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25/09/2014 | FRANCE | N°13/08031

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 25 septembre 2014, 13/08031


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2014



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08031



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/05303





APPELANT



Monsieur [Q] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Marie

-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assisté de Me François DESLIERRES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0683







INTIMES



Monsieur [X] [M]

[Adre...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2014

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08031

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/05303

APPELANT

Monsieur [Q] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assisté de Me François DESLIERRES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0683

INTIMES

Monsieur [X] [M]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Non constitué

Monsieur [B] [R]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Thomas RONZEAU de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Assisté de Me Véronique CHIARINI, avocat au barreau de NIMES

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANG UEDOC Société Coopérative à Capital Variable inscrite au RCS de MONTPELLIER

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Bernard-Claude LEFEBVRE de l'Association LEFEBVRE HATEM-LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R031

Assistée de Me Candice CHAUVIDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R031

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Juin 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN

ARRET :

- Défaut,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

****************

Le 11 décembre 2007, Madame [J] [F] (51 % des parts) et la S.A.R.L. Promoz, ayant pour gérante Madame [V] [C] épouse [S], (49 % des parts) ont créé la S.A.R.L. [Adresse 5] Foncière, ayant pour objet la promotion, construction, rénovation, vente, location de tout bien immobilier, le montage technique et financier, la gestion et l'exploitation de tout bien ou projet immobilier et d'être marchand de biens, dont Madame [F] est la gérante. Elle a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'[Localité 4] sous le numéro 501 426 720, le 12 décembre 2007.

Par acte authentique reçu par Maître [R], notaire à [Localité 6], le 17 décembre 2007, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a consenti à la société [Adresse 5] Foncière un prêt d'acquisition et de travaux d'un montant de 480.000 euros, remboursable en 20 ans avec intérêts au taux contractuel de 5,61 % l'an, garanti par une inscription de privilège de prêteur de deniers à hauteur de 350.000 euros et une inscription d'hypothèque conventionnelle à hauteur de 130.000 euros, prises à la conservation des hypothèques de [Localité 5] le 25 janvier 2008, volume 2008 V n° 119 avec bordereau rectificatif en date du 13 février 2008,volume 2008 n° 223.

Aux termes de cet acte, Monsieur [X] [M], présent, et Monsieur [Q] [S], non présent et représenté par Monsieur [M], en vertu d'une procuration sous seing privé du 15 décembre 2007annexée à l'acte, se sont, chacun, portés caution solidaire du prêt au profit de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc dans la limite de 576.000 euros en principal, frais et accessoires pour une durée de 240 mois.

Par un acte authentique du même jour, la société [Adresse 5] Foncière a acheté un bien immobilier à usage professionnel, situé à [Localité 7], au prix de 350.000 euros payé par le prêt bancaire obtenu de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc.

Par jugement en date du 16 juin 2009, le tribunal de commerce de Nîmes a étendu la procédure de redressement judiciaire de la SAS Scoprom et de la SAS Scoprom Industrie ouverte depuis le 27 mai 2009 à la S.A.R.L. [Adresse 5] Foncière avec confusion des patrimoines et fictivité des entreprises. Par jugement du 30 juin 2009, il a prononcé sa liquidation judiciaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 août 2009, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a déclaré sa créance pour un montant de 463.772,37 euros à titre privilégié au titre du prêt du 17 décembre 2007 et pour un montant de 87.904,77 euros à titre chirographaire au titre du solde débiteur de compte.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2010, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a mis en demeure Monsieur [Q] [S], en sa qualité de caution, de lui régler sa créance, avant de l'assigner en paiement par acte d'huissier en date du 22 mars 2011.

Par actes d'huissier en date du 2 novembre 2011, Monsieur [Q] [S] a fait assigner en intervention forcée Maître [B] [R], notaire, et Monsieur [X] [M].

