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08/10/2014 | FRANCE | N°12/19874

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 08 octobre 2014, 12/19874


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/19874



Décision déférée à la Cour : Arrêt rendu le 30 juin 2010 par la Chambre 5-3 de la Cour d'appel de PARIS (RG 08/04269) cassé par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 17 octobre 2012 (N°1199 FS-P+B) sur appel d'un jugement rendu le 20 Décembre 20

07 par la 18ème chambre - 2ème section du Tribunal de Grande Instance de PARIS (RG n° 02/17020)





APPELANTE



SARL DUGONG INVESTISSEMENT prise en la per...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/19874

Décision déférée à la Cour : Arrêt rendu le 30 juin 2010 par la Chambre 5-3 de la Cour d'appel de PARIS (RG 08/04269) cassé par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 17 octobre 2012 (N°1199 FS-P+B) sur appel d'un jugement rendu le 20 Décembre 2007 par la 18ème chambre - 2ème section du Tribunal de Grande Instance de PARIS (RG n° 02/17020)

APPELANTE

SARL DUGONG INVESTISSEMENT prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053, avocat postulant

Assistée de Me Marie DUAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0803, avocat plaidant substituant Me Jean PATRIMONIO, avocat au barreau de Paris, toque B 344

INTIMÉ

Monsieur [Z] [V]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125, avocat postulant

Assisté de Me Julien LAMPE, avocat au barreau de PARIS, toque : C 0700, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Juin 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente

Madame Odile BLUM, conseillère

Monsieur Christian BYK, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : lors des débats : Madame Orokia OUEDRAOGO

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière.

********

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant acte sous seing privé du 8 septembre 1992, les consorts [Q] aux droits desquels vient aujourd'hui la société Dugong Investissement, ont donné à bail à M. [Z] [V] des locaux à usage commercial sis au [Adresse 2], dans [Localité 3].

Par exploit d'huissier en date du 18 octobre 2000, la SARL Dugong Investissement a délivré à M.[V] un congé sans offre de renouvellement, offrant de régler une indemnité d'éviction d'un montant de 50.000 francs (7.622,45 euros). Le preneur, contestant ce montant, a attrait la SARL Dugong Investissement devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement avant dire droit du 4 mars 2004, a désigné un expert avec mission de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction et d'apprécier si cette dernière entraînera la perte du fonds ou son transfert.

Par jugement en date du 20 décembre 2007, le Tribunal a :

-dit que par l'effet du congé comportant refus de renouvellement signifié le 18 octobre 2010, il a été mis fin au bail, dit que l'éviction entraîne la perte du fonds, fixé à la somme de 82 500 € le montant de l'indemnité d'éviction, toutes causes confondues, due par la SARL Dugong Investissement à M [V], déclaré la SARL Dugong Investissement prescrite en sa demande de fixation et paiement d'une indemnité d'occupation fixée selon les critères de l'article L 145-28 du code de commerce, débouté la SARL Dugong Investissement de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, condamné la SARL Dugong Investissement à payer à M [V] une somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la SARL Dugong Investissement aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

M. [V] a interjeté appel du jugement.

Par un arrêt du 30 juin 2010, la Cour d'appel de Paris a débouté la SARL Dugong Investissement de sa demande tendant à voir M [V] déchu de son droit à indemnité d'éviction, infirmé le jugement dont appel sur le montant de l'indemnité d'éviction, et statuant à nouveau, l'a fixée à la somme globale de 81.364,65 euros. La cour a, en revanche, confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite la SARL Dugong Investissement en sa demande d' indemnité d'occupation, au motif que plus de deux ans se sont écoulés entre la date d'effet du congé et la demande de la bailleresse en fixation du paiement d'une indemnité d'occupation.

Par arrêt du 17 octobre 2012, la Cour de cassation statuant sur le pourvoi de la SARL Dugong Investissement a cassé l'arrêt sur ce dernier point et remis la cause et les parties en l'état ou elle se trouvaient avant ledit arrêt, les renvoyant devant la cour d'appel de Paris autrement composée et ce aux motifs que le délai de la prescription biennale de l'action en paiement de l'indemnité d'occupation ne peut commencer à courir avant le jour où est définitivement consacré dans son principe le droit du locataire au bénéfice d'une indemnité d'éviction.

C'est dans ces conditions que l'arrêt revient devant cette cour autrement composée.

