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30/01/2014 | FRANCE | N°13/15627

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 30 janvier 2014, 13/15627


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 30 JANVIER 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15627



Décision déférée à la Cour : Jugement en date du 10 Juin 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - 9ème chambre 1ère section - RG n° 07/15573

( revenant suite à Arrêt en date du 24 janvier 2012 - Cour d'Appel de PARIS - Pôle 5 chambre 8 - RG n° 10/20923 ca

ssé par Arrêt en date du 13 Juin 2013 -Cour de Cassation de paris - Pourvoi n° E 12-16.612 arrêt n° 988)





APPELANTE :



SA COVEA RISKS

ayant son ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 30 JANVIER 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15627

Décision déférée à la Cour : Jugement en date du 10 Juin 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - 9ème chambre 1ère section - RG n° 07/15573

( revenant suite à Arrêt en date du 24 janvier 2012 - Cour d'Appel de PARIS - Pôle 5 chambre 8 - RG n° 10/20923 cassé par Arrêt en date du 13 Juin 2013 -Cour de Cassation de paris - Pourvoi n° E 12-16.612 arrêt n° 988)

APPELANTE :

SA COVEA RISKS

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

assistée de : Me Patricia LE TOUARIN LAILLET de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0133

INTIME :

Monsieur [V] [H]

né le [Date naissance 2]1946 à [Localité 6]

de nationalité française

demeurant [Adresse 3]

[Localité 3]

représenté par : Me Jean-Loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

assisté de : Me Denise MARTZ, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE :

Madame [T] [H]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 5]

de nationalité française

demeurant [Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par : Me Jean-Loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

assistée de : Me Denise MARTZ, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE :

Maître [P] [Q]

és qualités de liquidatrice à la liquidation judiciaire de la SARL MOB'UTIL

demeurant [Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par et assistée de : Me Véronique BERTRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : B0598

INTIMEE :

SCP BROUARD DAUDE

és qualités de mandataire ad'hoc de la société CONVERGENCES

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

n'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François FRANCHI, Président de chambre et Madame Michèle PICARD, Conseillère, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Madame Violaine PERRET, greffier présent lors du prononcé.

La  Société  MOB'UTIL  est  une  entreprise  commerciale,  immatriculée  au  Registre  du

Commerce et des Sociétés sous le numéro PARIS 341 964 989 depuis le 20 août 1987. Elle a pour activité principale, la distribution et la commercialisation de moyens et de supports de communication audiovisuelle.

Madame  [T]  [H]  en était  la  Gérante  de  MOB'UTlL  et  Monsieur  [V]

[H] était salarié cadre.

La comptabilité de la société MOB'UTIL était entièrement traitée par un Cabinet d'expertise comptable, la société CONVERGENCE ayant pour  une  mission  de présentation des comptes   annuels,   à   savoir   l'établissement   du  bilan   et   de   la  liasse fiscale correspondante.

Par avis émis le 27 juillet 2005 par la 12ème Brigade de la Direction de Contrôle Fiscal Ile de France-Est, MOB'UTIL a fait l'objet d'une vérification de comptabilité relative à la période du 01/01/2002 au 31/12/2004 et portant sur les bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés et sur la TVA. 

Ce contrôle a été diligenté du 9 septembre 2005 au 25 novembre 2005.

Et à l'issue de cette vérification de comptabilité, une proposition de rectification a été émise le 20  décembre  2005   pour   la   période   concernée   suivant  une   procédure   de  rectification contradictoire.

Par ailleurs, Monsieur et Mme [H], associés de cette société ont fait l'objet d`un redressement fiscal pour la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 à raison de dividendes perçus, et non déclarés.

L'administration fiscale a relevé que la société Convergences a :

- passé en charges déductibles, dans la catégorie 'Opérations diverses', des écritures de

302 748 euros, 5 980 euros et 100 000 euros, alors qu'il n'existait aucune pièce justificative des opérations concernées ; cette somme a été intégralement rejetée par l'administration fiscale et réintégrée dans les résultats de l'entreprise pour l'exercice 2004 ;

- mentionné, dans ces mêmes charges, des frais professionnels constitués d'honoraires, qui n'avaient pas fait l'objet d'une déclaration annuelle dans le cadre de la DADS2, au titre des années 2002, 2003 et 2004, concernées par la vérification fiscale,

- opéré des doubles comptabilisations et des erreurs comptables, notamment en ce qui concerne l'inscription, en charges, de factures de location de véhicules et de frais d'affranchissement

Par jugement du 24 mars 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête aux fins de décharge des rappels de charges et impôt sur les sociétés présentées par la société Mob'Util et un certificat de non appel a été établi le 24 août 2011 par le greffier en chef de la cour administrative d'appel de Paris ;

La société Mob'Util et les époux [H] ont alors assigné la société d'expertise comptable Convergences, représentée par son liquidateur judiciaire la SCP Brouard-Daudé, et la société d'assurances Covea Risks en responsabilité et paiement de dommages-intérêts, soutenant que certains éléments du redressement fiscal auraient pour origine des erreurs et négligences de l'expert-comptable ;

La société MOB'UTIL a déposé son bilan et a été mise en liquidation judiciaire le 4 décembre 2007.

