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06/03/2014 | FRANCE | N°13/08130

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 06 mars 2014, 13/08130


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 06 MARS 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08130



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2011000686





DEMANDERESSES AU CONTREDIT





OBB PRODUKTION GMBH

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 12]

AUTRICHE



RAIL CARGO AUSTRIA AG

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 12] AUTRICHE



Représentées par Me Monique STENGEL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0895



OBB INFRASTRUKTUR

[Adresse 12]

[...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 06 MARS 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08130

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2011000686

DEMANDERESSES AU CONTREDIT

OBB PRODUKTION GMBH

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 12] AUTRICHE

RAIL CARGO AUSTRIA AG

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 12] AUTRICHE

Représentées par Me Monique STENGEL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0895

OBB INFRASTRUKTUR

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 12] AUTRICHE

Représentée par Me Brigitte VICTOR-GRANGER, avocat au barreau de Paris, toque : C2176

DÉFENDEURS AU CONTREDIT

SAS RENAULT

[Adresse 1]

[Localité 8]

TOKIO MARINE EUROPE INSURANCE (TMEI)

[Adresse 5]

[Localité 6]

AXA CORPORATE SOLUTIONS

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentés par Me Rozenn LOPIN du PUK CLYDE & CO LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : P0429

SOCIETE DE TRANSPORTS DE VEHICULES AUTOMIBILES (STVA)

[Adresse 7]

[Localité 5]

ALLIANZ IARD

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentées par Me Philippe LEONARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E1526

ZURICH INSURANCE PUBLIC LIMITED COMPANY

[Adresse 10]

[Localité 9]

Représentée par Me Béatrice DESHAYES, avocat au barreau de PARIS, toque : R188

substitué par Me Anne PEIGNÉ

COMPAGNIE HELVETIA

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Alexandre GADOT de la SCP DBG, avocat au barreau de PARIS, toque : P0174

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Virginie FARKAS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

SA SOGEEFER

[Adresse 9]

[Localité 1]

SA GENERALI ASSURANCES

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentées par Me Carine DEPRÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : R061

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Frédéric CHARLON, Président de chambre

Mme Evelyne LOUYS, Conseillère

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Frédéric CHARLON, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

ELEMENTS DU LITIGE':

La société Renault, dont les co-assureurs sont la société Tokio Marine Europe Insurance (TMEI) et la société AXA Corporate Solutions Assurances (AXA), avait confié le transport ferroviaire de 208 véhicules automobiles entre la Roumanie et la France à la Société de Transports de Véhicules Automobiles (STVA), qui avait pour assureurs, selon la nature des risques, la société Allianz IARD (Allianz), la société Zurich Insurance Public Limited Company (Zurich) et la société Helvetia Compagnie Suisse d'Assurances (Helvetia).

La société Sogeefer, assurée par la société Generali, était chargée de l'entretien des wagons de STVA.

Pour réaliser le transport de ces véhicules, STVA s'était substituée à l'établissement public Société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF) qui avait chargé la société Rail Cargo Austria AG (RCA) des opérations de transport ferroviaire sur le territoire autrichien.

L'infrastructure ferroviaire située sur le territoire autrichien était gérée et entretenue par la société Österreichische Bundesbahnen Infrastruktur AG (Öbb Infrastruktur) et la locomotive qui tractait le convoi en Autriche se trouvait sous la responsabilité de la société Österreichische Bundesbahnen Produktion GmbH (Öbb Produktion).

Le 16 juin 2010 le train transportant les véhicules de Renault déraillait en Autriche et 201 d'entre eux étaient détruits ou endommagés si bien que TMEI et AXA ont versé à leur assuré Renault la somme de 1.643.227,65 euros à titre d'indemnités.

Le 1er juin 2011 Renault a assigné STVA et son assureur la société Allianz ainsi que RCA devant le tribunal de commerce de Paris, pour obtenir l'indemnisation de son préjudice qu'elle évaluait à la somme de 1.695.442,29 euros, Helvetia, TMEI et AXA étant intervenus volontairement à cette instance principale.

