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09/04/2014 | FRANCE | N°12/00368

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 09 avril 2014, 12/00368


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 09 Avril 2014



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00368



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 mai 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 09/13002





APPELANT

Monsieur [I] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Aude BOURUET AUBERTOT, avocat

e au barreau de PARIS, C0215





INTIMÉE

S.A.S. GROUPE SEGUR

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Anne-Laure BÉNET, avocate au barreau de PARIS, J095





COMPOSITION DE LA COUR :



L'a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 09 Avril 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00368

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 mai 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 09/13002

APPELANT

Monsieur [I] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Aude BOURUET AUBERTOT, avocate au barreau de PARIS, C0215

INTIMÉE

S.A.S. GROUPE SEGUR

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Anne-Laure BÉNET, avocate au barreau de PARIS, J095

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Février 2014, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Monsieur Jacques BOUDY, conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 23 mai 2011 ayant débouté M. [I] [S] de ses demandes et l'ayant condamné aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de M. [I] [S] reçue au greffe de la cour le 11 janvier 2012 ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 12 février 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [I] [S] qui demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris

- statuant à nouveau, de condamner la SAS GROUPE SEGUR à lui payer les sommes indemnitaires de 256 758 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 42 793 € (demande nouvelle) pour violation de la priorité légale de réembauche

- en tout état de cause, de condamner la SAS GROUPE SEGUR à lui régler la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 12 février 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SAS GROUPE SEGUR qui demande à la cour de confirmer la décision déférée et de condamner M. [I] [S] à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

M. [I] [S] a été recruté par la SARL FERIM, devenue ultérieurement HOCHE CARAIBES, en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 9 janvier 2001 en qualité de chargé de mission-directeur des programmes, son contrat de travail ayant été transféré le 1er juillet 2003 à la SA HOCHE PROMOTION avec laquelle il a formalisé leur collaboration en tant que chargé de mission relevant du statut cadre au niveau IV- échelon 2 de la convention collective nationale de la promotion et construction.

M. [I] [S] se voit alors confier le suivi opérationnel des actifs immobiliers HOCHE PROMOTION moyennant un salaire de 88 000 € annuels bruts sur 13 mois.

Le contrat de travail de l'appelant a ensuite été transféré le 1er janvier 2004 à la SAS GROUPE SEGUR avec laquelle un écrit a été formalisé le 30 juin 2006, celui-ci y occupant des fonctions de directeur opérationnel avec un statut de cadre-niveau conventionnel 6.

Par lettre du 21 janvier 2009, la SAS GROUPE SEGUR a convoqué à un entretien préalable prévu le 29 janvier M. [I] [S] qui a adhéré le 12 février au dispositif légal sur la convention de reclassement personnalisé.

Répondant à M. [I] [S] qui entendait le 13 février 2010 contester la rupture de son contrat de travail reposant sur un motif économique, l'intimée lui rappelait dans une correspondance du 16 février «les difficultés économiques» auxquelles était confronté «le groupe» depuis la fin 2008, alors même que l'exercice clos au 30 juin 2008 était déjà «déficitaire», difficultés économiques ayant conduit à la «suppression de (son) poste de Directeur opérationnel en charge de l'immobilier».

Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, M. [I] [S] percevait une rémunération en moyenne de 17 515,07 € bruts mensuels comme précisé par l'employeur dans ses dernières conclusions (page 3).

Sur le bien fondé de la rupture

Des éléments soumis à la cour, notamment un organigramme (pièce 1 de l'appelant), il apparaît que la SAS GROUPE SEGUR est une composante d'un ensemble plus vaste au travers du groupe SEGUR qui en 2009 comprenait une quarantaine d'entreprises.

Dans le cadre de son activité commerciale, telle que figurant sur son extrait K bis, la SAS GROUPE SEGUR intervient en matière de «modernisation des entreprises ' par les techniques de l'organisation de l'informatique et du management (en) gestion immobilière», activité correspondant aux responsabilités confiées à M. [I] [S] en charge du suivi opérationnel des actifs immobiliers ainsi que des travaux de l'ensemble des entreprises du groupe précité, ce qui s'entend notamment de l'activité hôtelière.

C'est fort justement que l'appelant soutient ainsi que dans le cadre de son activité générale de gestion immobilière, la SAS GROUPE SEGUR intervient de manière directe pour le compte des entreprises du pôle hôtelier du groupe SEGUR.

A l'examen du rapport de gestion établi par le président de la SAS GROUPE SEGUR sur l'exercice clos au 30 juin 2008 (pièce 31/3 de l'appelant), il ressort que le résultat net dudit groupe, qui comprenait «une quarantaine de sociétés ' dont 31 intégrées fiscalement» comme cela est repris par l'appelant dans ses écritures (page 8), se traduit par une perte de - 17 814 K € sur l'exercice clos au 30 juin 2008, tendance déficitaire qui se confirmera sur l'exercice suivant arrêté au 30 juin 2009 (- 7 205 K €, pièce 32/5 de l'appelant).

Les propres données comptables produites par l'intimée sur les années 2008/2009 permettent d'aboutir à la même conclusion (ses pièces 32, 32 bis et 32 ter).

