La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2014 | FRANCE | N°12/10719

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 07 mai 2014, 12/10719


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 07 MAI 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/10719



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/13766





APPELANTE



SARL [I] prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]



Re

présentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515, avocat postulant

Assistée de Me Jean DOUCET de la SELARL CORNET-VINCENT-SÉGUREL (C.V.S.), avocat au barreau de NANTES,...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 07 MAI 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/10719

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/13766

APPELANTE

SARL [I] prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515, avocat postulant

Assistée de Me Jean DOUCET de la SELARL CORNET-VINCENT-SÉGUREL (C.V.S.), avocat au barreau de NANTES, avocat plaidant

INTIMÉE

SCI DU [Adresse 1] prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476, avocat postulant

Assistée de Me Catheline GAGNE de la SELAS SAUTIER-GUILLEMIN-MEUNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R022, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Février 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Odile BLUM, conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente

Madame Odile BLUM, conseillère

Monsieur Christian BYK, conseiller

Greffier : lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********

Par acte du 21 mai 1998, la SCI [Adresse 1] a donné à bail commercial à la SARL [I], pour une durée de neuf années à compter du 1er juin 1998, des locaux situés [Adresse 1].

Par acte extrajudiciaire du 22 juin 2007, la société [I] a demandé le renouvellement du bail. Peu après, le 28 juin 2007, la SCI [Adresse 1] a donné congé à sa locataire pour le 31 décembre 2007 avec offre de renouvellement.

Les parties s'accordant alors sur le renouvellement du bail mais non sur son prix, le juge des loyers commerciaux a été saisi qui, par jugement du 19 septembre 2008, a constaté l'accord des parties pour que le bail renouvelé prenne effet au 1er janvier 2008 et a ordonné une mesure d'expertise.

Faisant valoir qu'elle avait appris en cours d'expertise que la société [I] n'était pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés pour le fonds de commerce exploité au [Adresse 1] et que la seule immatriculation existante portait sur le [Adresse 2], la SCI [Adresse 1] a notifié à sa locataire, par acte extrajudiciaire du 11 mai 2010, un refus de renouvellement comportant dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux.

Le 9 septembre 2010, la société [I] a assigné la SCI[Adresse 1] en nullité dudit acte et subsidiairement, paiement de dommages et intérêts .

Par jugement rendu le 15 mai 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit que l'acte de rétractation du 11 mai 2010 n'est pas entaché de fraude,

- constaté la validité de l'acte de rétractation du 11 mai 2010 de l'offre de renouvellement du bail au 1er janvier 2008,

- déclaré la SARL [I] déchue de son droit statutaire pour défaut d'immatriculation du fonds à l'adresse des lieux loués à la date du congé du 28 juin 2007,

- dit que la SARL [I] occupe sans droit ni titre les locaux,

- ordonné l'expulsion et dit que les meubles, matériel et objets mobiliers donnent lieu à application des dispositions des articles 65 de la loi du 9 juillet 1991 et 201 du décret du 31 juillet 1992,

- condamné la SARL [I] à payer à la SCI [Adresse 1] une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer en cours à compter du 1er janvier 2008 et jusqu'à la complète libération des locaux,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné la SARL [I] aux dépens.

La SARL Galerie [I] [I] a relevé appel de cette décision le 13 juin 2012. Par ses dernières conclusions du 25 janvier 2013, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

1/ à titre principal

- constater la nullité du refus de renouvellement comportant dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux signifié le 11 mai 2010, l'absence d'immatriculation de la société locataire à l'adresse des lieux loués étant connue du bailleur avant la signification du congé portant offre de renouvellement,

2/ subsidiairement, si le refus de renouvellement était estimé valable,

- dire que la SCI [Adresse 1] a commis une faute en lui offrant le renouvellement du bail puis en signifiant une dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux,

- condamner la SCI [Adresse 1] à l'indemniser du préjudice subi à raison de la mauvaise foi de la bailleresse dans la signification du refus de renouvellement,

- avant dire droit sur le montant du préjudice, ordonner une expertise aux frais avancés de la SCI [Adresse 1],

- condamner la SCI [Adresse 1] à lui payer la somme de 20.000 € à titre de provision à valoir sur les dommages et intérêts,

3/ en tout état de cause

- condamner la SCI [Adresse 1] à lui payer la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, avec distraction.

