La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2014 | FRANCE | N°12/14468

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 17 septembre 2014, 12/14468


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2014



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14468



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Avril 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/16731



APPELANTES



LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES représentés par la SA LLOYD'S FRANCE SAS ayant son siège social



[Adresse 5]

[Localité 5]



Représentée par : Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée de : Me Caroline YAMADJAKO AUBRY, avocat a...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2014

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14468

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Avril 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/16731

APPELANTES

LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES représentés par la SA LLOYD'S FRANCE SAS ayant son siège social

[Adresse 5]

[Localité 5]

Représentée par : Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée de : Me Caroline YAMADJAKO AUBRY, avocat au barreau de Paris, toque : E668, substituant Me Yanick HOULE, avocat au barreau de Paris, toque : C1743

SCI LES HERBIERS agissant en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 3]

Représentée par : Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée de : Me Caroline YAMADJAKO AUBRY, avocat au barreau de Paris, toque : E668, substituant Me Yanick HOULE, avocat au barreau de Paris, toque : C1743

SAS LE ROY LOGISTIQUE agissant en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 3]

Représentée par : Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée de : Me Caroline YAMADJAKO AUBRY, avocat au barreau de Paris, toque : E668, substituant Me Yanick HOULE, avocat au barreau de Paris, toque : C1743

INTIMEES

SARL CEPI INGENIERIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représentée par : Me Elise NIVAUD-PELLETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0071

Assistée de : Me Charlotte JOLY plaidant pour le Cabinet ARTEMIS, substituant Me VEYRIER du Cabinet ARTEMIS, avocats au barreau de POITIERS

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par : Me Elise NIVAUD-PELLETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0071

Assistée de : Me Charlotte JOLY plaidant pour le Cabinet ARTEMIS, substituant Me VEYRIER du Cabinet ARTEMIS, avocats au barreau de POITIERS

Société GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par : Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de : Me Matthieu MALNOY, avocat au barreau de Paris, toque : D1226

Société CRAMA CENTRE ATLANTIQUE prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 7]

SARL PASQUIET EQUIPEMENTS

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée et assistée par : Me Marie-Pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295

SARL NICOT ARCHITECTE

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par : Me Elise NIVAUD-PELLETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0071

Assistée de : Me Charlotte JOLY plaidant pour le Cabinet ARTEMIS, substituant Me VEYRIER du Cabinet ARTEMIS, avocats au barreau de POITIERS

SA CENTRE TECHNIQUE DE L'APAVE NORD-OUEST agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par : Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

Assistée de : Me Sandrine MARIÉ plaidant pour la Selarl Sandrine MARIÉ, avocat au barreau de Paris, toque : C168

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mai 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre

Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère

Madame Maryse LESAULT, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Guillaume MARESCHAL

ARRET :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre et par Madame Corine COLLIN, Greffier présent lors du prononcé.

*******

La SCI LES HERBIERS 'groupe LEROY LOGISTIQUE' a assuré la maîtrise d'ouvrage de la construction d'un bâtiment de stockage et plate-forme logistique, devant être exploité par la société LEROY LOGISTIQUE, qui est assurée auprès des SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES.

Sont intervenus à la construction :

- la société NICOT ARCHITECTURE assurée auprès de la MAF en qualité de maître d'oeuvre,

- le bureau d'études CEPI pour la définition des lots techniques fluides,

- la société PASQUIET EQUIPEMENTS assurée auprès de la société GROUPAMA ou CRAMA pour l'installation du chauffage,

- le bureau de contrôle CETE APAVE, pour le contrôle technique.

Le bâtiment a été réceptionné le 17 mars 2006 avec réserves.

La chaufferie a été mise en service le 22 janvier 2007.

Le 17 février 2007 une explosion suivie d'un incendie a détruit le local abritant la chaufferie et abritant une chaudière à gaz alimentant l'eau des sprinklers.

Une expertise judiciaire a été ordonnée par le juge des référés et M. [C] désigné expert a déposé un rapport en décembre 2009.

Les sociétés LEROY LOGISTIQUE, LES HERBIERS, et LES SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES ont assigné les constructeurs et intervenants en réparation de leurs préjudices et des appels en garantie ont été effectués.