Par assignation du 13 novembre 2007, MOB'UTIL a sollicité la condamnation de COVEA RISKS, compagnie d'assurances de la société CONVERGENCES représentée par la SCP BROUARD DAUDE, prise en sa qualité de  mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de CONVERGENCES, appelée à garantir son assurée et tendant au paiement de dommages intérêts au titre du préjudice financier correspondant  aux incidences du contrôle fiscal pour la somme de 566.911 euros.

Les époux [H] s'appuyait sur les considérations suivantes :

1 - Il ressort de cette vérification de comptabilité et des investigations effectuées par le dirigeant de  MOB'UTIL,  dans  le  but  de  fournir  les  justifications  demandées  par l'administration fiscale, l'apparition de certains éléments du redressement fiscal ayant pour origine des erreurs et  des  négligences  de  la  Société  CONVERGENCES,  expert-comptable  en  charge  de l'établissement des comptes et bilans de la Société MOB'UTIL pour les périodes en cause.

Ce redressement a eu comme conséquence la mise en liquidation judiciaire de la Société

MOB'UTIL.

Malgré les demandes faites à l'expert-comptable, auteur de cette écriture, celui-ci n'a pas été en   mesure   de   fournir,   ni   à   l'entreprise   MOB'UTIL,   ni   à   l'administration  fiscale,   la justification réelle de cette écriture comptable.

2 - Alors que le Cabinet comptable était en charge du contrôle des comptes de chaque exercice et de l'établissement des documents fiscaux et sociaux de fin d'année (bilans, annexes, liasses fiscales,  déclarations  des  salaires,  commissions  et  honoraires (DADS1 et DADS2),  il est apparu  à  l'occasion  du contrôle  fiscal,  que  la  finalisation des DADS2 des trois exercices concernés (2002, 2003, 2004) n'a pas été effectuée par le Cabinet comptable.

Il en résulte pour l'entreprise MOB'UTIL, que ses charges d'honoraires et de commissions

payées, mais non déclarées dans la DADS2, n'ont pas  été admises en déduction de ses résultats :

-    sur l'exercice 2002 pour une somme de 1.990 euros

-    sur l'exercice 2003 pour une somme de 7.648 euros

-    sur l'exercice 2004 pour une somme de 7.100 euros

Soit pour un total de 16.738 euros.

Également, les écritures de charges déductibles suivantes inscrites par CONVERGENCES

n'ont pu être justifiées par l'expert-comptable et ont été rejetées par l'administration fiscale.

- Honoraires comptables exercice 2004 ' Convergences ' Opérations diverses : 45.053 euros ;

- Une provision pour commissions (OD au 31/12/2004) a été rejetée pour 100.000 euros ;

- Une écriture de régularisation LOPEZ au 31/12/2004 pour 5.980 euros.

Soit pour un total de 151.033 euros.

3 -  Le Cabinet comptable chargé d'établir les bilans et déclarations fiscales, se doit de procéder à la vérification des écritures comptables enregistrées tout au long des années considérées. Le Cabinet comptable a à cet effet une obligation de contrôle des comptes, compte par compte.

Or, il apparaît que des écritures comptables ont été réintégrées dans les résultats fiscaux, suite à des erreurs et doubles comptabilisations.

Ainsi, des locations de véhicules ont été inscrites en charges, une première fois avec la facture et une seconde fois avec le règlement pour un total de 1.440 euros.

De même pour des frais d'affranchissement pour 1.150 euros.

Des factures d'achats du fournisseur 3M pour un total 4 500,47 € ont été comptabilisées régulièrement une première fois, puis une seconde fois par le Cabinet comptable par opérations diverses (OD) au 31/12/2004.

Soit un total réintégré dans le résultat fiscal pour 7.090 euros.

Par jugement du l0 juin 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :

- donné acte à Maître [P] [Q] de son intervention volontaire dans l'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mob'Util,

- dit que la société Convergences a commis une faute dans le cadre de l'exécution de sa mission d'expert-comptable (manquements de l'expert-comptable à son devoir de diligence et de compétence professionnelles ), a fixé le montant du préjudice subi par cette dernière à la somme de 300 000 euros,

- a condamné la société Covea Risks à payer à Maître [Q], és qualités, la somme de 300 000 euros en application du contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle souscrit par la société Convergences et la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté les époux [H] de toutes leurs demandes et a rejeté toutes autres prétentions.

Par déclaration du l 7 juillet 2009, la société Covea Risks a interjeté appel de cette décision.

Elle demandait à la cour de dire les époux [H] irrecevables et en tout cas non fondés en leur demande, à titre principal, infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée a garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile professionnelle de la société Convergences et, statuant à nouveau, de prononcer sa mise hors de cause, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les époux [H] de leurs demandes formées à son encontre, subsidiairement, de constater que tant la société Mob'Util que les époux [H] ont contesté devant le tribunal administratif de Paris les redressements sur lesquels ils fondent leurs réclamations chiffrées, de les débouter, en conséquence, de leurs demandes dès lors qu'ils ne peuvent, en l'état, invoquer un préjudice actuel et certain, encore plus subsidiairement, d'infirmer le jugement dont appel dans ses dispositions ayant conduit à allouer une indemnité de 300 000 euros à la société Mob'Util, de condamner in solidum Maître [Q], ès qualités, et les époux [H] aux entiers dépens.

