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23/01/2014 | FRANCE | N°13/00620

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 23 janvier 2014, 13/00620


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 23 JANVIER 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/00620



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 28 Décembre 2012 -Président du TGI de PARIS





APPELANTE



Madame [F] [H]

[Adresse 4]

[Localité 4]



Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER

- BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Assistée de Me Hubert DIDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R0172







INTIMES



Monsieur [J] [H]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représent...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 23 JANVIER 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/00620

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 28 Décembre 2012 -Président du TGI de PARIS

APPELANTE

Madame [F] [H]

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Assistée de Me Hubert DIDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R0172

INTIMES

Monsieur [J] [H]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Michel BLIN de la SCP BLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0058

Assisté de Me Yves VIVIEZ DE CHATTELARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1259

SARL CAMPER SARL

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée et Assistée de Me Sandra GRASLIN LATOUR, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301

UDAF D'INDRE ET LOIRE

en qualité de tuteur de Madame [X] [L]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assisté de Me Christine VAZEREAU, avocat au barreau de TOURS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Frédéric CHARLON, Président de chambre

Mme Evelyne LOUYS, Présidente de chambre

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Frédéric CHARLON, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

Vu l'ordonnance en date du 28 décembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a':

- déclaré recevables les demandes de M. [J] [H] et de L'Udaf d'Indre-et-Loire,

- Ordonné le retrait de la vente aux enchères publiques des livres visés dans l'assignation, organisée par la société SVV Camper sur requête de Mme [F] [H],

- désigné L'Udaf en qualité de séquestre, la société SVV Camper étant désignée en qualité de séquestre à titre provisoire,

- dit que les frais de transport des objets et de séquestre seront à la charge de Mme [F] [H],

- rejeté les demandes de Mme [F] [H],

- rejeté les demandes de la société SVV Camper à l'encontre de M. [J] [H] et de L'Udaf,

- dit n'y avoir lieu à référé s'agissant des demandes de la société SVV Camper à l'encontre de Mme [F] [H],

- rejeté les autres demandes';

- laissé à la charge de chaque partie ses propres dépens';

Vu l'appel interjeté contre cette décision par Mme [F] [H] le 11 janvier 2013';

Vu les conclusions de Mme [F] [H] en date du'7 novembre 2013';

Vu les conclusions de M. [J] [H] en date du 20 novembre 2013';

Vu les conclusions de L'Udaf en date du 13 novembre 2013';

Vu les conclusions de la société SVV Camper en date du 25 novembre 2013';

SUR QUOI LA COUR';

Considérant que par jugement du 31 août 2012 le juge des tutelles de Tours avait prononcé l'ouverture de la tutelle de Mme [X] [L] veuve [H] et nommé l'association Union des Associations Familiales de l'Indre-et-Loire (l'Udaf) en qualité de mandataire judiciaire à la protection de cette majeure';

Considérant qu'ultérieurement Mme [F] [H], fille de Mme [X] [H], avait confié à la société de vente volontaire de meubles aux enchères publiques Camper (SVV Camper) une collection de livres anciens pour qu'elle les vende aux enchères publiques le 8 novembre 2012';

Considérant que M. [J] [H], fils de Mme [X] [H], avait eu connaissance de ce projet et avait engagé devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris une action pour obtenir le retrait de ces livres de la vente en prétendant que ces biens appartenaient à sa mère et que Mme [F] [H] n'avait aucunement le droit d'en disposer';

Que par ordonnance du 8 novembre 2012 le juge des référés décidait de suspendre la vente de lots de livres figurant dans le catalogue établi par la SVV Camper et renvoyait l'affaire pour statuer sur les autres demandes et qu'ainsi, par une seconde décision en date du 28 décembre 2012, le juge des référés déclarait recevables les demandes de M. [J] [H] et ordonnait principalement le retrait de certains livres de la vente aux enchères';

Considérant que Mme [F] [H] et l'Udaf soulèvent l'irrecevabilité des prétentions de M. [J] [H] pour défaut de qualité à agir dans une instance ayant pour objet d'empêcher la vente de biens dont le demandeur prétend lui-même qu'ils appartiennent à sa mère';

Considérant que M. [J] [H] invoque tout d'abord les articles 430 et 436 du code civil'; que cependant ces dispositions combinées, qui permettent aux personnes ayant qualité pour demander l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle d'accomplir des actes conservatoires indispensables à la préservation de la personne protégée, ne sont applicables que si cette dernière se trouve sous le régime de la sauvegarde de justice alors qu'au moment de l'introduction de l'instance Mme [X] [H] se trouvait sous tutelle et que seul son tuteur avait le droit de la représenter dans les actes de la vie civile, et notamment le droit d'agir en justice pour faire valoir ses droits patrimoniaux ;

Considérant en outre que même en admettant que l'action en justice mise en 'uvre par M. [J] [H] pour le compte de sa mère soit utile à la conservation de ses droits, les règles de la gestion d'affaires ne peuvent avoir pour conséquence de contraindre Mme [F] [H] à accepter un débat judiciaire engagé par un demandeur agissant comme gérant d'affaires';