Par jugement en date du 28 mars 2013, le tribunal de grande instance de Paris a débouté Monsieur [Q] [S] de toutes ses demandes tant à l'encontre de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc qu'à l'encontre de Maître [R], notaire, et à l'encontre de Monsieur [X] [M], débouté Monsieur [Q] [S] de sa demande formée contre Monsieur [X] [M], débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc de ses demandes à l'encontre de Maître [R], notaire, condamné Monsieur [Q] [S] en sa qualité de caution de la société [Adresse 5] Foncière à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 499.869,63 euros, selon décompte provisoirement arrêté au 22 mars 2012, outre intérêts au taux légal postérieurs à cette date jusqu'à parfait paiement, ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, condamné Monsieur [Q] [S] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes, rejeté les autres demandes au titre des frais irrépétibles, condamné Monsieur [Q] [S] aux dépens.

La déclaration d'appel de Monsieur [Q] [S] a été remise au greffe de la cour le 19 avril 2013.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 30 avril 2014, Monsieur [Q] [S] demande l'infirmation du jugement déféré et à la cour, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

- constater la nullité de la procuration incluse dans l'acte notarié de prêt,

- constater qu'il n'a pas donné son engagement,

- constater, en conséquence, la nullité de l'engagement de caution qu'il n'a pas souscrit,

- dire que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc ne peut pas se prévaloir de l'engagement de caution à son encontre,

- débouter la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc de toutes ses demandes à son encontre,

A titre subsidiaire,

- constater que la banque a accordé un prêt à la société [Adresse 5] Foncière de manière inconsidérée et abusive,

- constater le manquement de la banque à son devoir d'information et de conseil à son égard,

- constater également la disproportion manifeste de son engagement de caution à ses biens et revenus de l'époque et donc la faute de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc,

- dire que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a engagé sa responsabilité contractuelle à son égard,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

- constater le manquement de la banque à son obligation d'information à son égard, prétendu caution, compte tenu de la nullité de l'engagement de ce dernier,

- dire que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc est, en conséquence, déchue du droit aux intérêts depuis la souscription de l'engagement de caution, soit depuis le 15 décembre 2007,

- dire que la créance de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc, purgée de tous intérêts contractuels, ne s'élève en tout état de cause qu'à la somme de 403.244,11 euros,

- ordonner la compensation entre les sommes dues par chaque partie à l'autre,

- dire que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc sera déboutée de sa demande au titre de la clause pénale,

- constater que Maître [R] a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle à son égard,

- condamner Maître [R] à lui verser la somme de 500.000 euros en réparation de son préjudice,

- constater que Monsieur [M] a commis une faute dans l'exécution du mandat qu'il lui a confié,

- condamner Monsieur [M] au paiement de l'intégralité de la somme due à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc au titre du prêt que cette dernière a consenti et à 50.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner Monsieur [M], cofidéjusseur, à le garantir à hauteur de 50 % des condamnations mises à sa charge,

- condamner solidairement la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc, Maître [R] et Monsieur [M] à lui verser la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 7 août 2013, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc demande de:

- la déclarer bien fondées en ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [S], en sa qualité de caution, à lui payer la somme de 499.869,63 euros arrêtée au 22 mars 2012 avec intérêts au taux légal à compter de cette date jusqu'à parfait paiement et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- débouter Monsieur [S] de ses demandes,

et subsidiairement, si la cour venait à infirmer partiellement le jugement déféré en considérant comme nulle la procuration incluse dans l'acte notarié constatant le prêt et à rejeter de ce fait la demande de condamnation de Monsieur [S] au titre de son engagement de caution, de :

- constater que Maître [R], notaire, a commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle à son égard,

- condamner Maître [R], notaire, à lui payer la somme de 499.869,63 arrêtée au 22 mars 2012 avec intérêts au taux légal à compter de cette date jusqu'à parfait paiement, en réparation de son préjudice résultant de l'impossibilité dans laquelle elle se trouverait de se prévaloir de l'engagement de caution de Monsieur [S],

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

et, en tout état de cause, de:

- condamner Monsieur [S] à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 24 juillet 2013, Maître [B] [R], notaire à [Localité 6], demande de :

- constater l'intention définitivement arrêtée par Monsieur [S] selon l'acte sous seing privé du 15 décembre 2007,

- constater l'absence de révocation de la procuration et l'absence d'informations contraires données au notaire,

- constater l'exécution sans réserve de la procuration par le mandataire en la personne de Monsieur [M],

- constater l'absence de faute du notaire, l'absence de préjudice et de relation de cause à effet,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [S] de ses demandes à son encontre et la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de ses demandes à son encontre,

- subsidiairement déclarer l'appel en garantie de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel à son encontre irrecevable et infondée,

- condamner Monsieur [S] à lui payer la somme de 5.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

Par acte d'huissier du 2 mai 2014 l'assignant et lui dénonçant ses dernières conclusions, Monsieur [Q] [S] a mis en cause Monsieur [X] [M] qui n'a pas comparu.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 mai 2014.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR

Considérant que Monsieur [Q] [S] soutient que le cautionnement dont se prévaut la banque est nul ; qu'il n'était pas présent à la signature de l'acte authentique du 17 décembre 2007 ; que, le 15 décembre 2007, il a établi un projet de procuration pour se porter caution solidaire au profit Monsieur [M] dans l'attente de la modification du contrat de prêt et des garanties y afférentes constituant une condition déterminante de son consentement ; que, dans cette attente, il a envoyé au notaire rédacteur de l'acte, une copie du projet de procuration en conservant l'original et qu'il a informé le notaire par téléphone qu'en l'absence de la modification demandée, il refusait de se porter caution ; qu'il n'a jamais envoyé l'original de sa procuration et n'a jamais signé les pages de l'offre de prêt ; que c'est par une erreur manifeste d'appréciation que les premiers juges n'ont pas retenu le faisceau d'indices démontrant qu'il n'a pas consenti à s'engager en qualité de caution par l'envoi d'une copie au lieu de l'original, ce qui suffisait, selon lui, à empêcher la signature de l'acte ou, à tout le moins, à l'engager comme caution ; qu'il n'a pas été informé de la date de la signature de l'acte et n'a pas pu intervenir avant qu'il ne soit signé ; que le notaire lui a réclamé l'original de sa procuration et qu'il n'y a pas donné de suite marquant son désaccord ; que, même si la copie de procuration comporte les mentions manuscrites prévues par l'article 1326 du code civil, le cautionnement est nul en l'absence d'original de la procuration ; que le notaire, qui a aussi commis des erreurs sur son adresse et son statut matrimonial, n'a pas vérifié sa volonté de s'engager par une copie de la procuration, ni la sincérité et la validité de son consentement, ni qu'il avait pleinement conscience des conséquences de son engagement alors qu'il était absent le jour de la signature ; qu'il a ainsi commis une faute qui engage sa responsabilité et l'oblige à réparer le préjudice subi dans l'hypothèse où le cautionnement litigieux serait considéré comme valable ; que Monsieur [M], qui était son mandataire, a également commis une faute en l'engageant en qualité de caution contre son gré et doit payer les sommes qu'il devrait payer à la banque en cas de condamnation ;

Considérant qu'en réponse, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc fait valoir que Monsieur [S] ne prouve pas que la procuration de se porter caution solidaire en son nom qu'il a donnée à Monsieur [M] était soumise à la modification du contrat de prêt et des garanties ; que cette procuration est conforme aux exigences de l'article 1326 du code civil ; qu'il n'est pas justifié des modifications substantielles qui auraient été attendues par Monsieur [S] pour qu'il confirme son cautionnement ; que l'appelant ne peut pas arguer du fait qu'il n'a pas été informé de la date de la signature de l'acte authentique puisqu'il a donné une procuration à son cofidéjusseur pour qu'il le représente sachant qu'il ne pouvait pas être présent ;

Considérant que Maître [R], notaire, fait valoir que la procuration n'a pas été révoquée par Monsieur [S] qui ne l'a jamais informé téléphoniquement de son désaccord sur les modalités du prêt et les garanties ; que cet acte est conforme aux exigences de l'article 1326 du code civil, qu'il est paraphé et que la signature de Monsieur [S] est certifiée conforme ; que l'erreur commise sur l'adresse de Monsieur [S] et son statut matrimonial dans les mentions d'état civil figurant dans l'acte authentique de prêt n'affecte pas la validité de son engagement ; qu'il n'a pas commis de faute engageant sa responsabilité ni envers Monsieur [S], ni envers la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc ;

Considérant que c'est pertinemment par des motifs exacts, que la cour fait siens, que les premiers juges ont écarté l'allégation de Monsieur [S] selon laquelle il aurait donné sa procuration à Monsieur [M] 'dans l'attente de la modification du contrat de prêt et des garanties' en l'absence de toute preuve au soutien du fait allégué et de l'absence de précision sur les modifications attendues conditionnant son accord ;

Considérant que la copie de la procuration annexée à l'acte de prêt n'est pas contestée dans son contenu, ni sa forme, ni dans l'écriture, ni dans la signature apposée qui est celle de Monsieur [S] certifiée conforme par la mairie du 14e arrondissement de Paris ; que cet acte, qui contient trois pages, comprenant l'état civil complet du mandant et du mandataire et toutes les caractéristiques du prêt constituant la dette cautionnée ainsi que des sûretés prises sur l'immeuble financé par le prêt consenti en cause, est paraphé à chaque page par Monsieur [S] ; qu'il donne expressément le pouvoir à Monsieur [M] de représenter Monsieur [S] ou, à défaut, à tout clerc de notaire de Maître [R], notaire à [Localité 6], pour se constituer caution solidaire en son nom de la société [Adresse 5] Foncière au profit de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc pour le prêt qui est l'objet du litige ; qu'il comporte les mentions manuscrites exigées par l'article 1326 du code civil et celles prévues par les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation ;

Considérant que la copie de la procuration, dont il n'est pas contesté qu'elle est conforme à l'original conservé par Monsieur [S], est valable ; que son contenu et la signature certifiée conforme de son auteur suffisent à établir la sincérité et la validité du consentement de la personne qui donne le pouvoir et s'engage en qualité de caution solidaire de la société [Adresse 5] Foncière envers la banque pour un montant déterminé pour une durée déterminée en parfaite conformité avec les exigences légales en matière de cautionnement ;

Considérant que Monsieur [S], ayant donné un pouvoir à son cofidéjusseur pour être représenté lors de la signature de l'acte de prêt chez le notaire, ne peut pas arguer de son absence lors de la signature de l'acte de prêt du 17 décembre 2007, ni d'une absence d'information sur la date prévue par la signature en vue de laquelle il a précisément établi la procuration contestée afin que son cautionnement puisse être recueilli dans l'acte, sans lequel il n'aurait pas pu être signé ; qu'il est, par ailleurs, établi par les mails produits que, le 13 décembre 2007, la clerc de notaire de Maître [R] a adressé à Monsieur [S] le modèle de procuration à régulariser en lui rappelant toutes les exigences légales, lui demandant de lui adresser par fax la procuration régularisée et de lui adresser l'original par courrier ; que si la copie de la procuration ainsi établie a été télétransmise par Monsieur [S] au notaire, il ne lui a jamais adressé l'original malgré une relance du 27 décembre 2007 ;

Considérant que l'exigence de l'original n'est pas nécessaire dès lors qu'il n'y a pas de doute sur la sincérité et la validité du mandat donné par le mandant à son mandataire de se constituer caution en son nom d'une dette parfaitement déterminée dans des termes qui satisfont aux exigences légales ; qu'il n'y a eu aucune révocation de la procuration donnée avant la signature de l'acte de prêt incriminé ;

Considérant que la copie de la procuration rédigée et signée par Monsieur [S], dont il n'est pas contesté qu'elle est parfaitement conforme à l'original, n'est pas nulle, pas plus que le cautionnement souscrit par Monsieur [S] qui l'engage ;

Considérant que la validité du cautionnement de Monsieur [S] exclut toute faute du notaire rédacteur de l'acte ; que l'erreur sur l'adresse du domicile de Monsieur [S] et son statut matrimonial affectant l'état civil de la caution en page 6 de l'acte notarié n'affecte pas la validité du cautionnement donné ;

Considérant qu'il n'y a pas davantage de faute de Monsieur [M] qui a exécuté le mandat qui lui a été confié dans les termes de la procuration donnée par son mandant ; que Monsieur [S] ne rapporte aucune preuve de son refus de se porter caution avant la signature de l'acte du 17 décembre 2007 ; que le courriel du 2 janvier 2008 adressé par Monsieur [S] à Monsieur [M] lui demandant : 'As-tu le nouveau texte caution bâtiment scoprom '' est sans lien avec le cautionnement du prêt consenti par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à la société [Adresse 5] Foncière et ne prouve rien ;

