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04/06/2014 | FRANCE | N°12/22618

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 04 juin 2014, 12/22618


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 04 JUIN 2014



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/22618



RENVOI APRES CASSATION

Arrêt du 12 septembre 2012 - Cour de cassation - pourvoi E 11.10.421

Arrêt du 12 novembre 2010 - Cour d'appel de PARIS - RG n°08/23308

Jugement du 04 Novembre 2008 - Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/0

8360





DEMANDEURS A LA SAISINE



Monsieur [D] [F] [K] [E]

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représenté par : Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toq...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 04 JUIN 2014

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/22618

RENVOI APRES CASSATION

Arrêt du 12 septembre 2012 - Cour de cassation - pourvoi E 11.10.421

Arrêt du 12 novembre 2010 - Cour d'appel de PARIS - RG n°08/23308

Jugement du 04 Novembre 2008 - Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/08360

DEMANDEURS A LA SAISINE

Monsieur [D] [F] [K] [E]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par : Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assisté de : Me Francis BOUSQUET substitué à l'audience par Me Luc BOUSQUET, avocats au barreau de Paris, toque : B482

Madame [S] [P] [Q] [A] épouse [E]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par : Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée de : Me Francis BOUSQUET substitué à l'audience par Me Luc BOUSQUET, avocats au barreau de Paris, toque : B482

DEFENDEUR A LA SAISINE

Syndicat des copropriétaires SDC [Adresse 1] en la personne de son syndic la société ETC GESTION domicilié en cette qualité audit siège

C/o la SARL ETC GESTION

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par : Me Nathalie HERSCOVICI de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assisté de : Me Pascal ADAM, avocat au barreau de Paris, toque : A642

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Mars 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre

Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère

Madame Maryse LESAULT, Conseillère

qui en ont délibéré

Rapport ayant été fait par Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Guillaume MARESCHAL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José THEVENOT, Présidente et par M. Guillaume MARESCHAL, Greffier.

*******

[D] [E] et [S] [A] épouse [E] ont acquis le 30 décembre 1983 un appartement dans un immeuble à [Localité 3]. Des travaux de rénovation ont été effectués sur l'immeuble à la demande de la CMRI alors maître d'ouvrage et ils ont fait l'objet d'une réception le 28 février 1986.

La locataire des époux [E] s'est plainte en 1987 de désordres affectant l'appartement et une action a été engagée par elle à l'encontre des époux [E] et du syndicat des copropriétaires qui a appelé en garantie les constructeurs.

Des désordres ayant affecté également les parties communes de l'immeuble, une procédure a été également diligentée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre des constructeurs et assureurs et suite à un jugement du tribunal de grande instance de Créteil en date du 2 novembre 1992 ayant condamné ceux-ci à verser diverses sommes, des travaux ont été exécutés par le syndicat des copropriétaires.

Cependant [D] [E] et [S] [A] épouse [E] se sont plaints de la persistance de désordres dans leur appartement et une expertise a été diligentée à leur demande. Le rapport de M. [Y] a été déposé en mars 2001.

[D] [E] et [S] [A] épouse [E] ont assigné sur le fondement de l'article 14 al 4 de la loi du 10 juillet 1965 le syndicat des copropriétaires en paiement de la somme de 70.572,40€ valeur mars 2001 au titre des réfections, de la somme de 7313,40€ par an à compter du 1er décembre 1987 au titre de la perte locative et d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires a assigné en garantie les constructeurs et leurs assureurs.

Par jugement du 4 novembre 2008 le tribunal de grande instance a rejeté l'exception d'irrecevabilité formée par le syndicat des copropriétaires pour défaut de droit d'agir de [D] [E] et [S] [A] épouse [E], rejeté la demande au fond de ceux-ci, dit sans objet les appels en garantie, condamné [D] [E] et [S] [A] épouse [E] notamment à verser au syndicat des copropriétaires une somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamné le syndicat des copropriétaires à verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile à certains locateurs d'ouvrage et leurs assureurs.

Par arrêt du 12 novembre 2008 la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement et condamné [D] [E] et [S] [A] épouse [E] à verser une somme de 2000€ au syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 12 septembre 2002 la Cour de Cassation a cassé cet arrêt en toutes ses dispositions.

[D] [E] et [S] [A] épouse [E] ont saisi la présente cour de renvoi le 20 novembre 2012.