Devant le tribunal de commerce de Paris STVA et Allianz ont appelé en garantie RCA, Öbb Infrastruktur, Öbb Produktion, Zurich, Sogeefer et Generali, puis Zurich a assigné en garantie RCA, Öbb Infrastruktur, Öbb Produktion, Sogeefer et Generali, enfin RCA et Öbb Produktion ont assigné en garantie la SNCF, STVA, Allianz, Zurich, Sogeefer et Generali.

RCA et Öbb Produktion ont soulevé une exception d'incompétence au profit des juridictions autrichiennes et Öbb Infrastruktur a soulevé une exception d'incompétence au profit de tribunal de commerce de Vienne (Autriche).

Par jugement du 31 janvier 2013 le tribunal de commerce de Paris a notamment':

déclaré irrecevable l'exception d'incompétence de RCA et de Öbb Produktion,

- débouté Öbb Infrastruktur de son exception d'incompétence formée à l'égard de la société Helvetia,

- dit être territorialement compétent pour connaitre des demandes dirigées par la société Helvetia contre Öbb Infrastruktur,

- dit mal-fondée l'exception d'incompétence soulevée par Öbb Infrastruktur à l'encontre de STVA, Allianz, Zurich, SNCF, Sogeefer et Generali,

- dit être territorialement compétent pour connaitre des demandes dirigées par STVA, Allianz, Zurich, SNCF, Sogeefer et Generali à l'encontre de Öbb Infrastruktur,

- réservé les dépens.

Öbb Produktion et RCA ont formé un contredit contre ce jugement le 13 février 2013 et demandent d'infirmer la décision du tribunal de commerce et de déclarer la juridiction française territorialement incompétence au profit des juridictions autrichiennes.

Öbb Infrastruktur a aussi formé contredit de cette même décision le 15 février 2013 et demande l'infirmation du jugement, de dire que le tribunal de commerce de Paris est incompétent et de renvoyer les parties à se mieux pourvoir devant le tribunal de commerce de [Localité 12] (Autriche).

Renault, TMEI et AXA demandent la confirmation du jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître des demandes et elles sollicitent la condamnation de RCA à leur verser la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

STVA et Allianz concluent à l'irrecevabilité des prétentions de RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur, à la confirmation de la décision du tribunal de commerce de Paris'; elles réclament la condamnation solidaire de ces trois parties à payer à STVA la somme de 3.000 euros et à Allianz la somme de 3.000 euros en remboursement de leurs frais irrépétibles.

La SNCF demande de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris et la condamnation in solidum, ou l'un à défaut de l'autre, de RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur à lui verser la somme de 3.000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Sogeefer et Generali concluent à la confirmation de la décision de première instance et demandent qu'en toute hypothèse RCA et Öbb Produktion soient déclarées forcloses à se prévaloir de l'incompétence du tribunal de commerce de Paris et de dire que Öbb Infrastruktur est mal fondée en son contredit enfin, Sogeefer et Generali réclament l'allocation de la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à la charge de chacune des demanderesses au contredit.

Zurich demande la confirmation de la décision du tribunal de commerce de Paris et la condamnation in solidum de RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur au paiement de la somme de 30.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Helvetia conclut à la confirmation de la décision de première instance et à la condamnation solidaire de RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur au paiement de la somme de 3.000 euros pour les frais de procédure.

SUR QUOI LA COUR ;

Sur la jonction des instances engagées sur contredit par Rail Cargo Austria, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur

Considérant que les sociétés RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur ont chacune formé un contredit de compétence contre la décision rendue par le tribunal de commerce de Paris le 31 janvier 2013'et qu'il existe entre ces trois procédures de contredit un lien tel qu'il est de bonne justice de les juger ensemble';

Que la jonction de ces instances sera donc ordonnée';

Sur la recevabilité des contredits de Rail Cargo Austria, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur

RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur ont formé leurs contredits par un écrit motivé remis au tribunal de commerce de Paris dans le délai de quinze jours de la décision du 31 janvier 2013';

Que ces contredits sont donc recevables';

