RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRÊT DU 27 Mai 2014
(n° , 05 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/01181
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Janvier 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY section encadrement RG n° 10/00779
APPELANT
Monsieur [T] [O]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
comparant en personne
assisté de Me Cédric MAS, avocat au barreau de MARSEILLE
substitué par Me Marion DUTARD, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉES
SARL BUREAU SERVICES DEVELOPPEMENT (BSD)
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Christelle CAPLOT, avocat au barreau d'ESSONNE
Me [Q] [P] - Mandataire judiciaire de la SARL BUREAU SERVICES DEVELOPPEMENT (BSD)
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
ni comparant - ni représenté
AR signé le 29-10-2012
Me [N] [S] - Administrateur judiciaire de la SARL BUREAU SERVICES DEVELOPPEMENT (BSD)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
ni comparante - ni représentée
AR signé le 29-10-2012
AGS CGEA IDF EST
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205 substitué par Me Anne-Lise HERRY, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Février 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine PORCHER, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Claudine PORCHER, présidente
Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller
Madame Aline BATOZ, vice présidente placée faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 10 décembre 2013
Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [T] [O], engagé par la société BUREAUTIQUE SERVICE DEVELOPPEMENT (BSD) suivant contrat à durée indéterminée du 1er novembre 1999 en qualité d'ingénieur système a été convoqué le 11 mars 2009 à un entretien préalable à une mesure de licenciement économique fixé au 24 mars.
Le 31 mars 2009, il a accepté la convention de reclassement personnalisé.
Le 9 avril 2009, la société BSD lui a notifié les motifs économiques de son licenciement.
Contestant la qualification professionnelle mentionnée sur son bulletin de salaire et son certificat de travail ainsi que le bien fondé de son licenciement, Monsieur [O] a saisi, le 7 juillet 2009, le conseil de prud'hommes d'EVRY.
Le 21 septembre 2009, le tribunal de commerce d'EVRY a ouvert à l'encontre de la société BSD une procédure de redressement judiciaire.
Par jugement rendu le 18 janvier 2011, le conseil de prud'hommes d'EVRY a débouté Monsieur [T] [O] de l'ensemble de ses demandes.
Le 2 février 2011, Monsieur [T] [O] a interjeté appel de cette décision.
Il conteste la réalité des difficultés économiques alléguées par la société BSD, invoque les manoeuvres déloyales de celle-ci en ce que le poste supprimé n'est pas le poste contractuellement occupé par lui, l'absence de proposition de son reclassement sur celui d'assistant commercial vacant dans l'entreprise, le non-respect de l'ordre des licenciements ainsi que le préjudice subi du fait de la rupture de son contrat de travail, dépourvue de cause réelle et sérieuse.
Il demande d'ordonner la délivrance d'un bulletin de salaire pour le mois d'avril 2009, d'un certificat de travail et d'une attestation pôle emploi portant mention du poste d'ingénieur système, catégorie cadre, niveau 2.2, coefficient 130 sous astreinte de 100 € par document et par jour de retard et de condamner la société BSD à lui payer 3 659 € de dommages et intérêts pour modification unilatérale de son contrat de travail, 65 844 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10 000 € pour non-respect de l'obligation de consultation préalable des délégués du personnel sur les critères d'ordre de licenciement ainsi qu'au remboursement des indemnités versées par pôle emploi.
A titre subsidiaire, il sollicite 30 000 € d'indemnité pour non-respect des critères d'ordre des licenciements et, en tout état de cause, une somme de 4 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, la fixation de sa créance au passif de la société BSD et l'opposabilité de la décision à l'AGS.
La BSD invoque les difficultés économiques patentes rencontrées depuis 2007 contraignant à la suppression de postes de travail, une évolution des fonctions de Monsieur [O] depuis son embauche et celles d'ingénieur commercial réellement exercées par ce dernier, l'impossibilité de son reclassement et le respect de l'ordre des licenciements ainsi que l'absence de préjudice établi par le salarié qui a cumulé, dès l'été 2009, ses allocations chômage avec ses fonctions de gérant de société.
Elle demande de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de débouter Monsieur [O] de toutes ses prétentions et de le condamner à lui payer 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'AGS CGEA IDF EST fait valoir qu'elle n'a pas l'obligation de garantir les dettes d'une société qui, comme la société BSD, a exécuté les obligations mises à sa charge par un plan de redressement de l'entreprise et est depuis in bonis pour solliciter sa mise hors de cause.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées à l'audience des débats.
SUR CE, LA COUR,
Sur la qualification professionnelle
La qualification professionnelle se détermine par les fonctions réellement exercées.
Les différentes formations commerciales suivies en 2002 et 2006 par Monsieur [O], un mail du 16 décembre 2004 ayant pour objet les objectifs pour démarches commerciales 2004-2005, du 5 juin 2007 de demande de soutien pour initier une démarche commerciale et comportant comme signature électronique '[T] [O] Ingénieur Commercial BSD', les cartes de visite contenant ces mêmes mentions, les plaquettes commerciales et l'organigramme de la société le positionnant à la direction commerciale attestent d'une évolution des fonctions techniques de ce dernier à des fonctions commerciales au sein de l'entreprise.
Cette évolution et son acceptation par le salarié résultent du propre curriculum vitae établi par ce dernier et mentionnant, au titre de son expérience professionnelle au sein de SSII BSD, deux périodes, la première de 1999 à 2001 pour laquelle il indique avoir exercé les fonctions de Chef de Projet Sytèmes Ouverts comportant une partie développement commercial d'une activité Systèmes ouverts au sein de l'entreprise, la seconde de 2002 à ce jour où il mentionne une qualité d'ingénieur d'affaires solutions collaboratives et des missions exclusivement à caractère commercial (planification des démarches commerciales, organisation des activités commerciales, développement commercial exclusifs nouveaux comptes, pilotage de l'activité commerciale, mise en place de partenariats éditeurs).
Au surplus, Monsieur [O] ne fournit aucun élément sur les tâches qu'il effectuait de nature à contredire ce qu'il a écrit dans son curriculum vitae ni sur la direction, autre que commerciale, à laquelle il aurait été rattaché.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui a considéré qu'il occupait un poste d'ingénieur commercial et de le débouter de sa demande en délivrance d'un bulletin de salaire pour le mois d'avril 2009, d'un certificat de travail et d'une attestation pôle emploi portant mention du poste d'ingénieur système, catégorie cadre, niveau 2.2, coefficient 130 et de dommages et intérêts pour modification unilatérale de son contrat de travail.
Sur le licenciement économique
Dans la lettre du 9 avril 2009, la SARL BSD motive le licenciement économique de Monsieur [O] par une baisse de son chiffre d'affaires et de ses résultats depuis 2007 s'expliquant par la perte de contrats auprès des principaux clients historiques de la société, des pertes importantes enregistrées sur le marché 'BPM-VDOC', les conséquences alarmantes sur la pérennité de l'entreprise de l'importance des coûts d'exploitation devenus beaucoup trop lourds au regard des mauvais résultats dégagés et l'obligeant à prendre des mesures drastiques, dans le but d'assurer sa pérennité, de réduction des dépenses et des frais commerciaux et de marketing et l'ayant amené à supprimer définitivement le poste d'ingénieur commercial occupé par le salarié.
Elle justifie des chiffres mentionnés dans sa lettre par les bilans 2006, 2007 et 2008 et de la résiliation de contrats avec TOTAL, CLARA, LES JEUDIS.COM, de l'abandon de projets et par conséquent des difficultés ainsi rencontrées et qui ont abouti à un état de cessation de paiement, constaté et, fixé provisoirement au 17 juillet 2009, par le tribunal de commerce d'EVRY par jugement du 21 décembre 2009 ouvrant une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société, peu important que cette procédure ait été sollicitée par l'employeur suite aux contentieux générés par la mesure de licenciement intervenue en mars 2009 et l'obligeant à inscrire ou à provisionner des règlements de sommes importantes à prélever rapidement sur la trésorerie de l'entreprise.
Par ailleurs le fait que la SARL BSD soit redevenue rapidement in bonis n'est pas de nature à remettre en cause la réalité du motif économique ayant amené à la suppression du poste de Monsieur [O], puisque le but de l'employeur en prenant les mesures de réduction de l'effectif de cinq postes et des dépenses de fonctionnement et d'investissement ou d'arrêt des investissements sur l'activité BPM était de retrouver rapidement une exploitation bénéficiaire.
L'existence d'un poste vacant - notamment dans les services techniques - autre que celui d'assistant commercial qui, proposé à la responsable marketing au titre de son reclassement, ne pouvait plus l'être à Monsieur [O], une fois passé le délai de réflexion de la salariée, n'est pas établie.
Par ailleurs, la société BSD justifie par la production de mails de recherche de reclassement externe pour les cinq salariés licenciés.
Dès lors, il y a lieu d'écarter le moyen tiré d'un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [O] de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'ordre des licenciements
La société BSD justifie, par la production du compte rendu de réunion extraordinaire du 9 mars 2009 de la consultation des représentants du personnel sur l'ordre des licenciements.
Il en résulte que le critère retenu pour l'ordre des licenciements de la structure direction commerciale est l'ancienneté dans l'entreprise, critère que l'employeur peut privilégier parmi ceux énumérés à l'article L 1233-5 du code du travail sans pour autant exclure les autres.
Les critères d'ordre des licenciements s'apprécient par catégorie professionnelle laquelle s'entend de l'ensemble des salariés exerçant dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune.
En l'espèce, dès lors que les deux ingénieurs commerciaux dépendant de la direction commerciale étaient concernés par le licenciement économique, l'employeur n'avait aucun choix à opérer et par conséquent pas d'ordre des licenciements à respecter.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Condamne Monsieur [T] [O] aux dépens.
Dit n'y avoir lieu à allocation de somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT