COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 12
ARRÊT DU 27 Octobre 2014
(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/ 02187
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Novembre 2013 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG no 12-01167
APPELANTE SARL MAZEH 65 rue des Entrepreneurs 75015 PARIS représentée par Me Jean-marc GRUNBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : C2210
INTIMEE URSSAF 75- PARIS/ REGION PARISIENNE Service 6012- Recours Judiciaires TSA 80028 93517 MONTREUIL CEDEX représenté par M. X... en vertu d'un pouvoir général
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale 14, avenue Duquesne 75350 PARIS CEDEX 07 avisé-non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 mai 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller qui en ont délibéré
Greffier : Mme Delphine BARREIROS, lors des débats
ARRÊT :- contradictoire-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Fatima BA, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société Mazeh d'un jugement rendu le 18 novembre 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à l'URSSAF d'Ile de France ;
Les faits, la procédure, les prétentions des parties :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle, l'URSSAF a retenu que la société Mazeh avait appliqué à tort la réduction Fillon aux rémunérations versées aux deux enfants du gérant qui ne justifiaient pas leur assujettissement à l'assurance-chômage ; qu'il en est résulté un redressement de cotisations d'un montant de 10 248 ¿ au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 ; que la société Mazeh a été mise en demeure, le 10 mai 2011, de régler cette somme ainsi que celle de 1 482 ¿ au titre des majorations de retard ; que la société a contesté ce redressement devant la commission de recours amiable qui a rejeté sa réclamation par décision notifiée le 7 septembre 2011 ; que la juridiction des affaires de sécurité sociale a ensuite été saisie par lettre recommandée du 23 février 2012.
Par jugement du 18 novembre 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a déclaré irrecevable le recours de la société Mazeh.
La société Mazeh demande d'abord le retrait des pièces de l'URSSAF au motif qu'elles ne lui ont pas été communiquées avant l'audience malgré sa demande du 20 mars 2014. En tout état de cause, elle soutient des conclusions tendant à infirmer le jugement, déclarer son recours recevable, dire et juger mal fondées les demandes de l'URSSAF et condamner cet organisme aux dépens de la présente instance.
Sur la recevabilité du recours, elle invoque les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'atteinte au principe contradictoire en ce qu'il existe un déséquilibre entre les droits de l'URSSAF et ceux du cotisant pour l'exercice d'un recours. Elle prétend ensuite que le courrier recommandé du 7 septembre 2011 lui ayant notifié la décision de la commission de recours amiable ne comportait pas l'indication de manière très apparente des délais de recours et ne l'informait pas qu'à défaut de recours, la décision deviendrait définitive.
Sur le fond du litige, elle considère bien fondées les réductions opérées sur les cotisations patronales pour les salaires versés à MM. Amir et Sam Y...entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2009. En effet, selon elle, ces deux salariés relevaient bien du régime obligatoire d'assurance chômage et n'étaient pas dirigeants sociaux mais associés minoritaires. Elle indique qu'aucun texte ne subordonne le bénéfice des réductions Fillon à la production d'une attestation de Pôle-Emploi et fait grief à l'URSSAF de renverser la charge de la preuve en exigeant de l'employeur la justification de l'affiliation de ses salariés au régime d'assurance-chômage. En tout état de cause, elle justifie, par la production des statuts de la société et d'un courrier de la banque du fait que les intéressés n'avaient qu'une part minoritaire du capital de la société et ne disposaient pas d'une procuration sur le compte bancaire de l'entreprise. Enfin, elle fait observer que la réalité de l'activité salariée de ces personnes n'est pas remise en cause par l'URSSAF et que Pôle-Emploi lui a répondu, par lettres des 14 août et 30 septembre 2013, que l'assurance-chômage couvrait les deux salariés en question.