Sur la recevabilité de l'exception d'incompétence soulevée par Rail Cargo Austria et par Öbb Produktion

RCA et Öbb Produktion demandent que le litige soit renvoyé devant les «'juridictions autrichiennes'»';

Que ce faisant elles ne se heurtent pas à l'irrecevabilité de leur exception dans la mesure où, selon l'article 75 du code de procédure civile, lorsque à l'occasion d'une exception d'incompétence il est prétendu qu'une juridiction étrangère est incompétente, il suffit au défendeur de préciser l'Etat dans lequel se trouve la juridiction compétente sans avoir à préciser ni sa nature ni sa localisation exacte';

Considérant qu'en revanche il résulte de l'article 74 du code de procédure civile, les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir';

Que RCA, STVA et Allianz ont été assignées par Renault, demandeur principal originaire';

Que STVA et Allianz ont formé plusieurs appels en garantie, notamment contre RCA, Öbb Infrastruktur et Öbb Produktion ;

Que Zurich, assureur responsabilité civile de STVA en tant que détenteur de wagons, a assigné en garantie notamment RCA, Öbb Infrastruktur et Öbb Produktion ;

Que le 7 juillet 2011 RCA et Öbb Produktion ont à leur tour assigné en garantie STVA, Zurich, Sogeefer, Generali et la SNCF';

Qu'à l'audience tenue par le tribunal de commerce le 3 avril 2012, RCA et Öbb Produktion ont déposé des conclusions dans lesquelles elles ont soulevé l'incompétence de cette juridiction au profit de juridictions autrichiennes';

Mais considérant que RCA et Öbb Produktion, en assignant des parties en intervention forcée aux fins de les voir condamner à relever et garantir de toutes condamnations en principal, intérêts, indemnités, frais et dépens qui pourraient être prononcées à leur encontre, ont présenté des défenses au fond qui, malgré l'oralité des débats devant le tribunal de commerce, rendaient leur exception d'incompétence irrecevable, et ce même en admettant que la compétence alléguée relèverait de l'ordre public international, puisqu'il résulte aussi de l'article 74 du code de procédure civile que l'obligation de soulever in limine litis l'exception d'incompétence s'applique même si les règles invoquées au soutien de celle-ci sont d'ordre public';

Qu'enfin, si dans certains cas le juge peut se déclarer d'office territorialement incompétent, il n'y est jamais tenu';

Considérant qu'il convient dès lors de confirmer la disposition par laquelle le tribunal de commerce de Paris déclare irrecevable l'exception d'incompétence soulevée tant par RCA que par Öbb Produktion' et se déclare lui-même compétent';

Que RCA et Öbb Produktion seront en outre condamnés à payer les sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme il sera dit dans le dispositif de la présente décision';

Sur le contredit de Öbb Infrastruktur

Considérant que, contrairement aux autres demandeurs au contredit, Öbb Infrastruktur a soulevé l'exception d'incompétence du tribunal de commerce de Paris avant toute défense au fond si bien que cette exception est recevable'; que, pour la prétendre bien-fondée, cette société invoque les dispositions de la Convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF) qui primeraient sur les dispositions du règlement arrêté le 22 décembre 2000 par le Conseil de l'Union européenne';

Considérant que la COTIF, élaborée par l'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaire (OTIF), a été initialement conclue à [Localité 11] le 9 mai 1980 avec pour objet d'établir et d'appliquer dans les Etats membres, dont l'Autriche et la France, des règles juridiques communes pour le transport international ferroviaire de personnes et de marchandises';

Qu'un Protocole de Vilnius du 3 juin 1999, entré en vigueur le 1er juillet 2006, a modifié la COTIF et notamment les règles uniformes concernant le contrat de transport international ferroviaire des marchandises (RU-CIM)'applicables notamment à tout contrat de transport ferroviaire de marchandises à titre onéreux, lorsque le lieu de la prise en charge de la marchandise et le lieu prévu pour la livraison sont situés dans deux Etats membres différents';

Que le § 1 de l'article 46 RU-CIM de 1999, qui traite du for, prévoit que «'les actions judiciaires fondées sur les présentes Règles uniformes peuvent être intentées devant les juridictions des Etats membres désignées d'un commun accord par les parties ou devant la juridiction de l'Etat sur le territoire duquel le défendeur a son domicile ou sa résidence habituelle, son siège principal ou la succursale ou l'agence qui a conclu le contrat de transport, ou'le lieu de la prise en charge de la marchandise ou celui prévu pour la livraison est situé.'

