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25/06/2014 | FRANCE | N°13/07508

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 25 juin 2014, 13/07508


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 25 JUIN 2014



(n° 203 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/07508



Renvoi après cassation : arrêt n° 168 F-D rendu le 19 Février 2013 par la Cour de Cassation - Pourvoi n° J11-27.537





APPELANTE



LA SOCIÉTÉ GEODIS WILSON FRANCE anciennement dénommée GEODIS OVERSEAS FRANCE agissant poursuite

s et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représentée par Me Olivier DECOUR de l'AARPI GODIN ASSOCIÉS, avoc...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 25 JUIN 2014

(n° 203 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/07508

Renvoi après cassation : arrêt n° 168 F-D rendu le 19 Février 2013 par la Cour de Cassation - Pourvoi n° J11-27.537

APPELANTE

LA SOCIÉTÉ GEODIS WILSON FRANCE anciennement dénommée GEODIS OVERSEAS FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Olivier DECOUR de l'AARPI GODIN ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

Assistée de Me Philippe GODIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R 259

INTIMÉES

LA SOCIÉTÉ ALSTOM GRID nouvelle dénomination de la société AREVA T&D agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 3]

Société GENERALI GLOBAL (LONDON), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 5] ROYAUME UNI

SA ALLIANZ IARD anciennement dénommée ASSURANCES GÉNÉRALES DE FRANCE I.A.R.T.

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentées par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS,

toque : B0515

Assistées de Me Patrick SIMON, avocat au barreau de PARIS, toque : P 160

Société de droit égyptien NATIONAL TRANSPORT AND O VERSEAS SERVICES CO - NOSCO prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1] (Egypte)

non comparante

SOCIÉTÉ DE DROIT ÉGYPTIEN SAVING SHIPPING & FORWAR DING EGYPTE SAE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1] (Egypte)

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 mai 2014, en audience publique, après qu'il ait été fait rapport par Madame Françoise COCCHIELLO, Président, chargée d'instruire l'affaire, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Madame Françoise COCCHIELLO, Président

Madame Irène LUC, Conseiller, rédacteur

Madame Claudette NICOLETIS, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Denise FINSAC

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Président et par Madame Denise FINSAC, Greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

******

Vu le jugement prononcé le 5 mars 2007 par le tribunal de commerce de Paris, dans lequel il a rejeté l'exception de péremption d'instance soulevée par les défendeurs, dit l'action non prescrite, dit l'assignation initiale et l'appel en garantie valides, dit l'exception de compétence recevable mais mal fondée, dit que les sociétés Areva T & D et AGF-IART ont intérêt à agir et ordonné aux parties de conclure au fond';

'

Vu le jugement prononcé le 29 juin 2009 par le tribunal de commerce de Paris, assorti de l'exécution provisoire, dans lequel il a dit recevables les demandes de la société Areva, dit recevable la société AGF-IART en tant qu'apériteur du contrat souscrit par la société Alstom mais jugé la société Generali Global London irrevable de ce fait, débouté la société Geodis de toute demande de garantie relative au contrat d'assurance d'EDF prévue à l'article 17.4 du contrat liant la société Alstom au maître d'ouvrage EDF, débouté la société Geodis et tous ses prestataires substitués de leurs demandes d'exonération de responsabilité en raison du défaut d'attestation de non-recours des assureurs d'Alstom, débouté la société Geodis de sa demande de prescription pour les sommes réglées par AGF IART avant le 5 décembre 2002 ainsi que les sommes réglées les 3 juin 2005 et 5 août 2005, condamné la société Geodis à payer la somme de 1.842.080 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 9 février 2006 (1'747'120 € au titre des dommages matériels, 94'860 € au titre des pénalités de retard), à la société AGF-IART en tant qu'apériteur des assurances de la société Alstom jusqu'à concurrence de la somme de 1.462.725,88 euros et de la contrevaleur en euros de 380.00 US dollars calculée au taux de change au jour du paiement, à la société Areva T & D pour le surplus, condamné la société Steinweg NV à garantir la société Geodis à hauteur de 91.660 euros et débouté la société Steinweg NV de sa demande de garantie contre la société Euronatie, débouté la société Geodis de ses demandes en garantie à l'encontre des sociétés Coli Schffahrt & Transport, Hans & Claus Heinrich, CFTI, Saving Shipping, Nosco, [2] et Mme [H], es qualités de curateur de la société Euronatie, jugé sans objet les demandes de la société Alstom T & D, d'Areva et d'AGF-IART à l'encontre des sociétés Saving Shipping and Forwarding Egypte SAE, National Transport and Overseas Services CO, Hans & Claus Heinrich, dit n'y avoir lieu à statuer sur les instances RG 20030200084, RG 2003023942 et RG 2003303164 et, enfin, condamné la société Geodis à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 100.000 euros à la société AGF-IART à charge pour elle de répartir cette indemnité entre les demandeurs, 10.000 euros à chacune des parties suivantes : Coli Schiffahrt, Hans & Claus Heinrich, CFTI, Saving Shipping & Forwarding Egypte SAE et Nosco';

