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06/05/2014 | FRANCE | N°12/04951

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 06 mai 2014, 12/04951


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 4

ARRÊT DU 06 Mai 2014
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/ 04951- AMD

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mars 2012 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de BOBIGNY, section activités diverses RG no 09/ 04831
APPELANTE
Association STUDIO ALBATROS Prise en la personne de ses représentants légaux Sise 52 rue du Sergent Bobillot-93100 MONTREUIL SOUS BOIS

Représentée par Me Géraldine K

ESPI-BUNAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0426 substitué par Me Anna GAUDINO, avocat au barreau de P...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 4

ARRÊT DU 06 Mai 2014
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/ 04951- AMD

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mars 2012 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de BOBIGNY, section activités diverses RG no 09/ 04831
APPELANTE
Association STUDIO ALBATROS Prise en la personne de ses représentants légaux Sise 52 rue du Sergent Bobillot-93100 MONTREUIL SOUS BOIS

Représentée par Me Géraldine KESPI-BUNAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0426 substitué par Me Anna GAUDINO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1188
INTIMÉE
Madame Houria X... épouse Y... Demeurant...-93100 MONTREUIL SOUS BOIS Comparante en personne,

Assistée de Me Cécile CHAMBESLIN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 9, bénéficiant d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 053170 du 28/ 11/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Mars 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Greffier : Madame Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Madame Mélanie RAMON, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour est saisie de l'appel interjeté par l'ASSOCIATION STUDIO ALBATROS du jugement du Conseil des Prud'hommes de BOBIGNY, section activités diverses, statuant en départage, rendu le 9 Mars 2012 qui a retenu sa compétence pour statuer, a requalifié le contrat d'accompagnement dans l'emploi en contrat à durée indéterminée et l'a condamnée avec exécution provisoire, remise des documents conformes et intérêts légaux à compter du 18 Décembre 2009 sur les créances salariales et à compter du jugement sur les créances indemnitaires à payer à Madame Houria X... épouse Y... les sommes de : 726, 56 ¿ à titre d'indemnité de requalification 726, 56 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus les congés payés afférents 100 ¿ pour non respect de la procédure de licenciement 1000 ¿ pour licenciement abusif

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Le 2 Juin 2008 l'ASSOCIATION STUDIO ALBATROS a conclu une convention avec l'état dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi au profit de Madame Houria X... épouse Y..., née au mois de Juin 1957, pour une durée hebdomadaire de 20h moyennant un salaire brut de 747, 45 ¿ à compter du 5 Juin 2008, date de l'embauche jusqu'au 4 Décembre 2008, le montant de l'aide de l'état en pourcentage du SMIC horaire était fixé à 85 % ;
Parallèlement, l'association a signé avec Madame Houria X... épouse Y... le 2 Juin 2008 un contrat à durée déterminée « dans le cadre d'accompagnement à l'emploi » à compter du 5 Juin 2008 pour une période de 6 mois pour un emploi de femme de ménage « pour exercer les fonctions de nettoyage des locaux et surfaces sis 52, rue du sergent Bobillot à MONTREUIL » ; Le contrat prévoyait les horaires de travail et une rémunération sur la base du SMIC horaire soit 8, 63 ¿.
Le 15 décembre 2008 un nouveau contrat a été conclu dans les mêmes conditions pour la période du 5 décembre 2008 au 4 Juin 2009, toujours au profit de Madame Houria X... épouse Y... ;
L'entreprise est soumise à la convention collective du spectacle vivant, elle emploie moins de 11 salariés ;
Considérant n'avoir reçu aucune formation de la part de son employeur et que ce dernier n'a pas assuré les actions d'accompagnement et de formation qu'il devait dans le cadre du dispositif des CAE (contrat d'accompagnement à l'emploi), Madame Houria X... épouse Y... a saisi le Conseil des Prud'hommes le18 décembre 2009 ;

L'ASSOCIATION STUDIO ALBATROS demande à la Cour :