Par ses dernières conclusions du 22 mars 2013, la SCI [Adresse 1] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société [I] déchue de son droit statutaire pour défaut d'immatriculation à l'adresse des lieux loués et ordonné son expulsion,

- infirmer le jugement sur le montant de l'indemnité d'occupation et fixer cette indemnité, à compter du 1er janvier 2008 jusqu'à l'expulsion des lieux, à la somme mensuelle de 3.617 € avec réévaluation annuelle en fonction de l'indice Insee du coût de la construction,

- condamner la société [I] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE,

Considérant qu'il est constant que la société [I] n'a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés, pour les locaux loués au [Adresse 1], ni à la date de sa demande de renouvellement du bail ni à la date d'expiration dudit bail dont sa bailleresse lui a offert, le 28 juin 2007, le renouvellement ; qu'elle est restée immatriculée au [Adresse 2], son ancienne adresse, où elle n'exploite plus aucun fonds ;

Considérant que la société Galerie [I] [I] critique le jugement entrepris qui l'a déclarée déchue de son droit au renouvellement, en faisant valoir que ce jugement va à l'encontre de l'évolution de la jurisprudence qui tend à aligner le régime de la dénégation de statut sur celui du refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes et à priver le bailleur de la possibilité d'invoquer le défaut d'immatriculation s'il en avait connaissance avant d'offrir le renouvellement, que ce jugement méconnaît également la règle de la soumission volontaire au statut des baux commerciaux et qu'il a, en outre, écarté à tort la fraude caractérisée du bailleur et ses conséquences ;

Qu'elle soutient que la SCI [Adresse 1] lui a offert le renouvellement de son bail en parfaite connaissance de l'erreur d'immatriculation et que la preuve est rapportée de ce qu'elle n'a pas découvert l'absence d'immatriculation à l'adresse des lieux loués au cours des opérations d'expertise ainsi qu'elle le prétend ; que la SCI [Adresse 1] n'est donc plus fondée à se prévaloir du défaut d'immatriculation comme motif de dénégation ; qu'elle a renoncé tacitement mais sans ambiguïté à invoquer l'absence d'immatriculation optant ainsi, implicitement mais nécessairement, pour la soumission volontaire au statut des baux commerciaux ; que cette renonciation et cette option sont irrévocables ; qu'en tout état de cause, la bailleresse n'est revenue sur son offre de renouvellement que lorsqu'elle a réalisé qu'elle n'obtiendrait pas, par la procédure de fixation du loyer du bail renouvelé, le niveau de loyer qu'elle espérait ; qu'elle a utilisé l'erreur d'immatriculation qu'elle connaissait, de mauvaise foi et comme moyen de pression, pour échapper aux règles légales de calcul du loyer de renouvellement, ce qui caractérise selon elle la fraude ;

Que la société [I] ajoute, à titre subsidiaire, que le comportement de la SCI [Adresse 1] est nécessairement fautif ; qu'en entretenant sciemment sa locataire dans la croyance que celle-ci bénéficiait de la propriété commerciale tout en sachant pertinemment qu'elle se réservait le cas échéant la possibilité de lui dénier ce droit, la SCI [Adresse 1] a manqué au devoir de loyauté et de bonne foi dans les relations contractuelles posé par l'article 1134 alinéa 3 du code civil ; qu'à supposer que la mauvaise foi ne soit pas retenue, la SCI [Adresse 1], en lui offrant le renouvellement du bail sans s'assurer de la réunion des conditions d'application du statut, a commis une négligence fautive et engagé sa responsabilité ; qu'en s'abstenant de faire état, dès le stade du congé, de l'absence d'immatriculation, elle l'a contrainte à engager inutilement des frais dans le cadre de la procédure en fixation du loyer du bail renouvelé et l'a placée dans une situation particulièrement précaire, la contraignant à se réinstaller en extrême urgence ; que son préjudice correspond à la valeur du fonds de commerce par application de l'article L 145-14 du code de commerce ;