Considérant que Monsieur [Q] [S] soutient qu'il peut opposer au créancier toutes les exceptions inhérentes à la dette en application de l'article 2313 du code civil et que le prêt consenti par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à la société [Adresse 5] Foncière, immatriculée cinq jours avant la signature de l'acte de prêt, est abusif et a été accordé sans garantie de viabilité, ni analyse financière et sans aucune certitude sur la pérennité de la société ; que la banque a également manqué à son devoir de conseil et d'information envers lui-même ; qu'il est tiers à la société emprunteuse et n'est pas une caution avertie ; qu'il n'est ni le gérant, ni le dirigeant, ni associé de la société [Adresse 5] Foncière et qu'il n'en connaît pas la situation financière; que son activité professionnelle d'ingénieur ne fait pas de lui une caution avertie contrairement à ce qui été jugé par les premiers juges ; qu'il n'avait aucun intérêt financier à se porter caution d'une société dans laquelle sa femme était associée indirectement alors qu'ils sont mariés sous le régime de la séparation de biens ; qu'il aurait dû être mis en garde sur les risques inhérents à son engagement ; qu'il ajoute que l'acte notarié comporte une erreur sur l'adresse de son domicile et sur son statut matrimonial caractérisant la légèreté blâmable avec laquelle la banque a agi ; que le cautionnement litigieux est manifestement disproportionné à ses biens et revenus puisqu'il n'a que son salaire de 3.000 euros net par mois et aucun patrimoine propre ; que les revenus de capitaux fonciers, dont fait état, la banque sont à son épouse ; que l'immeuble acquis [Adresse 2] a été acheté à crédit et ne constitue pas un actif disponible ; qu'il se prévaut des dispositions de l'article L.341- 4 du code de la consommation et soutient que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel ne peut pas se prévaloir de son cautionnement ; qu'il prétend aussi que la banque a manqué à son obligation d'information annuelle de la caution prévue par l'article L.341-6 du code de la consommation, qu'il n'a jamais reçu aucune information depuis la souscription du cautionnement et que la banque doit être déchue de son droit aux intérêts contractuels de sorte qu'après imputation des intérêts payés par le débiteur principal, il ne pourrait devoir au plus que la somme de 403.244,11 euros de laquelle doit encore être déduite la somme de 32.162,03 euros réclamée au titre de la clause pénale ;

Considérant qu'en réponse, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc excipe de l'irrecevabilité de la demande de Monsieur [S] sur l'octroi d'un prêt excessif en se fondant sur les dispositions de l'article L.641-4 du code de commerce, donnant au seul liquidateur le pouvoir d'agir en ce sens ; que, sur le fond, elle fait valoir que le caractère récent de la société [Adresse 5] Foncière n'interdit pas de lui accorder un prêt destiné à lui permettre de se développer et qu'elle a remboursé le crédit pendant une année sans difficulté ; qu'elle estime que Monsieur [S], ingénieur des Ponts et Chaussées, président de la SAS Financière et commerciale Z Ficoz, société spécialisée dans la finance, et gérant de plusieurs sociétés civiles immobilières ayant une activité comparable à celle de la société cautionnée, est une caution avertie qui a les capacités intellectuelles pour comprendre la portée de son engagement et l'activité et les risques de la société [Adresse 5] Foncière ; qu'il n'est pas démontré qu'elle aurait eu des informations qu'il n'aurait pas eues sur la situation de la société cautionnée, pas plus qu'il y a eu un endettement excessif, ce qui exclut tout devoir de mise en garde ; que Monsieur [S], qui a déclaré percevoir des revenus annuels de 23.489 euros, des revenus de capitaux mobiliers de 74.880 euros et des revenus fonciers de 15.701 euros, soit un total de 114.070 euros en 2007, ne peut prétendre à aucun engagement disproportionné ; que c'est avec mauvaise foi que Monsieur [S] soutient que les revenus de capitaux et fonciers sont ceux de son épouse alors qu'il a obtenu un prêt d'un million d'euros en 2007 pour acheter l'appartement de [Adresse 2] correspondant à des remboursements mensuels de 6.331,89 euros qu'il exécute ; qu'en 2012, il a déclaré un revenu annuel de 140.961 euros excluant toute disproportion ; qu'elle précise qu'elle ne demande à Monsieur [S] aucun intérêt jusqu'au 7 juillet 2010 et seulement les intérêts au taux légal prévus par l'article 1153 du code civil après la mise en demeure ;

