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12/02/2014 | FRANCE | N°12/01115

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 12 février 2014, 12/01115


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 12 Février 2014

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01115-MPDL



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Février 2008 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section activités diverses RG n° 06/01067





APPELANTE

Madame [C] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne, assistÃ

©e de Me Cyril EMANUELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0334







INTIMEE

Association [1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Aurélien WULVERYCK, avocat au barrea...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 12 Février 2014

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01115-MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Février 2008 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section activités diverses RG n° 06/01067

APPELANTE

Madame [C] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Cyril EMANUELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0334

INTIMEE

Association [1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Aurélien WULVERYCK, avocat au barreau de PARIS, toque : C16

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Pierre DE LIÈGE, Présidente, et Madame Catherine BRUNET, Conseillère, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Pierre DE LIÈGE, Présidente

Madame Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Madame Catherine BRUNET, Conseillère

Greffier : M. Bruno REITZER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Pierre DE LIÈGE, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Les faits :

Mme [C] [S] a été engagée le 20 mars 2002 par l'Association [1], en qualité de secrétaire consultation, statut technicien de maîtrise, groupe 5, coefficient 358, suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel (142 heures par mois) pour un salaire initial de 1328,43 euros outre le 13e mois.

En novembre 2003, compte tenu des tâches qui lui étaient confiées, dans le cadre d'un entretien de positionnement, elle sollicitait une amélioration de son statut ; son employeur lui proposait alors un poste d'assistante service consultation échelon 1.

En juin 2004 l'employeur réunissait le personnel pour l'informer sur les nouveaux accords concernant le temps de travail.

Des avenants au contrat de chacun d'entre eux étaient envoyés en juillet 2004, intitulant son poste « chargée de mission permanente », pour un horaire mensuel de 138 heures, mission entraînant de majoration indiciaire de 30 points.

La lettre d'envoi adressée à la salariée le 30 juillet 2004 précisait « en cas de refus nous nous verrons dans l'obligation d'envisager la rupture de nos liens contractuels ».

La salariée considérant que son statut et son salaire n'étaient pas en adéquation avec ses fonctions qui n'avaient fait que se développer depuis son embauche, ayant appris que la personne qu'elle avait remplacée bénéficiait d'un indice nettement supérieur au sien, en particulier depuis 1995 et percevait un salaire également nettement supérieur aussi (540 € bruts par mois), refusait de signer cet avenant, par deux courriers du 19 novembre et du 20 décembre 2004.

Le 11 février 2005 l'employeur lui adressait un nouvel avenant « intégrant les nouvelles dispositions de l'accord d'entreprise du 4 mai 2004 », sa fiche de poste et de nouveaux horaires indiquant « en cas de refus de l'avenant proposé nous prendrons acte de votre décision et évaluerons les possibilités de continuité de votre contrat initial ou le besoin de rupture de nos liens contractuels. Vous ne vous exposez à aucune sanction immédiate et en tout état de cause, nous reviendrons vers vous pour vous informer de la suite que nous envisageons de donner à nos relations contractuelles ».

Toutefois, la salariée ayant refusé de participer à un entretien hors de la présence du délégué du personnel, se voyait infliger un avertissement le 11 février 2005

Le 21 février la salariée refusait l'avenant proposé, considérant que son travail et son statut n'étaient toujours pas reconnus, même si son salaire devait être amélioré en contrepartie d'un accroissement de son horaire de travail. Elle disait « j'ai le sentiment d'avoir perdu une année en négociations multiples. Jene cachais pas ma méfiance maintenant je ne vous cache pas ma fatigue... qui s'est notablement accru lorsque j'ai reçu votre avertissement».

Par LRAR du 11 juillet 2005 elle était convoquée à un entretien préalable fixé au 19 juillet.

L'employeur lui proposait un poste de reclassement : assistante échelon 1agent de maîtrise 308 niveau bac + 2 et connaissance en bureautique, pour 151,67 heures de travail par mois et une rémunération hors ancienneté de 1583,12euros.

Par lettre recommandée du 25 juillet suivant, Mme [C] [S] était licenciée pour motif économique.

