Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 26 MARS 2014
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/02392
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/15154
APPELANT
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] représenté par son syndic la Société CABINET DESLANDES, ayant son siège social
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
assisté de Me Edith LAGARDE-BELLEC, avocat au barreau de PARIS, toque : C2524
INTIMES
Association L'ECOLE DU CHAT prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège sis
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
assistée de Me Eric GOURDIN SERVENIERE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1850
Monsieur [R] [S]
[Adresse 4]
[Localité 1]
M.A.F. - MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS, ayant son siège social
[Adresse 9]
[Localité 1]
représentés par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090
assistés de Me Sophie TESSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0706
SA SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS, prise en sa direction Services Clients de LYON, ayant son siège social
[Adresse 7]
[Localité 2]
représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
assistée de Me Caroline REGNIER-AUBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Association BOURDON, représentée par son administrateur désigné par ordonnance de référé du 15.03.2012, ayant son siège social
[Adresse 8]
[Localité 1]
représentée par Me Catherine BELFAYOL BROQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0042
assisté de Me Bruno ELIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P501
SAS CABINET MAURY SCHWOB représentée par son Président, ayant son siège social
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
assistée de Me Carine CHICHE BRACKA, avocat au barreau de PARIS, toque : E738
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président, chargée du rapport
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller
Madame Claudine ROYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
Le 2 janvier 2003, un incendie est survenu dans le logement de M. [T], au 1er étage de l'immeuble sis [Adresse 1], et a endommagé les locaux de l'association Bourdon au rez-de-chaussée et sous-sol, donnés à commodat à l'association École du Chat, selon convention du 1er juillet 1992. Après le passage des pompiers, une bâche de protection a été posée au dessus de la courette surplombant le sous-sol.
L'association École du Chat a quitté les lieux le 30 juin 2004 et un état de sortie a été dressé par un huissier le 1er juillet 2004.
La descente d'eaux vannes desservant l'immeuble n'ayant pu être réinstallée dans sa position initiale lors des travaux de réfection, la nouvelle canalisation a été placée dans la courette, avec une écharpe horizontale d'1,10 m passant dans le local de l'association Bourdon.
Faisant état des divers désordres affectant son lot, l'association Bourdon a obtenu, selon ordonnance de référé du 22 septembre 2005, la désignation de M. [B] en qualité d'expert à l'effet d'en rechercher l'origine, et, au vu du rapport d'expertise déposé le 27 février 2007, elle a, suivant actes extra-judiciaire des 31 octobre, 2 novembre 2007, 16 juin 2008, assigné l'association École du Chat, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], la société Swisslife Assurance de Biens en sa qualité d'assureur de l'immeuble et la société Cabinet Maury Schwob à l'effet de les voir dire responsables de ses préjudices, condamnés à les réparer, d'entendre condamner, par ailleurs, le syndicat à supprimer, à défaut coffrer les canalisations posées dans ses locaux, sous astreinte.
Par ordonnance du 22 février 2008, le juge de la mise en état a désigné M. [V] en qualité d'expert avec pour mission de rechercher le meilleur tracé pour les canalisations litigieuses et de donner son avis sur la suppression de l'étaiement du plafond.
Par acte extra-judiciaire du 23 juin 2008, le syndicat des copropriétaires a assigné à jour fixe M. [R] [S], architecte de l'immeuble et l'assureur de ce dernier, la MAF, en expertise commune.
