RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 15 Octobre 2014
(n° 9 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07321
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 juillet 2013 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY - section commerce - RG n° 09/01147
APPELANT
Monsieur [H] [M]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparant en personne, assisté de M. Jean-François LASCOUX, délégué syndical ouvrier dûment mandaté
INTIMÉE
LA POSTE - PFE - PANTIN
[Adresse 1]
Cellule 12-13
[Localité 2]
représentée par Me Laurent MARQUET de VASSELOT, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, NAN 1701
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Septembre 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Christine ROSTAND, présidente
Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller
Madame Aline BATOZ, vice présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 02 septembre 2014
qui en ont délibéré
GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Marion AUGER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 12 juillet 2013 ayant débouté M. [H] [M] de l'ensemble de ses demandes et l'ayant condamné aux dépens';
Vu la déclaration d'appel de M. [H] [M] reçue au greffe de la cour le 23 juillet 2013';
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 septembre 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [H] [M] qui demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de condamner la SA La Poste à lui régler les sommes de 4'615,80 € au titre du rappel «complément poste» sur la période de mars 2004 à mars 2009, 461,58 € de congés payés afférents et 135 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre la remise des bulletins de paie rectifiés et la publication de la décision à intervenir dans les publications «Forum» et «Jourpost»';
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 septembre 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA La Poste qui demande à la cour de confirmer la décision déférée et de condamner M. [H] [M] à lui payer la somme de 1'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
M. [H] [M] a été embauché par l'intimée en contrat de travail à durée indéterminée ayant pris effet le 4 septembre 1995 en qualité d'agent de niveau I.2 - grade ACC12, avant d'être promu le 2 janvier 1998 sur un emploi correspondant au groupe fonctionnel C - grade ACC21, puis le 1er juin 2007 sur un poste du niveau II.2 - grade ACC22.
Depuis le 1er mars 2010, l'emploi occupé par M. [H] [M] au sein de la SA La Poste renvoie à l'intitulé de «pilote de production».
Au vu du dernier bulletin de paie de mars 2009 produit par l'appelant, son salaire de base est de 1'624,90 € bruts mensuels, auquel s'ajoutent divers accessoires dont le «complément poste».
Dans ses écritures de première instance reprises à l'identique devant la cour, au soutien de sa demande, M. [H] [M] se prévaut de la décision n° 717 du 4 mai 1995 sur les «règles d'évolution transitoires et permanentes du complément poste» figurant au bulletin des ressources humaines de La Poste, en ses articles 1 (§1.3) et 2 (§2.1), de l'accord collectif salarial pour l'année 2001, ainsi que du principe général «à travail égal, salaire égal», pour faire juger que la SA La Poste n'a aucune raison objective de lui verser «un complément poste de 1 743,00 euros alors qu'un fonctionnaire de même niveau de fonction perçoit 2'499,00 euros».
M. [H] [M] entend concrètement comparer l'évolution de sa rémunération à celle d'un collègue de travail, M. [S], agent de droit public dont l'ancienneté remonte au 14 mai 1970, cela en produisant un tableau récapitulatif sur la période 2004/2009 pour réclamer in fine un rappel de 4'615,80 € (+ 461,58 €) au titre du «complément poste» - sa pièce 13.
Après l'adoption de la loi n°90-568 du 2 juillet 1990, la SA La Poste, devenue un établissement public industriel et commercial (EPIC), s'est vu affecter les agents du service public de la Poste avec la possibilité par ailleurs de recruter des agents contractuels de droit privé relevant du code du travail et des accords collectifs conclus en interne.
L'instauration du «complément poste» au sein de la SA La Poste s'est inscrite à compter de l'année 1993 - décision du conseil d'administration du 27 avril suivie d'une instruction du 3 août - dans le cadre d'une refonte des règles de rémunération visant à regrouper les primes et indemnités jusque-là en vigueur, à simplifier ledit régime en distinguant parmi ces mêmes primes et indemnités celles qui constituent réellement un complément de rémunération, et à s'orienter vers un système global sur la base d'un lien plus étroit entre la rémunération servie à ses personnels et leur contribution au développement de l'entreprise.
Courant 1994 - instruction du 25 février et décision du 9 décembre -, le «complément indemnitaire poste» a été étendu aux agents titulaires de grades n'ayant pas été précédemment mensualisés, puis aux agents contractuels tant de droit public que de droit privé.
Dès lors que les agents, quel que soit leur statut de droit privé ou de droit public, se sont vu attribuer ce «complément poste» au regard de leur situation personnelle, il en est résulté pour chacun une application différenciée prenant notamment en compte le critère de la date d'entrée dans l'entreprise, application différenciée qui s'est concrétisée par des montants variables même à niveau de fonction identique ou similaire.
