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10/09/2014 | FRANCE | N°10/24621

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 10 septembre 2014, 10/24621


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 10 SEPTEMBRE 2014



(n° 265 , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/24621



Décisions déférées à la Cour :

- Jugement du 13 Juillet 2010 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2005F01718 (Appel enregistré à la Cour sous le RG 10/24621 et 11/07783)

- Jugement du 24 Septembre 2010 -Tribunal de Commerce de BOB

IGNY - RG n° 2010F01131 (Appel enregistré à la Cour sous le RG 10/24882)





PARTIES:



L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE LA SEINE SAINT DENIS agissant poursuites ...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 10 SEPTEMBRE 2014

(n° 265 , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/24621

Décisions déférées à la Cour :

- Jugement du 13 Juillet 2010 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2005F01718 (Appel enregistré à la Cour sous le RG 10/24621 et 11/07783)

- Jugement du 24 Septembre 2010 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2010F01131 (Appel enregistré à la Cour sous le RG 10/24882)

PARTIES:

L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE LA SEINE SAINT DENIS agissant poursuites et diligences de Monsieur le Bâtonnier

Maison de l'Avocat et du Droit

[Adresse 1]

[Localité 3].

Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque J151.

Assisté de Me Yves BILLET, avocat au barreau de Seine Saint Denis, toque T180.

APPELANT DANS LES DOSSIERS RG 10/24621ET RG 11/07783)

La SAS SAINT CHAMOND DISTRIBUTION agissant en la personne de son président

[Adresse 6]

[Adresse 5]

[Localité 1].

Représentée par Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque K0148.

Assistée de Me LASMARI, avocat au barreau de PARIS, toque C181.

APPELANTE DANS LE DOSSIER RG 10/24882

INTIMEE DANS LE DOSSIER RG 10/24621

La Société CFC EXPERT prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 4].

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020.

Assistée de Me DE BELLOY, avocat au barreau de PARIS, toque R191.

INTIMEE DANS LES DOSSIERS RG 10/24621ET 10/24882

LE SYNDICAT DES CONSEILS OPERATIONNELS EN OPTIMISATION DES COUTS 'SYNCOST' prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 2].

Représenté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque J125.

Assisté de Me VAN CAUWELAERT, avocat au barreau de PARIS, toque T07.

INTIME DANS LES DOSSIERS RG 10/24621, 10/24882 ET 11/07783

M. [B] [D]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Assigné en appel provoqué

Représenté par Me Baudouin DUBELLOY, avocat au Barreau de Paris, toque C 2090

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jacques BICHARD, Président

Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère

Madame Françoise LUCAT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL

ARRET :

- contradictoire,

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jacques BICHARD, président et par Madame Sabine DAYAN, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

XXXX

Le 4 mai 2005, la société Saint- Chamond a signé avec la société CFC Expert une convention dénommée 'Convention expertise de la tarification des risques professionnels', la société CFC Expert s'engageant ' à procéder à l'analyse des éléments servant de base de calcul du Taux Accidents du travail 2005 aux fins de permettre, s'il y a lieu, la réduction du montant des cotisations' .

Estimant que la société CFC Expertise proposait des prestations juridiques de façon illégale, la société Saint- Chamond a décidé de mettre un terme à ses relations contractuelles et a sollicité le 26 août 2005 la restitution de ses dossiers .

Et c'est donc dans ces circonstances que par acte du 16 novembre 2005 elle l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Bobigny aux fins essentiellement d'entendre prononcer la nullité du contrat conclu et d'obtenir sous astreinte la restitution de ses dossiers .

Par acte des 28 décembre 2006 et 2 janvier 2007, la société CFC Expert a assigné en intervention forcée et garantie, M. [B] [D], d'une part et d'autre part la Selarl [D] et Maître [B] [D] .

Par la suite sont intervenus volontairement à la procédure l'ordre des avocats du barreau de Seine Saint-Denis, le syndicat des conseils opérationnels en optimisation des coûts ( SYNCOST ), la société de droit luxembourgeois BEJ, la société COVEA RISKS en sa qualité d'assureur de la Selarl [D] et Maître [B] [D], ainsi que la société de droit anglais PCMG .

Par jugement du 20 janvier 2009, le tribunal s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes concernant la Selarl [D] et Maître [B] [D] au profit du tribunal de grande instance d'Evry et a renvoyé l'affaire principale à une audience ultérieure .

Par jugement du 13 juillet 2010, rectifié par décision du 24 septembre 2010, le tribunal a, avec exécution provisoire :

- dit que COVEA RISKS n'est plus dans la cause,

- reçu l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis et le SYNCOST en leur intervention volontaire à titre principale,

- dit les sociétés BEJ et PCMG irrecevables en leur intervention volontaire,

- débouté la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis de leur demande en annulation du contrat du 4 mai 2005 et de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Saint-Chamond Distribution de sa demande en restitution de pièces et de dommages intérêts pour résistance abusive,

- débouté l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis de sa demande en dommages intérêts et de publication,

- condamné la société Saint-Chamond Distribution à payer à la société CFC Expert la somme de 11545 euros à titre de dédommagement et a débouté la société CFC Expert de sa demande portant sur les intérêts à compter du 28 décembre 2006,

- débouté la la société CFC Expert de sa demande en dommages intérêts pour préjudice moral et de sa demande de garantie de M. [B] [D],

- débouté M. [B] [D] de sa demande en dommages intérêts pour procédure abusive,

- dit n'y avoir lieu à se prononcer sur la demande présentée par le SYNCOST de juger que l'activité de ses membres se situe hors du champ d'application de la loi du 31 décembre 1971 modifiée,

- dit qu'il n'y a lieu à énoncer ce que les entreprises qualifiées OPQCM sont autorisées à faire,

- dit qu'il n'y a lieu ni à se prononcer sur la compatibilité avec le droit communautaire de l'interprétation de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, ni à poser une question préjudicielle à la cour de justice européenne,

- débouté le SYNCOST de sa demande en dommages intérêts à l'encontre de la société Saint-Chamond Distribution et de l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis,

- débouté l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis de sa demande de dommages intérêts dirigée contre les sociétés BEJ et PCMG,

- condamné solidairement la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 10 000 euros à la société CFC Expert et celle de 5 000 euros au SYNCOST,

- débouté la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société CFC Expert à payer à M. [B] [D] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [B] [D] du surplus de ses demandes,

- condamné par parts égales la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis aux dépens .

***

Vu les déclarations d'appel déposées par la société Saint-Chamond Distribution à l'encontre de la société CFC Expert et du SYNCOST et par l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis à l'encontre de la société CFC Expert, de la société Saint-Chamond Distribution et du SYNCOST .

Vu les dernières conclusions :

- prononcer la nullité du contrat conclu le 4 mai 2005,

- condamner la société CFC Expert à lui remettre l'ensemble des dossiers et des pièces sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à rendre, à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour rétention et résistance abusives et une indemnité de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a :

* dit n'y avoir lieu à se prononcer sur la demande présentée par le SYNCOST de juger que l'activité de ses membres se situe hors du champ d'application de la loi du 31 décembre 1971 modifiée,

* dit qu'il n'y a lieu à énoncer ce que les entreprises qualifiées OPQCM sont autorisées à faire,

* dit qu'il n'y a lieu ni à se prononcer sur la compatibilité avec le droit communautaire de l'interprétation de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, ni à poser une question préjudicielle à la cour de justice européenne,

* débouté le SYNCOST de sa demande en dommages intérêts à l'encontre de la société Saint-Chamond Distribution et de l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis,

- statuer à nouveau :

* le dire et juger fondé en ces demandes:

* condamner la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis à lui payer, chacun, la somme de 1 euro à titre de dommages intérêts et, in solidum en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 15 000 euros,

* dire et juger la loi du 31 décembre 1971 modifiée contraire au droit de l'Union européenne et, s'il plaît à la cour, renvoyer devant la Cour de Justice aux fins d'interprétation préjudicielle.

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déclaré recevable ses conclusions en intervention volontaire et principale,

- infirmer ledit jugement des autres chefs et statuant à nouveau :

* annuler la convention du 4 mai 2005,

* condamner la société CFC Expert à lui verser la somme de ' un euro symbolique' en réparation de son préjudice moral,

* ordonner la publication de l'arrêt à rendre dans trois journaux d'audience nationale et dans trois revues spécialisées aux choix et diligence de l'appelant et aux frais de la société CFC Expert,

* enjoindre la société CFC Expert de cesser toute activité s'inscrivant en violation de la loi du 31 décembre 1971 modifiée,

* condamner la société CFC Expert à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- y ajoutant,

