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20/05/2014 | FRANCE | N°12/04892

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 20 mai 2014, 12/04892


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 4
ARRÊT DU 20 Mai 2014

(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/ 04892
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Mars 2012 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS section encadrement RG no 10/ 00621

APPELANT

Monsieur Patrice X...
...01600 TREVOUX
Représenté par Me Norbert GOUTMANN, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 2

INTIMÉE
SAS JCR
Prise en la personne de ses re

présentants légaux
79, 81, Rue Réaumur-75002 PARIS
Représentée par Me Véronique LEMERCIER-HENNON, avocat au barreau ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 4
ARRÊT DU 20 Mai 2014

(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/ 04892
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Mars 2012 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS section encadrement RG no 10/ 00621

APPELANT

Monsieur Patrice X...
...01600 TREVOUX
Représenté par Me Norbert GOUTMANN, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 2

INTIMÉE
SAS JCR
Prise en la personne de ses représentants légaux
79, 81, Rue Réaumur-75002 PARIS
Représentée par Me Véronique LEMERCIER-HENNON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1041 substitué par Me Djamila AIMEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : K0097

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Greffier : Madame Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Madame Mélanie RAMON Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur Patrice X...du jugement du conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement chambre 5, rendu le 26 mars 2012 qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Monsieur Patrice X...a été engagé par la SAS JCR suivant contrat à durée indéterminée en date du 15 juillet 1997, à l'effet du 18 juillet 1997, en qualité de directeur de production, niveau I, échelon 1. Il a été reconnu depuis le 20 décembre 1971, travailleur handicapé, classé en catégorie B, à titre définitif. Il travaillait à partir de son domicile à Lyon et organisait librement ses déplacements qui étaient remboursés par la société sur présentation d'un décompte mensuel de frais.
L'entreprise, qui emploie plus de 11 salariés, est soumise à la convention collective du commerce de gros de tissus.
Le 9 février 2009, Monsieur Patrice X...a été convoqué à un entretien en vue d'une rupture conventionnelle. Les propositions de l'employeur n'ont pas été acceptées par le salarié.
Le 31 août 2009, il lui a été proposé de ramener son horaire de travail à17 heures par semaine moyennant une diminution de salaire. Monsieur Patrice X...a refusé cette proposition.
Le 13 octobre 2009, la SAS JCR lui a proposé un poste de reclassement en qualité de responsable du sourcing en Asie. Monsieur Patrice X...n'a pas donné suite à cette offre.
Le 23 novembre 2009, il a été convoqué à un entretien préalable fixé au 4 décembre 2009. Il a adhéré à la convention de reclassement personnalisé à la date du 21 décembre 2009.
Le 23 décembre 2009, la SAS JCR lui a notifié son licenciement pour motif économique.

Monsieur Patrice X...demande à la Cour d'infirmer le jugement, de dire que le licenciement pour motif économique n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse et que l'obligation de reclassement n'a pas été respectée, de condamner la SAS JCR à lui payer les sommes suivantes :-115   865 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-6 000 ¿ au titre des frais professionnels,
-1 500 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La SAS JCR demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner Patrice X...à lui payer la somme de 2500 ¿ pour frais irrépétibles.

SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

Sur le licenciement
La lettre de licenciement fait état des éléments suivants :
«... Face à la disparition progressive de nos partenaires français qui a entraîné une baisse considérable de notre activité dans le secteur géographique dont vous avez la responsabilité, et intervenant sur un marché particulièrement concurrentiel, nous avons été contraints afin de sauvegarder notre compétitivité de réorganiser notre entreprise et par voie de conséquence de supprimer votre poste de travail.
Cependant, pour éviter d'avoir à procéder à votre licenciement économique et sachant que nos collections sont maintenant faites à 99 % en Asie, nous vous avons proposé... un reclassement au poste de responsable du sourcing en Asie avec maintien de votre salaire antérieur et remboursement intégral de vos frais de déplacement...
Nous avons recherché tant dans notre entreprise qu'à l'intérieur du groupe, d'autres possibilités de vous reclasser. Eu égard à la taille des entreprises du groupe, à la situation économique, il n'y a actuellement aucun autre poste disponible correspondant à votre qualification, à une qualification inférieure, ou à une autre qualification qui aurait nécessité une formation d'adaptation, susceptible de vous être proposé à titre de reclassement... ».
La SAS JCR expose que la concurrence internationale a eu des répercussions sur l'activité des sous-traitants de la société : écrutiers, teinturiers et imprimeurs de tissus qui ont peu à peu disparu. Confrontée au constat qu'elle ne pouvait plus assurer ses achats d'écrus en France, ni faire teindre ou imprimer ses tissus par des partenaires français, la SAS JCR a dû organiser sa production afin de satisfaire ses clients et maintenir son chiffre d'affaires, avant que la situation ne se détériore davantage, en important des produits finis fabriqués en Chine. C'est dans ces circonstances qu'elle a dû envisager la suppression du poste occupé par Monsieur Patrice X...en région Rhône-Alpes et qu'elle lui a proposé le poste de responsable du sourcing en Asie avec pour mission de développer le réseau des fournisseurs en Asie et d'assurer le suivi des productions.
Le licenciement économique peut reposer sur la nécessité pour l'employeur de réorganiser son entreprise afin de sauvegarder la compétitivité. La réorganisation de l'entreprise mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi n'est pas subordonnée à l'existence de difficultés économiques à la date licenciement.
La SAS JCR qui présente effectivement un résultat bénéficiaire rapporte cependant la preuve qu'un nombre important d'usines du secteur considéré ont fermé ou bien ont fait l'objet de procédures collectives rendant difficile son approvisionnement en France. La baisse des achats en France et l'accroissement de la production en Asie justifie de supprimer le poste de directeur de production en France.

La SAS JCR a proposé à Monsieur Patrice X...une offre de reclassement unique : responsable du sourcing en Asie.
Le licenciement économique d'un salarié ne pouvant intervenir que si le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise ou dans le groupe dont elle relève est impossible, il appartient à l'employeur de justifier qu'il a recherché toutes les possibilités de reclassement existantes ou qu'un reclassement était impossible.
Il n'est pas contesté que la SAS JCR fait partie d'un groupe. Elle ne fournit aucune information sur les diverses sociétés faisant partie du groupe ni sur les démarches qu'elle a accomplies auprès de ces diverses sociétés aux fins de rechercher toutes les possibilités de reclassement.

Le salarié est en droit de refuser les mesures de reclassement proposées par l'employeur, d'autant comme en l'espèce il s'agit d'une offre unique qui au surplus impose au salarié une désorganisation de sa vie professionnelle et familiale en faisant passer son périmètre d'intervention de la région Rhône-Alpes à la Chine.
Le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse et ouvre droit au profit du salarié au paiement de dommages et intérêts.
À la date licenciement, Monsieur Patrice X...percevait une rémunération mensuelle brute moyenne de 4 827, 71 ¿, avait 56 ans et bénéficiait d'une ancienneté de plus de 12 ans au sein de l'entreprise. Il n'est pas contesté qu'il a bénéficié des allocations de chômage avant de retrouver un emploi sous la forme d'un contrat unique d'insertion en février 2013 pour un salaire mensuel brut de 2 073 ¿. Il convient d'évaluer à la somme de 50   000 ¿ le montant de l'indemnité allouée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L. 1235-3 du Code du Travail.
En application de l'article L. 1235-4 du Code du Travail, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois.

Sur les frais professionnels
Monsieur Patrice X...fait valoir qu'il travaillait à son domicile et sollicite indemnisation de 6 000 ¿ à ce titre.
Monsieur Patrice X...ne rapporte pas la preuve que son employeur n'a pas mis à sa disposition un bureau et qu'il a été contraint de travailler à son domicile. Il ne justifie pas non plus d'un accord contractuel prévoyant une indemnité pour mise à disposition de son domicile à des fins professionnelles alors que son employeur démontre quant à lui qu'il a toujours réglé les frais professionnels sans la moindre discussion.
Monsieur Patrice X...sera débouté de sa demande à ce titre.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Patrice X...les frais irrépétibles qu'il a engagés. La SAS JCR sera condamnée à lui payer une somme de 1 500 ¿ en application des dispositions l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement,
Et, statuant à nouveau,

Dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la SAS JCR à payer à Monsieur Patrice X...la somme de 50   000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne le remboursement par la SAS JCR aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à Monsieur Patrice X...à la suite de son licenciement, dans la limite de six mois,
Déboute Monsieur Patrice X...de sa demande au titre des frais professionnels,
Condamne la SAS JCR à payer à Monsieur Patrice X...la somme de 1 500 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamne la SAS JCR aux entiers dépens.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/04892
Date de la décision : 20/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2014-05-20;12.04892 ?
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