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18/09/2014 | FRANCE | N°13/12617

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 18 septembre 2014, 13/12617


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12617



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2013 -Président du TGI de PARIS - RG n° 13/53847





APPELANTE



SOCIETE CIVILE DES MOUSQUETAIRES

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en c

ette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Assistée de Me Stéphanie MASKER de la SELAFA JEAN CLAUDE COULON ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0002

Représen...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12617

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2013 -Président du TGI de PARIS - RG n° 13/53847

APPELANTE

SOCIETE CIVILE DES MOUSQUETAIRES

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Assistée de Me Stéphanie MASKER de la SELAFA JEAN CLAUDE COULON ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0002

Représentée par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

INTIME

Monsieur [F] [N]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté et Assisté de Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Ayant pour avocat la SELARL ROUXEL CHAPALAIN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Juin 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Evelyne LOUYS, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Frédéric CHARLON, président

Madame Evelyne LOUYS, conseillère

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Frédéric CHARLON, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

Vu l'ordonnance rendue le 7 juin 2013 par laquelle le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en la forme des référés a':

- désigné M. [B] [M] en qualité d'expert aux fins d'évaluer, dans le cadre de l'article 1843-4 du code civil, la valeur actuelle et réelle des droits détenus par M. [N] dans la société civile à capital variable et de donner son avis sur les comptes entre les parties,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne M. [N] aux dépens';

Vu l'appel-nullité interjeté contre cette décision par la société civile des Mousquetaires le 24 juin 2013';

Vu les conclusions en date du 4 juin 2014 par lesquelles la société civile des Mousquetaires demande':

In limine litis :

- de dire que le président du tribunal de grande instance de Paris a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en refusant de laisser les arbitres statuer sur leur propre compétence en vertu de la clause compromissoire litigieuse,

En conséquence,

- d'annuler l'ordonnance déférée et renvoyer les parties à se pourvoir devant la juridiction arbitrale compétente,

A titre principal :

- de dire que le président du tribunal de grande instance de Paris a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en désignant un expert pour évaluer les parts d'un associé exclu d'une société à capital variable, alors que l'article L. 231-1 du code de commerce limite les droits des associés sortants au remboursement de leurs apports,

- de dire qu'en statuant ainsi, le président du tribunal de grande instance de Paris a encore méconnu l'étendue de ses pouvoirs en affirmant que l'expert désigné ne serait pas tenu de respecter les dispositions impératives de la loi qui régissent les sociétés à capital variable,

- de dire que le président du tribunal de grande instance de Paris a une nouvelle fois méconnu l'étendue de ses pouvoirs en désignant un expert pour évaluer les parts de M. [N] alors que ce dernier s'était d'ores et déjà engagé sur le prix de remboursement de ses apports,

En conséquence,

- d'annuler l'ordonnance déférée,

En tout état de cause :

- de condamner M. [N] à payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens.

Par conclusions du 10 juin 2014 M. [N] demande':

-de déclarer l'appel irrecevable,

- de confirmer la décision entreprise,

-de débouter la société civile des Mousquetaires de ses demandes,

- de la condamner aux dépens et au paiement de la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI';

Considérant que la société ITM Entreprises anime un groupement de la grande distribution sous plusieurs enseignes lui appartenant, dont la principale est «'Intermarché'»';

Que l'exploitation d'activités commerciales sous l'une de ces enseignes est effectuée en vertu de contrats de franchise par lesquels la société ITM Entreprises apporte aux entrepreneurs indépendants qui en bénéficient des éléments tels que son nom, ses marques, ses panonceaux, ses méthodes, son savoir-faire, ses services, ses systèmes de financement et ses moyens de contrôle de gestion, en contrepartie de quoi le franchisé doit verser à la société ITM Entreprises une cotisation équivalent à 0,50% de son chiffre d'affaires';

Considérant que le contrat de franchise comporte un article 68 selon lequel les parties conviennent de s'en remettre à une procédure d'arbitrage pour tous litiges pouvant survenir entre elles dans l'exécution du contrat ou de ses suites';

Que les fondateurs de la société ITM Entreprises ont par ailleurs créé une société civile à capital variable des Mousquetaires qui a pour objet essentiel de détenir le portefeuille des actions de la société ITM Entreprises';