Le 20 décembre 2007 Mme [C] [S] saisissait le conseil de prud'hommes de Paris pour contester le bien-fondé de son licenciement, demander diverses indemnités en conséquence ainsi qu'un rappel de salaire par application du principe « à travail égal salaire égal »

Par décision de départage du 29 février 2008, ce conseil de prud'hommes, section activités diverses chambre 4, déboutait la salariée de l'ensemble de ses demandes ainsi que l'employeur de sa demande reconventionnelle.

Mme [C] [S] régulièrement fait appel de cette décision.

Elle demande à la cour de :

- infirmer en son entier la décision entreprise.

À titre principal

- dire et juger sans cause réelle ou sérieuse le licenciement intervenu le 25 juillet 2005.

- en conséquence, condamner l'employeur à verser à Madame [S] une somme de 9802 euros par application de l'ancien article L. 122 14 4 du code du travail.

- condamner l'[1] à lui verser une somme de 3000 euros en raison de la fraude au plan social intervenue entre 2004 et 2005.

- condamner l'[1] à verser à Madame [S] une somme de 21 600 euros en réparation de son préjudice résultant de la discrimination subie dans l'application du principe « à travail égal, salaire égal ».

Subsidiairement

- condamner l'[1] à verser à Madame [S] une somme de 1000 euros en application du principe à travail égal salaire égal.

En toute hypothèse

- condamner l'[1] à verser à Madame [S] une somme de 2300 euros par application de l'article 700 du C.P.C.

L'[1], en réponse à cet appel, demande à la cour de :

à titre principal :

- juger que le licenciement de Mme [C] [S] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- Juger qu'aucune discrimination en matière de rémunération n'a été commise à son

égard.

En conséquence,

- Confirmer le jugement attaqué,

- Débouter Madame [S] de l'intégralité de ses demandes.

A titre subsidiaire,

- Juger que Madame [S] ne justifie pas d'un préjudice à hauteur de ses

demandes,

En conséquence,

- Réduire les indemnités sollicitées à de plus justes proportions.

A titre reconventionnel,

- Condamner Madame [S] à 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Laisser les entiers dépens à la charge de Madame [S].

L'association compte plus de 11 salariés.

Le salaire brut moyen mensuel de Mme [C] [S] était de 1463,92 €.

La convention collective de l'animation socioculturelle est applicable à la relation de travail.

Les motifs de la Cour :

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la rupture du contrat de travail de Mme [C] [S]

La lettre de licenciement adressée à Mme [C] [S] le 25 juillet 2005 est rédigée comme suit : 'Nous faisons suite à l'entretien que nous avons eu le 22 juillet au cours duquel nous vous avons remis un dossier relatif au PARE (Plan d'Aide de Retour à l'Emploi) anticipé et un document relatif à la CRP (Convention de Reclassement Personnalisé) et sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour motif économique...

En ce qui concerne les motifs de ce licenciement, il s'agit de ceux qui vous ont été indiqués, à savoir :

L'association connaît actuellement de graves difficultés économiques sur lesquelles le Comité d'entreprise a été informé et consulté. En effet, l'exercice 2004 s'est soldé par un déficit de 688.000 €. L'association ayant déjà connu en 2002 une perte de 325.000 €, des mesures de redressement urgentes doivent être prises.

Cette situation économique résulte notamment :

- d'une baisse importante de nos ressources tant au niveau des subventions que des ventes. - d'une augmentation des frais de fonctionnement.

- de difficultés de trésorerie.

En l'absence de toute mesure, les prévisions sur l'exercice 2005 confirment que la situation économique de l'EPE IDF irait en s'aggravant, mettant en danger la pérennité de la structure.

Afin de tout mettre en 'uvre pour éviter une telle extrémité et tenter de retrouver un équilibre financier en 2006, l'EPE IDF a décidé de se restructurer en :

- limitant les frais de fonctionnement,

- réduisant la masse salariale de l'association par la suppression de certains postes

administratifs et supports jugés non indispensables, sans réduire les effectifs dits « productifs ».

Afin d'améliorer le fonctionnement de l'EPE IDF, nous avons été contraints de vous proposer par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 février une modification de votre contrat de travail.

Le 21février, vous avez refusé par écrit toute modification à votre contrat de travail.

Nous ne sommes toutefois pas en mesure de maintenir votre contrat de travail dans ses dispositions actuelles et devons donc vous licencier pour motif économique.

