La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/09/2014 | FRANCE | N°13/11961

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 04 septembre 2014, 13/11961


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/11961



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Mai 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 11/03863





APPELANT



Monsieur [V] [U]

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représenté et assisté

de Me Blaise ADJALIAN, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 369







INTIMEE



SA SOCIETE GENERALE,

prise en la personne de ses représentants légaux

domiciliés en cette qualité audit siège

[...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/11961

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Mai 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 11/03863

APPELANT

Monsieur [V] [U]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté et assisté de Me Blaise ADJALIAN, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 369

INTIMEE

SA SOCIETE GENERALE,

prise en la personne de ses représentants légaux

domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Christophe BORE de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assistée de Me Francis RAIMON de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 112

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Mai 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

****************

Titulaire d'un compte courant ouvert dans les livres de la Société Générale avec une facilité de caisse de 100 euros, Monsieur [V] [U] a signé, le 14 janvier 2003, une convention de compte de titres et a effectué des opérations sur le marché à règlement différé (SRD). Son compte courant est devenu débiteur à compter du 30 juillet 2010.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 novembre 2010, la Société Générale a dénoncé la facilité de caisse accordée à Monsieur [U] et lui a notifié la clôture de son compte après un préavis de 60 jours, expirant le 4 janvier 2011.

Par courrier du 23 novembre 2010, Monsieur [U] a demandé à la Société Générale de procéder au transfert de son compte titres au Crédit Agricole.

Autorisée par ordonnance du juge de l'exécution de Créteil en date du 23 décembre 2010, la Société Générale a fait procéder à la saisie du compte titres, dont Monsieur [U] était titulaire, dans ses livres par acte d'huissier en date du 29 décembre 2010. N'ayant pas saisi le juge du fond dans le délai d'un mois, la Société Générale a réitéré sa demande et la saisie du compte de titres en vertu d'une nouvelle ordonnance du juge de l'exécution du 11 février 2011, en faisant assigner Monsieur [U] en paiement par acte d'huissier en date du 8 mars 2011.

Par jugement en date du 13 mai 2013, le tribunal de grande instance de Créteil a condamné Monsieur [V] [U] à payer à la Société Générale la somme de 96.509,61 euros avec intérêts au taux légal à compter du 8 mars 2011 au titre du solde débiteur de compte, ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, débouté Monsieur [V] [U] de sa demande en dommages-intérêts, rejeté le surplus des demandes, condamné Monsieur [V] [U] à payer à la Société Générale la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

La déclaration d'appel de Monsieur [V] [U] a été remise au greffe de la cour le 13 juin 2013.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 15 septembre 2013, Monsieur [V] [U] demande l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et à la cour, statuant à nouveau, de :

- constater que son compte liquidités présentait un solde de 782,54 euros à la date du 3 juillet 2010,

- constater qu'il a acheté des titres pour un montant de 176.135,74 euros de juillet à décembre 2010,

- dire que la Société Générale n'aurait jamais dû valider des ordres d'achat donnés au-delà du solde disponible,

- dire que la Société Générale a failli à sa responsabilité,

- dire qu'il a subi un préjudice économique et financier très important du fait des manquements de la Société Générale

- condamner la Société Générale à lui payer la somme de 2.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la Société Générale à lui verser la somme de 100.000,00 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, en réparation des conséquences financières qu'il a subies du manquement fautif de la demanderesse,

- condamner la Société Générale aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 7 octobre 2013, la Société Générale demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Monsieur [U] à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 avril 2014.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR

Considérant que Monsieur [V] [U] soutient que la Société Générale a engagé sa responsabilité pour la violation d'une interdiction légale et manquement à son obligation de prudence ; que la banque, qui est un prestataire de services d'instruments financiers, n'a pas respecté l'obligation de mettre en place un système automatisé de blocage de l'entrée de l'ordre en cas d'insuffisance des provisions et couvertures en violation de l'article 361-62 de l'arrêté du 12 novembre 2004 portant homologation des livres II et VI du règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) ; qu'elle a validé des ordres d'achat sur le SRD alors qu'il n'avait pas de liquidités suffisantes et qu'il s'est rapidement trouvé en position débitrice à partir du 8 juillet 2010 ; qu'il a pu réaliser les achats de titres pour des montants importants parce que ces opérations étaient autorisées par la Société Générale, qui est ainsi fautive de les avoir acceptées malgré leur caractère inhabituel en percevant à chaque transaction une commission ; qu'il se prévaut des dispositions des articles 516-1 et suivants du règlement général de l'AMF qui prévoient que le client doit disposer d'une couverture suffisante pour passer des ordres sur le SRD en garantie de ses engagements et qu'elle peut être constituée de liquidités ou de titres en compte, à l'exception des titres identiques à ceux sur lesquels portent l'ordre d'achat, et prétend qu'il n'a jamais eu la couverture suffisante au regard du solde débiteur de son compte excédant largement la facilité de caisse de 100,00 euros autorisée ; qu'il estime que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que son compte de titres d'une valeur de 76.391 euros au 30 septembre 2010 assurait une couverture suffisante au regard des opérations réalisées ; qu'il ajoute que la Société Générale a également manqué à son obligation de conseil en sa qualité de professionnel qui doit donner toutes les informations utiles au client en vertu de l'article L.111-1 du code de la consommation et qu'elle ne l'a pas informé des risques encourus dans les opérations spéculatives sur le marché boursier ; qu'il fait grief aux premiers juges d'avoir considéré qu'il avait connaissance des risques au regard des opérations sporadiques qu'il avait pu faire en 2004 et 2005, alors qu'il exerce la profession d'aide-soignant et n'est pas initié aux opérations sur le SRD ; qu'il estime être fondé à obtenir l'indemnisation des conséquences financières qu'il subit par la faute de la banque pour un montant qui ne saurait être inférieur à 100.000 euros ;

Considérant qu'en réponse, la Société Générale fait valoir que les opérations sur le SRD sont soumises à un cadre légal particulier régi par les articles 516-1 à 516-13 du règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers ; que la couverture exigée peut être constitué d'espèces ou de titres et que le compte de titres de Monsieur [U] constituait une couverture suffisante représentant 40 % des opérations réalisées dans le respect du 3e de l'article unique de l'instruction n° 2007-04 du 15 mai 2007 ; que seuls les titres négociés et non encore livrés ne peuvent pas constituer la garantie des positions prises par le client sur le marché ; que c'est à tort que Monsieur [U] apprécie l'obligation de couverture au regard de l'existence de ses liquidités et du solde de son compte courant ; qu'elle ajoute que son système automatisé de vérification des comptes prévue par l'article 321-62 de l'AMF lui permet de s'assurer que les ordres sont couverts ; qu'il n'est pas démontré qu'elle a failli à son obligation de couverture, alors que son compte de titres a une valeur de 73.003,50 euros au 30 décembre 2010 ; qu'elle estime qu'elle n'a pas manqué à son devoir de conseil envers Monsieur [U] qui effectuait habituellement des opérations d'achat et de vente en temps limité sur le marché boursier et le SRD depuis 2004 dans un but purement spéculatif et avait connaissance des risques encourus ; qu'elle explique que son site internet d'accès au SRD contient un message d'alerte sur les risques inhérents aux opérations réalisées sur le SRD ; qu'elle prétend n'avoir commis aucune faute et fait observer que le préjudice allégué par Monsieur [U] ne pourrait pas être constitué du solde débiteur de son compte, mais par la différence de valorisation entre les achats et les ventes réalisées et qu'il n'apporte aucun élément pour la calculer ;

Considérant qu'en vertu de l'instruction n° 2007-04 du 15 mai 2007 prise en application de l'article 516-4 du règlement général de l'AMF, applicable en la cause, relative à la couverture des ordres sur le SRD, la couverture exigée du client est calculée en pourcentage des positions selon la nature des actifs et qu'elle est de 20 % lorsque la couverture est constituée d'espèces et/ou d'OPCVM monétaires, de 25 % lorsqu'elle constituée d'obligations et/ou d'OPCVM obligataires et de 40 % lorsque'elle est constituée d'actions et/ou d'OPCVM actions ;