Qu'il appartenait plutôt à M. [J] [H], dès qu'il eut connaissance d'existence de la vente aux enchères du 8 novembre 2012, d'en informer le juge des tutelles, ce qu'il n'a pas fait';

Considérant qu'il convient, compte tenu de l'ensemble de ces éléments et en application des articles 504, alinéa 2 du code civil et 122 du code de procédure civile, d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle déclare recevables les prétentions de M. [J] [H]'; que celles-ci doivent être déclarées irrecevables';

Considérant que, pour sa part, l'Udaf demande de confirmer la décision de première instance ainsi que de condamner la société SVV Camper à lui verser le prix de vente des livres litigieux et de condamner Mme [F] [H] à payer les frais de séquestre et de transport de ces objets';

Considérant que Mme [F] [H] soulève l'irrecevabilité de ces demandes en prétendant que, selon conclusions du 22 novembre 2012, l'Udaf s'était contentée de s'en rapporter à la sagesse du juge avant de changer totalement de position la veille de l'audience';

Mais considérant qu'il n'est pas avéré ni même prétendu que l'Udaf se serait rapportée, lors de l'audience du 13 décembre 2012, aux prétentions et aux moyens qu'elle avait formulés par écrit le 22 novembre 2012, de sorte qu'il n'y a lieu de prendre en considération que les seules prétentions orales reprises dans l'ordonnance elle-même au titre de l'exposé du litige, et dont il ressort que l'Udaf revendiquait, au nom de Mme [X] [H], la propriété des livres mis en vente et sollicitait qu'il soit fait injonction à la SVV Camper de les lui restituer et que pour le surplus l'Udaf demandait le rejet des demandes «'des défendeurs'», c'est-à-dire M. [J] [H] et la société SVV Camper';

Qu'il apparaît dès lors que ces demandes formées en cause d'appel par l'Udaf contre Mme [F] [H] sont identiques ou tendent aux mêmes fins que ses demandes de première instance, compte tenu de l'évolution du litige et compte tenu de ce que, selon l'Udaf, la somme de 40.000 euros correspondrait au produit de la vente des livres';

Qu'en conséquence les demandes formées devant la cour par l'Udaf sont recevables';

Considérant que, sur le bien fondé de ces prétentions, il est de principe que les mesures de remise en état destinées à faire cesser un trouble manifestement illicite ou à prévenir un dommage imminent ne peuvent être décidées en référé que si la partie qui les demande établit l'existence d'une perturbation matérielle ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue ou est susceptible de constituer une violation évidente de la règle de droit';

Considérant que les livres proposés à la vente aux enchères avaient appartenu aux parents de Mme [F] [H] qui les avaient eux-mêmes acquis ou en avaient hérité et les avaient placés dans des bibliothèques à leur domicile';

Que Mme [F] [H] produit aux débats des attestations de ses deux s'urs et des propres filles de M. [J] [H] selon lesquelles Mme [F] [H] avait reçu des livres anciens par dons manuels de ses parents ou de ses grands parents'; que l'une de ces nièces et encore trois autres personnes précisent dans leurs attestations que des livres anciens se trouvaient au domicile de Mme [F] [H]'; qu'ainsi elle avait la possession matérielle de ces biens quand elle en a confié la vente à la société SVV Camper et qu'aucun élément des débats ne permet d'affirmer que, de toute évidence, Mme [F] [H] aurait détenu les livres à titre précaire ou que sa possession était affectée d'un vice'à la date prévue pour cette vente ;

Considérant qu'en conséquence la preuve d'un trouble manifestement illicite ou d'un dommage imminent n'est pas rapportée par l'Udaf et qu'il convient d'infirmer les dispositions par lesquelles l'ordonnance du 28 décembre 2012 ordonne le retrait des livres de la vente aux enchères, désigne des séquestres et met à la charge de Mme [F] [H] les frais qui en découlent';

Qu'il en résulte que l'Udaf sera déboutée de ses demandes contre Mme [F] [H] relative au paiement des frais de séquestre et de transport des livres et contre la société SVV Camper en paiement de la somme de 40.000 euros';

Considérant qu'est seulement constatée une situation favorable à Mme [F] [H] en tant que possesseur des livres sans que l'on soit en mesure, dans le cadre des pouvoirs accordés à la juridiction des référés, de reconnaître à celle-ci un droit de propriété sur ces biens et qu'il y a lieu de débouter Mme [F] [H] de sa demande sur ce chef';

Considérant que la cour ignore quels sont les «'livres visés dans l'assignation'», celle-ci n'étant produite aux débats par aucune des parties, il conviendra à toutes fins utile de dire que le lot n°54 ne fait pas partie des biens confiés par Mme [F] [H] à succession et qu'il ne devra pas être restitué à celle-ci';

Considérant que la SVV Camper sollicite que «'la partie succombante'» soit condamnée à lui payer les sommes provisionnelles de 9.905,83 euros pour les frais préparatoires et les frais de tenue de la vente du 8 novembre 2012 et de 11.200 euros au titre des pertes éprouvées à la suite de l'annulation de la vente et au titre de son préjudice moral et d'atteinte à son image';

Qu'il apparaît cependant que la vente du 8 novembre 2012 a pu se dérouler et que des objets ont été vendus pour le compte de tiers sans qu'il soit possible d'évaluer en référé la proportion des frais de la société SVV Camper qui auraient été liés à la seule vente des lots confiés par Mme [F] [H] dès lors que le jeu des enchères est intrinsèquement aléatoire et qu'il n'est pas certain que tous les lots de Mme [F] [H] auraient été vendus, fût-ce à un prix correspondant à l'estimation basse du catalogue, car il est toujours envisageable qu'une telle vente échoue, soit parce que les biens proposés lors de la vente volontaire ne trouvent pas preneurs, soit parce que le prix de réserve fixé par le vendeur n'est pas atteint';

Qu'ainsi l'allocation de tout ou partie des sommes de 9.905,83 euros et 11.200 euros se heurte à des contestations sérieuses et que les demandes en paiement de ces provisions seront rejetées';

Considérant qu'enfin la SVV Camper demande une somme provisionnelle de 15.000 euros au titre de son préjudice moral et de l'atteinte à son image';

Considérant qu'il apparaît clairement que M. [J] [H] a été pour le moins imprudent quand, sans disposer d'un quelconque droit d'action, il a saisi le juge des référés dans le but d'empêcher la vente des livres, alors qu'il aurait dû se contenter d'informer le juge des tutelles de l'imminence de la vente et de l'existence d'une situation qui, aux yeux de ce fils de la personne protégée, semblait de nature à porter préjudice aux intérêts de celle-ci';

Que cette imprudence a été la cause évidente de la suspension de la vente des lots apportés par Mme [F] [H] et de la perturbation des opérations menées par la société SVV Camper, laquelle a dû retirer ces objets in extremis en laissant supposer au public et aux professionnels de la vente aux enchères présents dans la salle - ainsi que le montrent les attestations produites aux débats - que la société SVV Camper avait commis des faits répréhensibles contraires aux devoirs de sa charge';

Qu'il convient ainsi de mettre à la charge de M. [J] [H] une somme provisionnelle de 5.000 euros correspondant au montant non sérieusement contestable de son obligation à l'égard de la société SVV Camper';

Considérant qu'en outre, M. [J] [H] devra verser à la SVV Camper, d'une part, au titre des frais de séquestre des livres, une somme mensuelle de 50 euros hors taxes à compter du 8 novembre 2012 jusqu'à la date de la signification de la présente ordonnance, date à laquelle Mme [F] [H] pourra retirer ces objets, d'autre part la somme de 436,80 euros, arrêtée au 30 juillet 2012, au titre des frais de garde-meubles exposés';

PAR CES MOTIFS

INFIRME l'ordonnance rendue le 28 décembre 2012 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris';

Statuant à nouveau':

DÉCLARE irrecevables les demandes présentées par M. [J] [H]';

DÉBOUTE l'Udaf de l'Indre-et-Loire (l'Udaf) des demandes formées à l'encontre de Mme [F] [H] et de la société de vente volontaires de meubles aux enchères publiques Camper (la société SVV Camper)';

DÉBOUTE Mme [F] [H] de sa demande tendant à voir juger qu'elle est propriétaire des ouvrages qu'elle a confiés à la SVV Camper';

ORDONNE la mainlevée de la mesure de suspension de la vente aux enchères publiques de ces livres, sauf à préciser que le lot n°54 ne fait pas partie des biens confiés par Mme [F] [H] à la SVV Camper et qu'il ne devra pas lui être restitué';

CONDAMNE M. [J] [H] à payer à la SVV Camper les sommes provisionnelles de':

- 50 euros HT par mois, à compter du 8 novembre 2012 jusqu'à la date de la signification de la présente ordonnance au titre des frais de séquestre des livres,

- 436,80 euros TTC, arrêtée au 30 juillet 2012, au titre des frais de garde-meubles,

- 5.000 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice moral et de l'atteinte à l'honorabilité de cette société,

DÉBOUTE la société SVV Camper du surplus de ses demandes de provisions';

DÉBOUTE l'Udaf de ses demandes contre Mme [F] [H] et contre la société SVV Camper';

CONDAMNE M. [J] [H] aux dépens de première instance et d'appel';

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

LAISSE à la charge de M. [J] [H] et de l'Udaf leurs frais irrépétibles et condamne M. [J] [H] à payer à Mme [F] [H] la somme de 3.000 euros et à SVV Camper la somme de 3.000 euros';

ACCORDE à la SCP Grappotte-Benetreau le bénéfice du recouvrement direct des dépens avancés sans avoir reçu provision';

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 13/00620
Date de la décision : 23/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°13/00620 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-23;13.00620 ?
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