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05/11/2014 | FRANCE | N°12/13168

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 05 novembre 2014, 12/13168


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2014



(n° 343, 05 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/13168



Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Juin 2012 -Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n°1200246







APPELANTE



Madame [V] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représ

enté de Me Alexandre MAILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R071





INTIMÉE



CABINET JONES DAY LLP

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée de Me Jean-rené FARTHOUAT de la SELAFA PRO.MARK, avocat au barreau ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2014

(n° 343, 05 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/13168

Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Juin 2012 -Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n°1200246

APPELANTE

Madame [V] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté de Me Alexandre MAILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R071

INTIMÉE

CABINET JONES DAY LLP

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée de Me Jean-rené FARTHOUAT de la SELAFA PRO.MARK, avocat au barreau de PARIS, toque : R130

Assistée de Me Juliette SCHWEBLIN, avocat au Barreau de Paris, toque A 966

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 juin 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques BICHARD, Président et Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jacques BICHARD, Président

Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de Paris en vertu de l'article R312-3 du Code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre.

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Déborah TOUPILLIER

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Madame Fatiha MATTE, greffier présent auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Vu la sentence rendue le 6 juin 2012 au visa de l'article 142 du décret du 27 novembre 1991 par le délégué du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris dans le cadre du litige opposant Mme [V] [M] au cabinet Jones Day LLP et qui a débouté Mme [V] [M] de la totalité de ses demandes.

Vu l'appel interjeté par Mme [V] [M].

Entendus à l'audience du 25 juin 2014 les conseils des parties conformes à leurs écritures :

- réformer la décision déférée,

- dire que le contrat ayant existé entre elle et le cabinet Jones Day LLP est un contrat de travail,

- constater que la rupture du 3 octobre 2011 est sans causes réelles et sérieuses,

- condamner le cabinet Jones Day LLP à lui payer les sommes suivantes :

* 340 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 14 167 euros pour non respect de la procédure,

* 31 163 euros au titre de l'indemnité légal de licenciement,

* 440 000 euros au titre des heures supplémentaires,

* 85002 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

* 30 000 euros au titre du préjudice moral,

* 140 000 euros au titre de la participation,

* 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner au cabinet Jones Day LLP de lui remettre les bulletins de salaire, certificat de travail et attestation pole Emploi sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document.

SUR QUOI LA COUR

Le 2 janvier 2002 un contrat d'exercice libéral a été conclu entre le cabinet Jones Day LLP et Mme [V] [M], à effet à compter de ce jour et pour une durée indéterminée.

Par lettre du 3 octobre 2011 le cabinet Jones Day LLP a mis fin à cette collaboration avec un préavis de 6 mois qui s'est terminé au 15 avril 2012.

Mme [V] [M] a pris acte de cette décision dont elle a dénoncé dans une correspondance du 23 novembre 2011 le caractère injustifié.

A la suite de l'échange de diverses autres correspondances entre les parties, Mme [V] [M] a pris l'initiative de saisir le bâtonnier des demandes qui ont donc été rejetées dans leur intégralité et qu'elle présente à nouveau devant la cour.

Le contrat passé par les parties est un contrat d'exercice libéral qui mentionne leurs obligations respectives , le cabinet Jones Day LLP devant notamment mettre à la disposition de Mme [V] [M] l'ensemble des moyens lui permettant de développer sa clientèle personnelle. Or celle-ci soutient que tel n'a pas été le cas et que depuis son entrée au cabinet, outre le fait qu'elle n'a pas disposé des moyens matériels suffisants, elle a dû consacrer tout son temps au traitement des dossiers de celui-ci, à la satisfaction et au développement de sa clientèle ainsi qu'à son bon fonctionnement.

Contestant ces griefs, le cabinet Jones Day LLP expose que Mme [V] [M] disposait d'un grand bureau, de salles de conférence, d'un secrétariat de jour, d'une secrétaire supplémentaire ' flottante', d'un accès à tous les moyens informatiques, d'une bibliothèque, de revues et de documentation, d'un papier à en-tête personnel ainsi que de formations organisées par le cabinet. Par ailleurs il indique que les documents produits démontrent que par le nombre d'heures accomplies par Mme [V] [M], qu' il s'agisse d'heures 'facturables 'ou pas, celle-ci disposait des plages de temps suffisantes pour développer sa clientèle personnelle .

A la question des heures 'facturables ' qui dans les feuilles de temps établies auraient été, aux dires de l'appelante, minorées par rapport à celles réellement effectuées par les collaborateurs, le délégué du bâtonnier a répondu par des motifs pertinents que la cour adopte . Au demeurant Mme [V] [M] qui mentionne les instructions qui auraient été données aux collaborateurs afin de réduire artificiellement leur nombre d'heures porté sur leur feuille de temps en procédant à la suppression d'une partie des heures travaillées se trouve cependant dans l'impossibilité de démontrer qu'elle même a reçu de telles consignes et a dû les mettre en oeuvre. Et les seules déclarations de deux anciennes collaboratrices du cabinet, Mme [Y] et Mme [P] qui font état de telles pratiques sont insuffisantes pour démontrer que Mme [V] [M] qui a collaboré pendant près de 10 ans au cabinet Jones Day LLP, y a également été soumise.