Considérant que c'est à tort que les premiers juges ont dit que Monsieur [S], poursuivi en paiement en tant que caution, ne peut pas opposer au créancier l'octroi d'un prêt abusif alors que la caution peut opposer au créancier qui la poursuit toutes les exceptions inhérentes à la dette comprenant l'octroi d'un crédit inadapté aux capacités financières de l'emprunteur en vertu de l'article 2313 du code civil ;

Considérant qu'en application de l'article 9 du code de procédure civile, il appartient à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de ses prétentions;

Considérant que Monsieur [S], qui se contente d'affirmer que le prêt est abusif en ce qu'il a été consenti à une société créée récemment et immatriculée cinq jours seulement avant l'octroi du crédit, ne rapporte aucune preuve du caractère excessif du prêt consenti qui a été remboursé pendant une année sans difficulté par la société emprunteuse que sa jeunesse n'empêche pas d'obtenir un concours bancaire ;

Considérant qu'à défaut de preuve contraire, il n'y a pas de prêt abusif ; que Monsieur [S] est mal fondé en ses moyens et demandes à ce titre ;

Considérant qu'en application de l'article L.341-4 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut pas se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face son obligation ;

Considérant qu'il ressort des avis d'imposition de l'année 2007 de Monsieur [S], qui s'est marié le [Date mariage 1] 2007, qu'il a déclaré un salaire annuel de 40.267 euros, des revenus fonciers de 19.701 euros et des revenus de capitaux mobiliers de 41.878 euros, soit un revenu mensuel de 8.400,00 euros compatibles avec les échéances de remboursement du prêt cautionné d'un montant mensuel de 3.331,75 euros ; qu'il n'est pas démontré que les revenus fonciers et mobiliers sont ceux de Madame [S], ce qui ne ressort pas des déclarations fiscales produites ; qu'il est, par ailleurs, justifié que, le 8 juillet 2010, Monsieur et Madame [S] ont fait l'acquisition d'un appartement, situé [Adresse 2], au prix de 1.150.000 euros financé par un prêt de 1.000.000 euros consenti par la société HSBC à Monsieur et Madame [S], remboursable en 20 ans par échéances mensuelles de 6.331,89 euros, démontrant une capacité d'endettement supposant des moyens financiers importants ; que ce bien appartient pour moitié à Monsieur [S], qui rembourse le crédit, et qu'il n'y a pas de communauté dans le régime de la séparation de biens entre époux, ce qui exclut l'application de l'article 1415 du code civil ; qu'il n'apparaît pas grevé d'hypothèque ;

Considérant qu'il se déduit de ces éléments qu'il n'y a pas de disproportion manifeste du cautionnement souscrit par Monsieur [S] à ses biens et revenus ; qu'il est mal fondé à opposer à la banque les dispositions de l'article L.341-4 du code de la consommation ;

Considérant que Monsieur [S], qui est ingénieur sorti d'une grande école et le gérant de plusieurs sociétés civiles exploitant des biens immobiliers, ne peut pas prétendre être une caution profane bien qu'il ne soit pas impliqué directement dans la société [Adresse 5] Foncière ; que ses capacités intellectuelles et son expérience lui ont permis de savoir ce qu'il faisait en s'engageant en tant que caution d'une société, dont la société gérée par son épouse était associée à 49 % ; que rien ne démontre que la banque avait des informations qu'il n'aurait pas eues sur les capacités financières de la société cautionnée ;

Considérant qu'il n'y a aucun manquement de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à ses obligations de conseil et de mise en garde envers Monsieur [S] qui doit être débouté de ses demandes en dommages-intérêts ;

