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04/02/2014 | FRANCE | N°11/07362

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 04 février 2014, 11/07362


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 04 Février 2014

(n° 6 , 7 pages)



Numéros d'inscription au répertoire général : S 11/07362

S 11/07363

S 11/07364

S 11/07365



Décision déférée à la Cour : arrêt de renvoi après cassation rendu le 15 mars 2011 par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation sur pourvoi d'un arrêt rendu le 10 décembre 2009 par la cour d'appel de PARI

S pôle 6 chambre 7 sur appel d'un jugement rendu le 11 décembre 2007 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section encadrement RG n° 06/10215,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 04 Février 2014

(n° 6 , 7 pages)

Numéros d'inscription au répertoire général : S 11/07362

S 11/07363

S 11/07364

S 11/07365

Décision déférée à la Cour : arrêt de renvoi après cassation rendu le 15 mars 2011 par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation sur pourvoi d'un arrêt rendu le 10 décembre 2009 par la cour d'appel de PARIS pôle 6 chambre 7 sur appel d'un jugement rendu le 11 décembre 2007 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section encadrement RG n° 06/10215, 06/10217, 06/10218, 06/10219

APPELANTS

Madame [O] [K]

[Adresse 4]

[Localité 4]

comparante en personne, assistée de Me Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0021

Monsieur [G] [R]

[Adresse 5]

[Localité 1]

représenté par Me Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0021

Monsieur [L] [P]

[Adresse 6]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0021

Madame [B] [M]

[Adresse 3]

[Localité 4]

comparante en personne, assistée de Me Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0021

INTIMÉES

SARL LIBÉRATION

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Isabelle ZAKINE-ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : J007

SCP VALLIOT-LE GUERNEVE-ABITBOL prise en la personne de Me [E] [Q] - Commissaire à l'exécution du plan de la SARL LIBERATION

[Adresse 7]

[Localité 3]

représenté par Me Isabelle ZAKINE-ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : J007

SELAFA MJA prise en la personne de Me [X] [A] - Mandataire judiciaire de la SARL LIBERATION

[Adresse 1]

[Adresse 8]

[Localité 5]

non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Claudine PORCHER, présidente

Mme Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Mme Catherine COSSON, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 28 avril 2005, la société anonyme Investissement presse (SAIP), associée unique de la SARL LIBERATION et dont les actions étaient jusqu'alors réparties en trois groupes A, B, C respectivement détenues par la SCPL, société civile du personnel de libération, par les actionnaires dits historiques et par les dirigeants de la SAIP a procédé à une augmentation de capital réservée à la société Holding Financier Jean Goujon (HFJG) dirigée par Monsieur [S] [Y] avec création d'une nouvelle catégorie d'actions, les actions D.

Le même jour, un pacte d'actionnaire a été conclu entre tous actionnaires en conséquence de l'entrée du nouvel investisseur et de la création d'une nouvelle catégorie d'actions D.

Lors d'une séance du conseil d'administration du 29 juin 2006, Messieurs [H] et [W] ont démissionné de tous leurs mandats et ont été remplacés par Monsieur [V], administrateur représentant la SCPL au sein du conseil d'administration, et par Monsieur [N], tous deux devenant concomitamment cogérants de la SARL LIBERATION.

Par lettres du 6 septembre 2006, quatre journalistes, Madame [O] [K], Madame [B] [M], Monsieur [G] [R] et Monsieur [L] [P], ont confirmé à la société LIBERATION leur décision de rompre leur contrat de travail en application de l'article L. 761-7 du code du travail au motif que lors de son entrée au capital du journal à concurrence de 38,8 %, Monsieur [S] [Y] est devenu le plus gros actionnaire de la société et que le pacte d'actionnaire signé le même jour lui en a conféré le contrôle au sens de l'article L. 233-3, I et II du code de commerce et ont sollicité en conséquence le paiement des indemnités prévues en ce cas.

La direction de Libération ayant refusé d'accéder à leurs demandes, les quatre journalistes ont, le 15 septembre 2006, saisi le conseil de prud'hommes de Paris.