Et même à admettre qu'elle ait dû s'y plier il n'est pas pour autant justifié que cette situation aurait eu pour conséquence directe d'accaparer tout son temps au point de l'empêcher de créer, développer et exploiter une clientèle personnelle .Certes ainsi que le font valoir Mme [Y] et Mme [P] ce mode de gestion du cabinet pouvait s'avérer pénalisant pour les collaborateurs qui y étaient soumis en termes de progression de carrière et de rémunérations, encore que Mme [V] [M] reconnaît avoir bénéficié d'augmentations régulières . Pour autant il n'est pas démontré qu'il pouvait constituer une véritable entrave au développement de leur clientèle personnelle.

Il n'est pas davantage établi que les rythmes de travail imposé aux collaborateurs, la multiplicité des taches qui leur auraient été imposées ont pu conduire à une telle situation, les diverses attestations produites aux débats étant contraires dans leur description des conditions d'exercice du contrat de collaboration, le cabinet Jones Day LLP faisant alors justement valoir que Mme [V] [M] qui en dénonce le caractère excessif, n'a cependant pas toujours atteint les prévisions établies sans qu'il lui en ait été pour autant fait grief, ni que sa rémunération en ait été affectée.

Egalement le délégué du bâtonnier a pertinemment relevé que le programme de contrôle du temps des collaborateurs dénoncé par Mme [V] [M], avait cependant été mis en place postérieurement à la rupture de son contrat de collaboration et qu'en tout état de cause il ne pouvait être reproché au cabinet d'avoir voulu s'assurer de la disponibilité de ses collaborateurs, ce souci de gestion ne constituant pas en lui même une entrave au traitement de leur clientèle personnelle.

Le cabinet Jones Day LLP verse d'ailleurs aux débats des extraits de l'agenda de Mme [V] [M] qui démontrent que celle-ci bénéficiait d'une disponibilité de temps certaine .

Et cette constatation trouve sa confirmation dans un mail du 29 avril 2010 émanant de Mme [V] [M] qui fait état de sa disponibilité pour aider l'équipe et de son souhait de prendre quelques jours de vacances au mois de mai .

Dans ces conditions les affirmations de Mme [Y] selon lesquelles les collaborateurs étaient soumis, particulièrement de la part de Mme [B], une des associées du cabinet, à un véritable harcèlement moral ainsi qu'à une pression constante ne peuvent être retenues en ce qui concerne l'appelante .Au contraire et tel que cela résulte de l'échange de plusieurs mails en juillet 2010 et septembre 2011, celle-ci a bénéficié de la part de cette associée de propositions de postes ce qui traduit à tout le moins l'existence de relations de confiance et l'estime dont jouissait l'appelante au sein du cabinet.

Par ailleurs il apparaît normal dans le cadre d'une bonne gestion que le cabinet Jones Day LLP ait voulu être régulièrement informé par les collaborateurs du suivi des dossiers qu'ils avaient en charge et cette exigence n'implique pas pour autant l'absence de toute indépendance dans l'exercice de leur contrat de collaboration. C'est ainsi que Mme [V] [M] géré des dossiers importants dont elle a assuré directement le traitement par l'élaboration de projets, la participation à des réunions, la 'finalisation' d'accords, comme en attestent les mails versés aux débats ( pièces 17 à 34 ) .

Appartenant à un cabinet d'avocats international employant une centaine d'avocats sur [Localité 3] et 2400 dans le monde, traitant notamment de dossiers de fusion acquisition complexes aux enjeux financiers importants, il n'est en rien étonnant que ponctuellement Mme [V] [M] ait été amenée à fournir une activité intense en travaillant le week-end ou tard dans la nuit.

Et au demeurant en 10 ans de collaboration l'appelante n'a émis aucune protestation sur les conditions dans lesquelles se déroulait son exercice professionnel libéral, l'expression, collaboration à temps complet mentionnée dans son contrat dont elle estime qu'elle traduit l'absence de toute activité personnelle ne devant pas être prise au pied de la lettre.

Enfin et contrairement à ce qu'elle soutient, elle disposait de conditions matérielles adéquates: bureau, salles de réunion, secrétariat, documentations, Mme [Q], secrétaire du cabinet attestant qu'elle avait pu choisir son bureau et que contrairement aux autres avocats elle ne partageait sa secrétaire qu'avec une seule collaboratrice junior, une avocate du cabinet, Mme [L], faisant état des formations proposées et des salles de réunion mises à disposition.

En réalité la fin de son contrat de collaboration s'explique par le refus du cabinet Jones Day LLP d'aller au delà de la rétrocession d'honoraires qui lui était proposée et la lettre de rupture du 3 octobre 2011, ainsi que le caractérisent plusieurs courriels faisant état de son départ dans les mois à suivre, à l'instar d'autres collaborateurs, s'inscrit en réalité dans un projet de changement professionnel confirmé par les propositions de postes dont il vient d'être fait état.

La rupture du contrat de collaboration n'est donc pas intervenue brutalement ainsi que le prétend l'appelante qui, au demeurant, n'a réagi que le 23 novembre 2011, soit plus d'un mois et demi après avoir reçu en mains propres la lettre du 3 octobre.

Dans ces conditions il convient de débouter Mme [V] [M] de la totalité de ses prétentions.

La solution du litige et l'équité commande d'accorder au cabinet Jones Day LLP une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 7000 euros.

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision déférée.

Condamne Mme [V] [M] à payer au cabinet Jones Day LLP une indemnité d'un montant de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme [V] [M] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/13168
Date de la décision : 05/11/2014

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°12/13168 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-05;12.13168 ?
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