* débouter la société CFC Expert de toutes ses demandes et la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire du SYNCOST et l'a condamné à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et statuant à nouveau dire irrecevable l'intervention du SYNCOST,

- subsidiairement confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté le SYNCOST de ses demandes,

- en tout état de cause, condamner le SYNCOST à la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- y ajoutant, débouter le SYNCOST de toutes ses demandes et la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société CFC Expert notamment de son appel en garantie dirigé à son encontre,

- condamner la société CFC Expert à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celee de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne les dommages intérêts qui lui ont été accordés au titre de la résiliation fautive et de condamner à ce titre la société Saint-Chamond Distribution à lui verser la somme de 23 090 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2006 avec application de l'article 1154 du code civil,

- dire irrecevables les demandes d'injonction présentées par l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis ,

- débouter la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis de leurs demandes,

- condamner solidairement la société Saint-Chamond Distribution et l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis à lui payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 15 000 euros,

- dans le cas de sa condamnation, dire et juger bien fondé son appel en garantie dirigé contre M. [B] [D], pour toutes les conséquences et notamment toutes les condamnations prononcées à son encontre .

Vu l'avis écrit en date du 7 août 2013 présenté par le Ministère public et dont il n'est pas contesté que toutes les parties en ont eu connaissance, aux termes duquel celui-ci invite la cour à confirmer le jugement déféré en retenant une motivation conforme aux exigences évoquées par la Cour de cassation à partir d'une analyse objective des éléments figurant au dossier qui lui est soumis .

SUR QUOI LA COUR

Considérant qu'il convient en premier lieu d'ordonner la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 10/24882 et 11/07783 ;

Considérant que le conseil de l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis conclut à l'irrecevabilité de l'intervention volontaire du SYNCOST au motif essentiel que celui-ci ne démontre pas que les intérêts collectifs de ses adhérents sont menacés alors qu'en l'espèce l'activité poursuivie par la société CFC Expert est à titre principal une activité juridique ne correspondant en rien 'aux métiers 'exercés par lesdits adhérents et qu'en réalité son intervention a pour objectif réel de défendre individuellement chacun de ses membres et donc présentement la société CFC Conseil ;

qu'en outre même collectif, cet intérêt ne serait pas légitime et se heurterait aux dispositions de l'article 31 du code de procédure civile ;

Considérant cependant que le SYNCOST dont l'objet est notamment ' l'étude et la défense des intérêts professionnels, économiques, moraux et sociaux de ses membres' est recevable à intervenir volontairement dans un litige qui porte sur l'activité professionnelle non réglementée, exercée habituellement par des personnes justifiant d'une qualification professionnelle reconnue, dans le cadre des dispositions des articles 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971 dont la solution est susceptible d'avoir des répercussions pour l'ensemble de ses membres qui revendiquent l'application de ces textes, peu important par ailleurs l'interprétation qu'ils en font tant au regard de la loi interne que du droit de l'union européenne ;

qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le SYNCOST recevable en son intervention volontaire ;

Considérant sur le fond du litige que l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée énonce:

' Nul ne peut directement ou par personne interposée, à titre habituel et rémunéré, donner des consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé, pour autrui : S'il n'est titulaire d'une licence en droit ou s'il ne justifie à défaut, d'une compétence juridique appropriée à la consultation et à la rédaction d'actes en matière juridique qu'il est autorisé à pratiquer conformément aux articles 56 à 66 ; : Les personnes mentionnées aux articles 56, 57 et 58 sont réputées posséder cette compétence juridique. Pour les personnes exerçant une activité professionnelle réglementée mentionnées à l'article 59, elle résulte des textes les régissant . Pour chacune des activités non réglementées visées à l'article 60, elle résulte de l'agrément donné, pour la pratique du droit à titre accessoire de celle-ci, par un arrêté, pris après avis d'une commission, qui fixe, le cas échéant, les conditions de qualification ou d'expérience juridique exigées des personnes exerçant cette activité et souhaitant pratiquer le droit à titre accessoire de celle-ci' ;

que l'article 60 de la dite loi dispose que ' Les personnes exerçant une activité professionnelle non réglementée pour laquelle elles justifient d'une qualification professionnelle reconnue par l'Etat ou attestée par un organisme public ou un organisme professionnel agréé, peuvent, dans les limites de cette qualification, donner des consultations juridiques relevant directement de leur activité principale et rédiger des actes sous seing privé qui constituent l'accessoire nécessaire ce cette activité ' ;