Le 4 octobre 2006, la société LIBERATION a été placée sous sauvegarde de justice.

Par jugement rendu le 11 décembre 2007, le conseil de prud'hommes de PARIS a débouté les quatre journalistes professionnels du journal LIBERATION de leurs demandes.

Le 21 décembre 2007, un plan de sauvegarde de la SARL LIBERATION a été arrêté et Maître [Q] désigné comme commissaire à l'exécution du plan.

Le 28 janvier 2008, Madame [O] [K], Madame [B] [M], Monsieur [G] [R] et Monsieur [L] [P] ont interjeté appel du jugement rendu le 11 décembre 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS.

Par arrêt du 10 décembre 2009, la chambre 7 du pôle 6 de la cour d'appel de Paris a :

- infirmé le jugement,

- dit que la rupture du contrat de travail survenue le 6 septembre 2006 à l'initiative de Madame [K], Monsieur [R], Monsieur [P] et Madame [M] était fondée sur une cession du journal Libération au sens de l'article L. 761-7 1° devenu L 7112-5 du code du travail, par application combinée des articles L. 233-3 III et L. 233-10 du code de commerce

- fixé la créance de Monsieur [R] au passif de la SARL LIBERATION à 21 039,68 € au titre de l'indemnité de congédiement de l'article L. 7112-3 du code du travail

- renvoyé, s'agissant de la fixation de l'indemnité de congédiement de Madame [K], Monsieur [P] et Madame [M], la partie la plus diligente à saisir la commission arbitrale,

cependant dès à présent

- fixé, à titre d'indemnité provisionnelle au passif de la SARL LIBERATION la créance de Madame [K], à 66 198,76 €, celle de Monsieur [P] à 71 044,95 € et celle de Madame [M] à 65 352 €.

Elle a en outre condamné la SARL LIBERATION à payer à chacun des appelants 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et dit que les dépens seraient portés au passif de la société.

La SARL LIBERATION a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision.

Par arrêt du 15 mars 2011, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 décembre 2009 entre les parties par la cour d'appel de Paris, remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Elle a également condamné Mesdames [K] et [M] et Messieurs [R] et [P] aux dépens et rejeté les demandes au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de sa décision, la Cour de cassation, se prononçant au visa de l'article L. 233-3, III, du code de commerce, a estimé qu'en retenant qu'au 29 juin 2006, le nouvel investisseur, HFJG, devait nécessairement agir de concert avec la SCPL pour parvenir à prendre le contrôle de l'entreprise de presse et que la cogérance ainsi mise en place permettait au nouvel investisseur d'exercer un contrôle de fait sur Libération et en déduisant que, cette prise de contrôle étant assimilée à une cession, les journalistes étaient fondés à invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 7112-5 du code du travail, la cour d'appel de Paris avait privé sa décision de base légale en la fondant par des motifs desquels il ne résultait pas que les sociétés agissant de concert déterminaient en fait les décisions prises en assemblée générale.

La cour de renvoi a été saisie par déclarations formées par les quatre journalistes représentés par Maître [J] [I] et reçues le 6 juin 2011 par le greffe social de la cour d'appel de Paris et l'affaire a été distribuée à la présente chambre 10 du pôle 6.

Les quatre journalistes font valoir qu'ils sont fondés à invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 7112-5 du code du travail et à obtenir le versement d'une indemnité au titre de la rupture de leur contrat de travail dès lors que les sociétés HFGJ et SCPL ont mené une action de concert qui leur a permis de prendre le contrôle de la SARL LIBERATION via son associé unique la SAIP, que cette prise de contrôle est manifestée conformément à l'article L. 1 233-3 II du code de commerce par la décision de l'associé unique de la SARL du 29 juin 2006.

Monsieur [G] [R] sollicite la condamnation de la SARL LIBERATION à lui payer, sur le fondement de l'article L. 7112-3 du code du travail, la somme de 21 039,68 €.

