RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 06 Novembre 2014
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/09319
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 juin 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de [Localité 2] RG n° 10/01355
APPELANTE
SARL LEGIO SECURITE
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par M. [D] (gérant) et assisté de Me Rémy BIJAOUI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0253
INTIMEE
URSSAF ILE DE FRANCE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 3]
représentée par Mme [E] en vertu d'un pouvoir spécial
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 1]
[Localité 1]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 septembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Fatima BA, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Marion MELISSON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société Legio Sécurité d'un jugement rendu le 30 juin 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'[Localité 2] dans un litige l'opposant à l'URSSAF de Paris-région parisienne, aux droits de laquelle vient l'URSSAF d'Ile de France ;
Les faits, la procédure, les prétentions des parties :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle inopiné de la société Legio Sécurité, qui exerce une activité de gardiennage et de sécurité, l'URSSAF a relevé que cette société avait sous-traité une partie de son activité à des entreprises non enregistrées auprès de ses services ou non à jour de leurs cotisations de sécurité sociale ; qu'estimant que la société ne s'était pas assurée que ses cocontractants étaient bien en règle au regard de l'article L 324-10 devenu L 8221-3 du code du travail en matière de déclaration sociale, l'URSSAF a s'est prévalue de l'obligation solidaire du donneur d'ordre prévue à l'article L 8222-2 et a réintégré dans l'assiette de cotisations dues par la société Legio Sécurité une partie du chiffre d'affaires réalisé par ses sous-traitants ; que la société a été mise en demeure d'acquitter un supplément de cotisations de 164 973 € au titre de la période du 1er janvier 2004 au 30 septembre 2006 et la somme de 38 063€ représentant les majorations de retard provisoires; que le cotisant a contesté ce redressement devant la commission de recours amiable qui a rejeté sa réclamation ; qu'il a alors saisi la juridiction des affaires de sécurité sociale.
Par jugement du 30 juin 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale d'[Localité 2] a débouté la société Legio Sécurité de ses demandes et l'a condamnée à verser à l'URSSAF 164 793 € en paiement de cotisations dues pour la période du 1er janvier 2004 au 30 septembre 2006 et 38 063€ au titre des majorations de retard.
La société Legio Sécurité fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions tendant à infirmer le jugement, débouter l'URSSAF de l'intégralité de ses demandes et condamner cet organisme à lui payer la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que sur le chantier contrôlé, elle n'avait eu recours en réalité qu'à une seule entreprise sous-traitante, exerçant son activité sous l'enseigne Kodecs, et que les poursuites pénales engagées ont abouti à une décision de relaxe du chef d'infraction relatif au recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé. S'agissant des autres entreprises sous-traitantes auxquelles elle a eu recours au cours de la période contrôlée, elle conteste avoir manqué à son obligation de vigilance puisqu'elle avait obtenu de chacune un extrait Kbis accompagné d'une autorisation préfectorale d'exercice et d'une attestation sur l'honneur concomitante à la conclusion des contrats. Elle fait observer que si elle s'est abstenue de demander à ces entreprises une attestation de l'URSSAF, c'est qu'en matière de marchés publics, auxquels elle a l'habitude de participer, cette formalité n'est pas nécessaire. Elle invoque sa bonne foi et indique que l'administration fiscale n'a pas poursuivi le redressement de TVA concernant les factures litigieuses. En conclusion, elle conteste sa responsabilité quant aux dissimulations de salariés et d'activités commises par ses sous-traitants.