En effet, l'association a notamment décidé de modifier l'organisation de son temps de travail qui était basée sur un roulement trimestriel. Or, le principe d'établissement des horaires de travail les cinquièmes vendredi, samedi et dimanche du mois impliquait une présence pour certains salariés un vendredi, samedi et dimanche par trimestre ajouté au travail régulier des 4 semaines mensuelles minimum. Cette organisation a fréquemment provoqué des difficultés et était incompatible avec les outils de planification nécessaires au bon fonctionnement des services.

L'association n'a donc eu d'autres choix que de prévoir une nouvelle organisation sur 4 semaines ce qui a généré selon les cas, de faibles modifications, à la hausse ou à la baisse du temps de travail mensuel.

Concernant votre reclassement, vous n'avez accepté aucun des postes que nous vous avons proposés par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juillet 2005.

Nous vous rappelons qu'il s'agissait des postes suivants : (cf le seul poste proposé lors de la convocation à entretien préalable précisé plus haut).

Aucun autre poste disponible au sein de l'EPE IDF ne pouvant vous être proposé au titre du reclassement, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique.

Nous vous informons que, conformément à l'article L 321-14 du Code du travail et au plan de sauvegarde de l'emploi, vous pouvez bénéficier d'une priorité de réembauchage pendant une durée de 18 mois pour les postes de travail permanents et de 12 mois pour les vacations. Pour ce faire, vous devrez nous faire part de votre désir d'user de cette priorité dans un délai de 12 mois à compter de la notification de votre licenciement et préciser si vous êtes candidat à des vacations sur le site formation en complétant un dossier de renseignements... »:

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutive notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, ou à une réorganisation de l'entreprise décidée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient. Ces circonstances doivent être clairement énoncées dans la lettre de rupture.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié. À défaut de ces mentions, la motivation de la lettre de licenciement est imprécise et celui-ci ne repose pas sur une cause réelle ni sérieuse.

Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent, à défaut et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises.

La lettre de licenciement circonscrit les limites du litige.

Dans le cas d'espèce, les difficultés économiques de l'Association en particulier depuis l'année 2002 sont établies : déficit cumulé année 2002 et année 2004 dépassant 1 million d'euros, et qui s'est d'ailleurs poursuivi en 2005, par un résultat déficitaire d'environ 992 000 € supplémentaires. La situation très difficile de l'Association a d'ailleurs été confirmée par l'expert missionné par le comité d'entreprise qui évoque une « crise économique très grave qui conduit l'association à une situation financière intenable en l'état», par l'avis favorable à l'unanimité du comité d'entreprise, ainsi que par l'inspection du travail qui parle aussi de « très graves difficultés économiques ».

Au-delà, pour que la motivation de la lettre de licenciement soit retenue comme suffisante celle-ci doit aussi indiquer la conséquence précise de cette situation sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié. À cet égard la lettre précise que l'Association, pour tenter de retrouver un équilibre financier, a décidé de :

-limiter les frais de fonctionnement,

-réduire la masse salariale de l'Association à la suppression de certains postes administratifs et supports jugés indispensables sans réduire les effectifs dits « productifs »

Ce souci de conserver les effectifs dits « productifs » s'explique par le fait que les subventions allouées à l'Association prennent nécessairement en compte l'importance de l'activité de celle-ci c'est-à-dire le nombre d'appels ou de dossiers traités par l'équipe des consultants ; réduire le nombre d'accueils risquait de se traduire immédiatement par une nouvelle réduction des subventions.

Or, dans la mesure où il n'est pas contesté que Mme [C] [S] occupait le seul poste assurant l'interface entre les personnes s'adressant à l'Association pour y trouver une aide et les consultants susceptibles de leur apporter cette aide, notamment en fixant les rendez-vous, la cour considère que ce poste doit davantage être assimilé à un poste « productif » que « administratif »: bien évidemment, l'Association ne pouvait se priver du salarié chargé de l'accueil et du dispatching des demandes.

Il en résulte, que si le choix opéré par l'[1] de supprimer le poste de Mme [C] [S] s'explique difficilement dans le cadre d'une réduction des effectifs des personnels administratifs, il s'explique beaucoup plus certainement par le fait que cette salariée était, depuis plus d'un an, en conflit avec son employeur auprès duquel elle sollicitait une remise à niveau de son statut et de son salaire eu égard à la réalité de ses fonctions.