Les époux [H] demandaient à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit engagée la responsabilité civile professionnelle de la société Convergences et en ce qu'il a dit que la société Covea Risks doit garantir la société Convergences, l'infirmer en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes, statuant à nouveau de ce chef, de condamner la société Covea Risks au paiement de la somme de 18 386 euros correspondant à leur préjudice financier résultant du supplément d`impôt sur le revenu pour l'année 2003 qu'ils ont supporté, de la somme de 257 000 euros correspondant au préjudice économique subi par Mme [H] du fait de la perte de son outil de travail et de ses salaires et de la somme de 10 000 euros correspondant au préjudice moral subi par Mme [H], d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter de l'assignation, de condamner la société Covea Risks à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître [Q], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Mob'Util, demandait à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu`il a retenu la responsabilité civile professionnelle de la société Convergences et en ce qu'il a condamné la société Covea Risks à garantir son assurée, la société Mob'Util, et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de l'infirmer, en revanche, en ce qu'il a fixé à 300 000 euros le montant du préjudice de la société Mob'Util, statuant à nouveau de ce chef, de condamner la société Covea Risks à lui payer la somme de 566 9ll euros à titre de dommages et intérêts, de condamner la même à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

La société Covea Risks faisait plaider que l'impôt que la société Mob'Util aurait, de toute façon, dû payer et les intérêts de retard ne constituent pas des préjudices indemnisables et que les pénalités de 40 % et 100 % n'ont été infligées à l'intéressée qu'en raison de sa propre incurie.

Pour débouter les époux [H] de leurs demandes de garantie de la société Covea Risks, en raison de la faute commise par la société Convergences consistant à avoir omis de déclarer les dividendes versés à Mme [H] au titre de l'année 2003, la cour d'appel de Paris par un arrêt en date du 24 janvier 2012 a dit :

- d'une part, que si l'imprimé fiscal unique rempli par le cabinet d'expertise comptable au titre de l'année 2003 ne comportait pas la déclaration du versement de la somme de 32 500 euros, à titre de dividendes, cette circonstance n'empêchait pas les intéressés de procéder à la déclaration de l' intégralité des dividendes qu'ils avaient reçus en 2003, de sorte que leur carence était, seule, à l'origine du redressement avec majoration et intérêts de retard,

- d'autre part, qu'alors que cette société s'est vu infliger un redressement de près de 600 000 euros, le préjudice en lien avec les fautes commises par l'expert-comptable a été limité à

284 000 euros, ce dont il résulte que les redressements imposés à l'entreprise ne procèdent pas uniquement des manquements de l'expert-comptable à ses obligations professionnelles, mais de fautes et irrégularités imputables à l'entreprise elle-même.

Par décision du 26 mars 2013, la Cour Administrative d'appel de Paris a reconnu la bonne

foi des époux [H] et les a déchargés des pénalités de mauvaise foi afférentes aux

droits correspondant à l'imposition des remboursements d'indemnités kilométriques. (pièce n° 20)

La cour de cassation par un arrêt en date du  13 juin 2013 a considéré qu' en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l'absence de lien de causalité direct et certain entre les fautes retenues à la charge de la société Convergences et le redressement fiscal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé et a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; elle a ainsi remis la cause et les parties dans l'état ou elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

Les époux [H] ont ainsi saisi la cour pour qu'elle statue comme cour de renvoi.

                                                                                             *

La Cour Administrative d'appel de PARIS qui, par décision du 26 mars 2013, a reconnu leur bonne foi en leur qualité respective de gérante et de directeur commercial de la société MOB'UTIL et a  prononcé à leur égard, la décharge des pénalités de 40 % pour manquement délibéré prononcées par l'administration fiscale au titre des remboursements de leurs frais de déplacement engagés à titre professionnel.

                                                                                             *

Les époux [H] observent qu'en l'état de la procédure :

- ils n'ont pu bénéficier de l'avoir fiscal.

- l'expert comptable se devait d'établir la DUA (déclaration unique annuelle) pour l'exercice 2003 et l'absence de DUA a entrainé pour la société MOB'UTIL une amende d'un montant de 12 500 €.

- 1'expert comptable se devait d'établir la déclaration d'échange de biens (DEB) et que son absence s'est traduite par une amende de 9 000 € pour 2002, de 8 250 € pour 2003 et de 8 250 € pour 2004. (pièce n° l - page 28)

- les charges d'honoraires et de commissions payées mais non déclarées dans la DADS2 n'ont pas été admises en déduction des résultats sur 1'exercice 2002 pour une somme de 1 990 € - sur l'exercice 2003 pour une somme de 7 648 € - sur l'exercice 2004 pour une somme de 7 100 €

soit pour un total de 16 738 € .(pièce n°1 -  page 20)

Ils demandent donc à la cour de :

- CONFIRMER   le  jugement   prononcé   par   la 9ème Chambre    du    Tribunal     de  Grande    Instance de  Paris  en  ce  qu'il  a  retenu  la   responsabilité   civile  professionnelle de   la  Société CONVERGENCES,  Expert  Comptable  de  la  société  MOB'UTIL,  du  fait  de ses fautes et négligences dans le cadre de ses missions ;

- CONFIRMER que COVEA RISKS doit garantir son assurée la société CONVERGENCES dans  le  cadre  de  sa  police  d'assurances en  responsabilité  civile  professionnelle  de toutes condamnations mises à la charge de celle-ci ;

Statuant à nouveau :

- INFIRMER le jugement prononcé par la 9° Chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a rejeté les demandes de M. et Madame [H],

Vu les dispositions de l'article 1382 du Code Civil,

- CONDAMNER COVEA RISKS à réparer l'entier préjudice à l'égard de Monsieur et Madame [H] correspondant aux sommes suivantes :

               * dommages-intérêts au titre du préjudice financier subi par Monsieur et Madame

[H] correspondent au supplément d'impôt sur le revenu pour l'année 2003 et s'élevant à la somme de 18 386 Euros ;

               * dommages-intérêts  au  titre  du  préjudice  économique  subi  par  Madame  [H] correspondant à la perte de son outil de travail pour 200 000 €.