Par conclusions du 24 janvier 2014 ils demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes et les a condamnés au paiement de la somme de 2000€ au syndicat des copropriétaires au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de déclarer le syndicat des copropriétaires entièrement responsable des désordres affectant leur appartement et des conséquences immatérielles de cette situation, de condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer la somme de 70.572,35€ TTC valeur mars 2001, avec actualisation et la somme de 7313,40€ par an à compter du 1er décembre 1987 jusqu'au 10 janvier 2006 date de la vente de leur appartement, de les déclarer recevables et fondés à obtenir en outre au titre d'une indemnisation complète de leur préjudice les intérêts au taux légal sur chaque année de loyers perdus, à compter du 1er décembre 1987, chaque année s'ajoutant aux précédentes pour le calcul de ces intérêts chaque premier décembre, et cela jusqu'au 10 janvier 2006, et ils réclament une somme de 8000€ au syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 12 février 2014 le syndicat des copropriétaires demande à la cour de déclarer [D] [E] et [S] [A] épouse [E] responsables des désordres affectant leur appartement , de les débouter de leurs demandes, de confirmer le jugement, subsidiairement de juger que la carence fautive de [D] [E] et [S] [A] épouse [E], eu égard à la perte de l'action récursoire par le syndicat des copropriétaires engage leur responsabilité et cause un préjudice au syndicat égal aux sommes qu'ils réclament, qu'il y a lieu de décharger, et d'ordonner la compensation entre les sommes réclamées et la créance de dommages et intérêts, et il réclame une somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour se réfère pour plus ample exposé des demandes aux conclusions ainsi visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Trois expertises judiciaires ont été effectuées sur les lieux, la première sur l'immeuble à la demande du syndicat des copropriétaires par M. [B] dont le rapport a été déposé en mars 1991, la seconde dans le cadre du contentieux locatif sur les parties privatives de l'appartement [E] par M. [B], dont le rapport a été déposé en mars 1992, la troisième sur les parties privatives de l'appartement [E] et à la demande de ceux-ci, par M. [Y] dont le rapport a été déposé en mars 2001.

Il en résulte que l'appartement des époux [E], situé au rez-de-chaussée de l'immeuble en contrebas d'un dénivelé de terrain, présentait des dégradations dues, en raison de la situation du terrain et de la présence de nappes phréatiques, à l'humidité ascensionnelle des murs porteurs et à la porosité des enduits, jointes à l'absence de mesures tendant à éradiquer les remontées capillaires et de toute ventilation naturelle ou mécanique prévue.

M. [Y] est clair en ce qu'il attribue l'origine des dégâts constatés dans l'appartement [E] aux parties communes de l'immeuble et les causes à des absences de respect des règles de l'art lors des travaux de rénovation de cet immeuble en 1985-1986. M. [B] avait également constaté des désordres sur les parties communes et à l'intérieur de plusieurs logements, dont celui des époux [E] et les avait attribués aux mêmes causes.

M. [Y] a chiffré à 462.924,24 francs soit 70.572,35€ le montant des réparations intérieures de l'appartement des époux [E].

Il est certain que depuis le premier décembre 1987, date du départ de la locataire de leur appartement pour des motifs tenant à son état dégradé du fait des désordres dus à l'humidité, qui avaient été constatés par huissier de justice en novembre 1987, les époux [E] n'ont pas reloué cet appartement avant de le vendre en 2006 et que celui-ci ne pouvait être occupé avant travaux de réfection importants.

Ils ont donc subi un préjudice locatif qui, au regard du montant du loyer antérieur doit être évalué sur les bases indiquées dans leurs écritures.

Le syndicat des copropriétaires est aux termes de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 responsable des dommages causés aux copropriétaires par le vice de construction des parties communes.

Toutefois il sera observé que :

- Les époux [E] avaient été assignés avec le syndicat des copropriétaires par leur locataire en décembre 1989 en indemnisation de préjudice. Ils connaissaient, pour être parties à la procédure, l'existence dès 1990 du recours effectué par le syndicat des copropriétaires à l'encontre des constructeurs, et l'ordonnance de référé du 29 mars 1990 désignant M. [B] comme expert afin d'examiner les désordres sur les parties communes de l'immeuble.

- Par jugement du 2 novembre 1992 le tribunal de grande instance de Créteil, s'il constate l'existence d'une très forte humidité dans l'appartement [E] indique cependant que leur locataire ne prouve pas la réalité d'un préjudice matériel ni même d'un préjudice de jouissance, car elle avait quitté les lieux dès l'apparition de cette humidité et il a débouté cette locataire de ses demandes. Le tribunal a également noté que M. [E] ne présentait pas de demande personnelle à l'encontre du syndicat des copropriétaires ni d'ailleurs des constructeurs également assignés, se contentant de demander la garantie du syndicat des copropriétaires en cas de condamnation à son encontre au profit de sa locataire. Il a enfin condamné les constructeurs à verser au syndicat des copropriétaires une somme au titre des reprises des désordres liés à l'humidité de l'immeuble.

- Le 27 janvier 1994 l'assemblée générale des copropriétaires a voté les travaux de réfection des parties communes.

- Aucune des pièces produites, notamment les procès-verbaux de cette assemblée générale et de celles du 15 mars 1995 et du 1er avril 1996 ne mentionne que les copropriétaires prennent en charge les réparations intérieures de l'appartement [E].

- Au contraire une lettre du cabinet KERN, qui assurait à la fois les fonctions de syndic de la copropriété et celles de gérant des biens de M. [E], précise le 5 juin 1996 à celui-ci que les travaux privatifs de son appartement ne peuvent être terminés car il n'a pas réglé les appels de fonds et les copropriétaires refusent de prendre en charge ces travaux.

- Postérieurement à 1994, date de décision des copropriétaires sur les réfections des parties communes, et 1996, date de réalisation de ces travaux, et jusqu'en 2006, il n'est pas démontré que les époux [E] auraient effectué quelques travaux que ce soit sur leurs parties privatives.

Si les nécessités de réparation de leur bien ne peuvent leur être imputées à faute puisque les dommages étaient constitués dès 1987, force est de constater que les époux [E] ont participé par leur inaction procédurale à la prolongation de leur préjudice de jouissance : il leur était loisible en effet de former dès 1990 une demande à l'encontre du syndicat des copropriétaires, et/ou à l'encontre des intervenants à la réalisation des travaux de réhabilitation, puisqu'ils étaient parties à la procédure, et de réclamer ainsi une somme leur permettant d'effectuer les travaux de reprise intérieure de leur appartement et l'indemnisation de leurs troubles privatifs.

Or leur inaction a non seulement participé à la prolongation de leurs troubles de jouissance, à compter d'une période qui doit être fixée au 1er décembre 1997 au regard de la possibilité raisonnable de terminer la totalité des travaux privatifs à cette date après la fin des travaux des parties communes, et jusqu'à la vente, mais elle a également privé le syndicat des copropriétaires d'exercer en temps utile ses recours contre les constructeurs d'origine : il sera rappelé que la réception des travaux étant intervenue le 28 février 1986, les constructeurs étaient déchargés de leur responsabilité au 28 février 1996. Aucune demande n'a été formée contre eux au titre des dommages des parties privatives de l'appartement [E]. Or seul le propriétaire de cet appartement avait qualité à présenter une telle demande, et l'interruption de la prescription intervenue au bénéfice du syndicat des copropriétaires pour les désordres des parties communes n'a pas eu pour effet d'interrompre la prescription au profit du syndicat des copropriétaires pour une action récursoire du chef de désordres affectant les parties privatives.

Ayant été ainsi privé de ses recours par la carence des époux [E], et alors qu'il est certain au regard des décisions rendues que ces recours auraient abouti à la garantie du syndicat des copropriétaires par les constructeurs condamnés au titre des parties communes, il doit être jugé que le syndicat des copropriétaires subit du fait de la faute des époux [E] un préjudice strictement égal aux sommes qu'il est contraint de supporter en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Il y a donc lieu de fixer le préjudice des époux [E] aux montants de 70.572,35€ valeur mars 2001 avec actualisation, en ce qui concerne les reprises, de 7313,40€ par an à compter du 1er décembre 1987 jusqu'au 1er décembre 1997, outre les intérêts au taux légal sur chaque année de loyer perdu en ce qui concerne le préjudice de jouissance comme réclamé dans leurs écritures pour assurer la parfaite indemnisation de leur préjudice, de dire que le préjudice du syndicat des copropriétaires est égal à ces montants, et d'ordonner la compensation de ces créances.

Les dépens doivent être mis à la charge du syndicat des copropriétaires mais des considérations d'équité conduisent au rejet de la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déclare le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] responsable du préjudice de [D] [E] et [S] [A] épouse [E] ;

Fixe ce préjudice aux montants de 70.572,35€ TTC, avec actualisation sur la base de l'indice BT01 du coût de la construction depuis mars 2001jusqu'au jour du présent arrêt, au titre des reprises, de 7313€ par an du 1er décembre 1987 au 1er décembre 1997 outre les intérêts sur chaque année de loyer à partir de sa date d'échéance au titre du préjudice de jouissance ;

Déclare [D] [E] et [S] [A] épouse [E] responsable du préjudice du syndicat des copropriétaires ;

Fixe ce préjudice au montant des sommes allouées ci-dessus à [D] [E] et [S] [A] épouse [E] ;

Ordonne la compensation des créances réciproques ;

Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens comprenant les frais d'expertise ;

Déboute [D] [E] et [S] [A] épouse [E] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Autorise le recouvrement des dépens par les avocats de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/22618
Date de la décision : 04/06/2014

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°12/22618 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-04;12.22618 ?
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