Après jonction des procédures, par jugement du 12 janvier 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et l'association École du Chat responsables des désordres causés à l'association Bourdon, selon le partage de responsabilité suivant :
30 % au syndicat des copropriétaires,
70 % à l'association École du Chat,
- dit que ce partage de responsabilité ne jouerait que dans leurs rapports entre eux pour les condamnations prononcées in solidum,
- débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes à l'encontre de la société Cabinet Maury Schwob et de M. [R] [S],
- débouté l'association Bourdon de ses demandes à l'encontre de la société Cabinet Maury Schwob,
- mis hors de cause M. [R] [S] et son assureur la MAF,
- dit que la société Swisslife Assurance de Biens devait sa garantie au syndicat des copropriétaires pour les condamnations prononcées contre lui,
- fixé l'indemnisation de l'association Bourdon à la somme de 33.541,06 € TTC, au titre des travaux de réfection dans les parties privatives, et à celle de 23.000 € au titre de son préjudice de jouissance pour une période de 30 mois comprise entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2006, avec intérêts au taux légal (le syndicat des copropriétaires étant tenu de régler la somme de 8.268,63 € TTC et l'association École du Chat celle de 25.272,43€ TTC au titre des travaux de réfection dans les parties privatives),
- ordonné au syndicat des copropriétaires de mettre tout en 'uvre pour procéder au coffrage de la canalisation, de manière à assurer une parfaite isolation phonique et un aspect visuel satisfaisant tel que préconisé par MM. [B] et [V], et à en justifier par la production dans les trois mois de la signification du jugement du devis et de la facture desdits travaux auprès de l'association Bourdon,
- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires, la société Swisslife Assurance de Biens et l'association École du Chat à payer à l'association Bourdon la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum aux dépens incluant les frais d'expertise le syndicat des copropriétaires, la société Swisslife Assurance de Biens et l'association École du Chat.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] a relevé appel de ce jugement dont il poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 4 février 2014, de :
' au visa de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965
- constater que les infiltrations subies par l'association Bourdon ont pour origine une absence d'étanchéité du bâchage,
- dire qu'il appartenait à la société Cabinet Maury Schwob, en sa qualité de syndic, de s'assurer de la parfaite étanchéité dudit bâchage,
- constater que la société Cabinet Maury Schwob a commis plusieurs fautes dans l'exercice de sa mission en ne déférant pas aux courriers de l'association Bourdon,
- dire que les fautes de la société Cabinet Maury Schwob engagent sa responsabilité personnelle envers l'association Bourdon,
- constater que la société Cabinet Maury Schwob a procédé à une représentation mensongère de la procédure d'expertise et ne l'a jamais tenu informé des raisons de celle-ci et d'un éventuel risque de condamnation,
- dire que l'association Bourdon ne peut se prévaloir des fautes personnelles de la société Cabinet Maury Schwob à l'encontre de son mandant, le syndicat,
- subsidiairement, limiter le quantum de la condamnation prononcée au titre des réparations des parties privatives à la somme de 2.148,75 € HT et celui de la condamnation prononcée au titre du préjudice de jouissance à la somme de 921,60 €,
- condamner la société Cabinet Maury Schwob et la société Swisslife Assurance de Biens à le relever et garantir de toutes condamnations liées aux infiltrations subies par l'association Bourdon,
- constater que M. [R] [S] n'a nullement rempli son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention de la société Cabinet Maury Schwob sur l'obligation de passage de la canalisation par les parties privatives de l'association Bourdon,
- constater que la société Cabinet Maury Schwob n'a pas convoqué d'assemblée générale pour qu'une telle mesure fût ratifiée,
- constater que M. [R] [S] et la société Cabinet Maury Schwob ont commis des fautes susceptibles d'engager leur responsabilité à son endroit,
- les condamner, en conséquence, à le relever et garantir de toutes condamnations qui viendraient à être prononcées contre lui relativement au passage de la canalisation dans les parties privatives de l'association Bourdon,
- en tout état de cause, condamner solidairement M. [R] [S], l'association Bourdon, l'association École du Chat et la société Cabinet Maury Schwob au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
La société Cabinet Maury Schwob prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 31 janvier 2014, de :
' vu les articles 1192 du code civil et 18 de la loi du 10 juillet 1965,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'association Bourdon et le syndicat des copropriétaires de leurs demande et appel en garantie,
- dire qu'il n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, que ce soit vis-à-vis de l'association Bourdon ou du syndicat des copropriétaires et la mettre hors de cause,
- très subsidiairement, dire que M. [R] [S] et la MAF devront à le relever et garantir de toutes condamnations qui viendraient à être prononcées contre elle et ayant son origine dans le suivi et la réalisation des travaux de reconstruction de l'immeuble suite au sinistre incendie, et dont le montant serait non couvert par l'assurance de l'immeuble,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et l'association Bourdon à lui payer, chacun, une somme de 6.000 € à titre de dommages-intérêts,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires, l'association Bourdon et l'association École du Chat au paiement de la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens incluant les frais des deux expertises.
Formant appel incident, la société Swisslife Assurance de Biens prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 28 janvier 2004, de :
- constater qu'elle n'est pas l'assureur de responsabilité du syndicat des copropriétaires ou de son syndic et qu'elle ne garantit que les conséquences de l'incendie du 2 janvier 2003, sa police ayant été résiliée au 1er décembre 2003,
- constater que l'association Bourdon n'a sollicité en première instance la condamnation du syndicat des copropriétaires et de son assureur que pour une partie des travaux de remise en état, limités à un coût de 8.268,63 € TTC,
- en conséquence, constater que le tribunal ne pouvait condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et l'association École du Chat au paiement de la totalité des travaux,
- dire irrecevables comme nouvelles en cause d'appel les demandes en paiement de l'association Bourdon contre elle au titre des travaux de réfection de ses locaux,
- constater que, selon le rapport de M. [B], les travaux de remise en état imputables au sinistre incendie se limitent à la somme de 2.148,75 € à la charge de la copropriété,
- limiter, en conséquence, à cette somme sa garantie,
- constater que l'association Bourdon ne démontre pas l'existence d'un préjudice de jouissance et la débouter de toutes ses demandes à ce titre,
- subsidiairement constater que le prétendu préjudice de jouissance de l'association Bourdon est dû à son opposition à l'exécution des travaux de réfection de la couverture financés par elle et commandés par le syndicat des copropriétaires en septembre 2004,
- en conséquence, débouter celle-ci de ses demande de paiement de dommages-intérêts pour privation de jouissance,
- en tout état de cause, constater que la prétendue privation de jouissance de l'association Bourdon n'est pas due au sinistre incendie mais au retard dans l'exécution des travaux financés par elle, la société Swisslife Assurance de Biens,
- constater que la garantie du préjudice de jouissance est limitée à une année de loyers et que ses locaux n'étaient pas loués mais gratuitement mis à la disposition de l'association École du Chat,
- en conséquence, dire qu'elle ne garantit pas le syndicat des copropriétaires au titre du préjudice de jouissance et débouter l'association Bourdon de ses demandes à ce titre,
- débouter l'association Bourdon de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en ce qu'elle est dirigée contre elle et la condamner au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
M. [R] [S] et la MAF prient la Cour, par dernières conclusions signifiées le 24 janvier 2014, de :
- débouter le syndicat des copropriétaires de son appel en garantie,
- débouter l'association Bourdon de sa demande de réparation,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a mis M. [R] [S] hors de cause,
- en cas de condamnation, limiter leur garantie à la somme de 8.268,63 €, à l'exclusion de toute autre,
- infiniment subsidiairement, condamner la société Cabinet Maury Schwob, d'une part, le syndicat des copropriétaires, d'autre part, à les relever et garantir de toutes condamnations qui viendraient à être prononcées contre M. [R] [S], à quelque titre que ce soit,
- dire la MAF recevable en son intervention volontaire, en sa qualité d'assureur de M. [R] [S],
- dire qu'elle est recevable à opposer à son assuré ainsi qu'aux tiers lésés la limitation de sa garantie à 70 % des indemnités accordées, par application de la règle de réduction proportionnelle prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances,
- condamner tous succombants au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
Formant appel incident, l'association École du Chat prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 8 janvier 2014, de :
- infirmer le jugement dont appel et dire qu'elle n'est pas responsable de ensemble des désordres mentionnés dans le rapport d'expertise de M. [B] du 27 février 2007,
- en conséquence, débouter le syndicat des copropriétaires, l'association Bourdon et la société Cabinet Maury Schwob de l'intégralité de leurs demandes formées contre elle,
- condamner l'association Bourdon, le syndicat des copropriétaires et la société Cabinet Maury Schwob au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
Formant appel incident, l'association Bourdon, représentée par son administrateur, Mme [X], désigné à ces fonctions par ordonnance de référé du 15 mars 2012, prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 4 septembre 2012, de :
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes à l'encontre de la société Cabinet Maury Schwob et en ce qu'il a limité à certaines parties seulement la charge d'indemnités insuffisantes dans leur quantum,
- débouter M. [R] [S], l'association Ecole du Chat et la société Swisslife Assurance de Biens de leurs appels incidents et de toutes leurs prétentions en ce qu'elles sont dirigées contre elle,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires, la société Cabinet Maury Schwob, la société Swisslife Assurance de Biens et l'association École du Chat à lui payer les sommes de :
' 88.500 € au titre de la perte de jouissance de ses locaux pour la période allant du 30 juin 2004 au 31 mai 2009 inclus,
' 35.541,06 € TTC au titre des travaux de réfection dans ses parties privatives,
- au titre des travaux de coffrage dans la canalisation, dire que l'injonction faite au syndicat des copropriétaires de procéder auxdits travaux sera assortie d'une astreinte de 200 € par jour de retard, passé trois de la signification du présent arrêt,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires, la société Cabinet Maury Schwob, la société Swisslife Assurance de Biens et l'association École du Chat à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens de première instance et d'appel,
- confirmer le jugement pour le surplus.