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Vu l'arrêt prononcé le 21 septembre 2011 par la cour d 'appel de Paris, dans lequel' elle a donné acte à la société Alstom ainsi qu'aux compagnies Allianz et Generali Global London de leur désistement d'action formée à l'encontre de la société Hans & Claus Heinrich, laquelle a déclaré l'accepter, confirmé les jugements déférés susvisés en toutes leurs dispositions, débouté les parties du surplus de leurs demandes respectives, condamné la société Geodis aux entiers dépens d'appel y compris les frais d'expertise sauf ceux exposés, d'une part, par la société Hans & Claus Heinrich, d'autre part, par les sociétés Alstom, Allianz et Generalli Global London dans leurs rapports contentieux et qui restent à la charge de chacune d'entre elles, ainsi que ceux exposés par la société Steinweg et qui restent également à sa charge, et, enfin, condamné la société Geodis à verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 10.000 euros à chacune des sociétés Alstom, Allianz et Genralli Global London ainsi que 10.000 euros à la société CFTI, le surplus des demandes formées au titre dudit article étant rejeté';

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Vu l'arrêt prononcé le 19 février 2013 par la chambre commerciale de la Cour de Cassation, dans lequel elle a cassé et annulé, sauf en ce qu'il a donné acte d'un désistement d'action et confirmé le jugement du 5 mars 2007 ayant statué sur diverses exceptions de procédure et fins de non-recevoir, l'arrêt rendu le 21 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris, remis , en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, condamné les sociétés Alstom et Allianz aux dépens';

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Vu les dernières conclusions signifiées le 28 avril 2014, par la société Geodis Wilson France dans lesquelles elle demande'l'infirmation du jugement entrepris et que la société Alstom GRID et les compagnies ALLIANZ et GENERALI GLOBAL (LONDON) soient déboutées de leurs demandes tendant à l'indemnisation des dommages au transformateur C21-03 dont le montant a été fixé par l'expert judiciaire à 1.636.911 € et au transformateur C22-04 qui se sont élevés à 10.846 €, la société ALSTOM GRID de sa demande tendant au paiement d'une indemnité pour retard, que la société ALSTOM GRID et les compagnies ALLIANZ IART et GENERALI GLOBAL (LONDON) soient déclarées mal fondées en leur appel incident, condamner la société ALSTOM GRID et les compagnies d'assurance ALLIANZ IARD et GENERALI GLOBAL (LONDON) à payer à la société GEODIS WILSON FRANCE la somme de 100.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, les condamner aux dépens de première instance, qui comprendront les frais et honoraires d'expertise judiciaire et d'appel, subsidiairement, voir limiter l'indemnité dont pourrait être redevable la société GEODIS WILSON FRANCE au titre des dommages au transformateur C21-03 dans l'hypothèse où par impossible la Cour viendrait à les imputer à son transport à l'équivalent en euros de 1.338.000 Livres égyptiennes et très subsidiairement, à 94.860 € au titre du retard, s'entendre la société ALSTOM GRID condamner à relever et garantir la société GEODIS WILSON FRANCE des condamnations qui pourraient être mises à sa charge au profit des compagnies ALLIANZ IARD et GENERALI GLOBAL (LONDON) au titre des dommages aux transformateurs C21-03 et C22-04 « in solidum » avec la société NOSCO et au titre des dommages aux transformateurs 30 MBA et 8 MBA, s'entendre la société ALSTOM GRID condamner à payer à la société GEODIS WILSON FRANCE la somme de 100.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamner la société ALSTOM GRID aux dépens de première instance qui comprendront les frais et honoraires d'expertise judiciaire et d'appel';

