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13/03/2014 | FRANCE | N°12/01185

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 13 mars 2014, 12/01185


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 13 MARS 2014



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/01185



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2011 - Tribunal de Commerce de MELUN - RG n° 20102263





APPELANTE



SA BRED BANQUE POPULAIRE

ayant son siège [Adresse 1]



Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL,

avocat au barreau de PARIS, toque : D1119

Représentée par Me Aurélie PAUCK de la SCP MALPEL'Associés, avocat au barreau de MELUN





INTIME



Monsieur [F] [I] [B] [L]

Demeurant [Adresse 2]
...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 13 MARS 2014

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/01185

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2011 - Tribunal de Commerce de MELUN - RG n° 20102263

APPELANTE

SA BRED BANQUE POPULAIRE

ayant son siège [Adresse 1]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119

Représentée par Me Aurélie PAUCK de la SCP MALPEL'Associés, avocat au barreau de MELUN

INTIME

Monsieur [F] [I] [B] [L]

Demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Jean-Loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

Représenté par Me Georges SITBON de la SCP PEREZ SITBON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0198

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 décembre 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

La société Oxalys a été créée le 10 avril 2007 par M. [F] [L], qui en a pris la gérance, et avait pour objet l'exploitation d'un fonds de commerce de films, jeux vidéos, livres dans le centre commercial dit de « [1] » à [Localité 1].

Par actes des 18 juillet 2007 et 17 août 2007, la société Bred Banque Populaire (ci-après la société Bred) a accordé à la société Oxalys deux prêts d'un montant de 420 000 euros et 200 000 euros. M. [L] s'est porté caution solidaire, par actes du 30 avril 2007, de ces engagements à concurrence de 210 000 euros pour le prêt de 420 000 euros et de 100.000 euros pour le prêt de 200 000 euros.

En garantie du remboursement de ces prêts, la société Bred a inscrit un nantissement, suivant acte sous seing privé du 18 mars 2008, enregistré au SIE de Rouen Est le 21 mars 2008.

Par jugement du 31 mai 2010, le tribunal de commerce de Melun a prononcé la liquidation judiciaire de la société Oxalys.

Par lettre recommandée du 7 juillet 2010, la société Bred a mis en demeure M. [L] d'avoir à lui régler la somme de 281 188,76 euros en sa qualité de caution. M. [L] n'ayant procédé à aucun règlement, la Bred l'a assigné devant le tribunal de commerce de Melun en paiement des sommes dont elle s'estimait créancière.

Devant la tribunal, M. [L] a demandé que la procédure soit jointe à celles engagées contre lui par la Société Générale et par la société BNP Paribas et, subsidiairement, a conclu au débouté des demandes de la Bred en invoquant, en particulier, la disproportion de son engagement. La société Bred s'est opposée à la demande de jonction et a conclu à la condamnation de M. [L].

Par jugement rendu le 12 décembre 2011, le tribunal de commerce de Melun a :

- dit n'y avoir lieu à jonction ;

- débouté la société Bred de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions ;

- condamné la société Bred à payer à M. [L] la somme de 1.000 euros TTC sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a jugé que l'engagement de caution souscrit par M. [L] était, compte tenu de ses autres engagements à l'égard de la société BNP Paribas et de la Société Générale, manifestement disproportionné à ses biens et revenus et, en conséquence, a débouté la Bred de ses demandes en application de l'article L. 341-4 du code de la consommation.