               * dommages-intérêts  au  titre  du  préjudice  économique  subi  par  Madame  [H] correspondant à la perte de ses salaires à hauteur de 257 600 Euros ;

               * dommages-intérêts an titre du préjudice moral subi par Madame  [H]  évalué à la somme de 10 000 Euros ;

-  ASSORTIR  le  règlement  de  ces  sommes  des  intérêts  au  taux  légal à compter  de

l'assignation ;

- CONDAMNER COVEA RISKS à régler à Monsieur et Madame [H] la somme

de 5 000 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure

Civile et aux entiers dépens,

Ils observent que l'expert-comptable avait une mission générale l'obligeant à établir la comptabilité d'une entreprise commerciale et d'établir l'ensemble de ses déclarations fiscales et ses bilans, étant ainsi tenu d'une mission générale et d'alerte ainsi que d'un devoir de conseil.

Or, les écritures de charges inscrites par CONVERGENCES n'ont pu être justifiées et ont été rejetées par l'administration fiscale, alors que le cabinet comptable chargé d'établir les bilans et déclarations  fiscales se doit de procéder à la vérification des écritures comptables enregistrées tout au long des années considérées dans le cadre d'un contrôle des comptes, compte par compte.

Dès lors que :

- des écritures comptables ont été réintégrées dans les résultats fiscaux, suite à des  erreurs et doubles comptabilisations (locations de véhicules inscrites en charges une première fois avec la facture et une seconde fois avec le règlement pour un total de 1 440 € - de même pour des frais d'affranchissement pour l 150 € - des  factures  d'achats  du  fournisseur  3M pour  un total de 4 500,47 € comptabilisées régulièrement  une  première  fois,   puis   une  seconde  fois par le  Cabinet comptable par opérations diverses (OD) au 31/12/2004 - soit un total réintégré dans le résultat fiscal pour 7 090 €) .

- l'expert comptable qui a établi le tableau de détermination fiscale de 1'année 2002 a procédé à une réintégration fiscale au titre de l'année 2001, erronée suite à une conversion inversée et que cette erreur a entrainé un rehaussement de l'impôt sur les sociétés de 13 572 €,

- la responsabilité pour faute de l'expert comptable est établie, d'autant qu'un simple pointage des comptes clients et fournisseurs et les rapprochements bancaires auraient suffit à révéler ces erreurs, ce qui,  manifestement n'a pas été fait par ce cabinet comptable.

Par ailleurs, alors qu'il appartenait au Cabinet Comptable de veiller au respect des règles liées aux opérations d'exportation, le contrôle fiscal a montré que les opérations d'exportation réalisées par la société n'ont pas fait 1'objet de l'établissement des déclarations d'échange de biens (DEB), ce qui a eu pour conséquence des amendes fiscales.

Sur le préjudice

Les époux [H] considèrent ainsi que les préjudices consécutifs aux fautes commises par l'expert comptable correspondent aux redressements opérés  par l'administration fiscale ainsi qu'aux majorations pour mauvaise foi par ailleurs appliquées (cf pénalité de 100%concernant l'écriture « opérations diverses » de 302 748,98 €) car le refus de déductions de charges qui ont provoqué les rehaussements des résultats fiscaux de la société MOB'UTIL pour les exercices 2002, 2003 et 2004 ont entraîné la taxation à l'impôt sur les sociétés, ainsi que l'impôt sur le revenu des dirigeants au titre des revenus de capitaux mobiliers, outre les majorations et intérêts de retard.

Sur la responsabilité civile de l'assureur

Les époux [H] considère que la responsabilité civile professionnelle de la société CONVERGENCES doit être couverte par son assureur, la société COVEA RISKS, soulignant que les fautes commises par l'expert Comptable CONVERGENCES ont eu pour conséquence directe et certaine le dépôt de bilan de la Société MOB'UTIL et, par cet effet, la perte de l'outil de travail des époux [H] et plus particulièrement la perte des revenus de Madame [H].

                                                                         *

Maître [Q], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Mob'Util, sollicite la confirmation du jugement  de  première  instance  en  ce  qu'il  a  reconnu  l'existence des  fautes du  Cabinet CONVERGENCES dans le cadre de l'exécution de sa mission d'expert-comptable, engageant sa  responsabilité  civile  professionnelle,  et  en  ce  qu'il  a  été dûment relevé que  COVEA RISKS, assureur de CONVERGENCES, doit sa garantie à l'égard de son assuré, garantie qui n'est plus contestée par COVEA RISKS.