- l'infirmation du jugement,
- de constater qu'à l'époque des faits elle n'était pas soumise à une obligation de formation mais à une simple recommandation,
en tout état de cause,
- de dire que Madame Houria X... épouse Y... a bénéficié des actions de formation conformément à l'engagement pris et en conséquence de rejeter ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 1 000 ¿ en application de l'article 700 du Code de Procédure civile et aux dépens.
Madame Houria X... épouse Y... conclut rejet des prétentions de l'Association Studio Albatros et demande à al Cour l'infirmation partielle du jugement et, statuant à nouveau, de la condamner à lui payer les sommes de : 726, 56 ¿ à titre d'indemnité de requalification 726, 56 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus congés payés afférents 726, 56 ¿ pour non respect de la procédure de licenciement 2 179, 68 ¿ à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail 1 600 ¿ en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au profit de Maître E..., avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre.
Les deux contrats d'accompagnement à l'emploi ont été conclus sous l'empire de l'ancienne rédaction de l'article L. 5134-20 du Code du Travail applicable jusqu'au 31 Décembre 2009 ; La Loi 2008-1249 du 1er décembre 2008 en son article 22-1 qui a modifié cet article n'étant entré en application qu'à compter du 1er janvier 2010 soit postérieurement au terme du dernier contrat ;
Dans sa rédaction applicable au litige, l'article L. 5134-20 du Code du Travail stipule : « Le contrat d'accompagnement dans l'emploi a pour objet de faciliter l'insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d'accès à l'emploi... » ; Ce n'est que la nouvelle rédaction de l'article L. 5134-20 du Code du Travail applicable à compter du 1er janvier 2010 qui ajoutera à la rédaction initiale qu'à cette fin, le contrat comporte des actions d'accompagnement professionnel ;
Madame Houria X... épouse Y... soutient que les contrats imposaient des obligations à l'Association Studio Albatros en terme d'orientation professionnelle, d'accompagnement dans l'emploi et de formation qu'elle n'a pas respectées de sorte qu'ils doivent être requalifiés en application des articles L. 1242-2 et L. 1245-1 du Code du Travail ;
L'Association Studio Albatros oppose les précisions apportées par la circulaire de la DGEFP du 21 Mars 2005 concernant la réglementation du CAE laquelle indique seulement qu'une formation au titre du CAE est « recommandée » ainsi qu'une réponse ministérielle à une question no 68086 qui énonce que « la formation et l'accompagnement prévus dans la convention sont fortement recommandés » ; Elle en tire que la norme législative ne rendait pas la formation obligatoire de sorte que la mise en ¿ uvre d'une formation professionnelle par l'employeur n'était pas impérative et ne peut être retenue comme une condition de validité des contrats de Madame Houria X... épouse Y... et donner lieu à requalification en contrat à durée indéterminée ; en tout état de cause elle estime avoir donné une formation qualifiante à Madame Houria X... épouse Y... ;
Il ressort des deux conventions CAE signées entre l'État et l'Association Studio Albatros les 2 juin 2008 et 3 décembre 2008 que :- le niveau de formation visé était 60- que la case « formation programmée » est cochée-que la case « type de formation interne » est cochée-que les cases « accompagnement vers l'emploi confié à un organisme extérieur Non » et « accompagnement social confié à un organisme extérieur Non » sont cochées-que la case « modalités de formation et d'accompagnement Pendant le temps de travail » est cochée-que l'accompagnement vers l'emploi n'était pas confié à un tuteur-que la case NON est cochée à la rubrique « Validation des acquis de l'expérience, procédure de validation »