D'autres juridictions ne peuvent être saisies'»';

Que cette règle confère au demandeur une option de compétence territoriale en lui permettant de saisir notamment la juridiction de l'Etat sur le territoire duquel le lieu de la livraison est situé quelle que soit la nature de la demande, fût-elle un appel en garantie puisqu'il n'y pas lieu de distinguer là où l'article 46- §1 ne distingue pas';

Que cette disposition n'est pas contredite par l'article 51 §6 RU-CIM de 1999 qui édicte que «'des recours ne peuvent pas être introduits dans l'instance relative à la demande en indemnité exercée par l'ayant droit au contrat de transport'» et qui figure dans le titre V relatif aux «'rapports des transporteurs entre eux'», lequel traite du droit et de la procédure de recours du transporteur ayant payé une indemnité en vertu des RU-CIM, contre d'autres transporteurs ayant participé au transport, et qui interdit de manière générale, et donc même en cas de connexité, de porter un tel recours dans l'instance en indemnité engagée par le titulaire du contrat de transport';

Qu'il ressort de ces éléments que l'article 51 -§ 6 RU-CIM institue une fin de non-recevoir et non point une règle de compétence territoriale qui contredirait l'article 46- §1';

Considérant en conséquence que même si le présent litige avait relevé, quant à la détermination de la compétence territoriale, du Protocole du 3 juin 1999, le tribunal de commerce de Paris aurait tout de même été territorialement compétent pour statuer sur les appels en garantie comme juridiction dans le ressort de laquelle deux des défendeurs au principal, STVA et Allianz, ont leur siège social';

Que cependant la règle effectivement applicable en l'espèce n'est pas la COTIF, mais bien le règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale dans l'Union européenne ;

Qu'en effet il résulte des articles 5-3, 6-1 et 6-2 de ce règlement qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite dans un autre État membre, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire, soit, s'il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément, soit encore, s'il s'agit d'une demande en garantie ou d'une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire, à moins qu'elle n'ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé';

Que l'article 71-1 du règlement du 22 décembre 2000 prévoit que celui-ci n'affecte pas les conventions auxquelles les États membres sont parties et qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, ce qui signifie qu'en cas de concours de règles, il convient en principe d'appliquer, lorsque le litige relève du champ d'application d'une convention spéciale, les règles énoncées dans celle-ci et non celles fixées par le règlement n° 44/2001, afin de permettre aux États membres de respecter leurs engagements internationaux vis-à-vis des États tiers et d'appliquer lesdites conventions au sein même de l'Union européenne ;

Mais considérant que cet article 71-1 doit être aussi interprété en contemplation de l'article 57-1 de la convention de Bruxelles de 1968, qui régissait la compétence judiciaire au sein de l'Union européenne avant l'entrée en vigueur du règlement 44/2001'; qu'en effet l'article 57-1 prévoyait que la convention de 1968 n'affectait pas celles «'auxquelles les États contractants sont ou seront parties et qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l'exécution des décision'»';

Qu'ici l'emploi des termes «ou seront» signifiait que les règles contenues dans cette convention ne s'opposaient pas à l'application de règles différentes auxquelles les États contractants souscriraient, dans le futur, par la conclusion de conventions spéciales ;

Qu'en revanche ces termes n'ont pas été repris à l'article 71-1 du règlement du 22 décembre 2000 et que l'on doit dès lors en déduire que les nouvelles conventions spéciales ou que la modification de conventions déjà en vigueur, dont seraient parties des Etats membres de l'Union européenne, ne sauraient primer celles du règlement n° 44/2001 ;

