La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/2014 | FRANCE | N°11/12574

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 30 avril 2014, 11/12574


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 30 Avril 2014

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/12574



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Avril 2008 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS Section Encadrement RG n° 06/04138





APPELANTE

L'Etat, représenté par L'Agent Judiciaire de l'Etat, Direction des affaires juridiques venant aux droits de l'

EPIC EMC, lui même venant aux droits de la SA EMC, elle même venant aux droits de la Société commerciale des potasses et de l'azote (SCPA)

[Adresse 2]

[Adresse ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 30 Avril 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/12574

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Avril 2008 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS Section Encadrement RG n° 06/04138

APPELANTE

L'Etat, représenté par L'Agent Judiciaire de l'Etat, Direction des affaires juridiques venant aux droits de l'EPIC EMC, lui même venant aux droits de la SA EMC, elle même venant aux droits de la Société commerciale des potasses et de l'azote (SCPA)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Frank WISMER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107 substitué par Me Muriel DELUMEAU, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [R] [G]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Isabelle HADOUX-VALLIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Février 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice LABEY, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Melle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. [R] [G] a été engagé le 15 janvier 1979 en qualité d'ingénieur chimiste dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par la SOCIETE COMMERCIALE DES POTASSES ET DE L'AZOTE (SCPA) dont les activités étaient régies par la Convention collective nationale des industries chimiques.

Ainsi que cela résulte du certificat de travail du 6 juin 1985 et de sa lettre d'affectation du 30 mars 1979, M. [G] a été "détaché" par son employeur de la manière suivante :

-du 15 avril 1979 au 22 août 1981 auprès de la Société Camerounaise d'Engrais à DOUALA,

-du 1er mars 1981 au 7 mai 1984 puis du 8 mai 1984 au 31 mai 1985 auprès de la Société Industrielle d'Engrais jusqu'au 7 mai 1984, puis auprès des industries chimiques du SÉNÉGAL à DAKAR.

La lettre d'affectation du 30 mars 1979 précitée indiquait notamment que les cotisations de retraite étaient établies selon la grille des échelles de la branche chimie.

Le salarié a été informé par la CRAM d'Aquitaine du refus de prise en compte des 25 trimestres correspondant aux périodes de détachement, faute de cotisation à la caisse de retraite des français de l'étranger par son employeur. Contacté par M. [G] les 29 juillet 2004, le 13 juin 2005, 22 septembre 2005, ce dernier lui a indiqué le 21 juin 2005 que son dossier serait étudié.

Le 28 mars 2006, M. [G] saisissait le Conseil des prud'hommes de PARIS, aux fins de faire condamner la SA EMC venant aux droits de la SCPA à lui verser intérêts au taux légal et sous le bénéfice de l'article 515 du Code de procédure civile :

- 23 542 € à titre de dommages et intérêts pour non affiliation au régime général de la Sécurité Sociale ;

- 30 258,50 € à titre de dommages et intérêts correspondant au manque à gagner entre février 2006 et juin 2008 ;

- 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

La Cour a été saisie d'un appel formé par la SA EMC contre le jugement du Conseil des prud'hommes de PARIS qui l'a condamnée à verser à M. [G] avec application de 1'article 515 du code de procédure civile:

- 23 542 € à titre de dommages et intérêts pour le coût du rachat des trimestres non cotisés ;

- 30 258,50 € à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte de revenu liée

à la perception d'une retraite minorée de février 2006 à juin 2008 ;

- 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

-1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

L'EPIC ECM, venu aux droits de la société ECM a fait l'objet d'une liquidation, dont la clôture a été approuvée par arrêté ministériel du 28 décembre 2012. L'AGENT JUDICIAIRE du TRESOR venant aux droits de la société liquidée est intervenu à la procédure.

Vu les conclusions du 26 février 2014 au soutien des observations orales par lesquelles l'AGENT JUDICIAIRE du TRESOR (AJT) conclut à l'infirmation du jugement entrepris, au rejet de l'intégralité des demandes de M. [G] et à sa condamnation à lui payer 1000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Vu les conclusions du 26 février 2014 au soutien de ses observations orales au terme desquelles M. [G] demande à titre principal à la Cour, de condamner l'AJT à lui payer, outre 20000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral :

- 23 542 € à titre de dommages et intérêts correspondant au montant du rachat des trimestres non cotisés, avec intérêts légaux avec capitalisation.

- 30 238,50 € à titre de dommages et intérêts pour le manque à gagner de février 2006 à juin 2008.

De ces chefs mais à titre subsidiaire, M. [G] demande, la condamnation de l'AJT à lui verser 48 455€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'impact des manquements de son employeur ses droits à retraite, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Pour infirmation, l'AJT fait essentiellement valoir qu'il n'est pas possible à l'intéressé de revendiquer le statut de détaché, que l'article L 761-2 du Code du travail conditionne notamment le maintien du régime de sécurité sociale et de retraite par le caractère temporaire du détachement, qu'il était nécessaire d'adresser une demande concernant le détachement à la sécurité sociale, l'arrêté du 22 mars 1978 exigeant une attestation détaillée de l'employeur qui dispose du choix de cette modalité d'exercice des fonctions.