Vu l'appel interjeté le 19 janvier 2012 par la société Bred contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées le 23 octobre 2012 par la société Bred, par lesquelles il est demandé à la Cour de:

- dire et juger que le tribunal de commerce de Melun n'a pas tiré les justes conséquences juridiques de l'absence de jonction entre les différentes affaires concernant M. [L] ;

- dire et juger que les contrats de cautionnement consentis par M. [L] ne constituaient pas, lors de leur conclusion, des engagements disproportionnés par rapport à ses revenus et à son patrimoine ;

- dire et juger que M. [L], en sa qualité de caution avertie, ne peut se prévaloir d'aucun manquement de la société Bred à son obligation de conseil ;

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande de jonction ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [L] de ses demandes sur le fondement d'un prétendu manquement à un devoir de conseil ;

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Melun du 12 décembre 2011 en ce qu'il a débouté la société Bred de ses demandes de condamnation en paiement à l'encontre de M. [L] en sa qualité de caution solidaire ;

Statuant à nouveau de ce chef,

- condamner M. [L] à payer à la société Bred la somme principale de 281.188,76 euros outre intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2010, date de la mise en demeure et jusqu'à complet paiement ;

En tout état de cause,

- ordonner la capitalisation des intérêts dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière en application de l'article 1154 du code civil ;

condamner M. [L] à payer à la société Bred la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Bred demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et de condamner M. [L], en sa qualité de caution, à lui payer les sommes de 84 028,96 euros et de 197.159, 80 euros, soit la somme totale de 281 188,76 euros, au titre des prêts de 200 000 euros et de 420 000 euros qu'elle avait consentis à la société Oxalys.

Elle soutient que le tribunal, alors qu'il avait refusé de joindre la présente procédure à celles opposant M. [L], en la même qualité de caution, à la Société Générale et à BNP Paribas, a pris en compte, à tort, l'ensemble des engagements de caution de l'intéressé. Elle fait valoir que le tribunal aurait dû, pour l'application de l'article L. 341-4 du code de la consommation, ne prendre en considération que les engagements souscrits à son égard, lesquels n'étaient pas manifestement disproportionnés aux biens et revenus de M. [L]. Enfin, elle se défend de tout manquement à son devoir de conseil, en rappelant que M. [L] avait connaissance de la situation financière de sa société en sa qualité de dirigeant de la société Oxalys, et que, par ailleurs, il avait exercé des fonctions de direction dans différentes enseignes de la grande distribution.

Par arrêt du 25 avril 2013, la Cour d'appel de Paris a déclaré irrecevables, pour avoir été déposées tardivement, les conclusions signifiées le 6 novembre 2012 par M. [L].

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures de l'appelante, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la jonction de la présente procédure avec celle opposant M. [L] à la société BNP Paribas

Le tribunal a rejeté la demande de M. [L] tendant à la jonction de la présente procédure avec celle l'opposant à la société BNP Paribas. L'appelante demande à la Cour de confirmer sur ce point le jugement entrepris.

Aux termes de l'article 367 du code de procédure civile, « le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble ».

Dans le cadre de la présente espèce, la Cour aura à dire si la société Bred a manqué à son devoir de conseil à l'égard de M. [L] et cette appréciation, qui met en jeu les seules relations entre ces parties, sera portée indépendamment des faits et moyens en cause dans la procédure opposant celui-ci à la société BNP Paribas. Elle devra, par ailleurs, déterminer si les engagements de caution de M. [L] étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus et elle dispose, dans le dossier de la procédure, des éléments relatifs à l'ensemble des engagements souscrits par l'intéressé. Dès lors, s'il existe un lien entre la présente procédure et celle opposant M. [L] à la société BNP Paribas, l'intérêt d'une bonne justice ne commande pas d'en ordonner la jonction.

Sur le manquement de la Bred à son devoir de conseil

Le tribunal a constaté, au vu des moyens et arguments des parties et des pièces qu'ils ont produites, que M. [L] avait exercé des fonctions de direction dans différentes enseignes de la grande distribution, qu'il avait connaissance de la situation financière de la société Oxalys puisqu'il en était le dirigeant et il a en jugé, en conséquence, qu'il devait « être qualifié de caution avertie » et ne pouvait « donc prétendre à un manquement de la SA Bred Banque Populaire à son obligation de conseil ».

