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22/05/2014 | FRANCE | N°13/07034

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 22 mai 2014, 13/07034


COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 5
ARRÊT DU 22 Mai 2014 (no, 5 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 07034
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS-Section commerce-RG no 12/ 05807
APPELANTE Madame Joëlle X... ...75017 PARIS Représentée par Me Christine RUAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0609, bénéficiant d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 035877 du 11/ 10/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS.
INTIMÉE SARL IMMOB

ILIÈRE PASSY Prise en la personne de ses représentants légaux Sise 50 rue Vita...

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 5
ARRÊT DU 22 Mai 2014 (no, 5 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 07034
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS-Section commerce-RG no 12/ 05807
APPELANTE Madame Joëlle X... ...75017 PARIS Représentée par Me Christine RUAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0609, bénéficiant d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 035877 du 11/ 10/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS.
INTIMÉE SARL IMMOBILIÈRE PASSY Prise en la personne de ses représentants légaux Sise 50 rue Vital-75016 PARIS
Représentée par M. Paul Y..., Gérant, régulièrement muni d'un pouvoir. Assisté de Me Thomas ROUSSINEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0067
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 4 avril 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Renaud BLANQUART, Président Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère Madame Anne MÉNARD, Conseillère
Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats
ARRÊT : CONTRADICTOIRE-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par Madame Mélanie RAMON, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Madame Joëlle X..., qui avait été engagée par la Société IMMOBILIÈRE PASSY en qualité d'assistante du service location et gestion en vertu de contrats à durée déterminée à temps partiel, du 30 avril 2007 puis du 1er septembre 2007, suivis d'un contrat à durée indéterminée le 1er septembre 2008, a été licenciée le 30 septembre 2011, au motif de son absence prolongée nécessitant son remplacement. Elle a saisi la juridiction prud'homale, le 23 mai 2012, d'une demande de paiement de diverses sommes au titre tant de l'exécution que de la rupture de son contrat. Par jugement du 31 mai 2013 notifié le 22 juin, le Conseil de prud'hommes de Paris a condamné la Société IMMOBILIÈRE PASSY à lui payer les sommes de :-1 183, 83 ¿ à titre d'indemnité de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,-6 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,- et 700 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Madame X... a interjeté appel de cette décision le 16 juillet 2013.
Représentée par son avocat à l'audience du 4 avril 2014, Madame Joëlle X... demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne l'indemnité de requalification et de l'infirmer pour le surplus en condamnant la société au paiement de :-2 367, 66 ¿ au titre d'un rappel des salaires d'août 2007 et 2008,-236, 76 ¿ au titre des congés payés afférents,-110 ¿ de rappel d'indemnité de licenciement,-20 000 ¿ de dommages et intérêts pour rupture abusive,-5 000 ¿ pour préjudice moral lié à celle-ci,-800 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile en première instance,- et 2 000 ¿ au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du Code de Procédure Civile, avec intérêts au taux légal à compter de la demande et capitalisation en application de l'article 1154 du Code Civil, et en ordonnant la remise des bulletins de paie, d'une attestation " Assedic " et d'un certificat de travail conformes, sous astreinte de 100 ¿ par document et par jour de retard. Elle expose que ses deux premiers contrats à durée déterminée ont été conclus pour des motifs totalement fallacieux et correspondaient, en réalité, aux fonctions courantes de l'agence, visant simplement à éviter l'embauche d'un salarié à contrat à durée indéterminée, ce qui justifie leur requalification. Elle considère, donc, avoir droit non seulement à l'indemnité de requalification précédemment accordée mais également au paiement des mois intermédiaires pendant lesquels elle s'est tenue à la disposition de son employeur. De plus, son ancienneté doit remonter au jour de sa première embauche pour le calcul de l'indemnité de licenciement, d'où le rappel sollicité. Elle fait valoir, par ailleurs, que son absence ininterrompue à compter du 24 février 2011 n'a pas mis l'employeur dans l'obligation de la remplacer définitivement, puisque d'une part, il n'a passé des annonces qu'en février 2012 pour un emploi en contrat à durée déterminée et d'autre part, il a démontré auparavant que le poste pouvait être pourvu sans dommage par contrat à durée déterminée comme il l'avait été par elle-même. Elle souligne que le contrat à durée indéterminée produit, à le supposer probant, a été conclu plus de cinq mois après son licenciement, ce qui ne saurait correspondre au délai raisonnable exigé par la jurisprudence pour justifier le licenciement. Elle demande donc la réparation du préjudice considérable qui en a résulté, se trouvant toujours au chômage malgré des recherches actives d'emploi.
