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04/06/2014 | FRANCE | N°11/06476

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 04 juin 2014, 11/06476


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 04 JUIN 2014



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/06476



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009023210



APPELANTE



SAS NEOLOG prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5]

[Adresse 5]

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Représentée par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, avocat postulant

Assistée de Me Julien LOMBARD plaidant pour Me Fabrice LORV...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 04 JUIN 2014

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/06476

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009023210

APPELANTE

SAS NEOLOG prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, avocat postulant

Assistée de Me Julien LOMBARD plaidant pour Me Fabrice LORVO de la SCP FOUCAUD TCHEKHOFF POCHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P010, avocat plaidant

INTIMÉES

SCI ENTRE MEURTHE ET BROT prise en la personne de ses représentants légaux

(Appelante dans le RG 12/18657 ayant fait l'objet d'une jonction avec le RG 11/06476)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, avocat postulant

Assistée de Me Pascale NIOLOUX plaidant pour la SELAFA HUBERT MAZINGUE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K8, avocat plaidant

SAS COANUS prise en la personne de ses représentants légaux

(Intimée dans le RG 12/18657 ayant fait l'objet d'une jonction avec le RG 11/06476)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Jean-didier MEYNARD de la SCP BRODU CICUREL MEYNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240, avocat postulant

Assistée de Me Francis KIHL plaidant pour la SELARL LORRAINE DEFENSE & CONSEIL, avocat au barreau d'EPINAL, avocat plaidant

SARL AME ARCHITECTURE MADE IN EUROPE prise en la personne de ses représentants légaux

(Intimée dans le RG 12/18657 ayant fait l'objet d'une jonction avec le RG 11/06476)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653, avocat postulant

Assistée de Me Patrice CARNEL de la SCP HOCQUET GASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant

SA BUREAU VERITAS prise en la personne de ses représentants légaux

(Intimée dans le RG 12/18657 ayant fait l'objet d'une jonction avec le RG 11/06476)

Par ordonnance du 12 février 2013 rendue dans le dossier inscrit sous le RG12/18657, la SCI Meurthe et Brot a été déclarée irrecevable en son appel à l'encontre de la SA Bureau Veritas.

[Adresse 6]

[Adresse 6]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Février 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Odile BLUM, conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente

Madame Odile BLUM, conseillère

Monsieur Christian BYK, conseiller

Greffier : lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********

Par acte du 15 février 2007, la SCI Entre Meurthe et Brot a donné à bail commercial à la Sttn, aux droits de laquelle est venue la société Neolog, filiale de La Poste, des locaux, situés [Adresse 2], à destination de plate-forme routière de ventilation de courrier.

Par cet acte, le bailleur s'engageait à réaliser les travaux de remplacement de la toiture de l'immeuble et à faire exécuter ces travaux de façon à gêner le moins possible l'activité du preneur. C'est ainsi que fin 2007, la SCI Entre Meurthe et Brot a confié la maîtrise d'oeuvre du chantier, prévoyant la dépose, le chargement et le transport des plaques en fibrociment amiantées composant la toiture, à la société Ame-Architecture made in Europe, la mission de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé des travailleurs à la société Bureau Veritas et la réalisation des travaux à l'entreprise de couverture Coanus, spécialisée dans les bâtiments industriels et qualifiée pour le traitement amiante, la méthode retenue étant une déconstruction protégée en sous face de la toiture avec maintien de l'activité sur le site.

À la suite d'une visite sur les lieux, le contrôleur du travail a, par lettre du 4 avril 2008, indiqué à la société Neolog que de manière générale tous les organismes préventeurs préconisent l'évacuation totale des locaux pendant les opérations de désamiantage et qu'il ne lui était pas possible de continuer à faire travailler son personnel dans les conditions constatées tant que le niveau d'exposition des salariés n'était pas connu de façon certaine.

En réponse à son interrogation sur la possibilité de réaffecter ses salariés à leurs postes de travail compte tenu des résultats négatifs des prélèvements d'air effectués, le contrôleur du travail a répondu, le 11 avril 2008, à la société Neolog qu'il était impossible d'affirmer que la poursuite des travaux dans les conditions constatées ne présente aucun risque pour les salariés, un incident pouvant survenir à tout moment et lui a demandé en conséquence de 'mettre en oeuvre les obligations qui vous ont été précédemment rappelées et de m'adresser les justificatifs des mesures prises en ce sens : mise à jour du document unique, établissement d'un plan de prévention après inspection commune, consultation des membres du CHSCT, mise en place d'un confinement parfaitement étanche, et formation et information de l'ensemble des salariés'. La société Neolog a alors immédiatement évacué son personnel.

Les travaux ayant fait l'objet, le 23 mai 2008, d'une réception avec réserves, levées le 30 mai suivant, la société Neolog, qui avait cessé de régler les loyers, a réintégré les lieux le 1er juin 2008.

Courant mars et avril 2009, la SCI Entre Meurthe et Brot a assigné, d'une part la société Neolog en paiement des loyers d'avril et mai 2008 avec intérêts et anatocisme, d'autre part la société Ame, la société Bureau Veritas et la société Coanus en paiement, à titre subsidiaire, des mêmes sommes à titre de dommages et intérêts.

Par jugement rendu le 1er mars 2011, le tribunal de commerce de Paris s'est dit compétent et a :

- dit que la SAS Neolog et la SARL Ame recevables mais mal fondées en leur exception de nullité de l'assignation,

- condamné la SAS Neolog à payer à la SCI Entre Meurthe et Brot la somme de 30.462,19 € TTC, majorée d'intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2008, intérêts capitalisés dans les termes de l'article 1154 du code civil,

- débouté la SAS Neolog de ses demandes à l'encontre de la SCI Entre Meurthe et Brot,

- débouté la SCI Entre Meurthe et Brot de ses demandes à l'encontre de la SAS Coanus et condamné la SCI Entre Meurthe et Brot à payer la SAS Coanus les intérêts au taux légal sur les sommes de 127.095,43 € du 12 septembre 2008 au 21 avril 2009 et de 30.462,42 € du 21 avril 2009 au 12 juin 2008,

- débouté la SAS Coanus de sa demande en dommages et intérêts,

- condamné la SCI Entre Meurthe et Brot à payer, en deniers ou quittance valable, à la SARL Ame la somme de 8.149,62 € TTC,

- débouté la SCI Entre Meurthe et Brot de sa demande à l'encontre de la SA Bureau Veritas,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la SAS Neolog à payer à la SCI Entre Meurthe et Brot la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la SAS Coanus de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la SCI Entre Meurthe et Brot,

- condamné la SCI Entre Meurthe et Brot à payer à la SARL Ame d'une part, à la SA Bureau Veritas d'autre part, la somme de 1 000 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné respectivement la SCI Entre Meurthe et Brot et la SAS Neolog à la moitié des dépens.

La SAS Neolog a relevé appel de cette décision le 5 avril 2011 à l'encontre de la seule SCI Entre Meurthe et Brot. (RG n° 11/06476).

La SCI Entre Meurthe et Brot a relevé appel du même jugement le 17 octobre 2012 à l'encontre des sociétés Coanus, Ame et Bureau Veritas (RG n° 12/18657).

Par ordonnance du 12 février 2013, le conseiller de la mise en état a déclaré la SCI Entre Meurthe et Brot irrecevable en son appel à l'encontre de la société Bureau Veritas.

Par arrêt du 3 avril 2013, cette cour a ordonné la jonction des deux procédures RG n° 11/06476 et RG n° 12/18657.

Par ordonnance du 10 septembre 2013, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de la société Ame tendant à voir déclare irrecevable, pour tardiveté, l'appel formé à son encontre par la SCI Entre Meurthe et Brot.

Par ses dernières conclusions du 23 janvier 2014, la SAS Neolog demande à la cour d'infirmer le jugement sur les condamnations à son encontre et de :

1/ à titre principal

- constater les troubles de jouissance qu'elle a subis durant les mois d'avril et mai 2008 du fait de l'exposition de ses salariés au risque d'amiante, que ce risque de propagation d'amiante n'a disparu qu'à la levée des réserves suite à la réception des travaux, soit le 30 mai 2008 et que c'est à bon droit qu'elle a quitté les locaux loués, du 14 avril 2008 au 31 mai 2008, du fait de la défaillance du bailleur à lui garantir la jouissance paisible ;

- ordonner le remboursement 'par la société Neolog à la SCI Entre Meurthe et Brot' des sommes versées en exécution du jugement soit 35.695,89 €,

- condamner la SCI Entre Meurthe et Brot à lui payer la somme de 25.197,56 € sur le fondement du préjudice financier dû à la réorganisation qui lui a été imposée et la somme de 10.000 € pour préjudice d'image,

- condamner la SCI Entre Meurthe et Brot à payer une indemnité de 12.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec distraction,

- rejeter toutes les demandes de la SCI Entre Meurthe et Brot,

2/ à titre subsidiaire, si la SCI Entre Meurthe et Brot ne devait pas voir sa responsabilité engagée

- rejeter toutes les autres demandes de la SCI Entre Meurthe et Brot,

- constater que le risque de propagation d'amiante a été également créé par les fautes des sociétés Ame et Coanus dans l'exécution des travaux,

- condamner solidairement les sociétés Ame et Coanus à lui payer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 35.695,89 € correspondant au loyer injustement payé par elle à la SCI Entre Meurthe et Brot, la somme de 25.197,56 € au titre de son préjudice financier dû à la réorganisation qui lui a été imposée et la somme de 10.000 € pour son préjudice d'image,

- condamner solidairement les sociétés Ame et Coanus à lui payer une indemnité de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction.

Par ses dernières conclusions du 12 février 2014, la SCI Entre Meurthe et Brot demande à la cour de :

- débouter la société Neolog de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Neolog à lui payer la somme de 30.462,19 € TTC au titre des loyers d'avril et mai 2008, majorée d'intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2008 avec capitalisation de ces intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil et débouté la société Neolog de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- infirmer la décision en ce qu'elle l'a déboutée du surplus de ses prétentions et condamnée à payer à la société Coanus les intérêts au taux légal sur le solde du marché, à savoir sur les sommes de 127.095,43 € du 12 septembre 2008 au 21 avril 2009 et de 30.462,42 € du 12 juin 2008 au 21 avril 2009,

- condamner la société Neolog à l'indemniser du paiement des intérêts versés à Coanus, dans la mesure où seules ses demandes illégitimes ont conduit la SCI à différer le paiement du solde des travaux,

- à titre subsidiaire, condamner les sociétés Ame et Coanus à la garantir de toute condamnation ; les condamner in solidum à lui payer toute somme pouvant être allouée à la société Neolog, en déduction, voire même en sus de sa dette de loyers en principal et intérêts, capitalisés à compter de la mise en demeure du 2 mai 2008 dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- rejeter toutes les demandes dirigées à son encontre,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Ame une somme de 8.149,62 € au titre du solde de ses honoraires,

- constater que la société Ame a manqué à son obligation de conseil et d'assistance à son égard et infirmer le jugement en ce qu'il a mis à sa charge des dépens et indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Ame,

- condamner in solidum les sociétés Neolog, Ame et Coanus au paiement de la somme supplémentaire de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction.

Par ses dernières conclusions du 8 janvier 2014, la société Coanus demande à la cour de :

- constater qu'elle n'a commis aucune faute et débouter la SCI Entre Meurthe et Brot de sa demande,

- condamner la SCI Entre Meurthe et Brot à lui payer la somme de 15.000 € au titre du préjudice moral et de procédure subi,

- condamner la SCI Entre Meurthe et Brot à lui payer la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions du 26 décembre 2013, la SARL Ame - Architecture Made In Europe (Ame) demande à la cour de :

- dire la SCI Entre Meurthe et Brot mal fondée en sa demande à son encontre, n'ayant commis aucune faute susceptible d'être en relation directe de cause à effet avec le préjudice prétendument invoqué,

- constater qu'il n'existe en appel aucun lien d'instance entre Neolog et Ame,

- juger irrecevables les demandes formulées pour la première fois en cause d'appel par la société Neolog à son encontre,

- condamner la SCI Entre Meurthe et Brot à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction.

SUR CE,

Considérant que la société Neolog soutient à titre principal que la SCI Entre Meurthe et Brot a commis une faute en ne lui assurant pas la jouissance paisible des locaux ni leur entretien pour servir à leur usage, en violation de l'article 1719 du code civil et des articles 5 et 33 du contrat de bail, du fait de l'exposition de ses salariés au risque de propagation de l'amiante ;

Qu'elle fait valoir que les risques de propagation d'amiante ont été identifiés par l'inspection du travail dans ses courriers des 7 et 11 avril 2008, tant durant le déroulement normal des travaux qu'en cas d'accidents pendant ceux-ci, que la SCI Entre Meurthe et Brot n'a pas pris les mesures raisonnables pour l'écarter, que le risque avéré de propagation l'a obligée à s'assurer de la sécurité de ses salariés, étant tenue en tant qu'employeur d'une obligation à cet égard dont le non-respect est sanctionnable pénalement, qu'il importe peu que la pollution ne soit pas survenue dès lors qu'il en existait le risque, que les exigences de l'inspection du travail, dont les juridictions civiles n'ont pas à apprécier le caractère contraignant et qui sont sans formalisme particulier, l'ont conduite à évacuer les lieux, par la faute de la SCI Entre Meurthe et Brot ;

Qu'elle ajoute que la SCI Entre Meurthe et Brot a commis une faute de surveillance des prestataires qu'elle a engagés pour réaliser les travaux sous sa responsabilité, qu'elle ne démontre par ailleurs pas que la réponse de l'administration était erronée, qu'elle ne prouve pas avoir démontré à l'inspecteur du travail que l'obligation de confinement n'était pas applicable, ni avoir soumis le point de savoir si le dispositif mis en place était adapté, à la société Bureau Veritas, au maître d'oeuvre ou à un tiers indépendant ; qu'elle soutient que la SCI Entre Meurthe et Brot n'est pas fondée à lui opposer l'article 5 du contrat de bail dont elle dénature le sens puisqu'elle était seule en mesure de mettre le bâtiment en conformité avec les exigences de l'administration, qu'elle ne démontre ni aujourd'hui ni au moment des faits que la réglementation avait été correctement respectée, qu'elle n'a entrepris aucune démarche auprès de l'inspection du travail, que par ailleurs le préjudice étant né du risque de propagation d'amiante et non de l'injonction administrative, les dispositions de l'article 1725 du code civil ne sont pas applicables, que les éléments de la force majeure invoquée ne sont pas réunis, l'intervention de l'inspection du travail n'étant pas imprévisible, ni irrésistible ; qu'elle conteste être en quoi que ce soit à l'origine de son propre préjudice et indique notamment avoir régulièrement informé le CHSCT en temps utile ;

Mais considérant que si à la suite de la visite sur site du contrôleur du travail le 4 avril 2008, celui-ci a formulé des observations et demandes tant par lettre adressée à la société Neolog le jour même que par celle adressée le 7 avril 2008 à la société Coanus, il ne ressort d'aucune de ces deux lettres ni même du courriel du 11 avril 2008 adressé à la société Neolog connaissance prise des résultats négatifs des prélèvements d'air, qu'il ait été signifié à l'employeur, dans les formes appropriées, réglementairement définies en cas de danger grave ou imminent et de situation dangereuse, de mesures contraignantes telle que l'évacuation des locaux ou l'arrêt temporaire d'activité ;

Considérant que la société Neolog ne peut dès lors prétendre que les exigences du contrôleur du travail l'auraient contrainte, sans mise en demeure formellement inexistante en l'espèce ni respect du formalisme réglementaire, à retirer immédiatement ses employés des lieux alors même que son bailleur, maître d'ouvrage, et l'entreprise Coanus, en charge des travaux, lui avaient fait part de leurs désaccords sur la réalité du risque allégué par le contrôleur du travail et avaient fourni les éléments permettant de répondre aux observations et critiques de celui-ci ;

Considérant qu'elle ne peut par ailleurs reprocher à la SCI Entre Meurthe et Brot une faute de surveillance des travaux motifs pris d'une réponse trop tardive, insuffisante et inappropriée au contrôleur du travail alors que les prélèvements d'air, qui se sont révélés négatifs, ont été effectués le jour même de la visite de ce contrôleur et que la société Coanus, professionnel qualifié pour le traitement amiante, a adressé dès le 15 avril 2008 une réponse motivée au contrôleur du travail qui ne s'est plus manifesté par la suite ;

Considérant que la société Neolog ne peut davantage soutenir que la SCI Entre Meurthe et Brot a commis une faute en ne lui assurant pas la jouissance paisible des locaux en violation des articles 1719 du code civil, 5 et 33 du bail du fait de l'exposition de ses salariés au risque de propagation de l'amiante et que les mesures mises en place n'étaient pas suffisantes pour permettre une activité salariée pendant la durée des travaux ; qu'en effet, la société Neolog, sur laquelle pèse la preuve de la charge de la faute qu'elle allègue, n'établit pas l'existence du risque de propagation de l'amiante ; qu'aucune des analyses effectuées n'a montré l'existence d'un tel risque ; que la réponse motivée, détaillant les mesures prises et justifiant du respect de la réglementation, adressée le 15 avril 2008 par la société Coanus au contrôleur du travail n'a pas appelé la moindre observation de la part de celui-ci ni a fortiori n'a pas été suivi d'une mise en demeure ou de l'établissement d'un procès-verbal d'infraction ;

Considérant que la société Neolog qui a fait choix d'évacuer sans délais les locaux donnés à bail alors qu'elle n'y était pas contrainte par une décision administrative, ne démontre pas la faute du bailleur ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et condamnée à payer le montant des loyers retenus par elle, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;

Considérant qu'à titre subsidiaire, la société Neolog demande que la responsabilité des sociétés Ame et Coanus soit retenue en raison des fautes commises par ces sociétés en mettant en place un dispositif de sécurité insuffisant ; qu'elle conteste le moyen d'irrecevabilité de la demande soulevé en réplique par la société AME, faisant valoir que sa demande nouvelle est recevable en ce qu'elle tend à atténuer les prétentions de la SCI Entre Meurthe et Brot ;

Considérant cependant que la société Neolog n'a formé aucune demande à l'encontre de la société Ame en première instance ; que sa demande nouvelle à l'encontre de celle-ci est irrecevable par application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Considérant par ailleurs, qu'aucune faute n'étant démontrée à l'encontre de la SCI Entre Meurthe et Brot, maître d'ouvrage, la société Neolog est mal fondée à rechercher la responsabilité de l'entreprise Coanus dont elle n'établit pas la faute dans l'exécution de son marché ;

Considérant que la SCI Entre Meurthe et Brot demande l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Coanus les intérêts au taux légal sur les sommes de 127.095,43 € et de 30.462,42 €, le solde du marché, en se prévalant d'un obstacle grave et légitime au paiement de ce solde au regard des difficultés soulevées par la société Neolog qui a mis directement en cause les prestations de l'entreprise ; qu'elle soutient à titre subsidiaire, que seules les demandes illégitimes de la société Neolog l'ont conduite à différer le paiement du solde des travaux et que celle-ci lui en doit réparation ;

Mais considérant que la SCI Entre Meurthe et Brot n'établit pas la faute commise par la société Coanus dans l'exécution de son marché ; qu'elle n'était pas fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution pour différer le paiement des sommes qu'elle lui devait ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a condamnée au paiement des intérêts au taux légal sur le montant du solde du marché réglé avec retard ; qu'elle n'est pas plus fondée en sa demande à l'encontre de la société Neolog dont les demandes et interrogations ne sont pas constitutives d'une faute en lien de causalité direct avec le non-paiement des sommes dues à l'entreprise ; que le surplus de son argumentation étant inopérant, la SCI Entre Meurthe et Brot sera déboutée de sa demande subsidiaire à l'encontre de la société Neolog ;

Considérant enfin que la SCI Entre Meurthe et Brot conteste devoir à la société Ame le solde de ses honoraires en invoquant le manquement de cette dernière à son obligation de conseil pendant la phase pré-contentieuse et la fourniture d'une assistance technique insuffisante pendant la phase contentieuse ; que cependant pour les motifs sus-indiqués et en l'absence de démonstration d'une faute du maître d'oeuvre distincte de celles que la société Neolog invoquait à l'encontre de sa bailleresse, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SCI Entre Meurthe et Brot à payer à la société Ame le solde de ses honoraires ;

Considérant que la société Coanus ne démontre pas que le droit de la SCI Entre Meurthe et Brot d'agir à son encontre en l'appelant, de façon justifiée, dans la cause, y compris devant la cour, a dégénéré en abus ; que sa demande de dommages et intérêts, non fondée, sera rejetée, le jugement étant confirmé sur ce chef ;

Considérant que le jugement étant confirmé sur le sort des dépens de première instance, la SCI Entre Meurthe et Brot conservera à sa charge les dépens d'appel afférents à la mise en cause des sociétés Coanus et Ame ; que la société Neolog sera condamnée au surplus des dépens d'appel ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, le jugement sera confirmé en ses dispositions à ce titre et les parties déboutées de leurs demandes formées sur ce fondement en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement ;

Déclare irrecevable la demande de la société Neolog à l'encontre de la société Ame - Architecture Made in Europe ;

Déboute la société Neolog de sa demande à l'encontre de la société Coanus ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la SCI Entre Meurthe et Brot aux dépens d'appel afférents à la mise en cause des sociétés Coanus et Ame - Architecture Made in Europe ;

Condamne la société Neolog au surplus des dépens d'appel ;

Dit que les dépens d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 11/06476
Date de la décision : 04/06/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°11/06476 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-04;11.06476 ?
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