Madame [B] [M], Madame [O] [K] et Monsieur [L] [P] demandent de les renvoyer à la commission arbitrale des journalistes pour la détermination du montant de l'indemnité due au titre de l'article L. 7112-4 du code du travail et de condamner la SARL LIBERATION à leur payer une indemnité provisionnelle respectivement de 65 352 €, 66 198,76 € et 71 045,33 €.

Chacun des appelants sollicite en outre la condamnation de la SARL LIBERATION à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La SARL LIBERATION et Maître [E] [Q] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de cette société font valoir que la prise de contrôle de la société Libération par une société actionnaire quelle qu'elle soit n'est pas établie et est, en tout état de cause rendue impossible par la rédaction même des statuts, qu'aucun accord ni politique commune nécessaires à la qualification d'action de concert ne sont démontrés et qu'ainsi, la mise en oeuvre de la clause de cession de l'article L. 7112.5 1° du code du travail par les quatre journalistes s'analyse en une démission au sens du droit commun.

Ils demandent de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 11 décembre 2007 en ce qu'il a estimé que les quatre journalistes ne pouvaient se prévaloir des dispositions de l'article L. 7112-5 du code du travail, de condamner ces derniers aux entiers dépens et à verser chacun 5 000 € à la SARL LIBERATION au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'ordonner sous astreinte de 100 € par jour la restitution des sommes lui restant dues, eu égard à la décision du juge de l'exécution, en conséquence de l'arrêt du 15 mars 2011 ayant cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 novembre 2009, et, subsidiairement, de constater l'absence de toute pièce caractérisant le préjudice de chacun des appelants.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées lors de l'audience des débats.

SUR CE, LA COUR

Compte tenu du lien existant entre les procédures des quatre journalistes, inscrites au rôle sous les numéros 11/07362, 11/07363, 11/07364 et 11/07365, il convient d'en ordonner la jonction.

La cassation prononcée d'une décision en toutes ses dispositions investit la juridiction de renvoi de la connaissance de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit et ce quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation.

Dès lors en l'espèce, il convient d'examiner l'argumentation, différente en son fondement de celle proposée par les quatre journalistes en première instance, développée devant la juridiction du second degré et reprise devant la cour de renvoi, reposant sur une cession du journal Libération au sens de l'article L. 7112-5 1° du code du travail par application des dispositions combinées des articles L. 233-3 III et L. 233-10 du code de commerce.

L'article L. 7112-5 1° du code du travail prévoit que la rupture du contrat de travail à l'initiative du journaliste motivée par la cession du journal lui permet de bénéficier des dispositions des articles L. 7112-3 et L. 7112-4 de ce même code lui donnant droit à une indemnité de licenciement qui ne peut être inférieure à la somme représentant un mois par année ou fraction d'année de collaboration des derniers appointements avec un maximum de mensualités fixé à quinze et qui est déterminée, lorsque l'ancienneté est supérieure à quinze années, par une commission arbitrale.

Il n'est pas contesté qu'une cession de journal peut résulter d'une prise de contrôle.

En application des dispositions de l'article L. 233-3 III sur lequel se fondent les quatre journalistes, deux ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérées comme en contrôlant conjointement une autre lorsqu'elles déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale.

L'article L. 233-10 du code de commerce en sa version en vigueur au moment des faits dispose que sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer les droits de vote pour mettre en oeuvre une politique vis à vis de la société.

En l'espèce si le HFJG est devenu suite à la délibération de l'assemblée générale extraordinaire et ordinaire du 28 avril 2005 l'actionnaire principal du fait de son entrée au capital de la SAIP, il ne dispose que de 38,8 % des droits de vote, les statuts de la SAIP, mis à jour à la même date prévoyant que jusqu'au 27 avril 2015, aucun actionnaire ne peut exprimer en assemblée générale plus de 40 % du nombre total des droits de vote attachés aux actions de la société.