L'URSSAF d'Ile de France fait soutenir oralement des conclusions de confirmation du jugement entrepris. Après avoir observé que la société Mazeh avait connaissance de toutes les pièces produites aux débats qui sont les mêmes qu'en première instance, elle relève le caractère tardif du recours judiciaire formé en février 2012 alors que la société reconnaît avoir reçu en septembre 2011 la notification de la décision de la commission de recours amiable. Subsidiairement, sur le fond, elle s'en rapporte aux constatations des inspecteurs du recouvrement qui ont relevé qu'il n'était pas justifié que les enfants du gérant, associés minoritaires de la société, étaient bien affiliés au régime d'assurance-chômage et prétend que la réponse faite par Pôle-Emploi en 2013 ne vaut pas pour la période antérieure correspondant à celle du contrôle.
Il est fait référence aux écritures déposées pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Motifs :
Sur l'incident relatif à la communication des pièces de l'URSSAF :
Considérant qu'il est justifié que, par lettre recommandée du 20 mars 2014, le conseil de la société Mazeh a demandé à l'URSSAF de lui communiquer l'intégralité de ses pièces qu'il n'avait pas pu consulter au greffe en première instance ;
Considérant que l'URSSAF n'ayant pas répondu à cette lettre avant l'audience du 26 mai 2014, les parties ont été invitées, en début d'audience, à échanger les pièces avant de développer leur argumentation ;
Considérant qu'eu demeurant le dossier contenant les pièces de l'URSSAF est constitué de la lettre d'observations du 17 février 2011, de la mise en demeure du 10 mai 2011, d'une contrainte et de la décision de la commission de recours amiable du 25 juillet 2011 ainsi que de sa notification intervenue le 7 septembre 2011 ;
Considérant qu'il s'agit donc de documents déjà portés à la connaissance de la société Mazeh et, s'agissant de la notification du 7 septembre 2011, la société Maezh y fait expressément référence, à plusieurs reprises, dans ses propres conclusions avec la mention " pièce adverse no 4 " ;
Considérant que la demande de la société Mazeh tendant à écarter les pièces adverses sera donc rejetée ;
Sur la recevabilité du recours :
Considérant que la société conteste d'abord le principe même du délai de forclusion sur le fondement des articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant cependant que l'existence d'un délai pour exercer un recours à peine de forclusion ne porte pas atteinte au droit reconnu par la Convention à un recours effectif et le principe d'égalité des armes n'est pas méconnu du seul fait que la personne qui reçoit la notification d'une décision, est seule intéressée à l'exercice d'un recours ;
Considérant ensuite que la société Mazeh soutient que la notification du 7 septembre 2011 ne lui a pas permis de connaître les modalités d'exercice du recours ouvert contre la décision de la commission de recours amiable du 25 juillet 2011 ;
Considérant toutefois que cet acte comporte l'indication que " cette décision est susceptible de recours, dans les deux mois de la présente notification, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale " ;
Considérant qu'il était en outre précisé que ce recours devait être formé par lettre recommandée à M. le secrétaire du tribunal et l'adresse du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris était également mentionnée ;
Considérant que cette information précise et complète permettait àson destinataire de connaître les modalités d'exercice du recours qui lui était ouvert et notamment le délai qui lui était imparti pour saisir la juridiction ;
Considérant que, contrairement aux allégations de la société, cette information se détachait parfaitement du corps de la notification et était très apparente ; qu'il n'était pas nécessaire d'ajouter qu'à défaut d'exercice du recours indiqué, dans le délai de deux mois, la forclusion serait acquise ;
Considérant que, dans ces conditions, c'est à juste titre qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article R 142-18 du code de la sécurité sociale et constaté que la notification de la décision avait été faite le 7 septembre 2011, les premiers juges ont décidé que le recours formé par la société Mazeh, le 23 février 2012, était irrecevable comme tardif ;
Que leur jugement sera confirmé ;
Considérant que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais ; qu'elle ne donne pas lieu à dépens ;
Par ces motifs :
- Rejette la demande de retrait des pièces de l'URSSAF ;
- Déclare la société Mazeh recevable mais mal fondée en son appel ;
- Confirme le jugement entrepris ;
- Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;
- Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L 241-3 et la condamne au paiement de ce droit d'un montant de 312, 90 ¿ ;
Le Greffier, Le Président,