La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2014 | FRANCE | N°12/04481

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 23 octobre 2014, 12/04481


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 23 octobre 2014 après prorogation

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04481

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Avril 2012 par le Conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 09/14061





APPELANTE

SAS HOTEL LITTRE

[Adresse 2]

représenté par Mme [O] munie d'un pouvoir (DS patronal)







INTIMEE


Mademoiselle [R] [P]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Eric DELBECQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0673





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositio...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 23 octobre 2014 après prorogation

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04481

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Avril 2012 par le Conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 09/14061

APPELANTE

SAS HOTEL LITTRE

[Adresse 2]

représenté par Mme [O] munie d'un pouvoir (DS patronal)

INTIMEE

Mademoiselle [R] [P]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Eric DELBECQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0673

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mars 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Evelyne GIL, conseillère faisant fonction de Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement formé par la société HÔTEL LITTRÉ SAS contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 10 avril 2012 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancienne employée, [R] [P] ;

Vu le jugement déféré ayant :

- condamné la SAS HÔTEL LITTRÉ à payer à [R] [P] les sommes de :

- 3 246 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 324,60 € au titre des congés payés afférents,

- 892,65 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 885,10 € au titre du salaire de la mise à pied,

- 88,51 € au titre des congés payés afférents,

- 12'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné la remise par l'employeur d'un certificat de travail et d'une attestation destinée au PÔLE EMPLOI conformes au jugement,

- débouté [R] [P] du surplus de ses demandes et la SAS HÔTEL LITTRÉ, de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné cette dernière aux dépens ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

La société HÔTEL LITTRÉ, SAS appelante, poursuit :

à titre principal :

- l'infirmation du jugement entrepris,

- la constatation de l'existence d'une faute grave justifiant le licenciement de [R] [P],

- le débouté de celle-ci de l'ensemble de ses demandes,

- sa condamnation à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

à titre subsidiaire :

- l'infirmation partielle du jugement du 10 avril 2012,

- la constatation de l'existence d'une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement de [R] [P],

- le débouté de la salariée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

à titre infiniment subsidiaire :

- l'infirmation partielle du jugement du 16 avril 2012,

- la constatation de l'absence de préjudice subi,

- la fixation à 11'356,44 € du montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, conformément à l'article L. 1235-3 du Code du travail ;

[R] [P], intimée, conclut :

- au débouté de la société HÔTEL LITTRÉ de son appel mal fondé,

- à la confirmation du jugement du 10 avril 2012 en ce qu'il a

- dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS HÔTEL LITTRÉ à lui payer un rappel de salaire et de congés payés pour la mise à pied, les indemnités de rupture à l'exception de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- à la réformation du même jugement en condamnant la société HÔTEL LITTRÉ à lui payer la somme de 26'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par application de l'article L. 1235-3 du Code du travail, subsidiairement, la somme de 12'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- à la condamnation de la société HÔTEL LITTRÉ à lui payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des éventuels dépens.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société HÔTEL LITTRÉ SAS exploite un hôtel 4 étoiles disposant de 90 chambres à [Localité 1], [Adresse 2].

Elle applique la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants, et avait, lors des faits, un effectif de plus de 11 employés.

Suivant lettre d'engagement du 14 février 2003 valant contrat de travail à durée indéterminée, elle a embauché [R] [P] à compter du 15 février 2003 en qualité de réceptionniste, moyennant un salaire brut mensuel de base de 1 523 € augmenté d'une indemnité de nourriture, qui, en son dernier état, s'élevait à 1 623 €.

Le 8 juillet 2009, elle a notifié à la salariée un avertissement en raison de son comportement, le 7 juillet, vis-à-vis de sa supérieure hiérarchique.

Le 21 juillet 2009, elle lui a notifié un deuxième avertissement en raison de l'altercation survenue le jour même, à la réception, avec [H] [C], et des menaces qu'elle lui avait adressées.

Le 4 août 2009, elle l'a convoquée à se présenter le 13 août 2009 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement et lui a confirmé que la mesure de mise à pied à titre conservatoire signifiée verbalement le jour même.