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Vu les dernières conclusions signifiées le 25 avril 2014, par la société Alstom Grid, par lesquelles elle demande'à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé les actions recevables et bien fondées et débouter la société Geodis de sa demande d'exonération ainsi que de sa demande de garantie dirigée contre Alstom, y ajoutant, dire que Geodis devra réparer l'intégralité du préjudice subi, condamner en conséquence Geodis à payer la somme de 2.785.613,19 € plus intérêts capitalisés à compter du 5 décembre 2002, dont 1.462.725,88 € et 380.000 $ à AGF et Generali et le surplus à Alstom Grid SAS, dire et juger, au visa des articles 149, 151 et 233 du Code Maritime Egyptien, que Geodis ne peut invoquer la limitation de responsabilité maritime en raison de ses fautes personnelles non maritimes, que Geodis ne peut invoquer la limitation de responsabilité du transporteur maritime puisque ledit transport maritime était achevé lors de la survenance du dommage, condamner Geodis à payer la somme de 2.785.613,19 € plus intérêts capitalisés à compter du 29 mai 2006, date de la demande de capitalisation, dont 1.462.725,88 € et 380.000 $ à AGF et Generali et le surplus à Alstom Grid SAS, débouter Geodis de toutes ses demandes, fins et conclusions, en tout état de cause, condamner la ou les parties responsables à supporter les entiers dépens de l'instance, y compris les frais et honoraires d'expertise judiciaire et, enfin, condamner les parties responsables à payer 100.000 € aux demandeurs au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel';

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Sur ce,

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Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

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Aux termes d'un contrat en date du 2 août 2001, la société Alstom T & D devenue Areva T & D, puis Alstom Grid (ci-après Alstom), avait confié à la société Geodis Overseas France, devenue Geodis Wilson France (ci-après Geodis), l'organisation complète du transport exceptionnel de transformateurs, destinés à être installés dans deux centrales thermiques EDF à [1] et à [2]. Les deux transformateurs étaient fabriqués à l'usine de [Localité 6] d'Alstom.

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En application de cette convention, la société Geodis devait acheminer:

-à [2], deux transformateurs 420 MVA et 30 MVA et un transformateur 8 MVA à la centrale électrique EDF de [2],

- à [1], trois transformateurs 420 MVA et 30 MVA et un transformateur 8 MVA à la centrale électrique EDF de [1].

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Dans le cadre de ce transport, l'article 4 du contrat du 2 août 2001 régularisé entre la société Alstom et la société Geodis prévoyait l'intervention de la société CFTI en qualité d'agent de la société Geodis en Egypte.

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S'agissant des transformateurs 420 MVA, ceux-ci ont été fabriqués dans l'usine de la société Alstom de Saint Ouen en 2001 et ont été transportés sans incident jusqu'à Anvers.

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L'agent maritime désigné par la société Geodis, la société Coli Schiff Ahrt, a choisi le transporteur, la société Hans & Claus Heinrich KG. Les trois transformateurs numérotés 03-C21, 04-C22, 05-C23 ont donné lieu à émission de trois connaissements signés par la société Coli Schiff Ahrt : le chargement a eu lieu sur le navire WIEBKE. Aucune réserve n'a été alors formulée, le 6 décembre 2001.

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A l'arrivée à [1], le 23 décembre 2001, un constat d'avarie contradictoire a été établi par le cabinet WORMS les 24 et 25 décembre 2001. Il mentionnait que les deux transformateurs n°03 et 04 (C21 et C22) n'avaient plus leur équipement indicateur d'impact et que le troisième comportait des traces de soudure.

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La société Geodis avait confié à la société Nosco le déchargement des transformateurs du navire et leur transfert sur massifs sur le site de la centrale EDF de [1]. La société Nosco a confié à la société SAVING SHIPPING & FORWARDING EGYPT, suivant télécopie du 7 novembre 2007, le déchargement des transformateurs du navire sur barge et leur déchargement de la barge sur semi-remorques.

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Le déchargement à quai des trois transformateurs par la société Saving, chargée de la manutention, avec les grues de [2] Port Authority, a produit des avaries : en effet, selon l'expertise du cabinet Worms, commissaire d'avarie, le transformateur 04 C 22 a, pendant le déchargement, heurté le transformateur 03 C 21, déjà déchargé, entraînant, sur une poutre latérale de ce dernier, une déformation de 30X25 cm. Ce rapport d'expertise du 27 décembre 2001 reprend en outre les avaries constatées sur le navire deux jours plus tôt.

