RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 13 mars 2014 après prorogation
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/04860
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Février 2011 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 10/04502
APPELANTE
Madame [T] [Q]
[Adresse 1]
non comparante, représentée par Me Hélène GORKIEWIEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0563
INTIMEE
SA VINCI PARK SERVICES
[Adresse 2]
représentée par Me Denis PELLETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R006
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Mme [T] [Q] à l'encontre d'un jugement prononcé le 22 février 2011 par le conseil de prud'hommes de Paris ayant statué sur le litige qui l'oppose à la société VINCI PARK SERVICES sur ses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.
Vu le jugement déféré qui
- a débouté Mme [T] [Q] de toutes ses demandes,
- a débouté la société VINCI PARK SERVICES de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- a condamné Mme [Q] aux dépens.
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
Mme [T] [Q], appelante, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la cour
- de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- de condamner la société VINCI PARK SERVICES à lui payer les sommes suivantes :
- 69 393,84 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 17 348,46 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat,
- 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement au devoir d'information et de conseil sur les garanties de prévoyance et leurs conditions de portabilité,
- 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- d'enjoindre à la société VINCI PARK SERVICES de lui remettre la notice d'information relative au contrat de prévoyance,
- d'ordonner l'exécution provisoire.
La société VINCI PARK SERVICES, intimée, conclut à la confirmation du jugement et au débouté de Mme [Q] de l'ensemble de ses demandes.
CELA ÉTANT EXPOSÉ
Après plusieurs contrats d'intérim effectués au sein de la société G.T.M.D.S. à compter du 8 avril 1999, Mme [Q] a été engagée par cette dernière pour une durée indéterminée à compter du 8 juillet 1999 en qualité de comptable.
Le contrat de travail était soumis à la convention collective des entreprises de travaux publics.
A compter du 1er janvier 2003, le contrat de travail a été transféré au sein de la société SOGEPARC EXPLOITATION appartenant au groupe VINCI. Mme [Q] devenait comptable unique (catégorie agent de maîtrise).
La convention collective applicable à la relation de travail est devenue celle des services de l'automobile.
Courant 2003, la société SOGEPARC EXPLOITATION est devenue VINCI PARK SERVICES.
En dernier lieu, le salaire mensuel brut de Mme [Q] était de 2 674,11 €.
Mme [Q] a été en arrêt de travail du 4 juillet au 19 août 2007, puis du 20 septembre au 4 novembre 2007, puis du 10 novembre 2007 au 2 mars 2009. Elle a repris le travail le 3 mars 2009 et a été de nouveau en arrêt maladie du 4 au 16 mars 2009.
Le 3 mars 2009, lors de la première visite de reprise, le médecin du travail a émis l'avis que Mme [Q] était "apte à ce poste dans une autre filiale du groupe VINCI".
Le 17 mars 2009, à l'issue de la seconde visite médicale de reprise, Mme [Q] était déclarée "Inapte au poste de comptable unique chez VINCI PARK et à tout autre poste chez VINCI PARK - Apte à ce poste dans une autre entreprise".
Le 7 mai 2009, la société VINCI PARK SERVICES convoquait Mme [Q] pour le 19 mai 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Mme [Q] ne se présentait pas à cet entretien.
Le licenciement était prononcé par lettre du 16 juin 2009 pour inaptitude médicalement constatée et impossibilité de reclassement.
Le préavis, non effectué, était payé à la salariée.
Le 2 avril 2010, Mme [Q] saisissait le conseil de prud'hommes qui a rendu le jugement déféré.
Le 5 mai 2010, la CRAM d'Ile de France informait Mme [Q] qu'une pension d'invalidité temporaire de 2ème catégorie lui était attribuée à compter du 1er avril 2010.
SUR CE
Sur le licenciement
Mme [Q] soutient que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement ; qu'alors que le médecin du travail avait estimé qu'elle serait apte seulement à un poste de comptable dans un autre établissement ou une autre filiale du groupe VINCI, l'employeur a recherché des possibilité de reclassement au sein même de VINCI PARK ; qu'il lui a proposé des postes ne correspondant pas à ses compétences et à sa qualification ; que les deux seules offres conformes aux prescriptions de la médecine du travail (poste d'assistante de trésorerie chez ENTREPOSE CONTRACTING et de comptable immobilisations chez COFIROUTE) étaient imprécises et/ou ne correspondaient pas à son profil ; qu'elle a donc été contrainte d'effectuer ses propres recherches et a constaté qu'il existait de nombreux postes libres au sein des sociétés du groupe ; qu'eu égard à l'importance du groupe (13 sociétés organisées en quatre pôles, 193 000 salariés), l'employeur n'a pas loyalement et sérieusement recherché des solutions de reclassement ; que l'employeur; qui avait, avant les visites médicales de reprise, manifesté l'intention de rompre le contrat de travail, n'a en réalité jamais eu l'intention de la reclasser.