Le 18 août 2009, elle lui a notifié son licenciement dans les termes suivants :

' Nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue de votre éventuel licenciement le 13 Août 2009 afin de recueillir vos éventuelles explications quant à votre comportement qui nous a conduit à vous signifier le 4 août 2009 une mesure de mise à pied conservatoire.

Préalablement, nous avions déjà eu à déplorer de votre part un comportement inadmissible au sein de notre entreprise.

Ainsi, le 8 juillet 2009, nous avons été contraints de vous notifier un avertissement au motif que vous aviez tenu des propos inacceptables et remis en cause l'autorité de Melle [A], votre supérieure hiérarchique au motif qu'elle était en période d'essai.

Vous n'en avez nullement tenu compte.

À nouveau, le 21 juillet 2009, nous avons été dans l'obligation de vous notifier un second avertissement au motif que vous aviez menacé Monsieur [C] de lui envoyer quelqu'un pour qu'il s'explique dehors et ce après lui avoir demandé des explications sur le contenu d'un courriel adressé au service commercial sur la desserte des bus pour les clients de l'hôtel.

Entre temps, le 20 juillet 2009, Monsieur [V] [G], de l'agence

$gt;, nous a adressé un courriel nous faisant part de son très vif mécontentement quant au comportement que vous aviez eu le 18 juillet 2009, à 20 heures, avec Monsieur [Z], Gérant de l'Agence $gt;, partenaire de $gt;.

Le 1er août 2009 à 14h 16, nous avons reçu de Monsieur [Z] un courriel confirmé par courrier postal reçu le 4 août 2009, nous avertissant de rompre nos relations commerciales existantes depuis plus de 2 ans au motif qu'il ne pourrait plus nous envoyer ses clients brésiliens au sein de notre établissement suite à l'incident du 18 juillet 2009.

En effet, alors que Monsieur [Z] était en conversation téléphonique avec l'un de ses clients présent dans l'hôtel Monsieur [J], vous êtes brusquement sortie du bureau situé derrière la réception, avez arraché le téléphone des mains de Monsieur [Z], mettant fin à son entretien téléphonique et avez tenu des propos inacceptables envers ce dernier.

Alors que Monsieur [Z] tentait de vous calmer, vous avez persisté et avez dénigré par des propos vulgaires celui-ci sur ses qualités et sa fonction au sein de l'agence de voyages.

Ceci est totalement inacceptable.

Votre attitude a menacé de mettre un terme à une relation commerciale établie de longue date............................................................................................................................................

Le 13 août 2009, vous n'avez pas jugé utile de vous présenter.

Ces faits caractérisent une faute grave.

Nous sommes donc contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave.'

[R] [P] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS, le 30 octobre 2009, de la contestation de son licenciement et de ses demandes en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés pour la période de mise à pied conservatoire ainsi que des indemnités de rupture.

Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.

SUR CE

- Sur le licenciement et ses conséquences

Aux termes de sa lettre de licenciement pour faute grave, du 18 août 2009, la société HÔTEL LITTRÉ, après avoir rappelé les avertissements qu'elle lui avait notifiés les 8 et 21 juillet 2009, reproche à [R] [P] l'incident qu'elle a provoqué, le 18 juillet 2009 à la réception, en s'emparant du téléphone utilisé par le client, monsieur [Z], en mettant fin à sa conversation téléphonique et en lui tenant des propos vulgaires et inacceptables sur ses qualités et sa fonction au sein de son agence de voyages.

L'intimée a contesté l'ensemble des griefs développés par la société HÔTEL LITTRÉ tant dans la lettre de licenciement que dans les deux avertissements qui y sont mentionnés.

Cependant, le comportement et les propos de [R] [P] à l'égard de sa supérieure hiérarchique qui lui sont reprochés dans l'avertissement notifié le 8 juillet 2009 sont confirmés par celle-ci, [S] [A], première de réception, qui, dans une lettre du 13 juillet 2009, explique à la directrice de l'hôtel que, compte tenu de l'attitude méprisante et des propos injurieux de [R] [P], il ne lui était plus possible d'assumer, dans des conditions normales, la mission qui lui avait été confiée.

