Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 25 JUIN 2014
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/19280
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/12508
APPELANTE
SAS BLUE MOON WW prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège sis
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148
assistée de Me Isabel BACLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0227
INTIMÉ
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] représenté par son syndic le CABINET VASSILIADES, ayant son siège social
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Albert GOLDBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : R091
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 Mai 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller, chargée du rapport
Madame Claudine ROYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
***
La société BLUE MOON WW est propriétaire, dans l'immeuble en copropriété sis [Adresse 1], de locaux situés aux rez-de-chaussée et sous-sol de l'immeuble.
Ces locaux ont été donnés en location à la société EDIPRO qui y exerce, sous l'enseigne « HIP GALERIE » les activités suivantes : commerce de produits et accessoires de mode, commerce de mobilier et accessoires de décoration, métier de marchand d'art, promotion d'artistes et de créateurs en art et objets d'art et bijoux.
La société EDIPRO accueille dans ses locaux l'association « HIP CLUB », laquelle a pour objet la promotion d'artistes et de créateurs en art, objets d'art et bijoux. Cette association offre à ses membres la possibilité de se rencontrer et de se restaurer dans l'espace club situé au sous-sol de la galerie.
Un procès-verbal d'huissier, dressé en date du 25 août 2011 à la requête du syndicat des copropriétaires, ayant constaté cette activité de restauration, le syndic a indiqué à la société BLUE MOON WW que cette activité de restauration était illicite comme n'ayant pas été permise par l'assemblée générale des copropriétaires du 1er février 2010, prise sur le fondement de l'article 7 du règlement de copropriété, qui n'avait autorisé son prédécesseur à exercer dans les locaux du rez-de-chaussée que les activités de commerce de produits de luxe et accessoires de mode, commerce de mobiliers et accessoires de décoration, métier de marchand d'art, promotion d'artistes et de créateurs en art et objets d'art et bijoux, à l'exclusion de toute autre activité.
Par exploit du 1er septembre 2011, la société BLUE MOON WW a fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins de voir déclarer nul l'article 7a) 4ème alinéa du règlement de copropriété et se voir reconnaître son droit d'user du local affecté aux poubelles comme tous les autres copropriétaires.
Par jugement contradictoire, assorti de l'exécution provisoire, rendu le 27 septembre 2012, dont la société BLUE MOON WW a appelé par déclaration du 26 octobre 2012, le tribunal de grande instance de Paris 8ème chambre 2ème section :
Déclare la société BLUE MOON WW mal fondée en sa demande principale en annulation de l'article 7 a) 4ème alinéa du règlement de copropriété ; l'en déboute ;
Dit que la demande accessoire relative au droit d'usage du local des poubelles, partie commune, se trouve sans objet ;
Déboute la société BLUE MOON WW de sa demande accessoire au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la société BLUE MOON WW à verser au syndicat la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.
Le syndicat des copropriétaires, intimé, a constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux conclusions d'appel, dont les dernières ont été signifiées dans l'intérêt :
De la société BLUE MOON WW, le 22 avril 2014,
Du syndicat des copropriétaires, le 7 avril 2014.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 avril 2014.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Sur les prétentions en cause d'appel
La société BLUE MOON WW demande, par infirmation, de déclarer non écrite la clause stipulée à l'article 7 a) 4ème alinéa du règlement de copropriété en ce qu'elle conditionne l'exercice d'une activité commerciale au rez-de-chaussée à une autorisation préalable du syndicat des copropriétaires, de lui reconnaître son droit, au même titre que tous les copropriétaires, d'user du local des poubelles, qui est une partie commune, et de condamner le syndicat à lui payer la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du CPC ;
Le syndicat demande de confirmer le jugement et de condamner la société BLUE MOON WW à lui payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ; il fait valoir que la clause querellée serait licite et que l'assemblée générale du 1er février 2010 aurait autorisé l'exercice d'un certain nombre d'activités commerciales limitativement énumérées au profit de la société BLUE MOON WW, mentionnées précisément dans son acte d'acquisition du 10 février 2010 ; que la société BLUE MOON WW se serait engagée, tant par les dispositions particulières de son acte d'achat que par les décisions arrêtées lors de l'assemblée générale du 1er février 2010 à laquelle elle participait, à respecter l'exercice limité d'un certain nombre d'activités et que sa présente demande tendrait à obtenir l'entérinement de la violation de ses engagements contractuels pour pouvoir exercer une activité de restauration dans ses parties privatives ; que la société BLUE MOON WW bénéficierait de la clause dérogatoire dont elle demande la suppression et que le succès de sa prétention de ce chef entrainerait de facto l'impossibilité d'exercer une quelconque activité commerciale au sein de l'immeuble ;
Sur la clause querellée du règlement de copropriété
Le règlement de copropriété stipule à son article 6, intitulé « Destination de l'immeuble » : « l'immeuble est destiné à l'usage mixte d'habitation, d'exercice de professions libérales et de bureaux » ;
L'article 7 du même règlement, intitulé « Usage des parties privatives » comprend un « a) Occupation » ainsi rédigé : « les locaux composant l'immeuble pourront être utilisés indifféremment soit pour l'habitation, soit pour l'exercice de professions libérales, soit à usage de bureaux.