Par jugement du 10 avril 2012 le tribunal de grande instance de Paris a débouté la société LEROY LOGISTIQUE, la SCI LES HERBIERS et les SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES de leurs demandes à l'encontre de la société PASQUIET EQUIPEMENTS, de M.[X], du CETE APAVE, de la société BET CEPI INGENIERIE et de leurs assureurs, et les a condamnées à supporter les dépens et frais irrépétibles.

Les premiers juges ont retenu que l'ouvrage de chaufferie n'avait pas été réceptionné, que les éléments du rapport d'expertise étaient empreints de contradictions et ne permettaient pas de déterminer la cause de l'explosion et d'établir des responsabilités.

Les sociétés LEROY LOGISTIQUE, LES HERBIERS, et LES SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES ont fait appel.

Dans leurs conclusions du 18 mars 2014 ils demandent à la cour de réformer le jugement, d'homologuer le rapport d'expertise judiciaire, de condamner in solidum les sociétés PASQUIET EQUIPEMENTS, NICOT ARCHITECTE, CRAMA, AGF, CETE APAVE NORD OUEST, CEPI à leur payer la somme de 222.020,12€ sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, subsidiairement sur le fondement des articles 1134,1142, 1147 ou encore subsidiairement 1382 du même code, de fixer le point de départ des intérêts au taux légal au11 juin 2007 date de l'assignation en référé, d'ordonner la capitalisation des intérêts, de condamner les succombants au paiement de la somme de 50.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions du 25 octobre 2013 les sociétés NICOT ARCHITECTURE, BET CEPI INGENIERIE, et MAF sollicitent le rejet des demandes formulées par les appelantes en l'absence de démonstration de leur qualité à agir et en l'absence de fondement juridique déterminé, demandent la confirmation du jugement et le débouté des appelantes, subsidiairement elles sollicitent leur mise hors de cause et en cas de condamnation la garantie par les sociétés PASQUIET, GROUPAMA CRAMA, et APAVE.

Elles réclament une somme de 6500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 24 février 2014 la société PASQUIET EQUIPEMENTS demande la confirmation du jugement, sa mise hors de cause, subsidiairement la garantie des sociétés NICOT ARCHITECTE, CEPI INGENIERIE, MAF, APAVE, GROUPAMA CRAMA CENTRE ATLANTIQUE et elle réclame une somme de 10.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions du 5 mars 2014 les sociétés CRAMA CENTRE ATLANTIQUE et GROUPAMA demandent de dire que la société GROUPAMA n'est pas l'assureur de la société PASQUIET et doit être mise hors de cause.

Elles demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes, et subsidiairement la CRAMA demande à n'être tenue que dans les limites de sa police soit à hauteur maximale de 22.649,43€ avec déduction d'une franchise d'un montant correspondant à 4,54 fois l'indice BT 01.

En cas de condamnation la CRAMA réclame la garantie des sociétés NICOT ARCHITECTE, MAF, CEPI INGENIERIE.

La CRAMA sollicite une somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la société GROUPAMA une somme de 3000€ sur le même fondement.

Dans ses conclusions du 27 mars 2014 la société CETE APAVE NORD OUEST demande la confirmation du jugement, le débouté de toutes demandes à son encontre, subsidiairement la condamnation des sociétés PASQUIET, NICOT, CEPI INGENIERIE, MAF, LEROY LOGISTIQUE, LES HERBIERS, LES SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES à la garantir.

Elle réclame une somme de 4000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour se réfère pour plus ample exposé des demandes aux conclusions ainsi visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande fondée sur les articles 1792 et suivants du code civil :

En sa qualité de maître d'ouvrage la société LES HERBIERS dispose d'un droit à agir en réparation des dommages sur le fondement de l'article 1792 du code civil à l'encontre des constructeurs et assureurs.

La société LEROY LOGISTIQUE propriétaire des bâtiments d'exploitation qui ont été détruits par l'explosion a également qualité à agir sur le même fondement.

En revanche la société LES SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES, assureur de la société LEROY LOGISTIQUE doit justifier être subrogée dans les droits de son assurée pour disposer de la qualité à agir en indemnisation, et ne fait pas cette preuve. Elle sera donc déclarée irrecevable en ses demandes.

Les appelantes soutiennent la réception de l'ouvrage de chaufferie en exposant que les autres travaux avaient été formellement réceptionnés le 17 mars 2006 alors que la chaufferie n'était pas achevée, que les travaux de la chaufferie ont été achevés ensuite et que la mise en service de la chaufferie le 22 janvier 2007 signifie une réception tacite de cet ouvrage.