L'AJT ajoute que le salarié avait la faculté de cotiser à la caisse de sécurité sociale des français de l'étranger ou de faire réaliser cette démarche par son employeur, qu'il ne rapporte pas la preuve de sa qualité de salarié détaché.

L'AJT soutient qu'au contraire, le contenu d'une lettre du 16 février 1981 de la société sénégalaise où il était affecté, indiquait que M. [G] se verrait appliquer le statut des expatriés et qu'elle prendrait elle-même en charge les cotisations de retraite, que les expatriés de la SCPA, qualifiés à tort en interne de détachés, bénéficiaient d'une indemnité d'expatriation, du régime complémentaire de la caisse de retraite des expatriés et que l'intéressé avait été informé par une circulaire du 24 mai 1982 de la possibilité de racheter les trimestres manquants.M. [G] réfute les arguments de l'AGENT JUDICIAIRE du TRÉSOR, arguant notamment du fait qu'il bénéficiait de visas de détachement temporaire, qu'il était sous la subordination hiérarchique de la SCPA, que ni la prétendue erreur sémantique, ni l'absence de diligence de son employeur ne lui sont opposables et que tout lui laissait croire qu'il était en position détachée, l'article 4 du règlement de la société disposant que le salarié en service détaché conservait ses droits à pension.

M. [G] expose en outre que son préjudice est double, dans la mesure où pour faire valoir ses droits à la retraite après son inaptitude médicale définitive, il lui manque 25 trimestres et doit se contenter d'indemnités ASSEDIC, sauf à procéder à leur rachat pour un coût de 23542€, l'inertie de son employeur depuis 2004 étant par ailleurs à l'origine d'un préjudice moral.

Le contrat de travail doit s'exécuter de bonne foi et dès lors que l'article 4 du règlement de la SCPA sur le détachement du personnel précisait expressément le maintien des droits à pension du salarié mis "en service détaché", l'affectation du 30 mars 1979 plaçant M. [G] en "mise en service détaché" ne permettait pas à l'intéressé de comprendre qu'il pouvait être dans une position statutaire autre que celle qui y était expressément indiquée, à savoir en position de salarié expatrié avec les droits afférents, et ce nonobstant l'erreur sémantique invoquée par l'employeur, dont rien ne permet de considérer que le salarié en ait jamais été averti.

Par ailleurs, l'article 7 du contrat de travail de M. [G] avec la société au SENEGAL précise également que l'agent est "détaché provisoirement" par la SCPA et que les retenues sur salaire seront celles répercutées par la SCPA, l'article 13 ajoutant que "l'agent reste affilié au régime de retraite souscrit par la SCPA", l'article 5 du règlement précité sur le personnel détaché indiquant que le montant de la retenue de retraite est reversé entre les mains de la SCPA.

De surcroît, toutes les décisions d'affectation de M. [G], assorties de la délivrance de visas de détachement temporaire renouvelés, faisant référence au détachement, étaient établies par la SCPA dont le Directeur général conservait en application de l'article 7 du règlement spécial sur le détachement du personnel, d'un pouvoir disciplinaire qu'il exercera effectivement à l'égard de M. [G], en lui adressant des remontrances.

Ni le bénéfice d'un régime complémentaire de retraite des expatriés à l'initiative de l'employeur, ni le remboursement par la société d'accueil des cotisations de retraite, ni la carence de l'employeur ne sont opposables à M. [G], et ne sont pas de nature à permettre à l'employeur de se soustraire aux engagements résultant la position de détachement dans laquelle il a placé son salarié, en application de son propre règlement.

Au surplus, l'employeur ne saurait sans une certaine mauvaise foi, se prévaloir de ne pas avoir informé M. [G] de l'absence de précompte des cotisations sociales au régime général, ni averti de la possibilité d'adhérer volontairement à un régime de retraite.

Il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise et de condamner l'AJT à verser à M. [G] au titre des dommages et intérêts correspondant au montant du rachat des trimestres non cotisés ainsi que pour le manque à gagner de février 2006 à juin 2008.

S'agissant des dommages et intérêts sollicités en réparation du préjudice moral résultant de la tromperie invoquée par M. [G] et de l'inertie abusive opposée par l'employeur à la demande, il lui sera alloué une indemnité de 5000 €.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

DÉCLARE recevable l'appel formé par la SA EMC (AJT)

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA. EMC (substituée par l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR) à payer à M. [R] [G] :

- 23542 € à titre de dommages et intérêts pour le coût du rachat des trimestres non cotisés ;

- 30238,50 € à titre de dommages et intérêts pour le manque à gagner de février 2006 à juin 2008;

-1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

LE RÉFORME pour le surplus,

et statuant à nouveau

CONDAMNE par l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR à payer à M. [R] [G] 5000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral :

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, application faite de l'article 1154 du Code civil,

CONDAMNE l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR à payer à M. [G] 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE M. [G] de ses autres demandes,

CONDAMNE l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER LE PRESIDENT

L. CAPARROS P. LABEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 11/12574
Date de la décision : 30/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°11/12574 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-30;11.12574 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award