Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2014
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/09676
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/08072
APPELANT
Monsieur [V] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Jean-Pierre SOMMELET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0494
Assisté de Me Nathalie KONDRACKI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0494
INTIMEES
SA CREDIT LOGEMENT
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée et assistée de Me Denis LANCEREAU de l'AARPI Cabinet TOCQUEVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : R050
SA CREDIT DU NORD
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Ali EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289
Assistée de Me Anna QUILLIVIC, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mai 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Caroline FÈVRE, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente
Madame Caroline FEVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN
ARRÊT :
- Contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.
****************
Selon une offre acceptée le 26 mars 2008, le Crédit du Nord a consenti à Monsieur [V] [Z] un prêt immobilier d'un montant de 500.000 euros, remboursable en 240 mois avec intérêts au taux fixe de 4,85 % l'an, destiné au financement de l'acquisition d'un appartement situé [Adresse 1], acheté au prix de 900.000 euros.
Par acte sous seing privé du 18 février 2008, la société Crédit Logement s'est portée caution de l'emprunt accordé à Monsieur [Z] au profit du Crédit du Nord.
A la suite de la défaillance de l'emprunteur dans le paiement des échéances du prêt, le Crédit du Nord a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 novembre 2009.
Les 29 juin 2009 et 22 janvier 2010, le Crédit Logement a payé les sommes de 22.318,70 euros au titre des échéances impayées du 14 novembre 2008 au 14 mai 2009 avec une pénalité de 352,74 euros et de 494.604,83 euros au titre du capital restant dû, des échéances impayées du 14 juin 2009 au 14 novembre 2009 avec une pénalité de 737,12 euros au Crédit du Nord qui lui en a délivré quittances.
Par une dernière lettre recommandée avec accusé de réception du 19 janvier 2010, le Crédit Logement a mis en demeure Monsieur [Z] de lui rembourser les sommes payées au Crédit du Nord, avant de l'assigner en paiement par acte d'huissier en date du 27 mai 2010.
Par acte d'huissier du 31 mai 2010, Monsieur [V] [Z] a fait assigner en intervention forcée le Crédit du Nord en se prévalent d'un manquement à son devoir d'information et de conseil.
Par jugement en date du 25 mars 2013, le tribunal de grande instance de Paris a condamné Monsieur [V] [Z] à payer au Crédit Logement la somme de 520.345,86 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2009 sur la somme de 22.318,70 euros, à compter du 23 janvier 2010 sur la somme de 516.923,53 euros et à compter du 9 avril 2010 sur la somme de 520.345,86 euros jusqu'à parfait paiement, ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, débouté Monsieur [Z] de ses demandes reconventionnelles, débouté les parties du surplus de leurs demandes, condamné Monsieur [Z] à payer la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au Crédit Logement et la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au Crédit du Nord ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'inscription de l'hypothèque judiciaire provisoire qui seront augmentés des frais de l'inscription de l'hypothèque judiciaire définitive à régulariser en vertu du jugement, ordonné l'exécution provisoire.
La déclaration d'appel de Monsieur [V] [Z] a été remise au greffe de la cour le 14 mai 2013.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 24 avril 2014, Monsieur [V] [Z] demande de :
- ordonner la communication par le Crédit du Nord du fichier des incidents de remboursement des crédits des particuliers concernant sa situation, que le Crédit du Nord a dû consulter avant l'émission de l'offre de prêt le 15 mars 2008, et d'en justifier la consultation,
- ordonner le renvoi de la présente procédure pour communication par le Crédit du Nord de cette pièce,
- ordonner le report des dates de clôture et de plaidoirie dans l'attente de la communication de l'intégralité de ces pièces,
- subsidiairement, ordonner la communication par le Crédit du Nord de ses pièces 4 et 5 et par le Crédit Logement de l'intégralité de ses pièces,
- ordonner le report des dates de clôture et de plaidoirie dans l'attente de la communication de l'intégralité de ces pièces,
- subsidiairement rejeter l'ensemble des demandes du Crédit du Nord et du Crédit Logement à son encontre,
- dire que le Crédit du Nord a commis une faute contractuelle en lui faisant souscrire un engagement, sans vérifier ses capacités financières, notamment au vu des avis d'imposition, en vérifiant qu'il était inscrit au fichier des incidents de remboursement des crédits des particuliers,
- condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 528.072,63 euros, sauf à parfaire des éventuels intérêts supplémentaires sollicités par le Crédit du Nord ou le Crédit Logement, subrogé dans les droits du Crédit du Nord, et ce, à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice qu'il a subi, résultant de l'acte en date du 9 février 2008,
- ordonner la compensation entre sa créance à l'égard du Crédit du Nord et l'éventuelle créance contractuelle revendiquée par le Crédit Logement, subrogé dans les droits du Crédit du Nord au titre de l'acte de prêt du 9 février 2008,
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner le Crédit du Nord à lui régler la somme de 2.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 23 septembre 2013, le Crédit Logement demande la confirmation du jugement déféré et de :
- dire mal fondé Monsieur [Z] en son appel,
- débouter Monsieur [Z] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner Monsieur [Z] à lui payer la somme de 528.072,63 euros en principal, outre les intérêts au taux contractuel de 4,85 % l'an à compter du 7 mai 2010, date du décompte,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- condamner Monsieur [Z] à lui payer la somme de 4.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 24 septembre 2013, le Crédit du Nord demande de débouter Monsieur [Z] de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 avril 2014.