Toutefois le procès-verbal de réception de l'ensemble des travaux en date du 17 mars 2006 comporte un certain nombre de réserves, concernant notamment l'absence de finition du lot chauffage ventilation, dont la chaufferie, avec précision des divers points restant à réaliser et/ou à compléter. Il est mentionné dans ce procès-verbal que ces finitions feront l'objet d'un constat ultérieur.

Les pièces versées aux débats établissent que le 22 janvier 2007 la société BAXI a mis en service l'installation de la chaufferie à la demande de la société PASQUIET installateur.

Cependant rien ne permet de dire que cette mise en service permettait de lever l'ensemble des réserves figurant sur le procès-verbal de réception et a manifesté une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir, alors même qu'aucune vérification contradictoire de cet ouvrage par quiconque n'apparaît être intervenue.

Le bref laps de temps ayant séparé cette mise en service de l'explosion du 17 février 2007 ne permet pas de conclure à une telle réception tacite du fait d'une utilisation prolongée.

La cour ne retiendra donc pas l'application des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil.

Sur les responsabilités contractuelles recherchées par les appelantes:

La SCI maître d'ouvrage et co-contractant des locateurs d'ouvrage et la société LEROY LOGISTIQUE propriétaire des locaux endommagés et qui bénéficie de tous droits et actions transmis par la SCI ont qualité à agir à l'encontre de ces locateurs sur le fondement contractuel. À défaut de justifier d'être subrogé dans les droits de son assurée le groupement LES SOUSCRIPTEURS DES LLOYD'S DE LONDRES est irrecevable en ses demandes.

Sur les causes du sinistre :

Les conclusions de l'expert sont les suivantes :

- à l'occasion d'une modification de type de gaz alimentant la chaudière, le brûleur initialement prévu pour fonctionner au gaz de ville n'étant pas adapté pour le gaz propane a été remplacé par un brûleur adéquat dont la forme de l'avaloir était différente de celui équipant le brûleur initialement installé ;

- la garde au sol se trouvant insuffisante, une cuvette a été creusée sous le nouveau brûleur, à défaut de rehausser l'ensemble de la chaudière.

- il a été relevé une anomalie dans l'assemblage d'un robinet sur une canalisation de purge de réseau d'alimentation gaz.

- cette anomalie a été la source d'une fuite progressive de gaz propane dans le local chaufferie.

- le propane est plus lourd que l'air, il s'est déposé par gravité dans la cuvette sous le brûleur, point bas du local.

- le mélange air/gaz s'est introduit dans le corps de chauffe en phase balayage dans des proportions fatales d'explosivité. L'étincelle en séquence d'allumage a provoqué la déflagration en interne de la chaudière avec une onde de choc amplifiée qui a détérioré les installations environnantes.

- l'explosion est la conséquence d'une série de phénomènes en chaîne :

* fuite sur un raccord assemblé avec un système inapproprié (imputable à l'installateur)

* contrôle défaillant des équipements (imputable à l'organisme de contrôle et au maître d'oeuvre)

* modification de la conception du brûleur en cours de chantier avec pour conséquence le creusement d'une cuvette et pour effet de collecter le gaz propane (imputable à la maîtrise d'oeuvre, au bureau d'études et à la maîtrise d'ouvrage)

Toutefois comme le soutiennent les intimés et comme l'ont relevé les premiers juges certaines interrogations subsistent :

- il est relaté page 35 du rapport, à titre d'hypothèse, le fait que du gaz stagnant dans la fosse sous le brûleur a été introduit lors du balayage dans le corps de chauffe mais l'expert précise immédiatement : 'dans cette hypothèse la flamme qui accompagne la déflagration aurait laissé des traces dans le local'. Or l'expert, qui retient finalement cette hypothèse comme cause du sinistre n'indique cependant pas avoir constaté de traces en correspondance dans le local et n'explique pas cette contradiction dans son rapport.

- il a été constaté le 20 mai 2008 la fuite sur le robinet de purge et ce jour là l'expert a reconnu que ce robinet avait été soumis aux torchères de gaz enflammé lors du sinistre ce qui pourrait expliquer les détériorations entraînant les fuites.