Au demeurant, MOB'UTIL sollicite l'infirmation du jugement sur le montant des dommages intérêts alloués à Maître [Q]-[E] en sa qualité de mandataire liquidateur de MOB'UTIL, ayant fixé le montant du préjudice subi à la seule somme de 300.000 euros.

Elle demande ainsi à la cour de :

- CONFIRMER le jugement prononcé par la 9ème Chambre du Tribunal de Grande Instance de PARIS le 10 juin 2009 en ce qu'il a retenu la responsabilité civile professionnelle de la société CONVERGENCES, au titre des fautes commises dans le cadre de l'exécution de sa mission d'expert-comptable au profit de la société MOB'UTIL, et en ce qu'il a condamné la société d'assurances COVEA RISKS à garantir son assuré, le Cabinet CONVERGENCES ;

Statuant à nouveau,

-    INFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 10 juin 2009 en ce qu'il a fixé le montant du préjudice subi par la société MOB'UTIL à la somme de 300.000 euros.

En conséquence,

-    CONDAMNER  la  société  COVEA  RISKS  à  régler  à  Maître  [Q] [E], en qualité de Mandataire liquidateur  de la SARL MOB'UTIL, la somme de 566.911 euros à titre de dommages intérêts relatifs aux préjudices financiers correspondant aux conséquences du contrôle fiscal subi par la SARL MOB'UTIL avec intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation ;

-    CONDAMNER COVEA RISKS à régler à Maître [Q] [E], en qualité de Mandataire liquidateur de la SARL MOB'UTIL, la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Elle considère que :

- Le Cabinet comptable chargé d'établir les bilans et déclarations fiscales, se doit de procéder à la vérification des écritures comptables enregistrées tout au long des années considérées. Le Cabinet comptable a à cet effet une obligation de contrôle des comptes, compte par compte.

- Par ailleurs, il appartient au Cabinet Comptable de veiller au respect des règles liées aux

opérations  d'exportation.  Or,  il  est  apparu  lors  du  contrôle  fiscal  que  les  opérations

d'exportation réalisées par la société, n'ont pas fait l'objet de l'établissement des déclarations d'échange de biens (DEB), ce qui a eu pour conséquence des amendes fiscales.

- enfin, les déclarations de relevés de frais généraux et de paiements de capitaux mobiliers

ont été omises par l'expert-comptable et ont donné lieu à des amendes fiscales

- L'expert-comptable chargé d'établir la comptabilité d'une entreprise commerciale et d'établir ses bilans est tenu d'une mission générale et d'alerte ainsi que d'un devoir de conseil.

- Il doit transcrire de manière réfléchie les données communiquées par son client et obtenir les documents et renseignements nécessaires afin d'établir une comptabilité véritable et sincère, qui  s'avère,  dans  l'hypothèse  d'un  contrôle,  probante et  conforme  aux  exigences  légales et réglementaires.

- Les préjudices sont consécutifs aux fautes commises par l'expert-comptable car les erreurs et l'absence de justifications dans la passation de ses écritures comptables, les

défauts de contrôle et d'établissement de documents obligatoires imputables au Cabinet comptable ont donné lieu à des refus de déductions de charges et par voie de conséquence des rehaussements des résultats fiscaux de la société MOB'UTIL pour les exercices 2002, 2003 et 2004. Les sommes représentant des charges déductibles, aucun impôt société sur lesdites sommes n'aurait dû être mis en recouvrement.

- le montant total des rappels et compléments d'impôts sociétés, intérêts de retard, pénalités et amendes fiscales s'élèvent à la somme de 566.911 euros mise à la charge de MOB'UTIL et ces rappels d'impôt sociétés augmentés des pénalités de 40 % ainsi que la pénalité de 100 % et les amendes constituent bien évidemment un préjudice indemnisable actuel et certain.

                                                                  *

La société COVEA RISKS appelante demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 10 juin 2009 en ce qu'il a débouté les époux [H] de toutes leurs demandes formées à l'encontre de COVEA RISKS.

-        Réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 10 juin 2009 en ce qu'il a alloué une indemnité à liquidation de la société MOB'UTIL.

-        Dire et juger que les sommes consignées par COVEA RISKS lui seront restituées.

Condamner les époux [H] et Maître [Q] [E] es qualité aux entiers dépens d'instance et d'appel et ce avec distraction au profit Maître  Jeanne BAECHLIN, Avocat  près  la  Cour  conformément  aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Sur l'absence de lien de causalité entre le préjudice allégué par les époux    [H]  et la faute alléguée contre le Cabinet CONVERGENCES au titre des 32.500 Euros de dividendes non déclarés

La société COVEA RISKS considère que :

- il n'est pas contesté que le Cabinet CONVERGENCES a omis dans les déclarations de la société MOB'UTIL les 32.500 Euros de dividendes versés aux  époux [H] mais il n'a jamais été l'expert comptable des époux [H].

- les époux [H] n'ont jamais ignoré avoir perçu 32.500 euros de dividendes au titre de l'année 2003 : somme suffisamment significative pour qu'ils en aient eu parfaite connaissance et conscience.

- les  époux  [H]  n'ont  jamais  ignoré  devoir  déclarer,  comme  revenu imposable, les dividendes qu'ils percevaient annuellement.