La location en meublé d'un local entier est autorisée.
La généralité des locaux compris dans l'immeuble ne pourra être utilisée ni pour y effectuer des actes de production industrielle ni pour y exercer un commerce de détail.
Par dérogation à cette règle, les locaux situés au rez-de-chaussée pourront être utilisés pour l'exercice d'un commerce pour lequel l'autorisation aura été préalablement obtenue du syndicat.
'.. »
Il s'évince des stipulations précitées du règlement de copropriété que la destination de l'immeuble est à usage mixte d'habitation, d'exercice de professions libérales et de bureaux et que ce n'est que par dérogation à cette destination que les locaux situés au rez-de-chaussée pourront être utilisés pour l'exercice d'un commerce, sur l'autorisation préalable de l'assemblée générale, amenée à vérifier que la sécurité et la tranquillité des autres occupants de l'immeuble ne seront pas compromises ou troublées, notamment par le bruit, l'odeur, les vibrations ou autrement, le règlement de copropriété insistant dans l'article 7 a) et b) sur ce caractère de tranquillité qui participe de la destination de l'immeuble ;
La société BLUE MOON WW ne peut pas valablement soutenir que l'article 7 a) 4ème alinéa du règlement précité devrait être réputé non écrit au motif que, par sa généralité, il restreindrait de façon non justifié les droits du propriétaire des lots du rez-de-chaussée, alors que le 4ème alinéa du a) de l'article 7 précité prévoit au contraire une dérogation bénéficiant aux seuls lots du rez-de-chaussée pour l'exercice d'un commerce, les autres lots ne pouvant servir qu'à l'usage d'habitation, d'exercice de professions libérales ou de bureaux conformément à la destination de l'immeuble ; ce moyen sera donc rejeté ;
La société BLUE MOON WW ne peut pas non plus valablement soutenir que l'article 7 a) 4ème alinéa devrait être réputé non écrit au motif qu'il subordonnerait l'exercice d'un commerce à une autorisation préalable du syndicat sans aucune précision et abandonnerait ainsi à l'appréciation discrétionnaire de l'assemblée des copropriétaires le soin d'autoriser tel ou tel commerce alors qu'il s'évince de l'analyse du règlement de copropriété, notamment de son article 6 et de son article 7 dans sa globalité, que les commerces autorisés au rez-de-chaussée, par dérogation à la destination de l'immeuble, sont ceux qui ne sont pas de nature à gêner la tranquillité des voisins notamment par le bruit, l'odeur ou les vibrations, toute autre considération relevant d'un abus de droit pouvant entraîner l'annulation judiciaire de la résolution qui refuserait l'autorisation sollicitée ; ce moyen sera donc rejeté ;
La société BLUE MOON WW ne peut valablement soutenir que le « g) Enseignes » de l'article 7 du règlement de copropriété édictant que, par dérogation à la règle d'interdiction de placer sur la façade de l'immeuble aucune enseigne, les occupants des boutiques sis au rez-de-chaussée pourront placer des enseignes aux droits de celles-ci, établirait la possibilité d'exercer un commerce au rez-de-chaussée sans qu'il soit nécessaire d'une autorisation préalable de l'assemblée générale alors qu'il appert de l'analyse du règlement de copropriété que tout commerce pouvant être exercé au rez-de-chaussée, par dérogation à la destination de l'immeuble, doit être de nature à respecter la tranquillité des autres occupants justifiant l'autorisation préalable de l'assemblée générale, de telle sorte que la possibilité d'exercer n'importe quel commerce n'est pas acquise du fait de la clause permettant, par cohérence, l'apposition d'enseigne aux droits des boutiques du rez-de-chaussée pour les commerces autorisés ; ce moyen sera donc rejeté ;
Dans ces conditions, par adoption de motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société BLUE MOON WW tendant à voir réputé non écrit l'article 7 a) 4ème alinéa du règlement de copropriété ;
Sur le local des poubelles
Le jugement sera confirmé, par motifs adoptés, en ce qu'il a dit que la demande relative au droit d'usage du local des poubelles, partie commune, se trouve sans objet, en l'absence de toute contestation ou litige sur la possibilité pour la société BLUE MOON WW d'utiliser lesdites poubelles ;
Il n'y a pas lieu de donner acte à la société BLUE MOON WW de ce qu'elle dispose, au même titre que tous les copropriétaires de l'immeuble, du libre accès au local des poubelles de l'immeuble ; cette demande, qui s'avère sans objet, sera rejetée ;
Sur les autres demandes
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué au syndicat la somme de 2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance ;
Il sera alloué au syndicat la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Confirme le jugement ;
Y ajoutant :
Condamne la société BLUE MOON WW à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Rejette les demandes autres, plus amples ou contraires ;
Condamne la société BLUE MOON WW aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,