L'examen attentif de ce robinet a permis ensuite à l'expert de constater qu'en raison d'un assemblage inadapté à la canalisation, le serrage d'un pas de vis entraînait le desserrage d'un autre et que le matériel avait été réassemblé par brasure. Il en a déduit que cet assemblage avait été fragilisé au fil du temps du fait des vibrations dues au passage du fluide et qu'il s'agissait de la cause du sinistre.

Mais force est de constater qu'il s'agit là d'une hypothèse, puisque, au regard de l'état des matériels après incendie, la cause de la détérioration effective de l'assemblage ne peut être déterminée avec certitude.

Si l'hypothèse retenue in fine par l'expert apparaît plausible, des incertitudes demeurent donc, qui empêchent d'établir l'origine précise du sinistre.

L'ouvrage n'ayant pas été réceptionné, la société PASQUIET était débitrice d'une obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vices.

A ce titre elle doit donc la réparation des dommages puisque quelle que soit la cause précise des dommages ceux-ci proviennent de vices internes du système de chauffage et non d'une cause étrangère, à aucun moment retenue par quiconque.

Le maître d'oeuvre et le bureau d'études CEPI qui sont liés par contrats respectifs du 5 juin 2005 et du 10 juin 2005 avec le maître ou le propriétaire de l'ouvrage sont débiteurs d'une simple obligation de moyens et leur faute ayant contribué à la réalisation des dommages doit être prouvée. En l'état des incertitudes sur la cause des dommages, et alors que la réception n'ayant pas été prononcée il ne peut être reproché aux maîtres d'oeuvre aucun manquement à leur devoir de vérification des travaux, cette faute n'est pas caractérisée, étant observé de surcroît que la fragilité affectant l'exécution de l'ouvrage retenue par l'expert aurait pu échapper à un maître d'oeuvre d'exécution normalement diligent.

Le contrôleur technique est débiteur également d'une obligation de moyens dans les limites de l'intervention prévue par son contrat. Or s'il a déposé un rapport avant la réception ainsi qu'un autre rapport en juillet 2006, il n'a pu effectuer de contrôle technique de l'ouvrage de chaufferie exécuté postérieurement, cela ne lui ayant pas été demandé entre cette exécution et l'explosion.

Dès lors que les causes du dommage ne sont pas imputées à d'autre origine que celles relatives à cet ouvrage non encore réalisé, la responsabilité du contrôleur technique ne peut être retenue.

Sur les réparations :

L'expert a chiffré le coût des reprises à 226.020,12€, correspondant selon lui pour 105.160,82€ à des mesures conservatoires, pour 43.622,06€ à des remises en état du local sprinkler, pour 64.953,26€ à la remise en état de la chaufferie, pour 11.036,03€ à des 'prestations intellectuelles' telles que diagnostic et contrôle technique, pour 960,95€ à divers frais.

Le montant de ces différents postes et le montant de 226.020,12€ ne font pas l'objet de discussions.

La société GROUPAMA SA déclare ne pas être l'assureur de la société PASQUIET mais être une caisse de réassurance des caisses régionales de GROUPAMA.

La police produite mentionne que l'assureur est la caisse locale à laquelle se substitue la caisse régionale des ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES. La CRAMA CENTRE ATLANTIQUE étant l'acronyme de cette caisse régionale de GROUPAMA, et reconnaissant être l'assureur, la société GROUPAMA SA sera mise hors de cause, sans toutefois qu'il soit justifié de faire droit à sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La CRAMA garantit outre la responsabilité décennale de la société PASQUIET non engagée en l'espèce, sa responsabilité civile professionnelle suivant différentes attestations produites aux débats.

L'une valable du 01/01/ 2004 au 31/12/2004 fait référence à un contrat numéro 3290378.

Une autre valable du 01/01/2006 au 31/12/2006 fait référence à un contrat numéro 0375478.

La troisième valable pour la période du 01/01/2007 au 31/12 /2008 fait référence à un contrat numéro 2252534.

Au regard de la date du sinistre ce dernier contrat est mobilisable.

L'attestation mentionne que la garantie couverte est celle de la responsabilité civile délictuelle et contractuelle pouvant incomber à l'assuré en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers, résultant d'accident, d'incendie, d'explosion et du dégât des eaux, survenus à l'occasion de l'activité professionnelle de l'assuré.