Selon le tableau de codification applicable au niveau de formation, le niveau 70 correspond à « pas de formation allant au-delà de la fin de la scolarité obligatoire » et le niveau 60, visé dans les CAE souscrits au bénéfice de Madame Houria X... épouse Y... correspond à « formation courte d'une durée maximum d'un an conduisant au certificat d'éducation professionnelle ou à toute autre attestation de même nature » ;
La circulaire du 21 Mars 2005, si elle ne s'impose pas au juge judiciaire, elle a le mérite de rappeler l'objectif du dispositif et les modalités d'application et recommandations qui avaient été transmises aux différents acteurs concernés dont les ANPE par ce type de contrat dont l'Etat prenait en charge 85 % du coût salarial ; en l'espèce, elle rappelle que l'employeur doit être incité à mettre en ¿ uvre notamment des actions d'accompagnement et de formation nécessaires à l'insertion ;
Selon pièces versées aux débats par l'Association Studio Albatros, cette dernière s'est engagée le 5 juin 2008 auprès de l'ANPE conformément à la demande par mail du 4 juin 2008 de Boussif Z... chargé du dossier ANPE, à former Madame Houria X... épouse Y... à la cuisine en tant qu'aide cuisinière ;
Selon les contrats à durée déterminée les horaires de Madame Houria X... épouse Y... étaient de 10h à 12h et de 13h à 14h30 du lundi au vendredi et le samedi de 10h à 12h30 ;
Les locaux de l'association comportaient une cafétéria, une salle, un studio et une cuisine ;
Aucun registre du personnel n'est versé aux débats, seuls les contrats à durée déterminée de deux salariées : Madame Kheira A... et B... Annie sont versés aux débats par l'employeur, toutes deux engagées également dans le cadre de contrat d'accompagnement dans l'emploi en qualité de femmes de ménage ; Le contrat de travail de Madame B... indique qu'elle exercera les fonctions consistant en nettoyage des locaux et aide à la cuisine ;
Il n'est donc pas justifié que l'association employait un salarié possédant les qualités professionnelles de nature à assumer une formation d'aide cuisinière à Madame Houria X... épouse Y... même si la législation applicable aux contrats de cette dernière n'imposaient pas la désignation d'un tuteur ;
L'association Studio Albatros ne peut donc valablement exciper de son compte-rendu de formation concernant Madame Houria X... épouse Y... dans lequel elle indique que Madame Kheira A..., « cuisinière en titre », l'a formée en cuisine tous les jours pendant deux heures ;
Si selon les attestations produites par l'Association appelante (Monsieur C... Mohamed et D... Pierre), Mesdames A..., B... et Madame Houria X... épouse Y... faisaient le ménage des locaux le matin et étaient en cuisine à partir de midi pour la préparation de plats simples et qu'il y avait toujours une personne de l'association, Monsieur G... (Président de l'Association) ou Madame G... qui avait établi le menu, présente pendant la confection des repas par l'une des trois salariées précitées, il ne résulte pas des dites attestations et eu égard à ce qui a été dit ci-avant que l'Association Studio Albatros ait assuré une véritable formation d'aide cuisinière à Madame Houria X... épouse Y... comme elle s'y était engagée auprès de l'ANPE pour voir valider le CAE lui permettant de bénéficier d'une large prise en charge par l'État du salaire et des charges afférentes, le fait que l'article L. 5134-20 du Code du Travail applicable au litige ne prévoit pas expressément l'obligation de la mise en ¿ uvre d'une formation professionnelle étant indifférent eu égard à l'engagement pris auprès de l'ANPE ;
En application de l'article L. 1245-1 du Code du Travail, c'est à bon droit que le premier juge a requalifié le contrat de travail à durée déterminée de Madame Houria X... épouse Y... et lui a alloué la somme de 726, 56 ¿ représentant un mois de salaire à titre d'indemnité de requalification ainsi qu'eu égard à l'ancienneté une indemnité compensatrice de préavis d'un mois soit 726, 56 ¿ plus 72, 65 ¿ pour congés payés afférents ;
En conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée de droit commun, eu égard à l'ancienneté de la salariée inférieure à deux ans, la rupture de la relation contractuelle est abusive ; La salariée a retrouvé un emploi le 10 février 2010 comme préparatrice de commandes en contrat à durée déterminée ; La somme de 1 000 ¿ allouée par le premier juge à titre de dommages intérêts est appropriée au préjudice subi ;
Il ressort de la combinaison des dispositions des articles L. 1235-2 et L. 1235-5 du Code du Travail avec celles de l'article L. 1235-3 du Code du Travail qu'il n'y a lieu à indemnité distincte de celle allouée ci-dessus à titre de dommages intérêts, pour non respect de la procédure de licenciement ; L'Association Studio Albatros conservera à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a exposés ;
En application des articles 37 alinéa 2 et 75 de la loi du 10 Juillet 1991 et 700 du Code de Procédure Civile, il y a lieu de condamner l'Association Studio Albatros à payer à Maître Cécile E..., avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 000 ¿ à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'État.
PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en ce qui concerne l'indemnité allouée pour non respect de la procédure de licenciement et le confirme pour le surplus mais par substitution de motifs

Rejette les autres demandes.
Condamne l'Association Studio Albatros à payer à Maître Cécile E..., avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 000 ¿ à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/04951
Date de la décision : 06/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2014-05-06;12.04951 ?
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