Dans des écritures signifiées le 21 mai 2014, Monsieur [V] [Z] demande de:
- ordonner la rétractation de l'ordonnance de clôture,
- ordonner la communication par le Crédit du Nord du fichier des incidents de remboursement des crédits des particuliers concernant sa situation, que le Crédit du Nord a dû consulter avant l'émission de l'offre de prêt le 15 mars 2008, et d'en justifier la consultation,
- ordonner le renvoi de la présente procédure pour communication par le Crédit du Nord de cette pièce,
- ordonner le report des dates de clôture et de plaidoirie dans l'attente de la communication de l'intégralité de ces pièces,
- subsidiairement rejeter l'ensemble des demandes du Crédit du Nord et du Crédit Logement à son encontre,
- dire que le Crédit du Nord a commis une faute contractuelle en lui faisant souscrire un engagement, sans vérifier ses capacités financières, notamment au vu des avis d'imposition, en vérifiant qu'il était inscrit au fichier des incidents de remboursement des crédits des particuliers,
- condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 528.072,63 euros, sauf à parfaire des éventuels intérêts supplémentaires sollicités par le Crédit du Nord ou le Crédit Logement, subrogé dans les droits du Crédit du Nord, et ce, à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice qu'il a subi, résultant de l'acte en date du 9 février 2008,
- ordonner la compensation entre sa créance à l'égard du Crédit du Nord et l'éventuelle créance contractuelle revendiquée par le Crédit Logement, subrogé dans les droits du Crédit du Nord au titre de l'acte de prêt du 9 février 2008,
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner le Crédit du Nord à lui régler la somme de 2.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
CELA ETANT EXPOSE,
LA COUR
Considérant que toutes les pièces produites par les parties intimées ont été communiquées à la partie appelante le 23 septembre 2013 par le Crédit Logement par la voie du RVPA et le 24 septembre 2013 par le Crédit du Nord, outre les pièces n° 4 et 5 constitués par les avis d'imposition des années 2005 et 2006 de Monsieur [Z] et la fiche de solvabilité datée du 9 février 2008, qu'il a remplie, le 24 avril 2014 ; que les dispositions de l'article L.333- 4 du code de la consommation interdisent de remettre une copie des informations contenues dans le fichier même à l'intéressé ; qu'il n'est justifié d'aucune cause grave de révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 29 avril 2014; qu'ainsi les dernières écritures signifiées par Monsieur [Z] le 21 mai 2014 postérieurement à la clôture sont irrecevables et doivent être écartées des débats ;
Considérant que Monsieur [Z] soutient qu'il est en droit d'invoquer la responsabilité du Crédit du Nord sur le fondement de l'article 1147 du code civil pour manquement à son devoir de mise en garde et à obtenir l'indemnisation du préjudice subi par l'allocation de dommages-intérêts d'un montant équivalent aux sommes qui lui sont réclamées sur le fondement de l'acte de prêt du 26 mars 2008 ; qu'il prétend que le Crédit du nord n'a pas vérifié ses capacités financières avant de lui accorder le prêt en cause, ni consulté le fichier des incidents de paiement des crédits des particuliers ; qu'il n'est justifié d'aucun avis d'imposition, ni d'une vérification de son état d'endettement par la consultation du fichier des incidents de paiement au moment de l'émission de l'offre de prêt ; que, si la banque avait vérifié sa situation, elle aurait pu constater une nette diminution de ses revenus entre 2005 et 2007 et l'incompatibilité du prêt avec ses revenus, l'obligeant à le mettre en garde sur le risque d'endettement né du crédit ; qu'il ne peut pas être tenu compte de revenus à venir hypothétiques ; qu'il n'est pas un emprunteur averti ayant fait l'acquisition de son domicile en sa qualité de gérant de la société de production Certain L'M Show ; qu'il doit y avoir une compensation entre sa dette et sa créance sur le Crédit du Nord, aux droits de qui le Crédit Logement est subrogé ;
Considérant qu'en réponse, le Crédit du Nord fait valoir qu'il a accordé un prêt de 500.000 euros pour un achat immobilier de 900.000 euros sur la base des informations communiqués par Monsieur [Z] à l'appui de sa demande de prêt comprenant ses avis d'imposition sur le revenu des années 2005 et 2006 et une fiche de solvabilité remplie par l'emprunteur datée du 9 février 2008 ; qu'il a ainsi vérifié les capacités financières de Monsieur [Z], gérant de sociétés et marchand de biens, qui est un emprunteur averti comme il l'a reconnu dans un mail adressé au Crédit Logement en date du 25 novembre 2009 ; qu'il n'y a aucune disproportion entre le prêt consenti à Monsieur [Z] et sa situation patrimoniale qui ne se limite pas à ses revenus professionnels, mais comprend un immeuble [Adresse 2] loué à un tiers pour un montant mensuel de 4.900 euros supérieur aux mensualités du prêt ; que la banque n'a commis aucune faute ;