Cette tension entre l'employeur et cette salariée en particulier explique la raison pour laquelle le choix s'est porté sur Mme [C] [S] quand l'employeur a voulu licencier, ce litige apparaissant en conséquence être la cause réelle du licenciement de Mme [C] [S], en dépit de ses fonctions indispensables au bon fonctionnement de l'association.

En conséquence, un doute réel existe quant aux circonstances qui ont amené l'[1] à choisir, précisément, de licencier Mme [C] [S] qui tenait une place « pivot » au sein de l'Association et vis-à-vis de laquelle aucun reproche quant à la qualité de sa prestation n'est par ailleurs mentionné.

Le doute devant profiter en matière de licenciement au salarié par application de l'article 1235-1 du code du travail, la cour dira ce licenciement pour motif économique dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle y ajoutera en outre que le seul poste de reclassement proposé correspond manifestement en réalité au contrat dont la salariée discutait les conditions, il ne pouvait bien évidemment pas être accepté par Mme [C] [S].

La cour infirmera donc la décision du conseil de prud'hommes et dira ce licenciement pour motif économique dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, de l'ancienneté dans son emploi de la salariée, et du préjudice qu'elle a établi avoir subi à la suite de celui-ci, ayant depuis la fin de ses droits à Pôle Emploi en juillet 2009, relevé le plus souvent du RMI, de l'aide au retour de l'emploi, de l'allocation de solidarité spécifique dont elle continue à relever, tout en ayant bénéficié de trois CDD à temps partiel en 2008 puis de missions d'enquêtrice vacataire pour l'INSEE depuis 2009 la cour fixera à 9800 € la somme due en application de l'article L. 1235-3 du code du travail.

En revanche, la fraude au PSE invoquée par la salariée n'étant pas établie, celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts formulée à ce titre.

Sur le rappel de salaire en vertu du principe « à travail égal salaire égal »

Mme [C] [S] soutient que l'employeur a manqué par deux fois à ce principe, si l'on compare sa situation :

- à celle de Mme [H], qu'elle a remplacée dans ses fonctions et qui percevait selon elle 500 € de plus par mois

- à celle de Mme [P] [Q], qui à la suite de l'adoption de la nouvelle grille salariale a été embauchée pour des responsabilités moindres à un niveau supérieur à celui auquel elle avait été embauchée.

Le principe « à travail égal, salaire égal », qui découle directement de l'interdiction de discrimination en matière de rémunération, impose à tout employeur d'assurer pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les salariés d'une même entreprise, hommes ou femmes. L'employeur qui a liberté cependant de fixer les salaires peut déterminer des rémunérations différentes pour tenir compte de compétences et de capacités différentes entre les salariés ou la nature des fonctions qu'ils exercent.

L'employeur, soutient que les demandes formulées par Mme [C] [S] à ce titre sont mal fondées, car selon lui Mme [C] [S] n'avait pas les mêmes responsabilités, et d'autre part justifiait d'une ancienneté nettement inférieure.

Or il n'est pas démontré par l'employeur, qui pourtant le soutient, que les fonctions de « coordinatrice des équipes de la consultation » de Mme [H], qui avaient valu à celle-ci une revalorisation de son coefficient de 350 à 455 puis 485, puis 495 en octobre 1999 et celles de « secrétaire consultation», rebaptisées le 27 novembre 2003 « assistante service communication », de Mme [C] [S] pour un coefficient de 358 jusqu'en septembre 2004, puis 390 à compter du mois suivant correspondaient en réalité à des tâches effectuées différentes.

Au contraire, plusieurs attestations régulières en la forme produites par la salariée (émanant de consultants travaillant pour l'association) disent que Mme [C] [S] effectuait depuis son embauche les mêmes tâches que Mme [H].

En revanche, il est établi que Mme [H] justifiait d'une ancienneté dans le poste de 11 ans, largement supérieure à celle de Mme [C] [S] lorsque la première percevait le salaire de comparaison invoqué par la seconde, différence d'ancienneté pouvant justifier, à tout le moins pour une part, la différence de salaire.