CECI ETANT EXPOSE, LA COUR
Sur les parts de responsabilité respectives du syndicat des copropriétaires et de l'association École du Chat
L'association Bourdon fait état de trois séries de désordres :
- une stagnation d'eau due à l'intervention des services de secours ainsi que des infiltrations imputables au défaut d'étanchéité de la bâche de protection,
- l'état déplorable des locaux au départ de l'association École du Chat,
- le passage d'une canalisation neuve de 1,10 m de long posée en sous-face du plancher haut du rez-de-chaussée de la courette ;
Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas la part de responsabilité qui lui a été imputée par le tribunal mais demande la garantie totale de son ancien syndic, la société Cabinet Maury Schwob, et de M. [R] [S] ;
L'association École du Chat, pour sa part, estime que le syndicat des copropriétaires et son syndic sont les principaux responsables des graves désordres survenus dans les locaux de l'association Bourdon et conteste avoir aucune part de responsabilité en faisant valoir que l'association Bourdon s'est montrée inerte dans le suivi des travaux de réfection et doit, de ce fait, garder à sa charge une part importante de responsabilité ;
L'expert [B] relate en son rapport que l'incendie du 22 janvier 2003 a entraîné des désordres dans la boutique, l'arrière-boutique, la cuisine et la salle d'eau du local de l'association Bourdon mais que les autres pièces occupées par l'association École du Chat n'ont pas subi de désordres liés à l'incendie du 1er étage ; il constate le très mauvais état de ces autres pièces, pourtant données, selon la convention de commodat, en bon état d'usage et d'entretien ;
Il apparaît du rapport d'expertise et des documents produits aux débats que les désordres et dégradations affectant les locaux de l'association Bourdon sont pluri-factoriels et mettent en cause :
- l'incendie survenu le 22 janvier 2003, pour éteindre lequel les pompiers ont copieusement inondé les locaux de l'association Bourdon, et qui a provoqué l'effondrement du plafond, soutenu par des étais,
- le mauvais état des lieux après l'occupation pendant douze années de l'association École du Chat qui hébergeait des chats errants dans les locaux donnés à commodat,
- les infiltrations d'eau de pluie à travers une bâche mal posée et devenue inefficace, qui ont aggravé les désordres ;
Au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a apprécié les parts de responsabilité à la charge du syndicat des copropriétaires, d'une part, de l'association École du Chat, d'autre part, dans la production des désordres endommageant les locaux de l'association Bourdon, à 30 % pour le premier et 70 % pour la seconde, étant observé qu'aucun d'entre eux n'est responsable de l'incendie survenu dans l'appartement de M. [T] au premier étage, cause première et essentielle des désordres, que, par ailleurs, l'association École du Chat ne saurait être déclarée responsable intégralement de la vétusté et du mauvais état des lieux après douze années d'occupation et d'hébergement de dizaines de chats errants, dont l'association Bourdon ne pouvait ignorer, dans le cadre du commodat consenti, qu'ils seraient à l'origine de déprédations d'importance, en sus de l'usure normale des tapisseries, carrelages, équipements électro-ménagers et sanitaires, en sorte que les dommages et intérêts réclamés par l'Association Bourdon et afférents aux frais matériels de réfection de ses locaux seront limités aux désordres strictement imputables aux fautes conjuguées du syndicat et de l'Ecole du Chat et étrangers à l'incendie puis à 'intervention des pompiers ;
Sur le quantum des réparations
Sur les dommages matériels :
M. [B] évalue dans son rapport le coût des travaux de réfection des locaux à la somme globale de 25.179,92 € HT et l'association Bourdon sollicite le paiement de la somme de 35.541,06 €, devis à l'appui ;
Or ces devis prévoient une rénovation complète des locaux, des réfections d'installation électrique et sanitaire, notamment, qui ne sauraient être pris intégralement en compte, alors que les locaux de l'association Bourdon étaient « en état d'usage » en 1992 et que leur remise à neuf à l'occasion d'un sinistre réalise un enrichissement pour l'association ;
La Cour retiendra donc comme justifié et strictement en relation avec les désordres imputables au syndicat et à l'Ecole du Chat un coût de réfection de 15.000 € pour l'ensemble des locaux, dont 30 % à la charge du syndicat des copropriétaires et 70 % à la charge de l'association École du Chat, les parties condamnées étant condamnées in solidum à l'égard de l'association Bourdon et au prorata de leurs parts de responsabilité dans leurs rapports respectifs ;
Sur le trouble de jouissance :
L'association Bourdon n'est pas fondée à faire état d'un trouble de jouissance d'une durée de cinq années, alors que son opposition à l'exécution de travaux de réfection pour lesquels le syndic avait passé dès le 14 septembre 2004, soit moins de dix-huit mois après le sinistre incendie, un ordre de service, est à l'origine essentielle de la persistance de son dommage passé cette date ; de surcroît cette opposition n'était pas même justifiée eu égard aux conclusions du rapport [V] qui valide sans réserves la solution adoptée par l'architecte [S] pour la modification du tracé de la canalisation EV ; quant aux paramètres avancés par l'association Bourdon pour évaluer sa perte de jouissance, valeur locative de la boutique, notamment, ils sont théoriques et peu adaptés à l'objet social caritatif d'une association de la loi de 1901à but non lucratif ;
Au regard de ces éléments, le trouble de jouissance de l'association Bourdon sera apprécié à la somme de 10.000 € qui sera supportée par le syndicat des copropriétaires à hauteur des 2/3, soit 6.666 € et d'1/3, soit 3.333 € pour l'association École du Chat, sans obligation in solidum entre eux à l'égard de l'association Bourdon, dès lors que le trouble de jouissance subi du fait du défaut de bâchage correct imputable au syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 est distinct de celui causé par le mauvais état des locaux au mois de juillet 2004 lors du départ de l'association École du Chat, qui ne justifiait que quelques semaines de travaux de remise en état ;
Le jugement sera donc réformé sur l'appréciation des parts de responsabilité et sur le quantum des indemnités allouées ;
Sur la demande d'injonction de travaux
Cette demande apparaît sans objet, le syndicat des copropriétaires exposant sans être contredit que les travaux ordonnés par le tribunal ont été effectués par la société TFN et facturés pour un montant de 1.177 € ;
Sur la garantie de la société Swisslife Assurance de Biens
La société Swisslife Assurance de Biens, assureur du syndicat des copropriétaires jusqu'au 1er décembre 2003 à ses dires, demande à la Cour d'écarter les demandes de réparation de l'association Bourdon comme nouvelles en cause d'appel et conteste devoir prendre en charge les condamnations in solidum prononcées contre le syndicat et l'association École du Chat, indiquant qu'elle n'est pas l'assureur de responsabilité dudit syndicat, alors que les préjudices dont fait état l'association Bourdon sont dus pour partie à la durée inusuellement longue d'un bâchage inefficace et pour partie à l'état déplorable des locaux après le départ de l'association École du Chat ;
Le syndicat des copropriétaires conteste la résiliation de la police d'assurance au 1er décembre 2003 et fait valoir que les désordres subis par les locaux de l'association Bourdon sont directement consécutifs au sinistre incendie à l'origine du bâchage de la courette ;
De première part, alors que, devant les premiers juges, l'association Bourdon ne recherchait la condamnation de M. [R] [S] qu'en ce qui concernait sa perte de jouissance, elle réclame en cause d'appel la condamnation in solidum de M. [R] [S] avec le syndicat des copropriétaires, la société Cabinet Maury Schwob et l'association École du Chat au paiement de la somme de 35.541,06 € au titre des travaux de réfection dans ses parties privatives ; cette demande, qui n'est ni l'accessoire ni le complément ni la conséquence des prétentions initiales et ne tend pas concrètement aux mêmes fins, sera écartée comme nouvelle en cause d'appel ;
De deuxième part, les seuls travaux de réfection strictement imputables à l'incendie pris en charge par l'assureur se limitant à 30 % de la somme de 15 000 €, soit 4 500 €, comme il a été dit, la garantie de la société Swisslife sera cantonnée à ce montant, les autres dommages subis par l'association Bourdon, notamment son préjudice de jouissance prolongé, étant imputables au défaut de bâchage de la courette et aux dégradations commises dans les lieux par l'association École du Chat, insusceptibles d'être couverts par une police d'assurance dommages ;
Le jugement sera donc réformé en ce qu'il a dit la société Swisslife Assurance de Biens tenue à garantir le syndicat sans plus de précisions ;
Sur la responsabilité et la garantie de la société Cabinet Maury Schwob
L'expert [B] estime que le syndic a manqué d'assurer une parfaite étanchéité permanente du bâchage mis en place dans l'attente des travaux définitifs, pour éviter les infiltrations d'eau pluviale constatées ;
Le syndicat des copropriétaires et la société Swisslife Assurance de Biens font également grief à la société Cabinet Maury Schwob d'avoir manqué, en dépit des lettres du 24 août 2004 et 1er janvier 2005 de l'association Bourdon l'alertant sur l'inondation des locaux en sous-sol, de prévoir des mesures conservatoires adaptées, ne faisant intervenir la société CLP que le 25 juillet 2006 puis le 16 novembre suivant afin de renforcer et remettre en place la bâche provisoire ; plus particulièrement, le syndicat des copropriétaires fait valoir que le quitus dont se prévaut le syndic est inopérant, faute d'information complète sur les mesures conservatoires donnée aux copropriétaires lors des assemblées générales ;
Ces moyens ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
En effet, le refus formel opposé par l'association Bourdon à toute pénétration dans ses locaux pour y effectuer des travaux conservatoires et réparatoires est à l'origine de la persistance des infiltrations d'eau de pluie, alors que la société Cabinet Maury Schwob établit avoir, dès le 14 septembre 2004, passé un ordre de service relatif à la réfection de la couverture du plancher haut, et ce n'est que le 29 décembre 2008, en réponse à une lettre officielle du syndicat des copropriétaires la mettant en demeure d'indiquer si elle maintenait son opposition à la réalisation des travaux de couverture, qu'elle a donné son accord pour cette réalisation ;
De surcroît, le syndicat des copropriétaires ne peut pertinemment reprocher à la société Cabinet Maury Schwob d'avoir celé les tenants et aboutissants du litige aux copropriétaires lors des assemblées générales, alors que le point n° 15 de l'ordre du jour de l'assemblée générale du 22 juin 2006 est intitulé « point sur le dossier sinistre incendie », que le conseil syndical se réunissait régulièrement pour suivre les investigations expertales et que le quitus a été derechef accordé au syndic lors des assemblées générales de copropriétaires de 2008 et de 2009 bien que le syndic fût déjà à cette date attrait à l'instance par l'association Bourdon en raison de ses fautes personnelles ;
Au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société Cabinet Maury Schwob et le syndicat des copropriétaires débouté de ses demandes contre celle-ci, tant au regard des condamnations prononcées sur les demandes de l'association Bourdon que du coût du coffrage mis en place sur la canalisation EV neuve ;
Sur la responsabilité et la garantie de M. [R] [S]
Le syndicat des copropriétaires met en cause la responsabilité de son architecte, M. [R] [S], assuré par la MAF, pour manquement à son devoir de conseil, lui reprochant de n'avoir pas attiré l'attention du syndic sur la nécessité de changer le tracé de la canalisation d'eaux vannes et sur l'obligation technique de la faire passer dans les locaux privatifs de l'association Bourdon, en tout état de cause, sur la nécessité de faire coffrer cette canalisation pour éviter toute gêne visuelle ;
Le tribunal a dit cette demande sans objet après avoir écarté les demandes indemnitaires présentées par l'association Bourdon à laquelle il a dénié tout préjudice en relation avec le remplacement de l'ancienne descente en fonte, posée en écharpe, par une neuve d'1,10 m ;