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Le transformateur C21-03 a été, dès le 27 décembre 2001, chargé sur remorque surbaissée de la société Nosco, après dédouanement, et transporté sur le site de la société EDF Port Saïd East Power où il est arrivé, le même jour, sans autre avarie que la tôle déformée constatée.

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Le lendemain, dans les mêmes conditions, les deux autres transformateurs ont été transportés sur le même site.

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Lors du montage des transformateurs sur le site, il a été constaté l'existence d'avaries plus sérieuses sur le transformateur C 21-03, entraînant l'obligation, pour la société Alstom, de le retourner à Saint Ouen pour réparation. Au cours de ces opérations, en effet, un morceau de résine provenant d'un plan de calage du circuit magnétique a été trouvé dans le fonds de cuve, ce qui révélait que toute la partie active de l'unité avait subi un déplacement, et donc, une déformation qui risquait de la rendre impropre à l'usage. Il était constaté que le flasque de calage des bobinages était fissuré en deux endroits et que le changeur de prise en charge avait subi un déplacement de 2 cm. Une nouvelle expertise était organisée sur le site, selon procès-verbal du 24 avril 2002, l'unité ayant été vidée de toute son huile. Selon le rapport récapitulatif établi par l'expert du bureau Worms, le transformateur avait subi une contrainte anormale pendant le transport, la conséquence principale étant des fissures sur l'un des plateaux de calage. L'expert ajoutait : « toutes ces opérations entraîneront la nécessité d'un traitement par vapeur qui ne peut être effectuée qu'en usine ».

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La société Alstom a demandé par voie de référé, une expertise judiciaire. L'expert a déposé son rapport le 23 janvier 2006. Aux termes de ce transport, il a retenu sur la base des justifications produites par Alstom pour l'évaluation du préjudice matériel, les montants suivants': transformateurs 8MVA':'22'012 euros, transformateurs 30MVA': 87'317 € pour les dommages subis à Anvers et 21'225 € pour les dommages subis à Alexandrie, transformateurs 420 MVA': 1'647'757 €. Il a également évalué à 915'413' euros l'indemnité de retard d'installation dont Alstom a dû s'acquitter envers EDF.

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La société Alstom a, par acte du 5 décembre 2002, assigné la société GEODIS, ainsi que les sociétés Hans & Claus Heinrich KG, le transporteur maritime, Saving Shipping et NOSCO, le manutentionnaire, devant le tribunal de commerce de Paris. Les assureurs de la société Alstom sont intervenus volontairement à la procédure.

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Dans le jugement présentement déféré, le tribunal a fait droit aux principales demandes des assureurs de la société Alstom et d'Alstom elle-même à l'encontre de la société GEODIS.

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Sur les dommages au transformateur C21-03

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Considérant que la société Geodis prétend qu'il appartenait à la société Alstom et à ses assureurs de rapporter la preuve certaine et non hypothétique que les dommages qui ont été constatés sur le transformateur C21-03, trois mois après la livraison, seraient survenus au cours de son transport'; que cette preuve de la survenance des dommages au cours du transport du transformateur ne pourrait résulter de l'expertise judiciaire qui a été réalisée'; qu'en effet, l'expert judiciaire a rappelé : «comme nous l'avons écrit, l'expert ne peut préciser le moment exact des dommages intervenus qu'en se basant sur les rapports existant'»'; qu'il ne s'est donc pas prononcé sur la possibilité d'une imputabilité des dommages à des causes antérieures ou postérieures au transport ; qu'enfin, la société Geodis fait également valoir que le transformateur C21-03 qui devait être livré, selon le Tribunal, le 27 décembre 2001, a dûment été réceptionné sur site à cette date en exécution du contrat conclu le 2 août 2001 ; qu'elle prétend, en conséquence, ne devoir aucune indemnité de retard';'