L'incident du 21 juillet 2009 ayant donné lieu au deuxième avertissement est confirmé par [H] [C], night audit à l'hôtel LITTRÉ, qui relate qu'après l'avoir interrogé sur une courriel adressé à l'assistante commerciale comportant une liste d'autobus, [R] [P] lui indiquant qu'elle connaissait 'des gars des cités' l'a menacé de lui

'ramener un gars' avec lequel il irait s'expliquer dehors.

Il est établi par les pièces du dossier que si la direction de la société HÔTEL LITTRÉ a été informée de l'incident du 18 juillet 2009 par [V] [G], directeur de la société cliente RING TOURS, qui lui a fait part du mécontentement de son partenaire, [X] [Z], gérant de la société PARIS QUERIDO, à la suite du comportement d'une employée de la réception s'appelant ' [Y] ', elle n'a reçu la lettre de doléances de l'intéressé, datée du 20 juillet et postée le 3 août, relatant l'incident que le 4 août 2009. [X] [Z] y relate que, souhaitant appeler un client, le réceptionniste de l'hôtel lui a remis le téléphone quand, sortant du bureau situé derrière l'accueil, une certaine '[Y]' a frappé le téléphone, interrompu la conversation avec le client, s'est mêlée à la conversation avec le réceptionniste et l'a interpellé d'un ton très désagréable et vulgaire sur ses 'qualités et conditions'. Cette lettre mentionne en objet : ' Avertissement avant rupture des relations commerciales '.

Il est établi qu'au sein de l'hôtel, [R] [P] se faisait appeler ' [Y] '.

La preuve est suffisamment apportée que le 18 juillet 2009, la réceptionniste qui avait notamment pour mission d'accueillir et d'aider les clients, s'est emparée du téléphone que son collègue avait provisoirement mis à la disposition du client [X] [Z], interrompant sa communication téléphonique et intervenant dans la conversation initialement engagée entre le client et son collègue.

En revanche, les propos vulgaires et dénigrants qu'elle aurait adressés à monsieur [Z] qui n'ont pas été précisés ne peuvent être retenus à son encontre.

Compte tenu des deux avertissements justifiés qui lui ont été notifiés au cours du même mois de juillet 2009 et en dépit de l'ancienneté de la salariée, il apparaît que l'attitude dépourvue de toute éducation qu'a manifestée [R] [P] à l'égard de [X] [Z] constitue une inexécution fautive des obligations découlant de son contrat de travail de réceptionniste.

Toutefois, la faute commise ne revêt pas une gravité justifiant la rupture immédiate du contrat de travail, sans préavis ni indemnité de licenciement.

La seule affirmation d'[L] [Q], réceptionniste dont le contrat de travail du 27 juillet au 19 août 2009 a été rompu en cours de période d'essai, selon laquelle elle aurait été informée lors de son entretien d'embauche à une date qui n'a pas été précisée, que [R] [P] qui créait beaucoup de problèmes à ses collègues devait être licenciée, ne suffit pas à justifier que dès la fin du mois de juillet 2009, l'employeur avait déjà arrêté sa décision de licencier son employée et ce, alors qu'il n'avait pas encore reçu la plainte de [X] [Z].

Le licenciement de l'intimée reposant sur une cause réelle et sérieuse, les condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes seront confirmées à l'exception de la condamnation au paiement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Sur la charge des dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

La société HÔTEL LITTRÉ, succombant partiellement à l'issue de l'appel, en supportera les dépens.

Au vu des circonstances de la cause, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non taxables qu'elles ont exposés chacune pour leur part à l'occasion du présent appel, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il porte condamnation de la société HÔTEL LITTRÉ SAS au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que le licenciement notifié à [R] [P] par la société HÔTEL LITTRÉ, le 18 août 2009, est justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Déboute [R] [P] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société HÔTEL LITTRÉ aux dépens de l'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le Greffier,P/Le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 12/04481
Date de la décision : 23/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°12/04481 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-23;12.04481 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award