L'expert [V] a validé le changement de tracé après avoir estimé qu'aucun autre solution n'était techniquement possible ou envisageable ;
A défaut pour le syndicat des copropriétaires de rapporter la triple démonstration d'une faute de M. [R] [S] et d'un lien de causalité entre la faute alléguée et un préjudice réparable pour l'association Bourdon, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté ledit syndicat de son appel en garantie ;
Le syndicat des copropriétaires sera également débouté de sa demande de prise en charge par M. [R] [S] du coffrage de la canalisation EV neuve mise en place dans le local de l'association Bourdon ;
Les conditions d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne sont réunies au cas d'espèce au bénéfice d'aucune des parties ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Réforme le jugement dont appel en ce qu'il a :
- dit le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et l'association École du Chat responsables du trouble de jouissance subi par l'association Bourdon, selon le partage de responsabilité suivant :
' 30 % au syndicat des copropriétaires,
' 70 % à l'association École du Chat,
- dit que la société Swisslife Assurance de Biens devait sa garantie au syndicat des copropriétaires pour les condamnations prononcées contre lui,
- fixé l'indemnisation de l'association Bourdon à la somme de 33.541,06 € TTC, au titre des travaux de réfection dans les parties privatives, et à celle de 23.000 € au titre de son préjudice de jouissance pour une période de 30 mois comprise entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2006, avec intérêts au taux légal (le syndicat des copropriétaires étant tenu de régler la somme de 8.268,63 € TTC et l'association École du Chat celle de 25.272,43 € TTC au titre des travaux de réfection dans les parties privatives),
Statuant à nouveau de ces chefs,
Fixe les parts de responsabilité en relation avec le trouble de jouissance subi par l'association Bourdon à 2/3 à la charge du syndicat des copropriétaires et 1/3 pour l'association École du Chat,
Évalue le coût de réfection des locaux en relation avec les désordres imputables au syndicat des copropriétaires, d'une part, (défaut de bâchage correct), à l'association École du Chat, d'autre part (mauvais état des locaux), à la somme de 15.000 €,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et l'association École du Chat à payer cette somme à l'association Bourdon,
Dit que dans leurs rapports respectifs, le syndicat des copropriétaires sera redevable de 30 % de cette somme et l'association École du Chat de 70 %,
Fixe à la somme globale de 10.000 € le préjudice de jouissance de l'association Bourdon en relation avec les désordres,
Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à payer la somme de 6.666 € à l'association Bourdon, en fonction de sa part de responsabilité évaluée aux 2/3 de ce préjudice,
Condamne l'association École du Chat à payer à l'association Bourdon la somme de 3.333 € pour sa part de responsabilité évaluée à 1/3 dudit trouble de jouissance,
Dit irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de l'association Bourdon tendant à voir la société Swisslife Assurance de Biens condamnée in solidum avec le syndicat, l'association École du Chat et la société Cabinet Maury Schwob à lui payer la somme de 35.541,06 € au titre de la réfection de ses locaux,
Dit que la société Swisslife Assurance de Biens devra garantir le syndicat des copropriétaires de la seule condamnation au paiement de 30 % de la somme de 15.000 € soit 4 500 € mise à la charge de son assuré,
Confirme le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Dit sans objet la demande d'injonction de travaux pour l'avenir,
Rejette toute autre demande,
Dit que chacune des parties conservera à sa charge ses dépens d'appel, à l'exclusion de ceux exposés par M. [R] [S], la MAF et la société Cabinet Maury Schwob qui seront supportés in solidum par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], d'une part, par l'association École du Chat, d'autre part, par moitié chacun dans leurs rapports respectifs, et dit que ces dépens pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,