Par ses conclusions en date du 12 avril 2013, M [V] demande à la Cour de :

A titre principal :

Constater que la société Dugong Investissement n'a formule aucune demande au titre de l'indemnité d'occupation avant ses conclusions déposées lors de l'audience du 16 septembre 2005 ;

Constater que la prescription biennale était acquise depuis le 30 juin 2003,

Constater que le droit à indemnité d'éviction de M [V] est consacré dans son principe depuis le 30 juin 2001,

Constater que la société Dugong Investissement n'a formulé aucune demande en fixation de l'indemnité d'occupation.

En conséquence :

Déclarer irrecevable la demande de la société Dugong Investissement au titre de l'indemnité d'occupation,

A titre subsidiaire :

Constater que la valeur de l'indemnité d'occupation n'est pas établie ;

En conséquence :

Rejeter la demande de la société Dugong Investissement au titre de l'indemnité d'occupation.

En tout état de cause :

Condamner la société Dugong Investissement à payer à Monsieur [V] une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Condamner la société Dugong Investissement aux entiers dépens, dont recouvrement dans les conditions de l'article 699 du CPC.

Par ses conclusions en date du 12 juin 2013, la SARL Dugong Investissement

demande à la Cour de :

Infirmer partiellement le jugement dont appel et statuant à nouveau ;

Dire et juger recevable et bien fondée la demande de la SARL Dugong en paiement d'une indemnité d'éviction ;

La fixer à la somme de 25.150 euros par an à compter du 1er juillet 2001 ;

Fixer l'indemnité mensuelle d'occupation due par M. [V] à la SARL Dugong Investissement à la somme de 2.096 euros à compter du 1er juillet 2011 jusqu'à la libération effective des lieux, soit jusqu'au 31 décembre 2011 ;

En conséquence :

Condamner M. [V] à payer à la société Dugong la somme de 187.241,46 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification des premières conclusions signifiées le 22 janvier 2013 ;

Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Débouter M. [V] à à payer à la SARL Dugong une somme de 4.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner M. [V] aux entiers dépens.

SUR CE

Sur le droit à indemnité d'éviction:

M [V] fait valoir qu'en application de l'article L 145-60 du code de commerce, se prescrivent par deux ans toutes les actions exercées en vertu des dispositions relatives aux baux commerciaux, qu' en cas de congé, le délai de prescription des actions nées du congé commence à courir à compter de la date d'effet du congé, qu'en l'espèce, le point de départ de l'action en fixation de l'indemnité d'occupation a commencé à courir au 30 juin 2001, date d'effet du congé offrant une indemnité d'éviction, que la SARL Dugong a demandé pour la première fois le 29 juin 2004 à l'expert qu'il estime l'indemnité d'occupation, soit plus de deux ans après la date d'effet du congé, que l'action de la SARL Dugong en paiement de l'indemnité d'occupation était prescrite à cette date, que l'arrêt de la cour de cassation du 17 octobre 2012 fait état de la prescription de l'action en 'paiement' d'une indemnité d'occupation et non de celle en 'fixation' d'une indemnité d'occupation comme c'est le cas en l'espèce, qu'enfin, retarder ainsi le point de départ de la prescription de l'action en fixation d'une indemnité d'occupation reviendrait à faire dépendre le point de départ du délai de prescription de l'action de l'attitude d'une partie.

Or, en rejetant les moyens du pourvoi concernant les dispositions de l'arrêt ayant débouté la SARL Dugong de sa demande tendant à la déchéance de M [V] au droit à une indemnité d'éviction, la cour de cassation a conféré à l'arrêt de cette cour du 30 juin 2010 ayant statué sur le droit de M [V] à une indemnité d'éviction et le montant de celle-ci, son caractère irrévocable d'autorité de chose jugée.