Il n'a pas non plus la majorité des voix au conseil d'administration, bénéficiant de six administrateurs sur les quinze membres composant le conseil d'administration conformément à l'article 14 de ces mêmes statuts et au pacte d'actionnaires signé par tous les actionnaires le 28 avril 2006 y compris par le HFJG ensuite de l'entrée de ce dernier au capital de la société.

Les parties à ce pacte ont par ailleurs prévu qu'à compter du 1er janvier 2012 ou si elle est antérieure, à compter de la date de cessation par Monsieur [F] [H] de ses fonctions de directeur général de la société et/ou de gérant ou de co-gérant de la SARL Libération, le directeur général de la société serait nommé par le conseil d'administration de la société parmi un ou plusieurs candidats présentés par les administrateurs D dans les conditions visées à l'article 16-IV des statuts soit en cas de vacance.

Elles se sont également engagées irrévocablement à faire en sorte que, d'une part le président directeur général de la société (ou le directeur général de la société en cas de dissociation de la société entre les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général de la société) et d'autre part, le ou, en cas de pluralité, l'un des directeurs généraux délégués de la société exerce les fonctions de co-gérants de la SARL Libération.

Il résulte du procès-verbal du 29 juin 2006 versé aux débats que suite à la démission de Monsieur [F] [H] de ses fonctions d'administrateur et de président directeur général de la société, de Monsieur [C] [W], de ses fonctions d'administrateur et de directeur général délégué et plus généralement de leur démission de l'ensemble de leurs mandats au sein du groupe Libération, le conseil d'administration de la SAIP a coopté deux nouveaux administrateurs pour les remplacer sur proposition de Monsieur [S] [Y] soit Monsieur [U] [V]S en remplacement du premier et Monsieur [D] [N] du second et ce pour une durée expirant le 30 septembre 2006.

Il a désigné le premier en qualité de président directeur général et le second de directeur général et, en, conséquence de ces nominations, approuvé leur nomination en qualité de cogérants de la société Libération et ce pour une durée expirant le 30 septembre 2006.

Par décision du 29 juin 2006, l'associé unique de la SARL LIBERATION a ensuite désigné en qualité de gérant de la société Monsieur [V] et Monsieur [N] en remplacement respectivement de Monsieur [H] et de Monsieur [W] pour une durée s'achevant le 30 septembre 2006.

L'existence d'un accord entre l'actionnaire principal et la SCPL sur une nomination de codirigeants sociaux pour une période intérimaire résulte du document intitulé proposition de la société civile des personnels de libération faisant état du trouble suscité par la vacance à la tête du journal suite au départ de [F] [H] souhaité par l'actionnaire principal, d'une rencontre des membres de cette société avec ce dernier et de sa proposition de désigner parmi ses membres un mandataire social, du scrutin organisé par la SCPL auprès des salariés et de la question qui leur était posée à savoir souhaitez-vous que la SCPL accepte, à titre intérimaire, le poste de mandataire social en cogérance avec un représentant désigné par l'actionnaire principal et des articles de presse versés aux débats.

Peu important son caractère ponctuel et l'opposition idéologique des deux catégories d'actionnaires - dès lors que l'action de concert peut avoir pour objet la poursuite d'objectifs propres à chacun d'eux -, l'accord de cogérance intervenu entre la société SCPL et HFJG et matérialisé par la décision du conseil d'administration du 29 juin 2006 pour mettre en place une nouvelle organisation des organes de gestion relève de l'action de concert.

Le contrôle d'une société s'entend du pouvoir de prendre les décisions sociales en assemblée et l'article L. 233-10 du code du commerce ne vise que l'exercice des droits de vote en assemblée générale et non l'exercice des droits de vote dans un organe de gestion ou d'administration.

Si, en l'espèce, les statuts de la SARL LIBERATION prévoient fort logiquement que l'associé unique exerce les pouvoirs dévolus à l'assemblée des associés, ceux de la SAIP stipulent que les décisions collectives des actionnaires sont prises en assemblées, lesquelles sont qualifiées d'assemblées générales ordinaires, d'assemblées générales extraordinaires ou d'assemblées spéciales selon la nature des décisions qu'elles sont appelées à prendre.

