RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6- Chambre 12
ARRÊT DU 06 Février 2014 (no 5, 3 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/ 01451
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Janvier 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG no 10-01383/ B
APPELANTE CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE SEINE SAINT DENIS-93-52-54 rue de la République 93005 BOBIGNY CEDEX représentée par Mme Dominique X...en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMÉE Madame Chantale Y...... 93320 LES PAVILLONS SOUS BOIS représentée par Me Catherine DOMINIQUE-DROUX, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB191 substituée par Me Sandrine PRUDON, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 191, bénéficiant d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 29811 du 11/ 08/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS.
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale 14, avenue Duquesne 75350 PARIS CEDEX 07 avisé-non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller qui en ont délibéré
Greffier : Mme Michèle SAGUI, lors des débats
ARRÊT :- contradictoire-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Marion MELISSON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme Chantale Y..., de nationalité ivoirienne, est entrée sur le territoire français en 2000 et y séjourne régulièrement depuis février 2007.
Par une première demande en date du 14 février 2007 renouvelée en 2010, elle a sollicité le bénéfice des prestations familiales en faveur de ses enfants Z...Kady née le 3 novembre 1992 à Anyama en Cote d'Ivoire et Z...Anna Mariam, née le 17 décembre 2002 à Bari en Italie qui, selon ses déclarations, sont arrivées sur le territoire français en même temps qu'elle, en dehors de la procédure de regroupement familial.
Ces prestations lui ont été refusées en l'absence de certificat délivré par l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations-Anaem-actuellement Office français de l'intégration et de l'immigration-Ofii.
La Commission de Recours Amiable a confirmé ce rejet.
Mme Chantale Y...a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociales de Bobigny lequel par jugement du 13 janvier 2011, assorti de l'exécution provisoire, a ordonné à la caisse de liquider ses droits à compter de mars 2007.
La caisse, par la voix de son représentant, fait soutenir oralement les conclusions visées par le greffe social à l'audience et tendant à l'infirmation de la décision entreprise.
Elle fait valoir que Mme Chantale Y...n'ayant pas fourni le certificat médical exigé à l'article D. 512-2 du Code de la sécurité sociale ne peut bénéficier des prestations familiales en faveur de ses filles.
Elle se prévaut des arrêts rendus par la Cour de cassation le 3 juin 2011 pour avancer notamment que les nouvelles dispositions législatives revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité d'un état démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 à 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ; elle soutient enfin que Mme Chantale Y...ne justifie pas d'accords relatifs au travailleurs migrants pour se prévaloir des arrêts rendus par l'Assemblée Plénière le 5 avril 2013.
Mme Chantale Y..., par la voix de son conseil demande la confirmation de la décision entreprise eu égard aux motifs exposés par le tribunal relativement notamment à la violation des dispositions de la convention européen des droits de l'home et la convention internationale des droits de l'enfant.
Vu les dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 20 novembre 2013, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.
SUR QUOI, LA COUR
Considérant qu'il résulte de l'article L. 512-2 du Code de la sécurité sociale, modifié par l'article 89 de la loi du 19 décembre 2005, que les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen ou de la Confédération suisse et séjournant régulièrement en France bénéficient des prestations familiales pour les enfants qui sont à leur charge, sous réserve qu'il soit justifié de la régularité du séjour de ces enfants en France ;
Considérant que l'article D. 512-2 du Code de la sécurité sociale, dispose que la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à sa charge et au titre desquels il demande des prestations familiales est justifiée notamment par la production du certificat de contrôle médical de l'enfant délivré à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ;
Considérant qu'ainsi le versement des prestations familiales est subordonné à la production d'un document attestant de l'entrée régulière des enfants étrangers en France ;
Considérant qu'en l'espèce, les enfants Kady et Anna Mariam Z...sont entrées en France en dehors de la procédure de regroupement familial ; qu'elles ne disposaient pas du certificat de contrôle médical précité ;
Considérant que l'exigence de ce certificat de contrôle médical répond tant à l'intérêt de la santé publique qu'à l'intérêt de la santé de l'enfant ; qu'un tel certificat permet, en effet, de vérifier que les enfants disposeront en France des conditions d'existence lui garantissant de mener une vie familiale normale et d'assurer sa protection ;
Considérant que les dispositions des articles L. 512-2 et D. 512-2 sont objectivement et raisonnablement justifiées par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants ;
Considérant que l'exigence de documents spécifiques délivrés à l'issue de la procédure de regroupement familial ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne constitue pas une discrimination prohibée par l'article 14 de la même Convention ;
Considérant que ces dispositions ne méconnaissent pas non plus l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ;
Considérant, dans ces conditions, que c'est à tort que les premiers juges ont reconnu à Mme Chantale Y...un droit aux prestations familiales au titre des enfants Kadi et Anna Mariam en l'absence de délivrance du certificat médical requis ;
Qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement attaqué et de débouter Mme Chantale Y...de ses demandes.
PAR CES MOTIFS
Déclare la Caisse d'allocations familiales de Paris recevable et bien fondée en son appel,
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Déboute Mme Chantale Y...de ses demandes de prestations familiales en faveur des enfants Z...Kadi et Z...Anna Mariam
Le Greffier Le Président