Tant devant le tribunal que devant la cour d'appel précédemment saisie, le droit de M [V] à pouvoir bénéficier d'une indemnité d'éviction avait été contesté par la bailleresse et ce nonobstant le fait que le congé offrait une telle indemnité; il ne peut donc être considéré que le droit du preneur au bénéfice d'une telle indemnité ait été définitivement consacré avant l'arrêt du 30 juin 2010 ;

En conséquence, l'allégation que l'action de la société Dugong serait prescrite au motif qu'elle n'a demandé pour la première fois le paiement d'une indemnité d'occupation que le 29 juin 2004 est sans portée, le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement de l'indemnité d'occupation étant constitué non par la date d'effet du congé mais par celle à laquelle est définitivement consacré dans son principe le droit du locataire au bénéfice d'une indemnité d'éviction;

Il s'ensuit que la demande par la SARL Dugong Investissement en fixation et paiement d'une indemnité d'occupation n'était donc pas prescrite au 29 juin 2004;

Sur le montant de l'indemnité d'occupation :

Selon M [V], la cour ne dispose pas d'éléments pour fixer l'indemnité d'occupation qui est déterminée conformément aux sections VI et VII du chapitre du code de commerce consacré aux baux commerciaux et il convient en tout état de cause de retenir un abattement de précarité de 30 % ;

La SARL Dugong fait valoir que le montant de l'indemnité d'occupation doit être déterminé d'après la valeur locative des locaux, que celle-ci a été fixée à la somme de 25.150 euros par l'expert, qu' il convient de soustraire à la somme de 264.075 euros due par M. [V] jusqu'au 31 décembre 2011 les paiements que ce dernier a effectués, soit 76.833,54 euros, afin d'aboutir à la somme de 187.241,46 euros HT.

Or l'indemnité d'occupation est déterminée, par référence aux sections VI et VII du chapitre des baux commerciaux, à la valeur locative de renouvellement dans des conditions exclusives de plafonnement, laquelle se distingue de la valeur locative de marché ;

L'expert a estimé la valeur locative de marché servant à la détermination du doit au bail à la somme de 275 €/m²; les locaux sont situés dans la dernière partie de la rue [Adresse 2], rue à sens unique, après la rue [Adresse 4] ; il s'agit selon l'expert d'un 'entre deux' commercial, la rue n'ayant de commerces que sur le coté impair ; les locaux dépendent d'un immeuble de standing correct édifié dans les années 30 ; ils se composent d'une boutique et de deux caves reliées à la boutique ; ils développent une grande façade vitrée de plus de 13 mètres sur 5,50 mètres de profondeur ; la situation des locaux à destination de commerce de librairie papeterie, articles de presse est décrite par l'expert comme d'intérêt local même si le preneur quoiqu' en situation de concurrence a su par sa notoriété attirer une clientèle plus large que celle du quartier mais le chiffre d'affaires est en baisse.

Le loyer contractuel plafonné aurait été de 7716 €/an , ce que l'expert estime être un loyer très faible, inférieur aux prix pratiqués dans le quartier;

La cour dispose des éléments de comparaison cités par l'expert et de l'ensemble des éléments d'appréciation pour apprécier la valeur locative de renouvellement et la fixer à la somme de 170 € /m² ce qui représente une indemnité de :

91, 45m²b x 165 = 15 089, 25 € dont à déduire un abattement de 10 % pour tenir compte de la précarité lié au congé qui empêche le preneur d'investir ou de céder son fonds, aucun argument n'étant invoqué pour justifier un abattement supérieur.

L'indemnité d'occupation doit donc être fixée à la somme de 13 580, 32 € par an arrondie à 13 580 € .

Il n'est pas contesté que M [V] a quitté les lieux le 31 décembre 2011; il reste redevable d'une indemnité totale de 13 580 x 6/12 + 13 580 x10 = 142 590 € dont à déduire les sommes dont il s'est acquitté.

Les intérêts au taux légal sur la somme restant due courront à compter de l'arrêt s'agissant d'une indemnité d'occupation .

Chaque partie supportera les dépens du présent arrêt à concurrence de ceux exposés, les dépens de l'arrêt partiellement cassé restant à la charge de la SARL Dugong Investissement .

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt de la cour de cassation du 17 octobre 2012,

Statuant dans la limite de la saisine,

Reformant le jugement déféré,

Dit que la demande de la société Dugong Investissement en paiement d'une indemnité d'occupation n'est pas prescrite,

Fixe le montant de cette indemnité due par M [V] à la SARL Dugong Investissement à compter du 1er juillet 2001 et jusqu'à son départ effectif des lieux au 31 décembre 2011 à la somme annuelle de 13 580 €.

Condamne M [V] à payer à la SARL Dugong Investissement la somme totale de 142 590 € dont à déduire la somme de 76 833, 54 € payée, le solde portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil .

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Dit que chacune d'elles supportera les dépens qu'elle a exposés.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/19874
Date de la décision : 08/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°12/19874 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-08;12.19874 ?
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