Considérant ainsi, que sur le fondement de l'article 60 de la loi du 31 décembre 1971, le professionnel ayant reçu un agrément OPQCM peut en conséquence exercer une activité de consultation juridique dès lors que celle-ci relève directement mais de façon accessoire, de son activité principale, laquelle ne peut être de nature juridique ;

que la consultation juridique ne doit donc pas constituer la suite d'une activité principale dont la nature même s'analyserait en une prestation juridique ;

Considérant qu'aux termes de la convention signée le 4 mai 2005, dénommée ' CONVENTION EXPERTISE DE LA TARIFICATION DES RISQUES PROFESSIONNELS' la société Saint-Chamond Distribution a confié à la société CFC Expert la mission de ' procéder à l'analyse des éléments servant de base au calcul du Taux accidents du Travail' de l'année 2005 aux fins de permettre, s'il y a lieu, la réduction du montant des cotisations ( ..... ) .

Agissant en maître d'oeuvre et coordinateur de la mission, CFC-Expert a faculté de déléguer ses pouvoirs et de désigner, au nom et pour le compte du Signataire, tout partenaire indépendant - avocat spécialisé et/ou médecin-expert- prés les tribunaux en vue d'assurer la représentation et la défense de ses intérêts dans le cadre de prestations judiciaires nécessaires à sa mission .

CFC-Expert assure la coordination des actions et veille à la bonne réalisation des diligences des intervenants indépendants mandatés ainsi qu'à l'information du signataire ' ;

qu'à cette fin il a été prévu ( article 4 ) que la société CFC Expert s'engage à :

'- intervenir et mandater, le cas échéant, en accord avec le Signataire, tout partenaire indépendant - avocat spécialisé et/ou médecin-expert prés les tribunaux - en vue d'effectuer les qualifications juridiques et/ou médicales et d'émettre tout avis et consultations sur les actions préconisées qui relèvent de leur champ de compétence et pour lesquelles il a été identifié un intérêt pour le Signataire....... .

- assister et faire assister s'il y a lieu le Signataire dans ses relations avec les différents organismes de Sécurité Sociale . A ce titre, les partenaires mandatés - avocat spécialisé et/ou médecin-expert - mettront en oeuvre toute mesure et recours pré-contentieux et contentieux appropriés jugés utiles par CFC-expert dans l'intérêt du Signataire .

- une totale confidentialité ..........' ;

que l'article 5 de la dite convention prévoit au titre de la rémunération revenant à la société CFC Expert ( article 5 ) que ' la mission définie ci-dessus fait l'objet d'une facturation dans l'hypothèse où des économies sont obtenues et consécutives aux seules contestations déposées à l'initiative et sous la coordination de CFC-Expert .....' ;

Considérant que la société Saint-Chamond Distribution a contracté avec la société CFC Expert dans le but d'optimiser ses coûts en matière de cotisation AT/MP, et donc de réduire le montant des cotisations dues en sa qualité d'employeur au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles ;

que la mise en oeuvre de cette mission, certes, impliquait nécessairement un aspect technique par la vérification des éléments chiffrés intervenant au niveau de la tarification ainsi que par celle portant sur l'exactitude de paramètres chiffrés retenus pour le calcul du taux de cotisation applicable ;

qu'il en est ainsi particulièrement des dossiers [I] et [E] identifiés par la société CFC Expert comme ayant entraîné des frais particulièrement importants et dont la conséquence directe était l'augmentation du taux de cotisation de l'employeur et qui, au demeurant, ont fait l'objet d'une transmission à un avocat qui a saisi la commission des recours amiables de la Sécurité Sociale ;

Considérant pour autant que la mission confiée à la société CFC Expert ne peut s'analyser comme consistant uniquement, voire même à titre principal, en la réalisation d'un audit technique ou médical dont la détermination et le traitement contentieux des conséquences juridiques auraient été appréciées par le seul avocat auquel le dossier aurait été transféré ;

que la convention litigieuse lui permettait en effet d'intervenir directement, et, éventuellement dans un second temps de mandater un avocat à cette fin, en vue ' d'effectuer les qualifications juridiques'et ' d'émettre tout avis et consultations sur les actions préconisées' ;