- le Cabinet CONVERGENCES n'a jamais été en charge de la déclaration personnelle des époux [H] auxquels il appartenait de déclarer ce revenu de capitaux mobiliers.

- le lien de causalité manque entre la faute du Cabinet CONVERGENCES à l'égard de la société MOB'UTIL et le rehaussement d'impôt des époux [H] ;

Ainsi, les époux [H] ne peuvent alléguer d'aucun préjudice indemnisable.

Sur l'absence de lien de causalité entre préjudice allégué par les époux [H] et les fautes retenues contre CONVERGENCES au titre de la situation de la société MOB'UTIL :

- si le Cabinet CONVERGENCES a commis des erreurs au titre de ses travaux comptables pour la société MOB'UTIL, il n'est pas démontré que la société MOB'UTIL  aurait  été pérenne  et aurait été de nature à leur procurer les revenus allégués au titre de la perte invoquée puisqu'elle présentait en effet depuis 2005 des résultats déficitaires et la pérennité de la société était compromise avant 2008.

- les redressements, qui constituent le rétablissement de l'impôt normalement dû par le contribuable en application de la loi fiscale ne peut être générateur d'un préjudice et moins encore d'un préjudice de nature indemnisable

- ni l'intérêt de retard ( 27.137 Euros), ni les pénalités de 100 % ne trouvent leur cause dans des fautes du Cabinet CONVERGENCES

Sur les majorations

Les majorations de mauvaise foi appliquées pour manquement délibéré du dirigeant de la société MOB'UTIL tant au titre de la TVA qu'au titre de l'impôt sur le revenu des années 2002, 2003 et 2004, qui représentent 93.621 Euros, ne peuvent constituer du préjudice indemnisable.

                                                                    *

SUR CE,

Il ressort des pièces produites que :

1- la vérification de la comptabilité de la SARL MOB'UTIL pour  la période du 01/01/2002 au 31/12/2004 a conduit la Direction Générale des Impôts à reprocher au contribuable :  

-        des charges 2004 inscrites sur 2003 pour 302.748 €,

-        une omission de déclaration DADS2 pour les trois exercices à hauteur de 16.738 € de charges d'honoraires,

-        des charges non justifiables par les pièces comptables,

-        des doublons dans la comptabilisation de certaines charges pour 7.090 €,

et à lui proposer une rectification au titre des exercices 2002, 2003 et 2004 de :  

-        79.828 € pour l'exercice 2002,

-        61.334 € pour l'exercice 2003,

- 81.299 € pour l'exercice 2004.

soit une imposition définitive de 524.716 € au titre de l'impôt sur les sociétés de l'entreprise MOB'UTIL en droits, intérêts de retard et pénalités de mauvaise foi de 40 % ainsi que des amendes fiscales pour 42.195 € (pièce GENNERAT 1).

 

 

2- au titre de dividendes non déclarés, les époux [H] se sont vus réclamer :  

-        34.768 € en droits,

-        4.791 € en majoration de 40 % pour mauvaise foi,

- 1.617 € en intérêts de retard.

Sur la responsabilité de l'expert comptable vis-à-vis de son client, la société MOB'UTIL

La cour constate qu'il n'avait pas été adressé par l'expert comptable de lettre de mission et que les factures adressées par l'expert comptable à la société en paiement des honoraires ne sont pas produites par l'une ou l'autre partie.

Les époux [H] invoque ainsi une « mission générale » et verse une attestation de Monsieur [Y] [R], ancien salarié employé de novembre 2000 à février 2007 auprès du Cabinet d'expertise comptable CONVERGENCES, dont on ne connaît pas les conditions d'obtention, disant que la mission était bien générale et que l'expert-comptable avait la mission de faire les déclarations sociales pour le compte de MOB'UTIL

La cour considère dès lors devoir distinguer les questions de :

- la passation des écritures comptables et le classement des pièces comptables,

- l'établissement des comptes annuels et des déclarations fiscales.

- l'obligation d'information ou de conseil

S'agissant des écritures comptables,

La cour rappelle que cette mission qui comprend l'enregistrement des factures, l'établissement des déclarations de TVA et accessoirement si cela couvre la comptabilité sociale, l'établissement des   fiches de salaires, ne rentre pas naturellement dans le cadre de la mission de l'expert comptable, sauf mission particulière mais qu'elle implique alors une obligation de contrôle des comptes, compte par compte.

Elle observe qu'il ressort du rapport de vérification que les redressements trouvent leur source sur le rejet des écritures passées par fournitures de pièces les justifiant invalides ou absence de pièces (frais des époux [H]) ou disparation de pièces ne permettant pas au vérificateur de s'assurer que les opérations passées en comptabilité correspondent à des opérations différentes, réalisées et comptabilisées à des époques différentes et donc qu'il n'y a pas eu double comptabilisation.

Elle observe à cet égard que la déclaration de sinistre du 23 octobre 2007 du cabinet CONVERGENCES à son assureur couvre ce point à hauteur des 302 748€ en cause, en faisant état d'une mise à jour informatique sur deux années du logiciel comptabilité du client sur lequel des erreurs de manipulation avaient fait perdre un certain nombre de données comptables ( factures d'achats relatives aux exercices 2002 et 2003) d'une année sur l'autre et de la passation d'une écriture rectificative en 2004 représentant ainsi des comptes fournisseurs non pris en compte.