L'URSSAF d'Ile de France fait déposer et soutenir oralement par sa représentante des conclusions de confirmation du jugement attaqué et de condamnation de la société Legio Sécurité à lui verser la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle relève en effet qu'à la suite du contrôle inopiné du 14 septembre 2006 il s'est avéré que la société Legio Sécurité recourait à des sous-traitants non répertoriés au registre du commerce et des sociétés, ni inscrits auprès de ses services et avait avec eux un courant d'affaires de plusieurs centaines de milliers d'euros. Elle fait observer que les renseignements demandés par la société Legio étaient insuffisants pour lui permettre de s'assurer du respect par ses cocontractants de leurs obligations sociales et que notamment aucune attestation de fourniture de données sociales à l'URSSAF n'était réclamée, en violation de l'article R 324-4 devenu D 8222-5 du code du travail applicable à la période en cause. Elle précise ensuite que le redressement ne concerne pas l'activité sous-traitée à l'entreprise Kodecs pour laquelle une décision de relaxe est intervenue et souligne l'indépendance du recouvrement des cotisations de sécurité sociale vis à vis de l'administration fiscale. Enfin, elle conteste la bonne foi de la société Legio Sécurité en faisant état d'un précédent litige les ayant opposé pour des faits de même nature.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Motifs :
Considérant qu'en application de l'article L 8222-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, toute personne doit vérifier, lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum de 3.000 euros en vue de l'exécution d'un travail ou de la fourniture d'une prestation de services, et périodiquement jusqu'à la fin du contrat, que son cocontractant s'acquitte des formalités d'immatriculation, de déclaration d'embauche et de déclaration de salaires ou de cotisations auprès des organismes de recouvrement et est à jour de ses obligations de paiement ;
Considérant que, selon l'article D 8222-5 du même code, est considérée comme ayant procédé aux vérifications exigées ci-dessus la personne qui s'est fait remettre une attestation de fourniture de déclarations sociales émanant de l'organisme de recouvrement et datant de moins d'un an, un extrait de l'inscription au registre du commerce et des sociétés et une attestation sur l'honneur établie par le cocontractant certifiant que le travail sera réalisé par des salariés employés régulièrement ;
Considérant qu'en l'espèce, les documents fournis par les sous-traitants de la société Legio Sécurité se limitaient à leur autorisation préfectorale, un extrait K bis non à jour et à une attestation établie par eux-mêmes certifiant respecter leurs obligations sociales ;
Considérant qu'il n'est pas justifié de la fourniture par les sous-traitants de l'attestation établie par l'URSSAF au sujet de la régularité de leur situation en matière de déclarations sociales ;
Considérant pourtant que ce document essentiel est le seul de nature à assurer le donneur ordre que son cocontractant est véritablement en règle au regard de ses obligations ;
Considérant que le fait que ce document ne soit pas exigé par les collectivités publiques lors de la passation des marchés publics est indifférent et n'excuse pas le manquement de la société à son obligation de vigilance ;
Considérant que, de même, la décision de relaxe intervenue en faveur de la société dans un autre marché de sous-traitance n'a pas d'incidence sur le présent redressement qui concerne d'autres entreprises ;
Considérant ensuite que l'abandon des poursuites par l'administration fiscale concernant les factures litigieuses ne fait pas non plus obstacle à la mise en oeuvre du redressement URSSAF, étant donné l'indépendance des règles de sécurité sociale par rapport aux règles fiscales ;
Considérant qu'enfin, comme l'indique l'URSSAF, la circonstance qu'un précédent litige ait déjà opposé les parties au sujet de faits de même nature vient contredire la bonne foi alléguée par la société Legio Sécurité ;
Considérant que la personne qui méconnaît ses obligations de vérification, au moment de la conclusion du contrat ou par la suite, est tenue solidairement avec l'entreprise coupable de travail dissimulé, du paiement des cotisations sociales ainsi que des pénalités et majorations ;
Considérant que c'est donc à bon droit que l'URSSAF a considéré que la société Legio Sécurité était redevable des cotisations afférentes au travail dissimulé, dont la réalité n'est pas contestée, et a procédé au redressement contesté ;
Considérant que le jugement attaqué sera donc purement et simplement confirmé ;
Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il convient de condamner la société legio Sécurité à verser à l'URSSAF d'Ile de France la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que succombant en son recours, la société sera déboutée de sa propre demande à ce titre ;
Considérant que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais ; qu'elle ne donne pas lieu à dépens ;
PAR CES MOTIFS
Déclare la société Legio Sécurité recevable mais mal fondée en son appel ;
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;
Condamne la société Legio Sécurité à verser à l'URSSAF d'Ile de France la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa propre demande à ce titre ;
Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L 241-3 et la condamne au paiement de ce droit s'élevant à la somme de 312,90 €.
Le Greffier, Le Président,