que cette action, particulièrement au niveau de la prise de décision de transférer le dossier à un avocat ou d'approfondir les données médicales en recourant à l'avis d'un médecin, implique nécessairement une analyse juridique préalable du cas traité au regard des dispositions du code de la Sécurité Sociale en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle ;

que l' étude de cohérence réalisée à partir d'éléments médicaux revendiquée par la société CFC Expert s'inscrit en réalité directement dans une prestation plus large, essentiellement de nature juridique dont les aspects techniques, mathématiques ou médicaux n'étaient que le support factuel et dont le relevé ne constituait pas la finalité exclusive de la mission qui lui était confiée;

qu'ainsi aux termes de la convention litigieuse la société CFC Expert est définie comme maître d'oeuvre et coordinateur de sa mission avec 'faculté de déléguer ses pouvoirs et de désigner, au nom et pour le compte du Signataire', particulièrement à un avocat spécialisé,

qu'il est également prévu que ' les partenaires mandatés - avocat spécialisé et/ou médecin-expert - mettront en oeuvre toute mesure et recours pré-contentieux et contentieux appropriés jugés utiles par CFC-expert dans l'intérêt du Signataire' ;

que la faculté de délégation du dossier à un avocat ainsi que l'appréciation de l'opportunité des recours préconisés par celui-ci induisent à l'évidence l'appréciation juridique du cas traité, peu important sa complexité et son devenir après sa transmission éventuelle à l'avocat ;

que dés lors en amont de la prestation juridique éventuellement assurée par l'avocat, la société CFC Expert était donc investie à titre principal d'une mission de consultation juridique et ceci contrairement aux dispositions de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 précité ;

Considérant par ailleurs, contrairement à ce que soutient le SYNCOST, que l'interprétation qui vient d'être faite de l'activité poursuivie par la société CFC Expert n'est en rien contraire au Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne en son article 49 relatif à la liberté d'établissement et son article 56 relatif à la libre prestation de services, ainsi qu'à la directive 2006/123 relative aux services dans le marché intérieur ;

qu'en effet, ne peut constituer une entrave au sens du droit européen, la qualification OPQCM qui ne vise que l'exercice du droit accessoire au sens de l'article 60 de la loi du 31 décembre 1971, qui peut être obtenue par toute entreprise française ou appartenant à un Etat membre de l'UE et qui ne se heurte à aucune discrimination en fonction de la nationalité et qui est justifiée par la seule impérieuse raison de l'intérêt général lié à la protection des destinataires des services concernés dans la mesure où le droit qui n'est pas assimilable à une banale activité de prestations de service, doit être exercé par un professionnel présentant les qualifications professionnelles et morales nécessaires à la réalisation de l'objectif poursuivi ;

que la condition de proportionnalité également exigée est respectée en raison de l'absence d'interdiction absolue de l'exercice du droit lequel reste possible dans la réserve de son caractère accessoire dans la cadre d'une qualification professionnelle reconnue par l'Etat ou attestée par un organisme public ou un organisme professionnel agréé, ce qui contrairement à ce que soutient le SYNCOST, n'a pas pour effet de 'bloquer' un secteur économique mais seulement d'en prévoir les modalités d'exercice à l'aune de la nécessité d'assurer la protection du destinataire du service ;

que par ailleurs la directive 2006/123 relative aux services dans le marché intérieur est sans conséquence sur les modalités d'exercice du droit telles que prévues par le droit français;

qu' en l'état de ces constatations il n'y a donc également pas lieu à renvoi devant la cour de Justice afin d'interprétation préjudicielle ;

Considérant que la convention litigieuse du 4 mai 2005 sera en conséquence annulée ;

que la société CFC Expert ainsi que le SYNCOST seront donc déboutés de toutes les prétentions qu' ils présentent à ce titre ;

Considérant également que l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis relève que la société CFC Expert contrevient aux dispositions de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 qui énonce que 'Nul ne peut, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit (....) ' ;

qu'il dénonce également une atteinte à l'article 1 du même texte et donc au principe d'indépendance de l'avocat ;

Considérant en premier lieu que les développements exposés par le SYNCOST sur la nature de l'activité poursuivie par ses adhérents est indifférente au présent débat dés lors que seule est concernée celle exercée par la société CFC Expert dont il vient d'être constaté, au titre du contrat passé avec la société Saint-Chamond Distribution qu'elle contrevient dispositions des articles 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée ;

Considérant que la convention signée le 4 mai 2005, mentionne que 'Agissant en maître d'oeuvre et coordinateur de la mission, CFC-expert a faculté de déléguer ses pouvoirs et de désigner, au nom et pour le compte du Signataire, tout partenaire indépendant - avocat spécialisé et/ou médecin-expert- prés les tribunaux en vue d'assurer la représentation et la défense de ses intérêts dans le cadre de prestations judiciaires nécessaires à sa mission .

CFC-expert assure la coordination des actions et veille à la bonne réalisation des diligences des intervenants indépendants mandatés ainsi qu'à l'information du signataire ' ;

qu'à cette fin il a été prévu ( article 4 ) que la société CFC Expert s'engage à :

'- intervenir et mandater, le cas échéant, en accord avec le Signataire, tout partenaire indépendant - avocat spécialisé et/ou médecin-expert prés les tribunaux - en vue d'effectuer les qualifications juridiques et/ou médicales et d'émettre tout avis et consultations sur les actions préconisées qui relèvent de leur champ de compétence et pour lesquelles il a été identifié un intérêt pour le Signataire....... .

- assister et faire assister s'il y a lieu le Signataire dans ses relations avec les différents organismes de Sécurité Sociale . A ce titre, les partenaires mandatés - avocat spécialisé et/ou médecin-expert - mettront en oeuvre toute mesure et recours pré-contentieux et contentieux appropriés jugés utiles par CFC-expert dans l'intérêt du Signataire' ;

Considérant que la société CFC Expert n'appartient pas à une profession réglementée ;

qu'elle ne relève pas des dispositions de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 qui énoncent que ' Nul ne peut, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'Etat et à la cour de Cassation et les avoués près les Cours d'Appel' ;

qu'il vient d'être constaté qu'aux termes du contrat litigieux elle a été investie d'une véritable mission d'assistance juridique, peu important l'intervention éventuelle et ponctuelle d'un avocat dont au demeurant la rémunération ne donne pas lieu pour le client à l'établissement d'une facture distincte mais est directement comprise dans celle lui revenant et calculée en fonction des économies réalisées par le client et 'obtenues consécutivement aux seules contestations déposées à l'initiative et sous la coordination de CFC-expert' ;

qu'elle se voit attribuer le contrôle de l'opportunité de toute mesure ou recours pré-contentieux et contentieux préconisé par l'avocat ;

qu'il n'existe ainsi aucune relation directe entre le client et l'avocat, la société CFC Expert se qualifiant de maître d'oeuvre et assurant seule la rémunération de celui-ci ;

Considérant que pas davantage la société CFC Expert ne peut, contrairement à l'assureur, faire utilement référence à la notion de ' direction du procès', puisque n'appartenant pas à une profession réglementée ;

qu'elle ne peut ainsi justifier d'un mandat d'intérêt commun , notion retenue à tort par le tribunal de commerce ;

que l'atteinte aux articles 4 et 1 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée est ainsi avérée ;

Considérant que l'activité exercée par la société CFC Expert en méconnaissance des articles 1er, 4, 54 et 60 précités est directement à l'origine du préjudice moral éprouvé par l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis, garant de la qualité et des compétences auxquelles s'attend légitimement tout usager du droit et exerçant les prérogatives que la loi lui confère dans le cadre d'une déontologie stricte et contraignante ;

qu'il convient en conséquence de lui accorder la somme de 1 euro en réparation dudit préjudice;

Considérant en revanche, alors même que seule la convention litigieuse, à l'exclusion de toute autre passée par la CFC Expert et dont, à l'évidence, la teneur des prestations fournies n'est ainsi pas connue, se trouve à l'origine du présent litige et que par ailleurs il n'est pas démontré que les violations des articles 1 et 4 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée qui viennent certes d'être relevées mais pour l'année 2005, sont toujours d'actualité, que la cour ne peut en conséquence accueillir les prétentions émises par l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis visant, par une condamnation générale, à enjoindre à cette société de cesser toute activité en violation de la loi du 31 décembre 1971;

Considérant également qu'il n'apparaît pas proportionné au dommage subi par l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis d'accueillir sa demande de publication de l'arrêt à rendre ;

que cette prétention sera donc écartée ;