Il se déduit de ces éléments que les redressements opérés à ce titre proviennent non de la passation d'écritures irrégulières ou fictives ou même d'erreurs d'imputation mais de l'incapacité du contribuable, la société MOB'UTIL, à fournir les pièces justifiant les opérations passées, alors qu'il n'est pas démontré que le cabinet CONVERGENCES avait la responsabilité de l'archivage des pièces comptables ; et la cour observe que la société MOB'UTIL était assisté lors de la procédure fiscale par un conseil qui n'était pas la société CONVERGENCES.

C'est en effet faute de pouvoir justifier de la matérialité  des achats que l'entreprise a été redressé, le vérificateur considérant alors qu'il s'agissait de revenus distribués, sans bénéficiaire révélé. Dès lors, ce n'est pas l'expert comptable qui n'est pas dans la procédure fiscale, de faire la démonstration de l'existence de ces pièces mais à l'entreprise assistée en tant que de besoin par ses conseils. Et si cette preuve l'avait été, cela aurait constitué au plus une mauvaise imputation comptable impliquant en tant que de besoin un redressement sur les exercices 2002 et 2003 compensant le redressement 2004.

 

La cour considère ainsi qu'il n'y a pas de faute pouvant être reprochée au Cabinet CONVERGENCES et donc ne pouvoir faire droit à une demande de réparation du chef du redressement fiscal, d'autant que la société MOB'UTIL ne démontre pas, sur l'avis de mise en recouvrement du 26 avril 2007, avoir acquitté une quelconque somme au titre des redressements, exposant au contraire avoir déposé le bilan à la suite de la notification de redressement.

Et il est de jurisprudence constante qu'un préjudice ne peut découler du paiement d'un impôt auquel le contribuable est légalement tenu, dès lors qu'il n'est pas établi que dûment conseillé, l'intéressé aurait pu bénéficier d'un régime fiscal plus avantageux.

Quant à la majoration pour mauvaise foi appliquée (pénalité de 100%), aux intérêts de retard au titre de l'impôt sur les sociétés et aux pénalités au taux de 40% ainsi que celles à 100%, elles ne peuvent être mises à la charge du cabinet CONVERGENCES, étant rappelé au surplus que :

- l'article 1727 du Code Général des Impôts dispose que l'intérêt de retard n'est pas une sanction et la jurisprudence de la Cour de Cassation rappelle que, dès lors qu'ils sont l'accessoire d'un impôt normalement dû, les intérêts de retard ne constituent jamais un préjudice indemnisable en considération du fait qu'ils ne sont que la contrepartie du temps durant lequel le contribuable a continué de bénéficier de  sommes  qu'il  aurait  dû, plus  tôt, verser à l'administration Fiscale et qu'il a pu conserver  dans  sa  trésorerie,  faire  fructifier  ou utiliser à d'autres fins,

- l'article 1729 du Code Général des Impôts prévoit l'application d'une majoration de 40 % en cas de manquement délibéré du contribuable et non de l'expert comptable, tiers au contrôle.

- l'amende de 100 % de l'article 1759 du CGI s'applique au contribuable qui refuse de révéler l'identité de sommes versées ou distribuées et non à l'expert comptable.

S'agissant de la présentation  des comptes annuels et des déclarations fiscales

La cour observe que le cabinet CONVERGENCES reconnaît avoir eu cette mission laquelle n'implique nullement de procéder  à  la  vérification  des  écritures  comptables  enregistrées tout  au  long de l'exercice mais la vérification de la cohérence des écritures outre le contrôle des inventaires. Elle comprend l'établissement du bilan et des annexes, de la liasse fiscale, de la déclaration des salaires, commissions et honoraires (DADSI  et DADS2), de la déclaration des frais généraux. 

Or,

- les déclarations d'échange de biens (DEB), dont l'absence a eu pour conséquence des amendes fiscales, n'ont pas été établies.

- l'établissement des déclarations de TVA n'était pas concordant avec la comptabilité enregistrée,

- l'établissement de la déclaration de DADS2 des trois exercices concernés (2002, 2003, 2004),  l'établissement de la déclaration des frais généraux 2067 pour l'année 2002,  n'ont pas été effectués par le cabinet comptable.

- l'établissement de la déclaration de l'article 242 ter CGI de  la  société  MOB'UTIL relatives aux 32.500 euros de dividendes versés aux époux [H], n'a pas eu lieu.

Le préjudice en résultant est le suivant :

* défaut de déclaration des opérations d'exportation réalisées par la société MOB'UTIL (12 en 2002, 11 en 2003 et 11 en 2004) à raison d'une amende de 750 euros par déclaration manquante :

2002 : 9.000 euros

2003 : 8.250 euros

2004 : 8.250 euros

défaut de déclarations de relevés de frais généraux :

- 2002 : 4.195 euros

défaut de paiements de capitaux mobiliers :

- 2003 : 12.500 euros.

soit un total de 42.195 euros

La Cour considère ne devoir condamner la société COVEA  RISKS au titre de sa garantie de son  assurée, la société CONVERGENCES à payer à Maître [Q]-[E], ès-qualités, la somme de 42 195 euros.