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Considérant qu'il n'est pas contesté que lors de son levage de la barge pour être déchargé, le transformateur C22-04 a heurté le transformateur'C21-03 ; que le commissaire d'avaries a exposé dans son procès-verbal contresigné par les sociétés Geodis, CFTI, NOSCO, SAVING et ALSTOM, les faits suivants : «Pendant que le transformateur 217967/03 (C21) a été soulevé de la barge, il a bougé et est entré en collision avec le transformateur n° 217976/04 (C22) causant une déformation de 30x25cm sur une poutre en bas du transformateur n° 217967/03 (C21). Le transformateur n° 217967/04 a été trouvé avec un élément de protection de l'indicateur d'impact PAC manquant tel qu'il avait été constaté à bord du « WIEBKE » le 25 décembre 2001»'; que le transformateur C21-03 ayant été directement transporté sur le site d'EDF à [1], EDF a établi un rapport d'incident lequel, après avoir rappelé les dommages aux trois transformateurs 03, 04 et 05 qui ont été décrits comme suit : « -'Transformateur (C21) 03 : une poutre déformée sur côté, deux écrous cassés sur bague de protection, un bouchon manquant, Transformateur 04 : une pièce de protection sur l'indicateur d'impact manquant, Transformateur 05 : éraflures sur partie de tôle», a évalué le montant des réparations dans une fourchette comprise entre 5.000 et 50.000 USD'; que cette évaluation a été confirmée par le responsable du projet EDF à [1] à la société Alstom'; qu'à la suite de l'expertise contradictoire effectuée sur site après mise des transformateurs sur massifs, le commissaire d'avaries a résumé l'avis général de tous les experts et techniciens présents en ces termes': « Les avaries constatées sont considérées comme petites avaries à l'extérieur des transformateurs. Elles sont réparables localement et elles ne devraient avoir aucun effet sur les trois transformateur »';

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Considérant que trois mois après la livraison des transformateurs, le responsable de la centrale électrique EDF a informé la société Alstom de la «découverte d'une partie cassée pendant l'installation du transformateur» C21-03, à savoir «un morceau de résine provenant d'un plateau de calage cuve / partie active qui avait été découverte en fond de cuve» ; qu'à la suite de l'expertise effectuée les 23 et 24 avril 2002, la société Alstom a décidé de retourner le transformateur C21-03 à SAINT OUEN pour y être réparé et a initié une expertise judiciaire';

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Considérant qu'aux termes de l'article 132-4 du code de commerce, le commissionnaire de transport est «garant de l'arrivée des marchandises et effets dans le délai déterminé par la lettre de voiture, hors les cas de force majeure légalement constatée »'; qu'aux termes de l'article L 132- 5 du même code, « il est garant des avaries ou pertes de marchandises et effets, s'il n'y a pas stipulation contraire dans la lettre de voiture ou force majeure'» ; qu'aux termes de l'article 1 du contrat du 2 août '2001, conclu entre les sociétés Alstom et Geodis, « le transitaire reconnaît agir au titre du présent contrat en tant que commissionnaire de transport, et être le seul responsable de l'exécution du transport dans les limites de l'article 1 ci-dessus, avoir pris connaissance des conditions locales, des dispositions à prendre et aménagement à effectuer pour mener à bonne fin le présent contrat, et renonce à toute réclamation qui serait fondée sur un manque d'informations. Le transitaire est tenu d'une obligation de résultat envers le client, et il est responsable de son propre fait et/ou du fait de ses substitués. D'une manière générale, le transitaire s'engage à fournir au client des prestations conformes aux règles de l'art, propres à sa profession, avoir conscience des intérêts du client, tant du côté de la qualité des services que du côté pécuniaire, à signaler au client toutes les possibilités d'obtenir les conditions les plus avantageuses dans le cadre du présent contrat. De plus, le transitaire s'engage à répondre pleinement de toutes les prestations relatives à l'exécution des transports de bout en bout, et à la réalisation des dispositions contractuelles qu'il aura confiées à ses sous-traitants. Le transitaire reconnaît par ailleurs avoir connaissance de l'extrême importance attachée par le client au respect très strict des délais d'exécution » ;

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Considérant que, présumée responsable des dommages subis pendant les opérations dont elle a la charge, en l'espèce les opérations de transport et de manutention, il appartient à la société Geodis de démontrer que ceux-ci sont dus à des causes étrangères ou extérieures ; qu'il résulte des éléments versés aux débats, que le choc de manutention entre les deux transformateurs lors du déchargement de la barge est la cause des désordres constatés après la livraison du transformateur litigieux à [1]'; que la circonstance que les désordres n'aient été découverts que trois mois après le choc litigieux ne saurait dégager la société Geodis de sa responsabilité ; qu'il n'était évidemment pas possible de démonter le transformateur lors de son déchargement sur le quai et de le vider de son huile pour évaluer avec précision l'étendue des dégâts'; que seule l'exploration de ce transformateur, après son installation, et la découverte au fond de cuve d'un morceau de résine provenant d'un plateau de calage, a alerté les agents d'EDF sur les anomalies apparues sur l'appareil et a mis en évidence les dommages subis par celui-ci ; que s'il est exact que le rapport de l'expert judiciaire n'a pas formellement déclaré que le choc entre les deux transformateurs était la cause des anomalies, le lien de causalité résulte des éléments du dossier ; que la société Geodis n'établit aucune circonstance étrangère qui serait de nature à expliquer les anomalies constatées ; que les simples hypothèses émises par le commissionnaire de transport au sujet du mauvais compactage du sol, de l'entreposage des transformateurs sur une pente ou d'un défaut de construction, ne sont corroborées par aucun élément du dossier et ne peuvent renverser la présomption de responsabilité qui pèse sur lui ;