Considérant que le Crédit Logement fait valoir que Monsieur [Z] ne recherche plus sa responsabilité en appel et que les demandes de ce dernier contre la banque prêteuse ne le concerne pas puisqu'ill agit contre le débiteur défaillant en sa qualité de caution qui a payé sur le fondement de l'article 2305 du code civil ; que son recours est personnel et que les fautes de la banque ne lui sont pas opposables ; qu'à titre subsidiaire, il fait observer qu'il n'y a aucun manquement au devoir de mise en garde compte tenu de la qualité d'emprunteur averti de Monsieur [Z] et de l'absence de crédit excessif au regard des revenus et du patrimoine de ce dernier, augmenté par l'acquisition immobilière financée par le prêt ;
Considérant qu'en application de l'article 2305 du code civil, la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou l'insu du débiteur ; que ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais ;
Considérant que, dans le cadre du recours personnel de la caution qui a payé à la différence du recours subrogatoire, le débiteur principal ne peut pas opposer à la caution les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier principal ;
Considérant que Monsieur [Z] ne peut pas opposer au Crédit Logement, qui est la caution qui a payé en ses lieu et place sa dette envers le Crédit du Nord le manquement au devoir de mise en garde du banquier ;
Considérant que la créance du Crédit Logement n'est contestée ni dans son principe, ni dans son montant ; que la condamnation prononcée à l'encontre de Monsieur [Z] à son profit doit être confirmée, sans que le Crédit Logement puisse prétendre à d'autres intérêts que l'intérêt au taux légal sur la somme qu'il a réglée en l'absence de toute convention prévoyant qu'il en soit autrement ;
Considérant que s'agissant des fautes reprochées au Crédit du Nord, il est établi par les pièces produites que la banque a vérifié les capacités financières de Monsieur [Z] par ses avis d'imposition sur le revenu des années 2005 et 2006 révélant un revenu annuel respectivement de 120.000 euros et de 100.000 euros, par une fiche de situation signée par Monsieur [Z], qui en a certifié le contenu, datée du 9 février 2008, indiquant qu'il est né le [Date naissance 1] 1957, divorcé avec cinq enfants à charge, qu'il est propriétaire de sa résidence principale constituée par un appartement situé [Adresse 2] estimé à 2,5 millions d'euros ; qu'il exerce la profession de marchand de biens à cette même adresse ; qu'il a un revenu de 10.000 euros par mois auquel s'ajoute un revenu locatif de 400 euros par mois et à venir un loyer de 6.000 euros, qu'il n'a aucune charge d'emprunt ou autres et aucune dette ;
Considérant que la banque n'a pas à vérifier les déclarations de l'emprunteur qui doit être loyal et ne peut pas se prévaloir de dettes cachées au Crédit du Nord qui n'a pas les moyens de savoir, même en consultant le fichier des incidents de paiement liés aux crédits accordés à des particuliers, que Monsieur [Z] est débiteur envers la société Video Projection System en sa qualité de garant des factures impayées par la société Certains L'M Show, dont il est le gérant, ce qui ne constitue pas un crédit accordé à une personne physique, et qu'il est débiteur de la société Consumer Finance en vertu d'une injonction de payer du 9 février 2010 postérieure à l'octroi du crédit en cause ;
Considérant qu'il se déduit des éléments constituant le patrimoine de Monsieur [Z], qui est en mesure de faire un apport de 450.000 euros sur le prix d'achat de l'immeuble financé partiellement par le prêt, qu'il n'y aucun crédit excessif de sorte qu'il n'y a pas de risque de surendettement et aucun devoir de mise en garde du Crédit du Nord envers Monsieur [Z] ;
Considérant que Monsieur [Z] est, en conséquence, mal fondé en son appel et en toutes ses demandes ;
Considérant que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge des parties intimées le montant de leurs frais irrépétibles d'appel ; qu'il convient de condamner Monsieur [Z] à verser, à chacune d'elles, la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que Monsieur [Z], qui succombe, supportera les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Déclare irrecevables les conclusions signifiées par Monsieur [V] [Z] le 21 mai 2014 postérieurement à la clôture,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [V] [Z] à payer à la société Crédit Logement la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur [V] [Z] à verser à la société Crédit du Nord la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne Monsieur [V] [Z] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT