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18/03/2014 | FRANCE | N°10/10542

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 18 mars 2014, 10/10542


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 18 Mars 2014

(n° , 04 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10542



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Août 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section activités diverses RG n° 10/00092





APPELANTE

Madame [P] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne

assistée de Me

Nadia TIAR, avocat au barreau de PARIS, toque : G0513





INTIMÉE

SCP [H] [S] - [F] [B] - [E] [V], HUISSIERS DE JUSTICE ASSOCIES

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Charles ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 18 Mars 2014

(n° , 04 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10542

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Août 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section activités diverses RG n° 10/00092

APPELANTE

Madame [P] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne

assistée de Me Nadia TIAR, avocat au barreau de PARIS, toque : G0513

INTIMÉE

SCP [H] [S] - [F] [B] - [E] [V], HUISSIERS DE JUSTICE ASSOCIES

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Charles TORDJMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0783 substitué par Me Arielle TORDJMAN, avocat au barreau de PARIS

en présence de M. [F] [B], huissier gérant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine PORCHER, présidente, et Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claudine PORCHER, présidente

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Monsieur Guy POÎLANE, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [P] [S] a été embauchée le 1er septembre 1972 en qualité d'employée par Maître [I], huissier de justice à [Localité 2] auquel a succédé, en 1975, Maître [H] [S], frère de la salariée, en qualité de titulaire de cette étude et occupait en dernier lieu les fonctions de clerc aux procédures.

Le 6 janvier 2010, Madame [S] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail pour faits de harcèlement moral dont elle a été déboutée par jugement rendu le 30 août 2010.

Le 26 novembre 2010, Madame [S] a interjeté appel de cette décision.

Le 10 mai 2012, Madame [S], en arrêt de travail pour maladie depuis le 9 mars 2009, a été licenciée pour inaptitude professionnelle.

Elle invoque une dégradation du climat et de l'ambiance de travail à l'arrivée de Maître [B] et Maître [V], devenus associés respectivement en 2003 et 2006 et des faits de harcèlement moral générateurs d'un état dépressif médicalement constaté, la nullité de son licenciement pour inaptitude professionnelle trouvant son origine dans le harcèlement subi.

Elle demande d'infirmer le jugement déféré et de condamner la SCP [S]-[B] à lui payer :

- 9 261 € d'indemnité de préavis et 926,10 € de congés payés afférents

- 98 000 € d'indemnité pour préjudice résultant de la nullité du licenciement

- 10 283,33 € de rappel 13ème mois de février 2009 à juin 2012 et 1 028 € de congés payés afférents

- 3 000 € d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCP [S], [B] & [V] invoque les difficultés éprouvées par Madame [S] à accepter l'intégration et l'autorité des deux nouveaux associés et la mise en oeuvre de la modernisation de l'étude, que les faits allégués par la salariée ressortent du pouvoir normal de direction et d'organisation de l'employeur et concernent l'ensemble du personnel de l'étude et que la dépression de cette dernière remonte à l'année 2004 et trouve son origine dans une cause extra-professionnelle.

Elle demande de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner Madame [S] à lui payer une indemnité de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits et de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées à l'audience des débats.

SUR CE, LA COUR

Sur le harcèlement.

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L 1154 -1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Madame [S] reproche aux deux associés de l'Etude, Maître [B] et [V] :

- un comportement humiliant et dévalorisant constitué par des remarques désobligeantes ('il y a des coups de pied aux fesses qui se perdent', 'avez-vous été sage') attestant d'un défaut de considération inacceptable compte tenu de son ancienneté et de son âge,

- des mauvais traitements et mesures de rétorsion en multipliant des pratiques persécutrices témoignant d'un acharnement dirigé spécialement contre elle comme la suppression de la pause cigarette, le changement d'horaire de travail, le refus d'autorisation d'absence pour se rendre à l'hôpital pour un traitement, une attitude de défiance à son encontre,

- une impossibilité d'exécuter son travail et le non-respect de son contrat par le refus de lui fournir une imprimante en état de marche, une réorganisation de l'étude affectant son travail sans concertation préalable, une attribution de tâches sans rapport avec ses fonctions, son coefficient et sa qualification, une surcharge de travail, des pressions incessantes et une attitude systématiquement critique, une suppression illégale du 13ème mois,

- une dégradation progressive de son état de santé.

Elle produit notamment des courriers échangés avec son employeur, des attestations d'anciens collègues, de membres de sa famille et d'amis et des certificats médicaux.

Elle établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants qui, pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur fait valoir :

- que les propos rapportés à supposer même qu'ils aient été tenus et se soient adressés à la salariée sont anodins et en tous cas plus corrects et mesurés que ceux adressés par cette dernière à l'encontre d'un associé ('vous m'emmerdez'),

- que la suppression de la pause cigarette en milieu de matinée justifiée par les heures d'ouverture d'accueil du public et des raisons de sécurité concernait l'ensemble des salariés tout comme la modification des horaires de travail, que les déplacements pour consultation médicale intervenant pendant le temps de travail et au demeurant sans justificatifs sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'employeur,

- que tous les collaborateurs, salariés ou associés, impriment depuis 2003 sur des imprimantes réseau et multifonction réseau, que la réorganisation de l'étude a été décidée au cours d'une réunion des trois associés, que le clerc principal participait à la tâche importante de la gestion du répertoire des actes détachés qui a été retirée à Madame [S] en 2008 devant son refus persistant de l'accomplir, que la suppression du 13ème mois a concerné l'ensemble du personnel, que les menaces et pressions de Maître [B] à l'occasion de discussions sur un éventuel départ 'je ne peux plus attendre des mois, sinon je vais agir autrement' ne sont pas démontrées, que l'existence d'une surcharge de travail est en contradiction avec la faiblesse des actes réalisés par Madame [S] par rapport à ses collègues,

- que la dépression de Madame [S] est vraisemblablement liée au décès de sa mère dont elle était très proche et que l'étude a fait ses meilleurs efforts pour la reclasser dans de bonnes conditions suite à l'avis d'inaptitude de médecin de travail.

Il produit notamment les horaires du personnel, des attestations d'anciens salariés et de salariés en poste, des données statistiques et informatiques.

Il démontre que les faits matériellement établis par l'appelante sont justifiés par la mise en oeuvre d'une modernisation de l'entreprise, indispensable notamment dans le domaine informatique, d'une réorganisation du travail de l'ensemble du personnel, relevant du pouvoir de direction de l'employeur, apparemment mal vécue - parce que menée par deux jeunes associés peut-être de façon un peu trop rapide et autoritaire -, par des salariés en place depuis longtemps et, pour ce qui concerne Madame [S], par une salariée très impliquée compte tenu de son ancienneté, de sa compétence et de ses liens avec l'un des huissiers, dans la vie de l'étude et, par conséquent, par des éléments objectifs à tout harcèlement.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [S] de sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail pour faits de harcèlement moral et de rejeter la demande en nullité de son licenciement formée par cette dernière en cause d'appel.

Sur la demande au titre du 13ème mois.

En l'absence de mention d'un 13ème mois dans son contrat de travail et en l'état de la dénonciation d'un avantage (prime de 13ème mois) notifiée par l'employeur le 17 février 2009 à tous les salariés et prenant effet au mois de décembre 2009, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande formée par Madame [S] à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, .

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Déboute Madame [P] [S] de sa demande en nullité du licenciement et en rappel au titre du 13ème mois de février 2009 à juin 2012.

Condamne Madame [P] [S] aux dépens.

Dit n'y avoir lieu à allocation de somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/10542
Date de la décision : 18/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°10/10542 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-18;10.10542 ?
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