Contrairement à ce que prétend M. [I] [S], la SAS GROUPE SEGUR démontre ainsi la réalité des difficultés économiques affectant le groupe SEGUR sur l'exercice comptable 2008 avant la rupture du contrat de travail intervenue entre les parties courant février 2009.

Pour considérer avoir satisfait à son obligation de recherche d'un poste en reclassement, la SAS GROUPE SEGUR rappelle exploiter une activité de services en management et gestion immobilière relevant de la convention collective nationale de la promotion construction ou promotion immobilière alors que les autres sociétés du pôle hôtelier du groupe SEGUR dépendent de la convention collective des Hôtels-Cafés-Restaurants (HCR), que leurs activités respectives ainsi que leurs modes d'organisations ne permettent pas d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, de sorte que, contrairement à ce que soutient l'appelant, le périmètre à retenir en la matière est exclusivement celui du «secteur d'activité de l'immobilier» au sein duquel il n'y avait aucun poste disponible susceptible d'être proposé au salarié.

Comme rappelé précédemment, la SAS GROUPE SEGUR a un domaine d'activité en matière de gestion immobilière qui la conduit à intervenir directement pour le compte des entreprises du pôle hôtelier du groupe SEGUR, de sorte que le périmètre de reclassement, contrairement à ce qu'elle prétend, s'étendait à l'ensemble des entités du groupe SEGUR dont les activités et l'organisation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Dès lors que la SAS GROUPE SEGUR a limité ses recherches supposées aux seules entreprises du secteur de l'immobilier, peu important en définitive qu'il y ait une différence de convention collective applicable, il ne peut qu'être constaté de sa part une violation de son obligation à ce titre résultant des dispositions de l'article L.1233-4 du code du travail.

Il s'en déduit que la rupture du contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse, de sorte qu'après infirmation du jugement la SAS GROUPE SEGUR sera condamnée à payer à l'appelant la somme indemnitaire à ce titre de 211 000 € représentant l'équivalent de 12 mois de salaires en vertu de l'article L.1235-3 du code du travail, compte tenu de son âge (45 ans) et de son ancienneté dans l'entreprise (8 années), avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.

L'application de l'article L.1235-3 du code du travail appelle celle de l'article L.1235-4 relatif au remboursement par l'employeur fautif aux organismes concernés de la totalité des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois.

Sur la priorité de réembauche (demande nouvelle)

Consécutivement à la rupture de son contrat de travail, M. [I] [S] a, dans une correspondance du 18 mars 2009 adressée à l'intimée, sollicité le bénéfice de la priorité de réembauche en application de l'article L.1233-45 du code du travail.

Au soutien de cette demande, l'appelant indique que la SAS GROUPE SEGUR a procédé à plusieurs embauches courant 2009 et notamment, le 10 novembre, une assistante de direction générale -cadre, ce à quoi l'intimée répond qu'il n'était pas doté des compétences nécessaires pour occuper un tel poste requérant une certaine expérience professionnelle qu'une formation d'une durée raisonnable n'aurait pas permis d'acquérir.

L'article L.1233-45 du code du travail précise que si le salarié exerce sa priorité de réembauche dans l'année suivant la rupture du contrat de travail, l'employeur l'informe «de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification».

L'examen du registre d'entrée et de sortie du personnel de la SAS GROUPE SEGUR (sa pièce 41) montre qu'elle a procédé dans le courant de l'année 2009 à diverses embauches de salariés cadre pour occuper des fonctions à responsabilités - un directeur administratif et financier le 16 mars, un gestionnaire en financement et participations le 1er septembre, une assistante de direction générale le 10 novembre -, de tels postes étant susceptibles par nature de convenir à l'appelant avec un minimum de temps d'adaptation dès lors qu'ils n'étaient pas totalement incompatibles avec sa qualification professionnelle.

Sur ce dernier point, la cour observera que M. [I] [S] occupait dans l'entreprise un emploi de directeur opérationnel avec une rémunération conséquente, poste supposant un certain niveau de responsabilités et des qualités particulières qui n'ont a priori jamais été remises en cause durant l'exécution du contrat de travail, en sorte qu'apparaît un peu court l'argument de l'intimée qui invoque par principe son manque d'adaptation et le fait qu'il ne serait qu'un pur «autodidacte» avec «un déficit de formation».

En application de l'article L.1235-13 du code du travail, la SAS GROUPE SEGUR sera en conséquence condamnée à régler à l'appelant la somme indemnitaire à ce titre de 35 100 € représentant l'équivalent de deux mois de salaires, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

L'intimée sera condamnée en équité à verser à M. [I] [S] la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME le jugement entrepris et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS GROUPE SEGUR à payer à M. [I] [S] la somme indemnitaire de 211 000 € sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt ;

Y ajoutant,

ORDONNE le remboursement par la SAS GROUPE SEGUR aux organismes concernés de la totalité des indemnités de chômage versées à M. [I] [S] dans la limite de six mois ;

CONDAMNE la SAS GROUPE SEGUR à régler à M. [I] [S] la somme indemnitaire de 35 100 € pour violation de la priorité légale de réembauche avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE la SAS GROUPE SEGUR à verser à M. [I] [S] la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS GROUPE SEGUR aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/00368
Date de la décision : 09/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°12/00368 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-09;12.00368 ?
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