Considérant que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc est ainsi bien fondée se prévaloir de l'engagement souscrit par Monsieur [S] à son profit et à lui demander de payer la dette cautionnée ;

Considérant qu'en application de l'article L.341-6 du code de la consommation, le créancier professionnel doit informer la caution personne physique chaque année du montant de la dette en principal, intérêts, frais et accessoires au 31 décembre avant le 31 mars de l'année suivante et qu'à défaut le créancier ne peut prétendre au paiement par la caution des intérêts contractuels et des pénalités ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc n'a pas adressé à Monsieur [S] l'information annuelle qui lui était due ; qu'ainsi la banque ne peut prétendre à aucun intérêt contractuel, ni au paiement de la clause pénale de 7 % du capital restant dû constituant une pénalité au sens du texte susvisé ;

Considérant que c'est, en conséquence, à bon droit que Monsieur [S] prétend imputer les paiements faits au titre des intérêts par le débiteur principal sur la créance réclamée par la banque à son égard en application de l'article L.313-22 du code monétaire et financier, qui le prévoit dans les rapports entre le créancier et la caution afin d'exclure tous intérêts contractuels de la dette que doit payer la caution qui n'a pas été tenue informée ;

Considérant qu'il est établi que le capital restant dû est de 457.104,00 euros au 30 juin 2009, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc ne justifiant pas de la somme supplémentaire réclamée en capital ; que les intérêts payés par la société [Adresse 5] Foncière se sont élevés à 1.600,11 euros en 2007, 26.005,93 euros en 2008 et à 12.936,67 euros en 2009 jusqu'au 30 juin, soit un total de 40.542,71 euros venant en déduction de la créance en principal de la banque contre Monsieur [S] ; qu'il doit ainsi payer la somme de 416.561,29 euros ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner Monsieur [S] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 416.561,29 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 mars 2012 en application de l'article 1153 du de civil ;

Considérant que les intérêts échus seront capitalisés pour une année entière conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

Considérant qu'en application de l'article 2310 du code civil, la caution qui est poursuivie en paiement par le créancier peut appeler en garantie son cofidéjusseur afin qu'il soit condamné à le garantir à proportion de ses parts et portions dans la contribution à la dette ;

Considérant que Monsieur [S] et Monsieur [M] s'étant, chacun, portés caution solidaire de la dette de la société [Adresse 5] Foncière envers la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc pour le paiement du prêt du 17 décembre 2007, Monsieur [S], qui est condamné à payer à la banque la somme de 416.561,29 euros, outre les intérêts, est fondé à demander que Monsieur [M] le garantisse de la moitié de la somme qu'il payera au créancier ;

Considérant qu'en conséquence le jugement déféré sera réformé en ses dispositions contraires au présent arrêt et confirmé pour le surplus ;

Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel et de Maître [R] le montant de leurs frais irrépétibles ; qu'il convient de condamner Monsieur [S] à payer à chacun d'eux la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que Monsieur [S], qui succombe presque en toutes ses demandes, sera condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [Q] [S] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 499.869,63 euros arrêtée au 22 mars 2012 avec intérêts au taux légal postérieurs et en ce qu'il a rejeté toutes les demandes de Monsieur [Q] [S] à l'encontre de Monsieur [X] [M],

Statuant à nouveau quant à ce et y ajoutant,

Dit que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc est déchue de son droit aux intérêts contractuels et pénalités en application de l'article L.341- 6 du code de la consommation,

Condamne Monsieur [Q] [S], en sa qualité de caution solidaire, à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 416.561,29 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2012 jusqu'à parfait paiement et anatocisme,

Condamne Monsieur [X] [M], en sa qualité de cofidéjusseur, à garantir Monsieur [Q] [S] à concurrence de la moitié de la condamnation prononcée à son encontre au profit de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc sur justification du paiement effectué entre les mains du créancier,

Condamne Monsieur [Q] [S] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [Q] [S] à payer à Maître [B] [R], notaire, la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Monsieur [Q] [S] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 13/08031
Date de la décision : 25/09/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°13/08031 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-25;13.08031 ?
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