La CRAMA produit un exemplaire des conditions générales de la police dont la société PASQUIET ne conteste pas qu'il s'agisse de celles applicables en l'espèce. Il en résulte, aux termes du chapitre 1 relatif à la responsabilité avant réception, que sont exclus les dommages atteignant les travaux ou ouvrages faisant l'objet de l'opération de construction, ainsi que ceux subis par les travaux ou ouvrages exécutés sur les existants, les frais incombant à l'assuré pour réparer , améliorer , remplacer , refaire tout ou partie des travaux des produits marchandises matériels fournis ou prestations exécutées ou pour leur en substituer d'autres, même de nature différente, ainsi que la perte qu'il subit lorsqu'il est tenu d'en rembourser le prix.

Par ailleurs les seuls dommages immatériels garantis sont les dommages consécutifs aux dommages corporels ou matériels garantis.

En l'espèce, comme le soutient la CRAMA, les dommages garantis ne peuvent donc comprendre les reprises de l'ouvrage dû par la société PASQUIET reprises chiffrées à hauteur de 47.716,89€ ni les préjudices immatériels afférents à la reprise soit les mesures conservatoires ou de chauffage provisoire chiffrées à 76.068,15€ et 26.736,98€.

La somme de 226.020,12- 150.522,02 soit 75.498,10€ telle que chiffrée dans les écritures de la CRAMA sera donc retenue comme étant la limite de la garantie due par celle-ci. Il n'y a pas lieu au regard de l'absence de cause établie quant aux dommages de procéder à un partage de responsabilité et à une réduction à ce titre de la somme due par l'assureur.

En revanche s'agissant d'une assurance non obligatoire la CRAMA est fondée à opposer aux tiers les limites de sa police, dont la société PASQUIET ne conteste pas qu'elle comporte une franchise de 15% du sinistre avec un minimum de 0,90 fois la valeur en euros de l'indice BT01 et un maximum de 4,54 fois la valeur en euros de cet indice.

Les appelantes demandent que les intérêts de sommes allouées courent à compter de l'assignation en référé, avec capitalisation.

Il s'agit toutefois non d'une créance due depuis cette date mais de sommes allouées à titre indemnitaire nécessitant une reconnaissance judiciaire avant d'être due. Afin de réparer l'entier dommage seule une revalorisation, pour tenir compte du temps écoulé depuis leur évaluation est à retenir.

En conséquence la cour allouera les indemnités retenues avec intérêts reportés au 11 juin 2007 comme réclamé. La demande d'anatocisme sera admise, étant rappelé que son point de départ doit être celui de la première demande qui en a été faite en justice en ce sens.

Les dépens suivent le sort du principal et en l'espèce doivent être mis à la charge de la CRAMA de même qu'une somme de 6.000€ qu'il y a lieu d'allouer aux sociétés LEROY LOGISTIQUE et SCI LES HERBIERS prises ensemble. Les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile doivent être rejetées pour des motifs d'équité.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les demandes des souscripteurs des LLOYD'S DE LONDRES.

Infirme le jugement et statuant à nouveau,

Condamne in solidum sur le fondement de l'article 1147 du code civil la société PASQUIET et la CRAMA CENTRE ATLANTIQUE, celle-ci garantissant celle-là, à payer aux sociétés LEROY LOGISTIQUE et LES HERBIERS, prises ensemble, la somme de 75.498,10€ avec intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2007.

Dit que la société CRAMA CENTRE ATLANTIQUE n'est tenue que sous déduction de sa franchise égale à 15 % du sinistre avec un minimum de 0,9 fois la valeur en euros au jour du paiement de l'indice BT 01 et un maximum de 4,54 fois cette valeur.

Condamne sur le fondement de l'article 1147 du code civil la société PASQUIET à payer aux sociétés LEROY LOGISTIQUE et LES HERBIERS, prises ensemble, la somme de 150.522,02€ avec intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2007 et capitalisation des intérêts à compter de la demande, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

Condamne la CRAMA CENTRE ATLANTIQUE aux dépens comprenant les frais d'expertise et au paiement aux sociétés LEROY LOGISTIQUE et LES HERBIERS prises ensemble d'une somme de 6000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Autorise le recouvrement des dépens par les avocats de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/14468
Date de la décision : 17/09/2014

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°12/14468 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-17;12.14468 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award