Que d'ailleurs si cette Union a elle-même adhéré au protocole de Vilnius par un accord signé avec l'OTIF le 23 juin 2011 (publié le 13 juillet 2001 au Journal officiel de l'Union européenne), il apparaît néanmoins que l'article 2 de cet accord précise que «'sans préjudice de l'objet et de la finalité de la convention, à savoir promouvoir, améliorer et faciliter le trafic international ferroviaire, et sans préjudice de sa pleine application à l'égard d'autres parties à la convention, dans leurs relations mutuelles, les parties à la convention qui sont des Etats membres de l'Union appliquent les règles de l'Union et n'appliquent donc les règles découlant de la convention que dans la mesure où il n'existe pas de règle de l'Union régissant le sujet particulier concerné'», disposition qui confère à la COTIF de 1999 un caractère supplétif dans l'Union européenne par rapport aux règles de cette dernière'et donc par rapport au règlement du 22 décembre 2000';

Considérant que l'article 5 des RU-CIM, qui traite de la nullité des stipulations contractuelles conclues en infraction avec ces règles uniformes, n'est applicable que dans les rapports entre les parties visées à l'article 1er de l'appendice B du protocole du 3 juin 1999 et ne saurait donc être utilement invoqué comme fondement d'une interdiction faite à l'Union européenne, à ses Etats membres et à l'OTIF'de convenir entre eux des dispositions dérogeant à celles de la COTIF';

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la compétence internationale pour statuer sur le mérite des appels en garantie formés par diverses parties à l'encontre de Öbb Infrastruktur, est régie par'le règlement n°44/2001 du 22 décembre 2000';

Considérant que les demandes principales de Renault et les interventions forcées contre Öbb Infrastruktur ont le même fait générateur qu'est l'accident ferroviaire du 10 juin 2010, toutes les parties à ces actions étant intervenues dans la chaîne du transport international des véhicules endommagés ou détruits au cours de cet accident'et qu'ainsi la compétence du tribunal de commerce de Paris, pour trancher dans le même procès l'action principale et les appels en garantie, répond à la finalité d'assurer une meilleure coordination de l'exercice de la fonction juridictionnelle à l'intérieur de l'espace européen ;

Que ce lien entre l'ensemble de ces demandes permet de conclure à l'absence de détournement de for';

Qu'il convient en définitive de rejeter le contredit de Öbb Infrastruktur, de condamner cette société aux dépens et à payer aux défendeurs des sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les montants et selon les modalités qui seront indiqués dans le dispositif ci-après';

PAR CES MOTIFS'

PRONONCE la jonction des instances inscrites au répertoire général de la cour d'appel sous les numéros 13/08130, 13/08144 et 13/08149';

DÉCLARE recevables les contredits formés contre cette décision par les sociétés Rail Cargo Austria AG (RCA), Öbb Produktion GmbH (Öbb Produktion) et Öbb Infrastruktur AG (Öbb Infrastruktur)';

CONFIRME la disposition du jugement du 31 janvier 2013 déclarant irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par les sociétés RCA et par Öbb Produktion';

DÉBOUTE Öbb Infrastruktur de son contredit';

RENVOIE l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris pour la poursuite de l'instance';

CONDAMNE RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur aux dépens';

Vu l'article 700 du code de procédure civile condamne':

- RCA à payer aux sociétés Renault, Tokio Marine Europe Insurance et à la société AXA Corporate Solutions Assurances la somme de 3.000 euros,

- RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur in solidum à payer à la Société de Transports de Véhicules Automobiles la somme de 3.000 euros et à la société Allianz IARD la somme de 3.000 euros,

- RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur, chacune, à payer la somme de 700 euros au profit des sociétés Sogeefer et Generali,

- RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur à payer in solidum à la SNCF la somme de 3.000 euros,

- RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur à payer in solidum à Zurich la somme de 3.000 euros,

- RCA, Öbb Produktion et Öbb Infrastruktur à payer in solidum à la société Helvetia la somme de 3.000 euros';

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 13/08130
Date de la décision : 06/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°13/08130 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-06;13.08130 ?
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