S'agissant de l'obligation d'information et de conseil

S'il est reproché au cabinet CONVERGENCES de n'avoir pas transcrit « de manière réfléchie » les données communiquées par son client en obtenant les documents et renseignements nécessaires afin d'établir une comptabilité véritable et sincère et donc probante, il convient de rappeler que la comptabilité de la société MOB'UTIL n'a pas été rejetée comme non probante et les écritures passées l'ont été sur la base de pièces que la cour ne peut apprécier puisqu'elles ont disparues ou établies par les époux [H] et jugées non adéquates pour pouvoir être prises en compte par l'administration fiscale.

Aucun préjudice n'est donc démontré.

Sur la responsabilité de l'expert -comptable vis-à-vis des époux [H]

La cour observe que :

- le cabinet CONVERGENCES n'a jamais été l'expert-comptable des époux [H] et n'a jamais été en charge de la déclaration personnelle des époux [H] auxquels il appartenait de déclarer le revenu de leurs capitaux mobiliers comme tout contribuable.

- le rehaussement d'impôt supporté par les époux [H] ayant pour seule cause la non-déclaration de revenus de capitaux mobiliers dont ils n'ignoraient ni l'existence, ni le caractère imposable, ni l'obligation de faire figurer ce revenu imposable dans leurs déclarations personnelles de revenu.

Cependant, elle n'ignore pas que l'article 242 ter du code général des impôts prévoit que : «Les personnes qui assurent le paiement des revenus de capitaux mobiliers visés aux articles 108 à 125 ainsi que des produits des bons ou contrats de capitalisation et placements de même nature sont tenues de déclarer l'identité et l'adresse des bénéficiaires ainsi que, par nature de revenus, le détail du montant imposable et du crédit d'impôt, le revenu brut soumis à un prélèvement et le montant dudit prélèvement et le montant des revenus exonérés....

La déclaration mentionnée au premier alinéa doit être faite dans des conditions et délais fixés par décret. Une copie de cette déclaration doit être adressée aux bénéficiaires des revenus concernés.».

Autrement dit, la déclaration visée par ce texte doit être établie en deux exemplaires par le déclarant, l'un étant adressé à l'administration fiscale, l'autre au bénéficiaire des revenus de capitaux mobiliers.

Elle considère alors que le cabinet CONVERGENCES, en ne respectant pas cette obligation, a fait perdre une chance aux époux [H] de faire face à leur obligation en la matière et que cette faute doit être indemnisée à hauteur de la somme de 5000€.

Sur la réparation des divers préjudices tirés de la liquidation judiciaire de la société MOB'UTIL (préjudice économique subi par Madame [H] correspondant à la perte de son outil de travail pour 200 000 € - préjudice  économique  subi  par  Madame  [H] correspondant à la perte de ses salaires à hauteur de 257 600 Euros - préjudice moral subi par Madame [H] évalué à la somme de 10 000 Euros)

Si les époux [H] soutiennent que le montant important des redressements  fiscaux notifiés  à MOB'UTIL sont à l'origine de son dépôt de bilan et que le Cabinet CONVERGENCES est lui-même à l'origine des redressements dès lors que ses erreurs et fautes caractérisent un manquement à ses obligations contractuelles, et donc à la perte de son outil de travail et de ses salaires par Mme [H], la cour observe que :

- les demandeurs ne démontrent, pas plus que le mandataire judiciaire, que cette société était pérenne puisque la perte de l'exercice clos au 31.12.2006 est de - 232.727 euros et si ce résultat intègre l'inscription d'une provision pour risques et charges de 200.000 euros liée au contrôle fiscal, la perte d'exploitation n'en était pas moins réelle étant rappelé qu'elle intégrait la passation de frais personnels aux époux [H] non négligeables. Au surplus, la responsabilité retenue du cabinet CONVERGENCES est très loin du montant de l'insuffisance d'actif.

Sur les frais irrépétibles

En outre, il est demandé à la Cour de condamner COVEA RISKS à régler à Maître [Q] [E], prise en sa qualité de Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL MOB'UTIL, ainsi qu'aux époux [H] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et aux  entiers dépens.

La cour ne fera pas droit à ces demandes dès lors que ces parties succombent et elle laissera à chacune des parties leurs dépens.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement prononcé par la 9° Chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a rejeté les demandes de M. et Madame [H], au titre des préjudices économiques et moral

 CONFIRME le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité civile professionnelle de la société CONVERGENCES, au titre des fautes commises dans le cadre de l'exécution de sa mission d'expert-comptable au profit de la société MOB'UTIL,  et condamné  la  société  d'assurances COVEA RISKS à garantir son assuré, le Cabinet CONVERGENCES ;

INFIRME le jugement pour le surplus.

Statuant à nouveau,

CONDAMNE COVEA RISKS à régler :

* à Maître [Q] [E], en qualité de Mandataire liquidateur de la SARL MOB'UTIL, la somme de 42 195 euros

* à Monsieur et Madame [H] la somme de 5000€ au titre du préjudice tiré de l'absence d'établissement de la déclaration de revenus de capitaux mobiliers

DIT que les sommes consignées par COVEA RISKS lui seront restituées sous réserve des montants dues par elle ;

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires y compris les demandes de frais irrépétibles,

LAISSE leurs dépens à chacune des parties.

LA GREFFIÈRE, LE PRESIDENT,

V. PERRET F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 13/15627
Date de la décision : 30/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°13/15627 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-30;13.15627 ?
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