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Sur le plafond de responsabilité évoquée par la société Geodis

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Considérant que, dans l'hypothèse où la cour viendrait à imputer les dommages qui ont justifié le retour du transformateur C21-03 en FRANCE à l'incident de manutention survenu au déchargement de la barge le 27 décembre 2001 à [1], la société Geodis prétend qu'elle ne pourrait en répondre en sa qualité de commissionnaire de transport que dans les mêmes conditions que l'entreprise dont elle répond, à savoir l'entreprise de manutention, la société Saving Shipping';

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Considérant qu'elle soutient que la responsabilité de cet opérateur, qualifié de «'marine contractor'» est limitée par le code maritime égyptien et que sa responsabilité' en sa qualité de commissionnaire de transport ne saurait excéder celle légalement encourue par son substitué, la société Saving Shipping, et doit donc être limitée à l'équivalent en Euros de (223.000 Kgs x 6 :) 1.338.000 Livres Egyptiennes';

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Considérant que, selon les dispositions combinées des articles 148, 149 et 233 du code maritime égyptien, un plafond de' responsabilité s'applique aux «marine contractor'», comme au transporteur maritime';

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Mais considérant que cette limitation de responsabilité que la société Geodis,' en tant que substitué, invoque, est subordonnée à la démonstration du fait que la société Saving Shipping peut effectivement être qualifiée de «'marine contractor'»'; que cette qualification suppose que le dommage se soit produit avant la fin du contrat de transport maritime ; qu'en l'espèce, 'il n'est pas contesté que le dommage a eu lieu lors du déchargement du transformateur de la barge, soit après la fin des opérations de transport maritime intervenue lors du chargement du transformateur depuis le pont du navire jusqu'à la barge'; que cette livraison sous palan a eu pour effet de mettre fin à toute responsabilité du transporteur maritime et donc, à toute limitation de responsabilité des opérateurs intervenant lors de cette phase'; qu'ainsi, il ne saurait être appliqué à la société Saving Shipping la limitation de responsabilité du transporteur maritime prévue dans le code maritime égyptien'; que ce moyen sera donc rejeté';

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Sur les dommages au transformateur C22-04

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Considérant que la société Geodis estime qu'elle ne serait être tenue au paiement du coût des réparations de ce transformateur, fixées par l'expert judiciaire à 10.846 €, la démonstration n'étant pas faite que les manutentions dont il a fait l'objet le 16 juin 2002 soient à l'origine des désordres constatés le 18 juin 2002';

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Considérant que la société Alstom, ayant décidé de retourner à son usine de Saint Ouen le transformateur C21 pour y être réparé, a demandé à la société Geodis de sortir le transformateur C22 de sa cellule pour le déposer en face du massif où était installé le transformateur C21-03 pour être ensuite placé sur son massif'; que la société Geodis a confié cette opération à la société Nosco qui l'a réalisée dans la journée du 16 juin 2002'; que la société Alstom a informé le commissaire d'avaries qu'elle avait constaté sur ce transformateur des désordres, celui-ci ayant aussitôt organisé une expertise et ayant procédé aux mêmes constatations que celles dont la société Alstom avait fait état';

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Sur l'indemnisation des dommages aux deux transformateurs 420 MV

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Considérant qu'il y a lieu de reprendre sur ce point les motifs du jugement entrepris et d'évaluer le préjudice subi par les transformateurs à la somme de 1'647'757 €, la réparation du C22 étant évaluée à une somme de 10'846 €';