Assistée par Me Thomas ROUSSINEAU, son Conseil, la SARL IMMOBILIÈRE PASSY, représentée par son gérant M. Y..., demande pour sa part à la Cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qui concerne les sommes allouées et de débouter Madame X... de l'intégralité de ses demandes, en la condamnant à lui payer la somme de 1 500 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle fait valoir qu'étant une petite agence immobilière tenue simplement par le gérant et sa collaboratrice et compagne, l'un et l'autre âgés, l'absence répétée et prolongée pendant sept mois de leur unique salariée à temps partiel a eu pour conséquence une réelle perturbation sur son fonctionnement, les 20 heures hebdomadaires assumées par leur salariée retombant directement sur eux. Elle souligne que l'activité de gestion immobilière dont s'occupait Madame X... nécessitait de réelles compétences juridiques, comptables et fiscales, qu'il ne s'agissait pas d'un poste de secrétaire généraliste qui aurait pu être pourvu à titre provisoire, d'autant que les arrêts de travail s'étant multipliés, il n'était pas envisageable de former quelqu'un jusqu'à la date du retour prévisible de la salariée absente. Elle ajoute qu'elle a demandé à cette dernière, six mois après son premier arrêt et avant d'engager la procédure de licenciement, si elle comptait reprendre son poste à la rentrée, ce à quoi l'intéressée a répondu négativement, puis ne s'est pas déplacée à l'entretien préalable, si bien qu'elle n'a émis aucune protestation à l'encontre de la mesure avant de saisir la juridiction prud'homale huit mois plus tard. Elle indique, enfin, avoir bien procédé au remplacement de la salariée par une embauche par contrat à durée indéterminée le 12 mars 2012, précédée par plusieurs annonces. Elle soutient, par ailleurs, que les motifs des contrats à durée déterminée conclus répondent aux exigences légales et correspondaient au voeu de l'intéressée de bénéficier d'un mois de congé complet en août. Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.
MOTIFS Considérant en premier lieu, sur la requalification des contrats à durée déterminée litigieux, que Madame X... a été engagée par la Société AGENCE IMMOBILIÈRE PASSY en qualité d'assistante du service gestion et location par un premier contrat à durée déterminée du 30 avril 2007 à temps partiel au motif " d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise : renforcement du service " gestion " à l'approche de la période fiscale ", conclu pour la période du 1er mai au 31 juillet 2007 ; que la salariée a été reprise à compter du 1er septembre 2007 dans les mêmes conditions, cette fois pour une durée de neuf mois, du 1er septembre 2007 au 31 mai 2008, au même motif " d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ", avec cette précision : " renforcement du service ¿ gestion et location'à l'approche des travaux de fin d'année " ; que ce contrat a été prolongé par avenant du 26 mai 2008 jusqu'au 31 juillet 2008, l'embauche définitive de la salariée intervenant le 1er septembre 2008 ; Que, cependant, les résultats de l'agence IMMOBILIÈRE PASSY, en constante augmentation depuis l'exercice clos le 31 mars 2006 jusqu'au 31 mars 2009, ne traduisent pas un accroissement temporaire d'activité justifiant la signature successive des deux contrats à durée déterminée en l'absence de justification du résultat de 2005 pour vérifier si 2006 présentait pour la première fois une augmentation, d'autant que s'agissant du premier contrat, la période fiscale était terminée à la fin mai, et que pour le second, les " travaux de fin d'année " ne sont pas autrement explicités même aujourd'hui ; Qu'il s'ensuit que les deux contrats doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée unique depuis le commencement ; Que le jugement sera, donc, confirmé en ce qu'il a alloué à Madame X... une indemnité de requalification égale à un mois de salaire par application de l'article L. 1245-2 du Code du Travail ; Considérant, en conséquence, que la demande de rappel d'indemnité de licenciement à hauteur de 110 ¿ est également fondée, son montant, non discuté, étant calculé sur la base d'une ancienneté remontant au 1er mai 2007 ; Qu'un certificat de travail rectificatif sera remis à l'appelante, sans qu'il y ait lieu à astreinte ; Qu'il convient également de faire droit au rappel de salaires, dès lors qu'en reprenant le travail à chaque fois dès le 1er septembre, la salariée a dû se tenir à la disposition de son employeur pendant les mois d'août, le non-paiement des congés payés constituant pour celui-ci l'avantage du détournement du recours aux contrats à durée déterminée ; Que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Considérant, en second lieu, que les termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il convient de rappeler que Madame X... a été licenciée par lettre de la société " Agence immobilière Passy " du 30 septembre 2011 aux motifs suivants : " L'immobilière Passy est une petite structure et votre absence prolongée fait reposer l'ensemble des tâches sur Annette Z...et moi-même ce qui est devenu impossible à assumer. Votre remplacement est donc indispensable au fonctionnement de l'agence. " ; Considérant que si l'article L. 1132-1 du Code du Travail fait interdiction de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail, il ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, ces perturbations devant entraîner la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif par l'engagement d'un autre salarié ; Qu'en l'occurrence, Madame X... a été absente sans interruption du 24 février au 14 octobre 2011, ses arrêts de travail s'enchaînant du 24 février au 31 mars 2011, puis du 31 mars au 23 mai, du 17 mai au 30 juin, du 24 juin au 4 septembre et du 5 septembre au 14 octobre 2011 ; Que le 26 août, l'employeur lui a dressé un courriel pour lui demander de ses nouvelles et savoir si elle allait reprendre son travail le 5 septembre comme prévu par son dernier arrêt de travail, lui indiquant qu'avec l'âge, il lui devenait difficile de supporter cette surcharge de travail plus longtemps et qu'il devrait, dans le cas contraire, envisager d'employer une nouvelle personne ; Que la salariée a répondu le 2 septembre qu'elle ne serait pas en mesure de reprendre et demandait de lui faire connaître ses droits si son remplacement devait être envisagé ; Que l'employeur lui a répondu, le 14 septembre, après réception de la dernière prolongation qu'il était dans l'impossibilité d'assumer avec Madame Z...l'ensemble des charges et qu'il devait, donc, envisager son licenciement, et a convoqué la salariée le lendemain à un entretien préalable à son licenciement auquel elle ne s'est pas présentée ; Que compte tenu de la toute petite taille de la structure, il est indéniable que la longue absence de la salariée a perturbé le bon fonctionnement de l'entreprise, l'employeur se trouvant seul avec sa collaboratrice habituelle pour accomplir l'ensemble des tâches de Madame X... ; Que s'il est toujours possible de procéder au remplacement d'un salarié en arrêt pour maladie même de durée incertaine par un contrat à durée déterminée conclu en application des dispositions de l'article L. 1242-2 du Code du Travail ou par un contrat de travail temporaire en application de l'article L. 1251-6 du Code du Travail, qui prévoient l'un et l'autre que le contrat a alors pour terme le retour du salarié absent, il reste que l'employeur fait valoir à juste titre qu'il est difficile de pourvoir dans ces conditions un emploi très spécialisé, à temps partiel de surcroît, tant en raison de l'effort de formation et de connaissance des dossiers pour bien les gérer qu'exige le poste, que même simplement pour attirer des candidatures qui n'ont pas l'espoir de voir le contrat précaire se transformer en emploi permanent ; Qu'il justifie, par ailleurs, avoir initié immédiatement après le licenciement ses recherches d'emploi, en passant sans succès des annonces dans Le Figaro les 19 et 26 septembre, 7 et 14 novembre 2011 et 13 et 20 février 2012 ; Que, par lettre du 20 février 2012, Madame B...a présenté sa candidature en précisant que son emploi actuel se terminant à la fin du mois de mars 2012, elle serait disponible à compter de cette date ; Qu'elle a été effectivement engagée par contrat à durée indéterminée le 12 mars 2012 selon le contrat et le bulletin de paie de février 2014 produits, l'employeur ayant dû accepter un 3/ 4 temps pour la retenir ; Que malgré le délai entre le licenciement et cette embauche, imposé par les motifs précédemment indiqués, l'employeur justifie ainsi du remplacement définitif de Madame X..., dont il s'était assuré que son retour n'était pas prévisible avant d'entamer la procédure de licenciement ; Que le licenciement est donc justifié et les demandes de dommages-intérêts seront en conséquence rejetées, le jugement étant infirmé sur ce point ; Et considérant que s'il y a lieu de rectifier le jugement de première instance en ce qu'il a condamné dans son dispositif la société au paiement d'une somme de 700 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile après avoir alloué à Madame X... celle de 800 ¿ dans ses motifs, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais de procédure qu'elles ont pu engager en appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SARL IMMOBILIÈRE PASSY au paiement d'une indemnité de requalification et aux dépens ; Statuant de nouveau sur les autres demandes,
Condamne la SARL IMMOBILIÈRE PASSY à payer à Madame Joëlle X... les sommes de :-110 ¿ à titre de rappel d'indemnité de licenciement,-2 367, 66 ¿ au titre d'un rappel des salaires d'août 2007 et 2008,- et 236, 76 ¿ au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande du 16 avril 2013, et capitalisation de ceux-ci dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil,- et 800 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; Rejette le surplus des demandes ;
Ajoutant au jugement, Condamne la SARL IMMOBILIÈRE PASSY aux dépens d'appel.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/07034
Date de la décision : 22/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2014-05-22;13.07034 ?
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