Que le règlement intérieur de cette société civile prévoit notamment que «'lorsqu'un associé n'exerce plus de fonction de direction (') à la tête d'une entreprise exploitant un fonds de commerce sous l'une ou l'autre des enseignes appartenant à la société ITM Entreprises il fera l'objet d'une proposition d'exclusion (') à moins qu'il ne décide de présenter lui-même sa démission'»';

Considérant que M. [N] était à titre personnel propriétaire de soixante actions de la société ITM Entreprises, dont il avait fait l'apport à la société civile des Mousquetaires'et qu'il avait en outre conclu notamment avec la société ITM Entreprises et des sociétés dont il était le dirigeant, deux contrats de franchise de cette nature, pour l'exploitation de supermarchés à l'enseigne «'Intermarché'», le troisième contrat de franchise conclu avec son épouse ne le concernant pas';

Qu'en 2010 M. [N] a cessé ses activités de sorte que par décision du 25 mai 2011 l'assemblée générale des associés de la société civile des Mousquetaires a prononcé son exclusion en application du règlement intérieur et a fixé la valeur unitaire des parts sociales de M. [N] à 8.875,57 euros, a qui une somme de 532.534,20 euros a donc été remise en remboursement de ses soixante parts ;

Que M. [N] a cependant refusé cette évaluation et a demandé une conciliation puis, faute d'accord, a saisi le tribunal de grande instance de Paris en vue de la désignation d'un expert en application de l'article 1843-4 du code civil';

Considérant que par ordonnance rendue en la forme des référés le 7 juin 2013, le président du tribunal de grande instance de Paris a fait droit à cette demande et a désigné M. [B] [M] en qualité d'expert afin d'évaluer la valeur actuelle et réelle des droits détenus par M. [N] dans la société civile à capital variable et de donner son avis sur les comptes entre les parties';

Considérant qu'il résulte de l'article 1843-4 du code civil que la décision par laquelle le président du Tribunal de grande instance, statuant en application de ce texte, procède à la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur de droits sociaux, est sans recours possible ;

Qu'il n'est dérogé à cette disposition qu'en cas d'excès de pouvoir si bien qu'il convient de rechercher si le premier juge a commis un tel excès de pouvoir ;

Considérant en premier lieu que l'article 68, alinéa 1er des contrats de franchise stipule que « pour tous les litiges pouvant survenir entre elles, dans l'exécution des présentes ou de leurs suites, comme pour toutes difficultés d'interprétation des présentes, les parties conviennent définitivement de s'en remettre à une procédure d'arbitrage'»';

Que cette clause ne couvre pas les litiges liés à l'évaluation des parts sociales de la société civile à capital variable des Mousquetaires en cas d'exclusion d'un associé, litiges qui trouvent exclusivement leur source dans l'application des statuts et du règlement intérieur de cette société civile, laquelle, au demeurant, n'est ni partie aux contrats de franchise, ni même directement impliquée, à quelque titre que ce soit, dans leur exécution et dans les différends qui peuvent en résulter';

Qu'il apparaît dès lors, sans qu'aucune interprétation de la volonté des parties soit nécessaire, que la clause d'arbitrage insérée dans chacun des contrats de franchise est manifestement inapplicable au litige opposant la société civile des Mousquetaires à M. [N] quant à la valeur des droits sociaux de ce dernier';

Considérant en deuxième lieu qu'il résulte de la combinaison des articles L.231-1 du code de commerce et 1845-1 du code civil que les statuts les statuts des sociétés civiles peuvent stipuler que le capital social est susceptible d'augmentation par des versements successifs des associés ou l'admission d'associés nouveaux, et de diminution par la reprise totale ou partielle des apports effectués';

Que ces dispositions, qui ne créent aucune forme nouvelle de société, permettent seulement d'introduire, dans les statuts de sociétés entrant dans leur champ d'application, des clauses de variabilité du capital social et de prévoir un droit de reprise des apports, sans pour autant imposer que l'associé retrayant ou exclu ne retrouve que son investissement initial, ce que reconnaît d'ailleurs elle-même la société civile des Mousquetaires, puisque, dans ses conclusions, après avoir affirmé que l'associé qui se retire d'une société à capital variable n'a droit qu'au remboursement de ce qu'il a versé, elle précise que «'l'article L.231-1 du code de commerce n'interdit pas aux statuts d'octroyer à l'associé démissionnaire ou exclu une somme supérieure au montant de ses apports'»';

Qu'ainsi la clause de variabilité du capital social de la société civile des Mousquetaires ne saurait à elle seule faire obstacle à l'application de l'article 1843-4 du code civil';

Mais, en dernier lieu, considérant que l'article 16-4 des statuts de la société civile des

Mousquetaires stipule que « l'associé qui se retire ou est exclu est remboursé conformément à l'article 48 de la loi du 24 juillet 1867 de la fraction libérée et non amortie de son apport, diminuée de sa participation aux pertes éventuelles et augmentée, s'il y a lieu, de sa quote-part dans les bénéfices de la société mis en réserve, telles que ces réserves figurent sur le dernier bilan régulièrement approuvé'» et que «'l'assemblée générale extraordinaire réunie à l'issue de l'assemblée générale ordinaire statuant sur les comptes de l'exercice précédant le retrait ou l'exclusion d'un associé pourra toutefois décider que le montant du remboursement dû à l'associé qui se retire ou est exclu sera fixé à la valeur de souscription des parts, déterminée par application des dispositions de l'article 6 du règlement intérieur, dans la mesure où cette valeur est supérieure au montant de l'application de l'alinéa qui précède »';

Que par ailleurs l'article 6 du règlement intérieur de la société civile des Mousquetaires prévoit que «'chaque année au moment de la réunion de l'assemblée générale annuelle, la gérance proposera à l'assemblée générale une valeur de souscription des parts de la société civile des Mousquetaires, qui pourra (') être retenue par l'assemblée générale, conformément à l'article 16-4 des statuts, comme valeur de remboursement des parts des associés démissionnaires ou exclus'»'et que «'la valeur proposée par la gérance sera celle de l'année d'avant majorée d'un pourcentage représentant une plus-value de dix pour cent'», avec indexation sur l'indice des prix à la consommation, et que cette «'majoration n'interviendra que dans la mesure où le résultat net consolidé d'ITM Entreprises et de ses filiales sera au moins égal en valeur absolue, à l'augmentation des parts qui résulterait de l'application de la formule ci-dessus'»';

Considérant qu'en devenant associé de la société civile des Mousquetaires, M. [N] a adhéré à ces règles statutaires qui constituent la loi des parties au contrat de société, et qu'il a de la sorte accepté qu'en cas d'exclusion motivée par sa cessation des fonctions de direction à la tête d'une entreprise exploitant un fonds de commerce sous l'une des enseignes appartenant à la société ITM Entreprises, il serait remboursé de ses parts sociales à un prix déterminable selon une méthode précisément définie, comme il a adhéré à l'article 7b du règlement intérieur qui précise que «'pour toutes transactions concernant les parts qui viendraient à intervenir entre associés ou entre associés et la société, la valeur retenue sera celle fixée comme indiqué ci-dessus [dans l'article 6] ainsi que chaque associé s'y engage définitivement »';

Considérant qu'ainsi le rachat par la société civile des Mousquetaires des droits sociaux de M. [N] résulte de la simple mise en 'uvre d'une promesse unilatérale de vente librement consentie par celui-ci lorsqu'il est devenu adhérent de la société';

Que dans ces conditions l'article 1843-4 du code civil est inapplicable, ce dont il découle que le juge des référés du tribunal de grande instance a excédé ses pouvoirs en désignant un expert au visa de ce texte aux fins d'évaluer la valeur des droits de M. [N] dans la société civile des Mousquetaires'et qu'il convient en conséquence d'annuler la décision entreprise';

Considérant que M. [N], partie succombante, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel et devra conserver à sa charge ses frais irrépétibles'et verser à la société civile à capital variable des Mousquetaires la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

PAR CES MOTIFS'

ANNULE l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris le 7 juin 2013';

CONDAMNE M. [N] aux dépens de première instance et d'appel';

LAISSE à sa charge ses frais irrépétibles';

CONDAMNE M. [N] à payer à la société civile à capital variable des Mousquetaires la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

ACCORDE à Maître Marie-Laure Bonaldi-Nut, qui en fait la demande, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 13/12617
Date de la décision : 18/09/2014
Sens de l'arrêt : Annulation

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°13/12617 : Annule la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-18;13.12617 ?
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