La société VINCI PARK SERVICES répond que son obligation de reclassement se limitait strictement aux sociétés du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettaient la permutation de tout ou partie du personnel ; que le groupe VINCI est organisé en deux pôles : le pôle 'concessions' au sein duquel se trouve VINCI PARK et qui compte moins de 16 000 salariés et le pôle 'contracting' ; qu'elle a néanmoins étendu ses recherches à l'ensemble du groupe ; qu'elle n'a nullement proposé à Mme [Q] des postes au sein de VINCI PARK ne correspondant pas à ses compétences et à sa qualification ; qu'elle a, en effet, dans un premier temps établi une liste de postes disponibles au sein du groupe en soulignant que le plus grand nombre - des postes d'agent d'exploitation - ne correspondaient pas aux conclusions du médecin du travail ; que dans un second temps, elle a identifié ceux qui pourraient être conformes ; que c'est ainsi qu'elle a transmis à Mme [Q] une offre précise et détaillée pour un poste d'assistante de trésorerie au sein de ENTREPOSE CONTRACTING ; que Mme [Q] ne maîtrisant pas l'anglais, sa candidature n'a pas pu être retenue ; qu'elle a donc poursuivi ses recherches et transmis à la salariée une offre de comptable immobilisations chez COFIROUTE ; qu'une candidature interne a toutefois été privilégiée ;
Qu'un poste d'assistante de trésorerie chez EUROVIA a ensuite été identifié mais qu'il était pourvu lorsque Mme [Q] a manifesté son intérêt ; qu'il en était de même du poste de comptable fournisseurs au sein de SOGEA SUD OUEST HYDRAULIQUE ; que l'obligation de reclassement est une obligation de moyens ; qu'elle n'a fait preuve d'aucune précipitation pour licencier Mme [Q], deux mois ayant été consacrés aux recherches de reclassement entre l'avis d'inaptitude et le licenciement ; qu'elle n'a nullement manifesté son intention de licencier Mme [Q] au début de l'année 2009.
Sur la qualification
En application de l'article L. 1226-2 du code du travail, lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment en raison d'une maladie ou un accident du travail non professionnel, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; l'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Il appartient à l'employeur de justifier des démarches qu'il a effectuées pour parvenir au reclassement du salarié déclaré inapte. L'employeur doit démontrer qu'il a tenté loyalement et sérieusement de reclasser la salariée et de l'impossibilité de tenter ce reclassement.
En l'espèce, il ressort des pièces fournies que par LRAR du 16 mars 2009, l'employeur a adressé à Mme [Q] une liste de 15 postes vacants, essentiellement d'agent d'exploitation, au sein de VINCI PARK - et ne correspondant donc pas, comme il le souligne lui-même dans son courrier, aux conclusions du médecin du travail -, ainsi qu'un poste offert en 'mobilité groupe' d'assistante de trésorerie, disponible au sein de la société ENTREPOSE CONTRACTING ; que par lettre du 26 mars 2009, Mme [Q] a indiqué que les postes au sein de VINCI PARK ne correspondant pas aux préconisations du médecin du travail, elle ne pouvait raisonnablement pas y donner suite et a sollicité des informations complémentaires (rémunération, durée du travail, statut) relativement au poste chez ENTREPOSE CONTRACTING en précisant qu'il avait retenu toute son attention ; que par LRAR du 30 mars 2009, l'employeur a indiqué 'Nous avons bien reçu votre fax daté du 26 mars 2009 (...) dans lequel vous nous informez ne pas être intéressé par les propositions de reclassement au sein de VINCI PARK. Nous en prenons bonne note' et apporté diverses informations complémentaires sur le poste disponible chez ENTREPOSE CONTRACTING, précisant notamment qu'il nécessitait la maîtrise de l'anglais.
Il apparaît ensuite que par courrier RAR du 6 avril 2009, Mme [Q] a écrit à l'employeur qu'elle avait 'trouvé' un poste en CDI d'assistante de trésorerie au sein de EUROVIA pour lequel elle indiquait poser sa candidature ; qu'un poste de comptable immobilisations chez COFIROUTE à [Localité 2] a été proposé à Mme [Q] par courriel du 16 avril 2009 comportant une fiche de poste et les coordonnées d'un contact ; que par courriel du 17 avril 2009, la salariée a demandé des informations complémentaires sur ce poste et, par ailleurs, appelé de nouveau l'attention de l'employeur sur le poste disponible chez EUROVIA trouvé 'via internet' ; que par courriel du même 17 avril 2009, l'employeur a indiqué à Mme [Q] que l'offre chez EUROVIA avait été retirée de la base mobilité et que l'entreprise concernée lui avait indiqué par téléphone qu'un candidat avait déjà été choisi ; que la société VINCI PARK SERVICES a néanmoins, par courriel du 20 avril 2009, adressé le C.V. de Mme [Q] à EUROVIA, laquelle a confirmé le jour même que le poste était pourvu.
Dans un courrier RAR à la salariée en date du 16 juin 2009, la société VINCI PARK SERVICES indique que Mme [Q] a candidaté pour le poste chez EUROVIA'plus de 3 semaines après' qu'elle lui ait transmis cette offre.
Mais elle n'est pas en mesure de prouver que c'est elle qui a effectivement proposé ce poste à Mme [Q] en mars 2009, les éléments fournis par la salariée étant au contraire de nature à corroborer la thèse de cette dernière selon laquelle c'est celle-ci qui a trouvé le poste sur internet et l'a signalé à l'employeur.
De ces éléments, il ressort, d'une part, que la société VINCI PARK SERVICES a, contrairement à ce qu'elle affirme, proposé délibérément à Mme [Q] des postes au sein de VINCI PARK ne correspondant pas aux préconisations du médecin du travail et négligé de lui soumettre une proposition pour un poste chez EUROVIA susceptible de lui convenir et, d'autre part, que ce poste était pourvu quand la candidature de Mme [Q] a été transmise à l'entreprise concernée, deux semaines après que la salariée se soit déclarée intéressée.
En outre, la société VINCI PARK SERVICES ne justifie pas qu'elle a effectivement effectué des recherches dans l'ensemble des sociétés du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, notamment au sein des entités du pôle 'concessions' qui regroupe, selon ses explications, outre VINCI PARK, les sociétés AUTOROUTES DU SUD DE LE FRANCE, ESCOTA et VINCI CONCESSIONS.
Dans ces conditions, la société VINCI PARK SERVICES n'a pas fait preuve du sérieux et de la loyauté requis, spécialement d'une entreprise de cette taille, dans la recherche de solutions de reclassement pour Mme [Q] qui bénéficiait d'une ancienneté de dix années.
Le licenciement ne peut donc reposer sur une cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, de l'ancienneté de Mme [Q] au moment de la rupture (dix ans), de son âge à ce même moment (52 ans), de sa rémunération, des circonstances de la rupture et de ses conséquences, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies révélant notamment que Mme [Q] perçoit une pension d'invalidité de 1 215,71 € et un complément versé au titre de la prévoyance souscrite par l'employeur, il y a lieu de lui allouer la somme de 32 000 € sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail.
Sur l'obligation de sécurité à la charge de l'employeur
Mme [Q] soutient que ses conditions de travail se sont progressivement dégradées suite à son affectation dans l'équipe de M. [M] à la fin de l'année 2003 ; que fin 2003, suite à une réorganisation, son poste a été supprimé et elle a intégré l'équipe de M. [M], chef comptable, contre la volonté de ce dernier et de celle de Mme [G], assistante chef comptable ; qu'elle a alors fait l'objet 'd'une véritable mise à l'écart accompagnée d'un mépris total par ses deux supérieurs hiérarchiques et collègues' (manifestation d'hostilité et de défiance, surcharge de travail sans moyens suffisants pour y faire face, instructions contradictoires, absence de consignes, reproches injustifiés quant à ses absences, privation de téléphone pendant une semaine, déménagement de ses affaires pendant un arrêt de travail pour maladie, installation dans un bureau exigu) ; qu'il s'en est suivi une détérioration de son état de santé (syndrome anxio-dépressif ) qui a conduit à son inaptitude à tout poste dans l'entreprise ; que bien que rapidement et régulièrement averti de la situation, l'employeur n'a jamais mené la moindre enquête ni donné aucune suite à ses alertes et à sa demande de mutation formulée en décembre 2007.