Faute de moyens ou éléments de preuve nouveaux justifiant de remettre en cause la pertinence de ces motifs, la Cour les adopte et juge que l'appelante n'a pas manqué à son devoir de conseil à l'égard de l'intimé et, en conséquence, confirme le jugement.

Sur la disproportion des engagements souscrits par M. [L]

Il ressort des énonciations du jugement attaqué et des pièces produites par l'appelante que la société Oxalys a souscrit auprès de la Bred deux prêts d'un montant de 420.000 euros et 200 000 euros pour le financement des travaux de gros 'uvre et d'agencement d'un fonds de commerce à créer dans le centre commercial dit de « [1] » à [Localité 1]. Chacun de ces contrats de prêt mentionnait que, par ailleurs, la Société Générale et BNP Paribas avaient accordé à cette société d'autres prêts pour le financement de cette même opération. Par un seul et même acte en date du 18 mars 2008, le fonds de commerce de la société Oxalys a été nanti au profit de ces trois établissements bancaires.

M. [L] a garanti chacun de ces prêts en apportant sa caution personnelle et solidaire et c'est ainsi qu'il a souscrit deux engagements de caution à l'égard de la Bred, d'un montant de 100 000 euros et 210 000 euros, par actes du 30 avril 2007. Ces engagements, cependant, n'étaient à cette date qu'hypothétiques et sans objet, puisque les prêts cautionnés n'ont été consentis qu'ultérieurement, par contrats en date du 18 juillet 2007 et 17 août 2007. C'est donc à ces deux dates qu'il convient de se placer pour déterminer si les engagements souscrits par M. [L] étaient disproportionnés à ces biens et à ses revenus, cette appréciation devant tenir compte de l'ensemble des engagements souscrits par M. [L].

Monsieur [L] ayant déjà cautionné à hauteur de 399 100 euros et 384 325 euros les prêts consentis par la Société Générale et la BNP, ses cautionnements de 210 000 euros et 100 000 euros souscrits à l'égard de l'appelante ont porté à 1 093 425 euros le total de ses engagements.

Selon l'avis d'imposition versé aux débats par l'intimé (pièce n° 13/1), le revenu imposable de M. [L] s'est élevé à 303 176 euros en 2005. Cette information, cependant, ne renseigne pas sur le montant de ses revenus à la date de ses engagements de caution, c'est-à-dire en 2007, alors qu'il avait quitté l'emploi salarié qu'il occupait précédemment. Aussi la Cour retiendra-t-elle les indications concordantes figurant dans les jugements rendus par le tribunal de commerce dans les procédures opposant M. [L] à la Société Générale et à BNP Paribas et versés aux débats par l'appelante (pièces n° 16 et 17), selon lesquelles les revenus de l'intéressé s'élevaient à 4 500 euros par mois. Il résulte par ailleurs du dossier et des énonciations de l'arrêt attaqué que la valeur nette du patrimoine immobilier de M. et Mme [L], époux communs en biens, s'élevait, déduction faite du passif au titre d'un prêt immobilier, à 618 185 euros, et celle de leur patrimoine mobilier à 16 400 euros. Le montant total des engagements de caution souscrits par M. [L] s'élevant, comme la Cour l'a relevé plus haut, à 1 093 425 euros, donc à une somme bien supérieure à la valeur de ses actifs immobiliers et mobiliers, c'est à juste titre que le tribunal a jugé qu'il était manifestement disproportionné aux biens et revenus de M. [L], dont il n'est pas démontré, par ailleurs, que son patrimoine lui permettait de faire face à son obligation lorsqu'il a été actionné par la Bred en sa qualité de caution. Le jugement sera donc confirmé.

Sur les frais irrépétibles

Il n'apparaît pas justifié, au regard des éléments du dossier, de prononcer de condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

DIT n'y avoir lieu à jonction ;

CONFIRME le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

REJETTE toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties;

CONDAMNE la société Bred Banque Populaire aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

E.DAMAREYC.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/01185
Date de la décision : 13/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°12/01185 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-13;12.01185 ?
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