Par ailleurs, il est expressément indiqué dans le procès-verbal du conseil d'administration du 29 juin 2006 que les nominations à titre provisoire des deux nouveaux administrateurs seront soumises à ratification de la plus prochaine assemblée des actionnaires.

Si l'accord de cogérance du 29 juin 2006 permettait ainsi à l'actionnaire principal, HFJG, d'accéder à la direction de la SARL Libération, il n'est fourni aucun élément et notamment aucun procès-verbal d'assemblées générales permettant de vérifier que l'action de concert résultant de la mise en place d'une nouvelle organisation des organes de gestion déterminaient en fait les décisions prises en assemblée générale.

Rien ne permet en effet de considérer que par cet accord, limité dans le temps à la gouvernance de l'entreprise, la SCPL a engagé le droit de vote de tous ses actionnaires et d'additionner ainsi ceux de la HFJG et de la SCPL (38,8 % et 18,45 %) représentant de ce fait 57 % des sociétés dans les assemblées générales de la SAIP et ce d'autant que 37 % des salariés inscrits au scrutin organisé par cette dernière avait émis un avis défavorable à la question posée le 28 juin 2006, que tant les articles de presse que les attestations versées aux débats témoignent du climat délétère régnant au sein du journal en raison des oppositions entre les salariés partisans de l'ancienne direction et ceux favorables à un changement.

Par ailleurs, dans une note explicative du vote du 3 janvier 2007 concernant le refus ou l'acceptation des changements de statuts de la SAIP préalable à l'augmentation de capital, adressée à ses actionnaires, la SCPL rappelle qu'elle va devoir réunir sa propre assemblée générale extraordinaire afin de déterminer dans quel sens son gérant votera à l'assemblée générale de la SAIP en faisant état de ce que parmi le personnel qui la compose, la société des rédacteurs a en majorité donné mandat d'autoriser la modification des statuts et la société des fabricants de la refuser, la société des administratifs et commerciaux étant partagée, ce qui tend à accréditer l'absence d'impact de l'accord de cogérance intervenu entre la société SCPL et HFJG et matérialisé par la décision du conseil d'administration du 29 juin 2006 sur les décisions prises en assemblées générales.

La preuve d'une prise de contrôle de l'entreprise de presse par la société HFGJ assimilable à une cession du journal Libération n'étant pas rapportée, les quatre journalistes qui ont rompu leur contrat de travail ne peuvent en conséquence se prévaloir des dispositions de l'article L. 7112-5 1° du code du travail pour obtenir le versement de l'indemnité de licenciement prévue aux articles L. 7112-3 et L. 7112-4 de ce même code.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 11 décembre 2007 en ce qu'il a débouté Madame [O] [K], Madame [B] [M], Monsieur [G] [R] et Monsieur [L] [P] de leurs demandes et les a condamnés aux dépens.

La SARL LIBERATION disposant déjà d'un titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution de l'arrêt de la cour d'appel cassé et annulé par la Cour de cassation, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

PAR CES MOTIFS

Se prononçant au vu de l'arrêt rendu le 15 mars 2011 par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation,

Ordonne la jonction des affaires enrôlées sous les numéros RG 11/07362, 11/07363, 11/07364 et 11/07365 sous un seul et même numéro RG 11/07362,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 11 décembre 2007 en ce qu'il a débouté Madame [O] [K], Madame [B] [M], Monsieur [G] [R] et Monsieur [L] [P] de leurs demandes et les a condamnés aux dépens.

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande en restitution de la SARL LIBERATION en restitution sous astreinte des sommes restant dues en conséquence de l'arrêt du 15 mars 2011 ayant cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 novembre 2009.

Condamne Madame [O] [K], Madame [B] [M], Monsieur [G] [R] et Monsieur [L] [P] aux dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 11/07362
Date de la décision : 04/02/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°11/07362 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-04;11.07362 ?
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