Mais considérant que les premiers juges ont rappelé à juste titre qu'en vertu de l'article L 145-1 du code de commerce, l'immatriculation du preneur au registre du commerce et des sociétés à l'adresse des locaux loués constitue l'une des conditions du droit au statut des baux commerciaux et que cette condition d'immatriculation s'apprécie à la date de signification du congé et à la date de l'expiration du bail à renouveler ;

Que s'agissant en l'espèce d'apprécier, à la date de la demande de renouvellement, la réunion des conditions objectives posées pour que la société [I] puisse bénéficier, en vertu des règles protectrices du statut, du droit au renouvellement, l'analogie qu'elle fait avec l'article L 145-17 du code de commerce et les conditions d'exécution du contrat est sans portée ;

Que par ailleurs, la société Galerie [I] [I] n'est pas fondée à invoquer une prétendue soumission volontaire des parties au statut des baux commerciaux à seule fin d'échapper aux conséquences de son absence d'immatriculation alors qu'il est acquis que le bail réunissait toutes les autres conditions pour relever de plein droit du statut ; qu'elle n'établit pas que la SCI [Adresse 1] ait renoncé sans équivoque à se prévaloir du défaut d'immatriculation à l'adresse des locaux loués ; que contrairement à ce qu'elle soutient, une telle renonciation ne saurait résulter de la seule connaissance de cette situation par le bailleur lorsqu'il a accepté le renouvellement du bail avant de se rétracter en lui déniant le bénéfice du droit au statut ;

Que la connaissance par le bailleur du défaut d'immatriculation ne caractérise pas non plus la fraude alléguée qui n'est pas autrement démontrée et ne peut résulter de ce que le bailleur a finalement dénié à la société [I] le droit au renouvellement après le lui avoir offert aux conditions qu'il posait et que la locataire n'a pas acceptées ;

Considérant que pour ces motifs et ceux pertinents des premiers juges, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que l'acte de rétractation du 11 mai 2010 n'est pas entaché de fraude, constaté la validité de cet acte de rétractation et déclaré la société [I] déchue de son droit statutaire au renouvellement pour défaut d'immatriculation du fonds à l'adresse des lieux loués ;

Considérant que cette démarche lui incombant, la société [I] n'a pu méconnaître le fait qu'à la date de sa demande de renouvellement comme à celle de l'offre de renouvellement qui lui a été faite ou encore à celle de l'expiration du bail, elle n'était pas immatriculée à l'adresse des locaux loués ce qui la privait, en vertu de l'article L 145-1 du code de commerce, du droit au renouvellement du bail ; qu'elle n'est pas fondée à imputer au bailleur les conséquences de sa propre carence ni à soutenir qu'il appartenait au bailleur, avant de lui offrir le renouvellement du bail, de s'assurer lui-même qu'elle réunissait toutes les conditions statutaires pour l'obtenir ; que la mauvaise foi et la déloyauté prétendues du bailleur sont sans lien de causalité directe avec le préjudice invoqué qui résulte de la propre négligence de la société [I] ; que l'article L 145-14 du code de commerce est sans application en l'espèce ; que la société Galerie [I] [I] sera déboutée de sa demande subsidiaire aux fins d'expertise et paiement de dommages et intérêts ;

Considérant que formant sur ce point appel incident, la SCI [Adresse 1] demande à voir porté le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 3.617 € par mois en faisant valoir que l'indemnité d'occupation de droit commun a un but à la fois indemnitaire et coercitif, qu'elle doit correspondre à la valeur locative et que celle-ci a été estimée par l'expert dans le cadre de la procédure en fixation de loyer, à 43.400 € avec mezzanine et 40.700 € par an sans mezzanine ;

Mais considérant que la SCI [Adresse 1] se borne à produire la dernière page du rapport d'expertise qu'elle invoque ce qui ne permet pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses allégations ; que le jugement sera confirmé sur le montant, exactement apprécié, de l'indemnité d'occupation due ; que s'agissant d'une indemnité, la demande d'indexation sera rejetée ;

Considérant que la société Galerie [I] [I] qui succombe sur son recours sera condamnée aux dépens d'appel ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, sa demande à ce titre sera rejetée et la somme de 3.000 € sera allouée à l'intimée pour ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement,

Déboute la société [I] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à la SCI [Adresse 1] la somme de 3.000 € ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société [I] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/10719
Date de la décision : 07/05/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°12/10719 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-07;12.10719 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award