Considérant que la société CFC Expert qui ne conteste pas détenir les pièces et dossiers, que lui a remis la société Saint-Chamond Distribution aux termes de la convention du 4 mai 2005 mais dont une liste exhaustive n'est cependant pas fournie, sera condamnée à les lui restituer sans qu'il y ait lieu de prononcer à cet effet une astreinte ;

que par ailleurs faute de justifier d'un préjudice, tant moral que matériel, résultant de cette situation, la société Saint-Chamond Distribution sera déboutée de sa demande en dommages intérêts présentée de ce chef ;

Considérant qu'en l'état de la décision rendue le SYNCOST sera débouté de sa demande en paiement de dommages intérêts ;

Considérant la société CFC Expert a appelé en garantie M. [B] [D] en sa qualité d'ancien dirigeant de fait à compter de l'année 2002 après que les deux parties aient signé 'un accord de partenariat' lui accordant en tant qu'avocat du groupe CFC une exclusivité et fraction du bénéfice ;

qu'elle estime que celui-ci ne pouvait ignorer les dispositions de la loi du 31 décembre 1971 modifiée et donc le risque d'annulation de la convention litigieuse et qu'il devait l'en informer et refuser de rédiger une convention illicite ;

qu'elle dénonce un manquement à l'obligation de compétence, de diligence et d'action à son détriment et directement à l'origine de son préjudice ;

Considérant qu'il sera seulement observé, qu'outre une transaction intervenue le 12 février 2003 entre M. [B] [D], agissant en son nom et comme gérant de la société d'avocat SELARL [D] et diverses parties dont la société CFC Expert, mais qui manifestement est relative aux seules relations d'affaires entretenues par ceux-ci, il résulte des dires mêmes de la société CFC Expert que M. [B] [D] aurait été son gérant de fait entre 2002 et 2004 de sorte que même à la supposer avérée, ce qui n'est pas démontré avec certitude, cette fonction est sans relation avec le contrat litigieux qui a été signé le 4 mai 2005, soit à une date à laquelle M. [B] [D] avait cessé toute relation de quelle que nature qu'elles fussent avec la société CFC Expert ;

que dés lors il convient de débouter la société CFC Expert de sa demande afin de garantie;

Considérant que faute de démontrer le caractère abusif de la procédure suivie par la société CFC Expert, la société Saint-Chamond Distribution et M. [B] [D] seront déboutés de la demande en dommages intérêts qu'ils présentent de ce chef ;

Considérant que la solution du litige, eu égard à l'équité, commande d'allouer à l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis, à la société Saint-Chamond Distribution et à M. [B] [D], chacun, une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'un montant de 5 000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Confirme les deux jugements déférés en ce qu'ils ont :

- dit que la société COVEA RISKS n'est plus dans la cause,

- reçu l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis et le SYNCOST en leur intervention volontaire à titre principale,

- dit les sociétés BEJ et PCMG irrecevable en leur intervention volontaire,

- débouté l'ordre des avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis de sa demande en dommages intérêts et de publication

- débouté la la société CFC Expert de sa demande en dommages intérêts pour préjudice moral et de sa demande de garantie de M. [B] [D],

- débouté M. [B] [D] de sa demande en dommages intérêts pour procédure abusive,

- dit n'y avoir lieu à se prononcer sur la demande présentée par le SYNCOST de juger que l'activité de ses membres se situe hors du champ d'application de la loi du 31 décembre 1971 modifiée,

- dit qu'il n'y a lieu à énoncer ce que les entreprises qualifiées OPQCM sont autorisées à faire,

- débouté le SYNCOST de sa demande en dommages intérêts à l'encontre de la société Saint-Chamond Distribution et de l'ordre des avocats du barreau de Seine-saint-Denis,

- débouté l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis de sa demande de dommages intérêts dirigée contre les sociétés BEJ et PCMG,

- condamné la société CFC Expert à payer à M. [B] [D] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [B] [D] du surplus de ses demandes .

Les infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau dans cette limite,

Déclare la société CFC Expert et le SYNCOST mal fondés en toutes leurs demandes et les en déboute .

Condamne la société CFC Expert à restituer à la société Saint-Chamond Distribution les dossiers et pièces que celle-ci lui a remis dans le cadre de la convention du 4 mai 2005 .

Condamne la société CFC Expert à payer à la société Saint-Chamond Distribution, à M. [B] [D] et à l'ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis, chacun, une indemnité d'un montant de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

Rejette toute autre demande .

Condamne la société CFC Expert et le SYNCOST aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile .

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/24621
Date de la décision : 10/09/2014

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°10/24621 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-10;10.24621 ?
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