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26/02/2014 | FRANCE | N°12/20060

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 26 février 2014, 12/20060


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 26 FEVRIER 2014



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/20060



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juillet 2012 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 10/05529



APPELANTE



Madame [D] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par : Me Michel GALL

I, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 49

Assistée de : Me Pascal MALATERRE avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS toque 143, substituant Me Michel GALLI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-D...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 26 FEVRIER 2014

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/20060

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juillet 2012 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 10/05529

APPELANTE

Madame [D] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par : Me Michel GALLI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 49

Assistée de : Me Pascal MALATERRE avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS toque 143, substituant Me Michel GALLI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 49

INTIMES

Monsieur [I] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par : Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assisté de : Me Henri GERPHAGNON plaidant pour la SCP GERPHAGNON IEVA-GUENOUN, avocat au barreau de MEAUX

SAS MAISONS BARBEY MAILLARD

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée et assistée par : Me Pascale DE LA ROBERTIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0295

SA SAGENA prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par : Me Nathalie HERSCOVICI de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de : Me Stanislas DE JORNA plaidant pour la SCP PINSON-SEGERS-DAVEAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-José THEVENOT, Présidente de chambre chargée du rapport

Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère

Madame Maryse LESAULT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Guillaume MARESCHAL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José THEVENOT, Présidente et par M. Guillaume MARESCHAL, Greffier.

*******

[D] [R] est propriétaire d'un bien immobilier à [Localité 3] et a pour voisin [I] [B].

[I] [B] a confié à la société BARBEY MAILLARD la construction d'une maison d'habitation en octobre 2005.

BARBEY MAILLARD a sous-traité des travaux à MBT CONSTRUCTION.

En cours de travaux l'entrepreneur a démoli un mur séparant les deux fonds et appartenant à [D] [R]. Un empiétement a par ailleurs été constaté.

[D] [R] a saisi le juge des référés d'une demande de paiement des réparations et d'expertise. Une expertise a été ordonnée et confiée à M. [H] qui a déposé un rapport en août 2010.

[D] [R] a ensuite assigné au fond devant le tribunal de grande instance de Meaux [I] [B] et la société BARBEY MAILLARD aux fins d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices et la suppression des empiétements.

BARBEY MAILLARD a mis en cause MBT CONSTRUCTION et la SAGENA en qualité d'assureur de la responsabilité civile de MBT CONSTRUCTION.

Par jugement du 19 juillet 2012 le tribunal de grande instance a, notamment, débouté [D] [R] de sa demande au titre du préjudice matériel, condamné [I] [B] à supprimer les empiétements aux points définis par l'expert, sous astreinte, condamné BARBEY MAILLARD à garantir [I] [B] de toutes conséquences financières de cette condamnation, fixé au passif de MBT CONSTRUCTION la créance de [D] [R] d'un montant de 500€ au titre du trouble de jouissance, condamné SAGENA à payer cette somme à [D] [R], condamné [I] [B] à payer à BARBEY MAILLARD la somme de 4996,30€ au titre d'un solde de travaux, rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

[D] [R] a fait appel.