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Considérant en effet qu'il y a lieu d'écarter la contestation élevée par la société ALSTOM et ses assureurs sur le poste « remontage sur site, logistique, gestion » qui a été fixé par l'expert à 128.362 € alors que la société ALSTOM et ses assureurs faisaient valoir un montant de 256.724 €'; qu'en effet, l'expert a exposé qu' « il nous semble' étonnant que le montage sur site du C21 ait coûté pratiquement 2,8 fois plus cher que celui du C22. N'ayant pas eu, par souhait général des parties, la possibilité de me rendre sur les lieux pour estimer les difficultés éventuelles qu'aurait pu rencontrer ALSTOM, nous ne retenons arbitrairement ce poste que pour la moitié »'; qu'ainsi que le tribunal l'a souligné : « la retenue pratiquée par Monsieur [Q] sur la ligne 1.4 paraît justifiée compte tenu des problèmes rencontrés par l'installation des transformateurs sur le site en 2002, notamment du compactage des massifs, problèmes qui ne devaient plus se poser fin 2002, lors du retour du C21 »'; '

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Sur l'indemnisation des transformateurs 30 MVA

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Considérant que l'appel ne porte pas sur ce point ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point, étant précisé que l'indemnisation des dommages subis à Anvers par les deux transformateurs de 30 MVA doit être fixée à 91'660 €, dès lors qu'il y a lieu d'ajouter à l'évaluation initiale correspondante de 87'317 € les frais d'expertise facturés par le cabinet Atlantis';

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Sur les dommages immatériels

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Considérant que la société Alstom estime à 83'206 € le coût financier résultant du retard à percevoir d'EDF le prix de la prestation ;

'

Mais considérant que la société Alstom ne fait pas état des indemnités déjà versées à ce titre par ses assureurs et ne démontre pas, en tout état de cause, que le retard invoqué était directement lié aux avaries dont la responsabilité est imputée à la société Geodis';

'

Sur la demande relative aux pénalités de retard versé à EDF

'

Considérant que Alstom prétend obtenir compensation par Geodis des pénalités de 940'000 dollars qu'elle a versées au maître d'ouvrage EDF pour retard à la livraison des équipements ;

'

Mais considérant que Alstom ne démontre pas que les retards soient directement imputables aux avaries qui sont imputées à la société Geodis ; que la société Geodis est liée avec la société Alstom et l'article neuf du contrat prévoit des pénalités de retard spécifiques pour la livraison des équipements transportés ; qu'en l'occurrence le transformateur C 21 qui devait être livré le 27 décembre 2001, l'a été le 22 novembre 2002 ; qu'en application des dispositions de l'article quatre et compte tenu de la durée du retard dont il s'agit, le montant à retenir doit être évalué à la somme de 94'860 euros ;

'

Sur l'appel en garantie de la société Geodis

'

Considérant que la société Geodis, excipant des dispositions de l'article 10 du contrat conclu avec la société Alstom, soutient que cette dernière ne pouvait s'affranchir de son obligation de demander à ses assureurs une attestation de non recours et aurait ainsi commis une faute inexcusable qui justifierait l'appel en garantie formé à son encontre ;

'

Mais considérant que si l'article 10 invoqué stipule effectivement que ''le client demandera à sa compagnie d'assurances sur requête du transitaire une attestation de non recours contre le transitaire et/ou ses sous-traitants en ce qui concerne les pertes et avaries sur matériel'', le même article énonce à la fois ''le client ou les assureurs subrogés se réservent le droit d'exercer un recours contre le transitaire et/ou ses substitués dans le cadre des dispositions légales ' ou contractuelles'' et ''cette attestation ne saurait dégager le transitaire de ses responsabilités '';

'

Considérant, en définitive, que l'attestation de non-recours n'est pas de nature à atténuer ou à supprimer la responsabilité du commissionnaire, astreint à une obligation de résultat'; que par suite, l'absence de demande d'une attestation est sans influence sur la présomption de responsabilité du commissionnaire et la société Geodis ne peut qu'être déboutée de sa demande de garantie contre la société Alstom'; que l'existence d'un contrat d'assurance, souscrit par EDF, ne saurait modifier ces conclusions, Geodis ne pouvant se prévaloir d'un contrat à l'égard duquel elle constitue un tiers';

'

'''

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris,

Et y ajoutant :

Déclare la société Geodis Wilson France responsable des dommages subis par la société Alstom Grid,

Condamne la société Geodis Wilson France aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

La condamne à payer à la société Alstom Grid la somme de 20'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 13/07508
Date de la décision : 25/06/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°13/07508 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-25;13.07508 ?
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