En tout état de cause, si la salariée produit le bulletin de paye de Mme [H] du mois de novembre 2001, elle ne produit aucun bulletin de paie la concernant jusqu'au mois d'août 2004, ce qui empêche en conséquence toute comparaison précise.

Il ressort toutefois des pièces versées par la salariée, qu'en réponse à son courrier du 20 décembre 2004 où elle se plaignait d'une évolution insuffisante de sa rémunération et d'un sentiment d'injustice au regard des acquis de son prédécesseur, l'employeur proposait dans un courrier du 4 janvier 2005(pièce 29) « une augmentation de salaire de 19,9 % hors ancienneté et majoration des samedis après-midi travaillés ».

Cette augmentation de salaire n'a pas été mise en oeuvre compte tenu du refus de la salariée d'accepter son avenant. La proposition traduit toutefois la reconnaissance par l'employeur de ce que compte tenu des tâches qui étaient les siennes, la salariée pouvait prétendre à une augmentation de salaire dans cette proportion.

La cour relèvera que les bulletins de salaire de Mme [H], ne donnent lieu à aucun versement supplémentaire, mais que ses derniers bulletins de salaire font apparaître un coefficient de 495, l'ancienneté apparaissant prise en compte séparément sous forme de 40 points alors que les derniers bulletins de salaire de Mme [C] [S] font apparaître huit points d'ancienneté mais un coefficient de seulement 390 en décembre 2005.

La preuve n'étant pas rapportée par l'employeur de ce que les missions de Mme [C] [S] étaient différentes de celles de son prédécesseur, et la cour ne disposant pas des éléments permettant d'apprécier la part de l'ancienneté, dans la différence de salaire perçu par les deux salariés, elle prendra acte de la proposition, formulée par l'employeur de relever de 19,90 %le salaire de Mme [C] [S] tel que proposé par l'employeur dans son courrier du 4 janvier 2005.

Elle considère toutefois que les fonctions de Mme [C] [S] étant les mêmes depuis son embauche, cette augmentation de salaire, correspondant à la réalité de ses fonctions et responsabilités, devait s'appliquer dès son embauche.

Il appartiendra aux parties qui disposent de l'ensemble des éléments relatifs aux salaires perçus par Mme [C] [S], depuis son embauche jusqu'à la rupture de son contrat de travail, de faire les comptes entre elles.

S'agissant de Mme [P] [Q], Mme [C] [S] soutient que celle-ci avait moins de responsabilité mais du fait de la nouvelle grille salariale a été embauchée un niveau supérieur au sien lors de son embauche.

L'employeur soutient toutefois que le salaire d'embauche de Mme [C] de Mme [C] [S] était de 10,31 euros de l'heure compte tenu de son horaire mensuel de 141,99 heures, alors que le salaire d'embauche de Mme [Q] s'établissait à 9,66 euros de l'heure compte tenu d'un horaire mensuel de 151,67, la différence entre les deux salaires d'embauche correspondant des lors, en réalité, à l'horaire de travail de chacune des salariés.

En tout état de cause, l'augmentation de salaire octroyée par la cour à [C] fait disparaître cet avantage au bénéfice de Mme [P] [Q].

Sur les dépens et la demande de dommages et intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

L'[1] qui succombe supportera la charge des dépens.

La Cour considère que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaît inéquitable de faire supporter par Mme [C] [S] la totalité des frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer. Il lui sera donc alloué, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 2000 euros, à ce titre pour l'ensemble de la procédure.

Décision de la Cour :

En conséquence, la Cour,

Infirme la décision du Conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions

et statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne l'[1] à payer à Mme [C] [S] la somme de 9800 €, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse en application de l'article L 1235-3 du code du travail,

somme avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Condamne l'[1] à verser à Mme [C] [S] un rappel de salaire correspondant à 19,9 % de son salaire brut depuis son embauche jusqu'à la rupture du contrat de travail.

Renvoie les parties à faire leurs comptes sur cette base, étant précisé qu'en cas de difficultés il en sera référé à la cour par simple requête.

Déboute les parties de leurs demandes complémentaires ou contraires.

Condamne l'[1] à régler à [C] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.

La condamne aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIER,LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 12/01115
Date de la décision : 12/02/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°12/01115 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-12;12.01115 ?
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