RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRÊT DU 16 Janvier 2014
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/01775
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Janvier 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AUXERRE section Industrie RG n° 09/00113
APPELANT
Monsieur [K] [N]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant en personne
assisté de M. Guy LOYER, Délégué syndical ouvrier dûment mandaté
INTIMEE
Me [B] [H] - Mandataire liquidateur de la SAS ATELIERS HEROLD
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Isabelle D'AUBENTON CARAFA, avocat au barreau de PARIS, toque : G0421
PARTIE INTERVENANTE :
UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Sara PASHOOTAN, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Patrice LABEY, Président et Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller, chargés du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice LABEY, Président
Monsieur Bruno BLANC, Conseiller
Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller
Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après prorogation du délibéré.
- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Melle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [N] a été engagé par la SAS ATELIERS HEROLD le 8 janvier 1987 en qualité de chaudronnier puis nommé chef d'atelier à compter du 1er octobre 2006.
M. [N] a fait l'objet le 25 février 2009 d'une convocation à un entretien préalable à licenciement, qui s'est tenu le 06 mars 2009 avant d'être licencié par lettre du 10 mars 2009 pour faute grave constituée par la mauvaise qualité de ses relations avec le chargé d'affaires, le personnel administratif, le personnel d'atelier, l'absence de rôle moteur dans l'organisation de l'atelier, le désintérêt pour l'activité de l'atelier mécanique, une attitude de repli sur soi ou d'arrogance, des carences en matière de sécurité.
Par lettre en date du 23 mars 2009, M. [N] a contesté les motifs de son licenciement et par lettre en date du 5 mai 2009, a saisi le Conseil de prud'hommes d'AUXERRE aux fins de faire juger que le licenciement intervenu le 10 mars 2009 était dénué de cause réelle et sérieuse et de faire condamner la SAS ATELIER HEROLD à :
lui payer :
-75000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
-5000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
-500 € au titre des congés afférents ;
-20500 € à titre d'indemnité de licenciement ;
à lui remettre un certificat de travail comprenant le préavis ;- 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La Cour est saisie d'un appel formé par M. [N] contre le jugement du Conseil de prud'hommes d'AUXERRE en date du 18 janvier 2011 qui a requalifié le licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné la SAS ATELIER HEROLD à lui payer avec intérêt au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation :
-5000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 500 € au titre des congés afférents.
-20500 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement .
et à lui remettre un certificat de travail rectifié.
La procédure de redressement judiciaire dont faisait l'objet la SAS ATELIER HEROLD a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'AUXERRE du 7 janvier 2013 et Maître [B] désigné en qualité de liquidateur judiciaire, lequel est intervenu volontairement à la procédure en cette qualité.
Vu les conclusions du 7 novembre 2013 au soutien des observations orales par lesquelles M [N] conclut à l'infirmation de la décision entreprise et à la condamnation de son employeur à lui verser 75000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les conclusions du 7 novembre 2013 au soutien de ses observations orales au terme desquelles Maître [B] es-qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ATELIERS HEROLD conclut à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle n'a pas retenue la faute grave, au rejet des demandes de M. [N] ainsi qu'à sa condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les conclusions du 7 novembre 2013 au soutien de ses observations orales au terme desquelles l'AGS de [Localité 5] conclut à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle n'a pas retenue la faute grave, au rejet des demandes de M. [N] ainsi qu'à sa condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience ;
MOTIFS DE LA DECISION
Il résulte des articles'L1234-1 et L1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.
L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.
En application des dispositions de l'article L1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut, à lui seul, donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; lorsqu'un fait fautif a eu lieu plus de deux mois avant le déclenchement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter lui-même la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire ; l'existence de faits commis dans cette période permet l'examen de faits plus anciens relevant du même comportement, reproduits dans la période.
Par ailleurs, une sanction déjà prononcée fait obstacle au prononcé d'une seconde sanction pour les mêmes faits ; la première peut être rappelée lors d'un licenciement ultérieur, pour conforter les griefs fondant celui-ci, mais ce rappel n'est possible que si elle n'est pas antérieure de plus de trois ans ;
En l'espèce, ainsi que l'ont pertinemment relevé les premiers juges, la plupart des griefs imputés à M. [N], pourtant repris par le liquidateur judiciaire dans des conclusions fournies, ont soit déjà été sanctionnés ou remontent à 2007 et ne sont pas de même nature que les derniers faits imputés au salarié.
En effet, hormis les faits relatifs à la livraison d'une cabine le 17 février 2009, le rappel d'un magasinier en tournée le 19 février 2009 pour prendre livraison de plaques de tôle et aux carences en matière de sécurité constatées les 17 et 25 février, les autres griefs apparaissent prescrits quand ils ne relèvent pas en réalité de l'insuffisance professionnelle.
Néanmoins, il est constant que la responsabilité d'un chef d'atelier en matière de sécurité, constitue une pierre angulaire de sa fonction, eu égard aux risques encourus par les salariés et à l'obligation de sécurité de résultat pesant sur l'employeur.
En l'espèce, il résulte du rapport du 19 février 2009 établi à la suite de la visite de l'inspection du travail du 17 février 2009 qu'au nombre des manquements constatés en matière de sécurité, figurait notamment le non fonctionnement d'un système de protection de la rouleuse, qualifié "d'inacceptable compte tenu de la dangerosité de l'équipement".
Il est par ailleurs établi que l'employeur de M. [N] a constaté le 25 février 2009 que la sécurité litigieuse ne fonctionnait pas, alors qu'il avait donné instruction à son salarié de procéder immédiatement à sa réparation le 17 février 2009.
Cette carence fautive dans l'exercice de ses responsabilité en matière de sécurité, au demeurant non formellement contestée par conclusions, apparaît suffisamment grave de la part d'un chef d'atelier, a fortiori dans un atelier de tôlerie industrielle, pour justifier le licenciement M. [N] pour faute grave.
Ni la lettre de contestation du licenciement du 23 mars 2009 de M. [N] qui ne peut suppléer une démonstration par voie de conclusions, ni l'attestation du salarié, déficient auditif indiquant qu'il lui avait été demandé d'attester avoir été victime de harcèlement de la part de M. [N], ne sont à cet égard opérants.
Dans ces conditions, la décision entreprise sera réformée et M. [N] débouté de l'ensemble de ses demandes.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Ni l'équité ni la situation économique respective des parties ne justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
DECLARE recevable l'appel formé par M. [K] [N],
INFIRME le jugement entrepris,
et statuant à nouveau
DEBOUTE M. [N] de l'ensemble de ses demandes.
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [N] aux entiers dépens de première instance et d'appel,
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
L. CAPARROS P. LABEY