société à lui payer la somme de 1'500 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera, en conséquence, infirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a statué sur les frais et dépens de première instance.

La société AEROBAG qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens de la procédure devant la cour, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de l'avocat de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, et à payer à cette dernière la somme de 2'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du même code.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS de sa demande en dommages et intérêts et sauf sur les modalités des astreintes ordonnées';

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que les deux astreintes provisoires distinctes de 100 euros par jour de retard et par salarié, à défaut de respect de la décision ordonnant à la société AEROBAG de décompter les congés payés en jours ouvrables, d'une part, et d'organiser le temps de travail de ses salariés sur la semaine civile tant qu'elle n'aura pas obtenu l'accord individuel des salariés ou signé un accord collectif sur ce point, d'autre part, courront à compter d'un délai de deux mois après la signification du présent arrêt, pendant une durée maximale de six mois, et sans qu'il soit besoin pour la cour de s'en réserver la liquidation';

Condamne la société AEROBAG à payer à l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS la somme de 1'500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession';

Condamne la société AEROBAG à payer à l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS la somme de 2'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la société AEROBAG aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de l'avocat de l'UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE L'AÉROPORT DE PARIS, dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 13/06856
Date de la décision : 13/11/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°13/06856 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-13;13.06856 ?
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