La société VINCI PARK SERVICES répond, en substance, que les accusations de Mme [Q] ne sont pas justifiées ; qu'en réalité, Mme [Q] infligeait à ses collègues 'un comportement qui n'était pas de nature à faciliter son intégration' ; que la charge de travail était répartie équitablement, Mme [Q] n'étant chargée que de la comptabilité d'une seule société ; que les propos et comportements dénoncés ne sont pas établis ; que le déménagement des bureaux avait été programmé à l'avance ; que le lien de causalité entre le syndrome anxio-dépressif constaté par son médecin et ses conditions de travail n'est pas établi ; que l'employeur a toujours répondu aux préoccupations de la salariée ; que des rendez vous ont été accordés à Mme [Q] début décembre 2007 et début avril 2009 ; que le médecin du travail n'a présenté aucune demande de mutation de la salariée.
Mme [Q] verse aux débats, notamment :
- un courriel à Mme [S] du 10 mars 2008 dans lequel elle énonce les difficultés qu'elle rencontre dans son travail (mauvais accueil dans l'équipe de M. [M] fin 2003 ('si j'ai eu ce poste c'était parce que j'étais pistonnée mais que je n'avais pas les qualités pour l'assumer, j'étais nulle etc etc'), alourdissement de sa charge de travail sans aide, mise en cause de ses capacités ('toujours des sous entendus non explicites, que j'abusais, que je n'avais pas grand chose à faire et que je grossissais fortement les problèmes que je pouvais rencontrer'), non prise en compte de ses doléances, rudesse verbale de M. [M] ('j'ai demandé (...) pourquoi toutes les autres équipes avaient embauché un jeune pour le mois de juillet sauf nous ' Il m'a répondu en haussant les épaules, exaspéré, qu'on en avait pas besoin (...) Il s'est énervé c'était quoi cette histoire de classement, il suffit d'ouvrir un classeur, cela demande 2 secondes, et si je passais moins de temps à parler à la machine à café (...)'), reproches infondés quant à ses congés, privation momentanée de matériel (téléphone, non branchement de son imprimante au réseau), reproche relatifs à sa tabagie, agressivité de ses collègues,
- un certificat médical du Dr [U], médecin traitant, du 29 février 2008, qui indique que Mme [Q] présente 'un syndrome anxio-dépressif important semble-t-il en rapport avec des gros problèmes relationnels à son travail',
- un certificat médical du Dr [C] de l'unité de pathologie professionnel du CHI de [Localité 1] du 8 avril 2008 indiquant que Mme [Q] présente 'un syndrome anxiodépressif réactionnel, semble t-il, selon ses dires, à ses conditions de travail', que 'l'idée de reprendre le travail déclenche chez elle des bouffées d'angoisse majeure'.
L'employeur verse, de son côté, l'attestation de Mme [P], directrice de la comptabilité et de la consolidation de VINCI PARK SERVICES, qui indique que depuis son entrée dans la société, Mme [Q] avait 'quelques soucis relationnels avec certains de ses collègues, liés à une certaine agressivité et spontanéité qui lui posaient problème', qu'ainsi, alors qu'elle fumait, elle ouvrait sa fenêtre mais refusait de fermer sa porte si bien que ses collègues'devaient soit se cloîtrer dans leurs bureaux, soit accepter d'avoir froid', ce 'qui a pu induire un sentiment de mise à l'écart' ; que Mme [Q] avait des difficultés d'ordre personnel (dissensions familiales, problèmes de santé de sa fille, incendie de son véhicule, harcèlement de voisins) ; que Mme [Q] avait à gérer une seule société composée de 36 parcs, ce qui présentait l'avantage de n'avoir à établir qu'un seul jeu d'états financiers, une seule liasse de consolidation, une seule liasse fiscale, et une seule déclaration de TVA', que son remplaçant a eu à gérer la même société plus une autre ; que Mme [Q] disposait d'une imprimante individuelle ; qu'il y avait une seule imprimante en réseau par service.
Il n'est pas contesté que Mme [Q] a été reçue dès le 6 décembre 2007 par le directeur financier pour un rendez vous qu'elle a sollicité le 3 décembre 2007 afin d'évoquer ses difficultés.
Il ressort de ces éléments que Mme [Q] ne démontre pas que l'employeur a méconnu à son égard son obligation de sécurité, étant observé que les griefs formulés ne sont étayés que par le courriel précité du 10 mars 2008 rédigé par la salariée elle-même alors que les certificats médicaux, qui constatent la dégradation de son état de santé et font état de ses doléances à l'encontre de son employeur, se gardent à juste raison d'imputer avec certitude cette dégradation aux conditions de travail.