Dans ses conclusions du 25 mars 2013 elle demande à la cour, sur le fondement des dispositions des articles 1382 et suivants, 1384 alinéas 1 et 5, 544 et 545 du code civil, d'infirmer le jugement, de la recevoir en son action, de condamner in solidum [I] [B] et BARBEY MAILLARD à lui payer la somme de 15.785,20€ au titre de la destruction du mur privatif, de condamner [I] [B], sous astreinte de 300€ par jour de retard à supprimer les empiétements de sa propriété sur celle de [D] [R] tels que définis par l'expert judiciaire, de condamner les défendeurs à lui payer la somme de 2000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son trouble de jouissance et la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 10 juin 2013 [I] [B] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de [D] [R] au titre du préjudice matériel, subsidiairement de fixer l'indemnisation à ce titre à 7068,36€, de confirmer sa garantie par BARBEY MAILLARD de toute condamnation financière résultant de l'injonction de mettre un terme aux empiétements, de condamner BARBEY MAILLARD à le garantir de toutes autres condamnations susceptibles d'être prononcées, de condamner BARBEY MAILLARD à exécuter à ses frais les travaux nécessaires à mettre un terme aux empiétements, de confirmer le rejet des demandes de [D] [R] sur l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter les demandes à ce titre en appel, de constater qu'il a réglé le solde de 4996,30€ à BARBEY MAILLARD, de condamner BARBEY MAILLARD à lui payer les sommes de 1500€ et de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 7 octobre 2013 la société BARBEY MAILLARD demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause, de constater que devant le refus de [D] [R] de laisser intervenir BARBEY MAILLARD pour les débords de tuiles, BARBEY MAILLARD ne peut être tenue de conséquences financières, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné SAGENA à garantir la responsabilité de MBT CONSTRUCTION et, en toute hypothèse, de condamner SAGENA à garantir BARBEY MAILLARD de toute condamnation, de condamner tout succombant à lui payer la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 18 juin 2013 la société SAGENA demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté [D] [R] de sa demande de réparation au titre du préjudice matériel, de l'infirmer en ce qu'il a condamné la SAGENA à lui payer la somme de 500€, de débouter [D] [R] de sa demande au titre du trouble de jouissance, subsidiairement de juger que le préjudice matériel ne peut excéder 7068,36€, de répartir les responsabilités à raison de 80% à la charge de BARBEY MAILLARD et 20% à la charge de MBT CONSTRUCTION, de juger que la condamnation de SAGENA ne peut excéder la somme de 1413,76€, et elle réclame en toute hypothèse à [D] [R] la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour se réfère pour plus ample exposé des demandes aux conclusions ainsi visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Selon les éléments recueillis par l'expert judiciaire, un mur de clôture séparant les deux propriétés [R]-[B] a été démoli lors des travaux réalisés pour le compte de [I] [B] et il a été ensuite procédé à la reconstruction d'un nouveau mur par [D] [R] à ses frais. Le nouveau mur a été construit en léger retrait sur le fonds [D] [R] entre des points E F G H d'un plan dressé par l'expert, alors qu'il aurait dû être construit en ligne directe le long de la limite séparative entre les points E et H, et il existe sur le fonds [R] un débord de la toiture de l'immeuble [B] de 4cm à un point C et de 2cm au point E.

La démolition du mur, toujours selon les éléments non contestés par les parties, de l'expertise, est le fait du maçon l'entreprise MBT CONSTRUCTION et faisait suite à un enlèvement d'une grosse pierre en limite séparative.

Les circonstances précédant et entourant la décision de démolition du mur et cette destruction ne sont pas autrement établies.

En droit, sur le fondement de l'article 544 du code civil, nul ne droit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage. Sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, chacun est responsable de ses fautes personnelles causant à autrui un dommage. Sur le fondement des articles 1384 alinéa 1 et 5, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, et les maîtres et commettants sont responsables des dommages causés par leurs préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.

En l'espèce [I] [B], propriétaire du fonds sur lequel ont été effectués les travaux à l'origine de la démolition du mur, et pour le compte de qui ces travaux ont été effectués est, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage et sans qu'il soit besoin de démontrer une faute de sa part, responsable de droit envers son voisin des dommages occasionnés à celui-ci par les sociétés et entreprises à qui il avait confié la réalisation des travaux.

Il est en effet incontestable que la destruction d'un mur appartenant à un voisin excède ce que ce voisin doit supporter au titre des inconvénients normaux de voisinage.

La société MBT CONSTRUCTION qui a réalisé cette démolition est responsable de son fait personnel.

La société BARBEY MAILLARD était liée à [I] [B] par un contrat de construction de maison individuelle qui comprend la conception et la réalisation de l'ensemble des travaux mais il est établi d'une part qu'elle avait sous-traité le lot maçonnerie, et d'autre part rien ne permet de retenir en l'absence de tout élément factuel sur ce point que, quelle que soit l'étendue de sa maîtrise d'oeuvre, la décision de démolition du mur ait été prise par elle, ni qu'elle ait été à même de la prendre au titre de la surveillance du chantier laquelle n'implique pas une présence permanente sur celui-ci.

Par ailleurs le constructeur ne répond pas envers les tiers au contrat des fautes délictuelles personnelles de ses sous-traitants, et le sous-traitant n'est pas au sens juridique le préposé de son donneur d'ordre.

Par conséquent ne peuvent être retenues, envers [D] [R], que les responsabilités de [I] [B] et MBT CONSTRUCTION. [D] [R] ne formant pas de demande à l'encontre de MBT CONSTRUCTION ou son assureur, seul [I] [B] sera déclaré tenu à réparation.

[I] [B] ne réclame lui-même la garantie que de BARBEY MAILLARD sur le fondement de son obligation de résultat à son égard du fait du contrat les liant.

Cependant cette obligation contractuelle ne concerne que les travaux dus à [I] [B], non les dommages causés aux tiers. Cette demande en garantie ne peut donc être admise.

Le mur a été reconstruit aux frais avancés de [D] [R] selon un devis de l'entreprise TARHAN s'élevant à 15.787,20€ au 13 novembre 2007. Toutefois l'expert a vérifié que la facture de cette entreprise, en date du 3 mai 2008 est d'un montant de 7068,36€ TTC. Seule cette somme sera donc retenue comme correspondant aux travaux réellement effectués.

L'expert a constaté que [D] [R] avait fait réaliser le nouveau mur avec un décrochage en deçà de la limite séparative, ce qui la prive de la jouissance d'une partie de sa propriété. Cependant il ne résulte d'aucun élément que cette privation de jouissance soit le fait de son voisin ou d'un tiers, ni qu'elle ait été rendue nécessaire par une cause technique. La privation de jouissance n'entraîne pas de surcroît en elle-même privation de la propriété et [D] [R] ne peut donc revendiquer une atteinte par quiconque à ses droits de propriété à ce titre.

En revanche il résulte de l'expertise que la construction édifiée sur le fonds [I] [B] empiète sur le fonds [D] [R] en deux endroits par débord de toiture respectivement de 4 cm au point C et de 2cm au point E du plan dressé par l'expert judiciaire.

En application des dispositions de l'article 545 du code civil [D] [R] est fondée à exiger que [I] [B], propriétaire et maître d'ouvrage des constructions portant atteinte à son droit de propriété soit condamné à supprimer cet empiétement.

Sur ce point [I] [B] est en doit d'être garanti en tous points par la société BARBEY MAILLARD, qui avait l'obligation contractuelle de construire un ouvrage s'inscrivant dans les limites de la propriété du maître de l'ouvrage [I] [B]. BARBEY MAILLARD soutient avoir été empêchée par [D] [R] de procéder aux travaux destinés à la suppression de cet empiétement mais ne produit sur ce point que des copies de courriers d'information au conseil de [D] [R], qui ne font pas la preuve d'une force majeure l'exonérant de son obligation. Il est justifié de condamner BARBEY MAILLARD également à une obligation de faire au profit de [I] [B].

Il est certain que la destruction de son mur et les empiétements ont occasionné des troubles à [D] [R] dans la jouissance paisible de son bien. A ce titre une somme de 800€ doit lui être allouée. [I] [B] sera condamné au versement de cette somme et BARBEY MAILLARD, responsable d'une partie seulement de ces troubles sera condamnée à le garantir à hauteur de 400€.

Il y a lieu en l'espèce de laisser les dépens de l'instance à la charge in solidum de [I] [B] et de BARBEY MAILLARD ainsi qu'une somme de 4000€ qu'il y a lieu d'allouer à [D] [R] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de ses frais de première instance et d'appel. Il est justifié au regard de la nature de l'affaire de dire que BARBEY MAILLARD relèvera indemne [I] [B] de ces condamnations. Il est également justifié pour des raisons d'équité d'allouer à [I] [B] une somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de ses frais en première instance et en appel, somme qui sera mise à la charge de BARBEY MAILLARD. Les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas justifiées au regard de l'équité et de la situation des parties.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement en sa disposition condamnant [I] [B] à supprimer les empiétements de sa propriété sur celle de [D] [R] aux points C et E définis par l'expert, dans le délai fixé de six mois et sous astreinte de 30 € de retard passé ce délai pendant un nouveau délai de six mois et en ce qu'il a condamné BARBEY MAILLARD à garantir [I] [B] des conséquences financières de cette condamnation.

Infirmant pour le surplus dans les limites de l'appel et ajoutant,

Condamne [I] [B] à payer à [D] [R] la somme de 7068,36€ TTC au titre de son préjudice matériel.

Condamne in solidum [I] [B] et la société BARBEY MAILLARD à payer à [D] [R] la somme de 800€ au titre du préjudice de jouissance.

Condamne la société BARBEY MAILLARD à relever indemne [I] [B] à hauteur de la moitié de cette somme.

Condamne la société BARBEY MAILLARD à effectuer les travaux nécessaires à la suppression des empiétements de la construction [B] sur le fonds [R] aux points C et E définis par l'expert, dans les trois mois de la signification du présent arrêt et dit que passé ce délai BARBEY MAILLARD y sera contrainte sous astreinte de 50€ par jour de retard.

Condamne in solidum [I] [B] et la société BARBEY MAILLARD aux dépens et au paiement à [D] [R] d'une somme de 4000€ au titre de ses frais irrépétibles.

Condamne la société BARBEY MAILLARD à relever indemne [I] [B] de ces condamnations aux dépens et frais irrépétibles et à payer à [I] [B] une somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Met la société SAGENA hors de cause.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Autorise le recouvrement des dépens par les avocats de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/20060
Date de la décision : 26/02/2014

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°12/20060 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-26;12.20060 ?
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