Considérant que compte tenu des actifs composant le patrimoine de Monsieur [U], ce ne sont pas ses liquidités qui servaient à sa couverture, mais son compte de titres constitué de titres de capital exigeant une couverture de 40 % ;

Considérant qu'il ressort du relevé de compte de titres de Monsieur [U] au 30 septembre 2010 que la valorisation de son portefeuille était de 76.391 euros et qu'eu égard aux opérations réalisées sur le SRD, les titres détenus par Monsieur [U] ont toujours constitué une couverture suffisante des opérations à venir sans tenir compte des titres identiques à ceux sur lesquels ont porté les ordres d'achat et/ou de vente à venir ; que la seule fois où cela n'a pas été le cas, la Société Générale lui a adressé un courrier, daté du 19 juillet 2010, l'avisant du défaut de couverture pour un montant de 1.705,18 euros et qu'à défaut de régularisation, elle pourrait procéder à la cession de titres pour assurer la couverture ; que Monsieur [U] a couvert ses positions et a continué à effectuer des opérations d'achat/vente sur le SRD ;

Considérant que c'est à tort que Monsieur [U] se prévaut de la seule position débitrice de son compte courant dont le solde débiteur a augmenté de juillet à décembre 2010, sans tenir compte de son compte de titres valorisé par ses achats et vente sur le SRD, faisant apparaître un montant brut de cessions au 31 décembre 2010 de 409.875,59 euros, un gain net de 7.511,84 euros et une perte nette de 20.086,60 euros et une valorisation de ses titres à cette date de 73.003,50 euros toutes opérations dénouées ;

Considérant qu'il n'est rapporté la preuve d'aucun manquement de la banque à l'obligation de couverture ;

Considérant que s'agissant de l'obligation de conseil incombant à la Société Générale, il est démontré par les pièces produites que Monsieur [U] est titulaire d'un compte de titres depuis 2003 et qu'il a déjà effectué des opérations sur le SRD de nature spéculative en 2004 et 2005, même si elles étaient de moindre importance, procédant à des achats/ventes du même titre sur une période courte de 24h ou 48h dans un but spéculatif, ayant compris le fonctionnement du marché et la volatilité des cours sur laquelle il pariait pour acheter et vendre ; que sa profession d'aide-soignant ne lui interdit pas d'avoir compris le fonctionnement du SRD, ni d'effectuer des opérations spéculatives dans le but de réaliser une plus-value qui est la contrepartie du risque pris ;

Considérant que la Société Générale justifie, par ailleurs, d'un message d'alerte sur son site internet d'accès à la bourse en ligne dédié au SRD, rappelant au client que ce marché peut amplifier les gains comme les pertes et qu'il expose le client à un risque de perte qu'il effectue sous sa seule responsabilité ;

Considérant que la banque n'a pas manqué à son obligation de conseil à l'égard de Monsieur [U] qui avait déjà l'expérience du SRD et a fait l'acquisition de titres constituant son portefeuille, une fois dénouées toutes ses positions, qu'il n'a pas vendu pour combler son solde débiteur de compte ;

Considérant qu'il est établi par les pièces produites que, dès que le solde débiteur du compte a dépassé l'autorisation de découvert, la Société Générale a avisé Monsieur [U] par lettre du 5 août 2010 et lui a demandé de régulariser la situation ; qu'elle a, par la suite, réitéré sa demande en octobre 2010 après de multiples tentatives de contacts téléphoniques avec Monsieur [U], y compris sur son lieu de travail, qu'il a laissé sans réponse ;

Considérant qu'il n'y a pas de faute prouvée de la Société Générale et Monsieur [U] est mal fondé en sa demande de dommages-intérêts ;

Considérant que la créance de la Société Générale est justifiée ; que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la Société Générale le montant de ses frais irrépétibles d'appel ; qu'il convient de condamner Monsieur [U] à lui verser la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que Monsieur [U], qui succombe, supportera les dépens d'appel;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [V] [U] à payer à la Société Générale la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Monsieur [V] [U] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 13/11961
Date de la décision : 04/09/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°13/11961 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-04;13.11961 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award