Mme [Q] sera déboutée de sa demande et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur l'obligation de conseil et d'information à la charge de l'employeur quant aux garanties de prévoyance et leur portabilité
Mme [Q] fait valoir que ce n'est que le 28 septembre 2009 que l'employeur l'a informée des conditions de maintien des garanties de couvertures complémentaires frais de santé et prévoyance résultant de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 ; qu'elle a immédiatement fait savoir à l'employeur qu'elle entendait adhérer à cette garantie et lui a adressé un chèque correspondant au montant de sa quote-part ; que cependant, la société VINCI PARK SERVICES, malgré ses multiples relances, ne lui a jamais remis la notice d'information de la prévoyance et est restée inerte face à ses difficultés, engendrant un retard dans le versement des sommes dues et un préjudice financier important ; que ce n'est que lors de l'audience de conciliation du conseil de prud'hommes en juin 2010 qu'elle a obtenu un commencement d'information, à l'exclusion toutefois de la notice légale d'information ; que ce manque d'information continue à engendrer des conséquences préjudiciables s'agissant de la revalorisation de sa rente pour incapacité ; que l'employeur a également omis de transmettre les documents nécessaires à l'organisme de prévoyance pour lui permettre de percevoir les compléments de salaire et rente ; que ce n'est qu'en février 2011 qu'elle a pu percevoir de l'organisme de prévoyance les rappels de compléments de salaires et de rente qui lui étaient dus.
La société VINCI PARK SERVICES répond qu'elle a remis à Mme [Q] une lettre-avenant à la notice d'information établie par l'assureur GENERALI, à savoir une notice d'information actualisée ainsi qu'un résumé des conditions particulières ; que ces documents permettaient à Mme [Q] de connaître les conditions dans lesquelles elle serait indemnisée ; que par ordonnance du 12 juillet 2010, le juge départiteur a d'ailleurs estimé que l'employeur avait satisfait à son obligation de communication des éléments d'information afférents au régime de prévoyance ; que Mme [Q] n'a plus sollicité la notice d'information devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes ; que Mme [Q] a été informée du changement d'assureur ; qu'il lui appartenait de transmettre au nouvel assureur les documents nécessaires au versement des prestations.
Par lettre du 28 septembre 2009, la société VINCI PARK SERVICES a informé Mme [Q] des conditions de maintien des garanties de couvertures complémentaires frais de santé et prévoyance en application de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 modifié par l'avenant n° 3 du 18 mai 2009.
En application de l'article 1 de cet accord, la notice d'information fournie par l'organisme assureur, qui mentionne les conditions d'application de la portabilité, doit être remise par l'employeur au salarié.
En l'espèce, l'employeur ne justifie pas avoir transmis à Mme [Q] cette notice ou les documents qui, selon lui, en tiennent lieu - à savoir la lettre avenant et le résumé des dispositions particulières qu'il verse aux débats -, avant le 21 juin 2010, date de l'audience de conciliation du conseil de prud'hommes. Mme [Q] lui avait pourtant adressé plusieurs courriers pour demander ces éléments d'information (cf. courriers des 12 janvier, 25 février; 29 avril et 21 mai 2010) que lui-même détenait depuis le mois d'octobre 2009 (courrier de GENERALLI du 15 octobre 2009).
Mme [Q] ne justifie pas, en revanche, que soit imputable à l'employeur le retard qu'elle déplore dans le versement des sommes qui lui étaient dues.
Le retard mis par l'employeur dans la communication à la salariée d'informations qu'elle sollicitait légitimement a nécessairement causé à l'intéressée un préjudice qui sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts. Le jugement de première instance sera réformé en ce sens.
Il n'y a pas lieu, en revanche, d'ordonner la remise de la notice demandée, les documents tardivement transmis par l'employeur comportant manifestement toutes les éléments nécessaires à l'information de Mme [Q].
Sur les intérêts
Les dommages et intérêts alloués porteront intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
La société VINCI PARK SERVICES qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, les dispositions prises les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
La somme qui doit être mise à la charge de la société VINCI PARK SERVICES au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Mme [Q] peut être équitablement fixée à 3 000 €.
Sur l'exécution provisoire
Le pourvoi en cassation ouvert contre le présent arrêt n'ayant pas d'effet suspensif, il n'y a lieu de prononcer l'exécution provisoire.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme partiellement le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de Mme [Q] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la société VINCI PARK SERVICES à payer à Mme [Q] les sommes suivantes :
- 32 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance par l'employeur de son obligation de conseil et d'information quant aux garanties de prévoyance et leur portabilité,
Dit que ces sommes produiront des intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance,
Condamne la société VINCI PARK SERVICES aux dépens de première instance,
Conforme le jugement déféré pour le surplus,
Y ajoutant,
Condamne la société VINCI PARK SERVICES aux dépens d'appel et au paiement à Mme [Q] de la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le Greffier,Le Président,