M. [H] [M], qui a été recruté après le 1er janvier 1995, a ainsi bénéficié en application du paragraphe 532 de la décision précitée n° 717 du 4 mai 1995 - sous-paragraphe 5321 - d'un complément poste «fixé au minimum du secteur bas du champ de normalité», après une revalorisation annuelle dans le cadre des accords collectifs d'entreprise conclus entre la direction et les organisations syndicales représentatives, la partie intimée versant aux débats l'ensemble desdits accords salariaux sur la période de 2001 à 2013 - ses pièces 9 à 19.
Pour un même niveau de classification II.2, en renvoyant dans ses écritures à un montant de «complément poste» de 2'499 € annuels, ce que perçoit effectivement son collègue - M. [S] -, l'appelant entend se situer dans le «secteur haut des champs de normalité applicables aux fonctionnaires» compris entre 2'117 € et 2'499 € annuels, soit le montant maximum auquel peuvent prétendre les agents de droit public qui ont une grande maitrise de leur emploi en rapport avec une ancienneté élevée.
La question centrale de la convergence des «compléments poste» entre agents de droit public et salariés de droit privé, qui est implicitement sous-entendue dans la demande de M. [H] [M], a été traitée notamment par les accords collectifs d'entreprise des 10 juillet 2001 et 8 juillet 2003 qui prévoient des «seuils de recrutement du complément poste» et fixent «des principes d'évolution pluriannuelle».
C'est ainsi qu'en application de l'article 3.5 de l'accord précité du 8 juillet 2003, les partenaires sociaux ont décidé que le «complément poste» de certains des salariés de droit privé est à fixer lors de leur recrutement à un montant au moins égal au minimum du «secteur bas des champs de normalité auxquels étaient recrutés les fonctionnaires», pour correspondre précisément à un montant «inférieur ou égal à 1734 €» annuels.
Le principe général «à travail égal, salaire égal» dont est issue la règle spéciale sur l'égalité des rémunérations entre hommes et femmes, telle que résultant de l'article L.3221-2 du code du travail, impose à l'employeur d'assurer une égalité de rémunération entre tous les salariés placés dans une situation identique, principe auquel il n'est pas porté atteinte si la différence de rémunération pratiquée de fait est justifiée par des raisons objectives ou des choix de gestion, en terme de politique salariale, exclusifs par ailleurs de toute discrimination au sens de l'article L.1132-1 du même code.
L'ancienneté peut être la justification à une pratique différenciée dans la rémunération servie entre salariés effectuant un travail égal ou de valeur égale, indépendamment du critère tiré de l'expérience professionnelle, à la double condition qu'elle ne soit pas déjà prise en compte sous la forme d'une prime distincte et que si, étant intégrée au salaire de base, elle soit de nature à légitimer intégralement la différence ainsi relevée.
L'examen des bulletins de paie produits par l'appelant permet de relever que l'ancienneté n'est pas intégrée comme telle à son salaire de base, de même qu'elle ne donne pas lieu à paiement d'une prime distincte à ce titre en tant qu'accessoire de salaire.
La SA La Poste, qui n'entend pas expressément se situer sur le terrain de la mise en place d'un «champ de normalité» organisant une différence de traitement entre ses agents en fonction de leur statut juridique de droit privé ou de droit public, se prévaut en l'espèce dans ses écritures de ce seul critère tiré de l'ancienneté - page 24 et suivantes, spécialement §3.3.2.
M. [H] [M], qui en reste à des généralités dans ses conclusions, ne peut pas sérieusement se comparer à M. [S] étant entré au sein de La Poste le 14 mai 1970 - fiche EDART, pièce G de l'intimée -, soit plus de 25 années avant lui, ce qui caractérise chez ce dernier une meilleure maitrise du poste et une plus grande expérience professionnelle à fonction - «pilote de production» - et classification égales - II.2.
Dès lors que M. [H] [M] ne se trouve pas dans une situation identique à celle de M. [S], à qui il entend se comparer, comme l'a relevé à bon droit le premier juge dans sa motivation (« ' il apparait objectif et pertinent de justifier l'acquisition d'une meilleure maîtrise du poste par 25 ans de plus d'ancienneté que celle de M. [M]»), ce qui exclut toute différence de traitement objectivement injustifiée, il convient de confirmer la décision querellée qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.
Aucune circonstance d'équité ne commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et M. [H] [M] sera condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement entrepris';
Y ajoutant,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';
CONDAMNE M. [H] [M] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE