RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 14 Janvier 2014
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/00333
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mai 2009 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 07/01594
APPELANTE
Madame [E] [T]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparante en personne, assistée de Me Véronique JEAURAT, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 251
INTIMEE
Association COSEM MIROMESNIL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Charles CANTEGREL, avocat au barreau de PARIS, toque : T02 substitué par Me Sophie GALLIER-LARROQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : T02
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller faisant fonction de Président et devant Mme Caroline PARANT, Conseillère, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Christine ROSTAND, Présidente Pôle 6-9
Madame Caroline PARANT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Nora YOUSFI, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [E] [T] a été embauchée en qualité de médecin par contrat à durée indéterminée, par l'association Cosem Miromesnil à compter du 1er juillet 1993.
Elle exerçait son emploi à temps partiel et plusieurs avenants ont été régularisés entre Madame [T] et le Cosem Miromesnil.
Sa rémunération s'est élevée en 2005 à une moyenne mensuelle de 2 151, 48 €.
Madame [T] s'est vue notifier 6 avertissements entre le 19 mars 2002 et le 28 juin 2005, dont 5 dans un intervalle de 10 mois.
- le 19 mars 2002, pour comportement agressif envers les équipes d'accueil et esclandres devant les patients,
- le 4 août 2004, pour défaut de respect de l'affectation dans les cabinets du centre et Madame [T] a contesté cet avertissement par lettre du 10 août suivant, expliquant les motifs de son changement de cabinet et stigmatisant l'attitude du responsable à son égard devant les patients,
- le 20 décembre 2004, pour tenue de propos inadmissibles envers la responsable du centre qui la sensibilisait sur son retard,
- les 18 février, 22 mars et 28 juin 2005 pour retards à l'arrivée de ses consultations, Madame [T] contestant par lettres des 15 mars et 4 avril 2005 les avertissements des 18 février et 22 mars.
Par lettre du 22 novembre 2005, Madame [T] a adressé au Cosem Miromesnil une lettre de démission libellée en ces termes :
' compte tenu de la dégradation des conditions de travail au Cosem Miromesnil et des pressions morales qui me sont imposées, je me vois dans l'obligation de vous soumettre ma démission ... ' .
*****
Madame [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 12 septembre 2006 d'une demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 15 mai 2009, rendu en formation de départage, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté les parties de toutes leurs demandes.
Madame [T] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
*****
Par conclusions visées au greffe le 19 novembre 2013, au soutien de ses observations orales, auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Madame [T] demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et de :
- dire et juger que le Cosem Miromesnil a manqué à ses obligations contractuelles, et notamment à son obligation de sécurité de résultat prévue à l'article L 4121 - 1 du code du travail,
- dire et juger que le Cosem Miromesnil s'est rendu coupable d'agissements répétés de harcèlement moral et a violé les articles L 1152 - 1 et L 1151 - 1 du code du travail,
- dire et juger que la démission de Madame [T] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner le Cosem Miromesnil au paiement des sommes suivantes :
* 2 890, 53 € à titre d'indemnité de licenciement,
* 26 752, 83 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 15 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral et des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat,
* 13 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi par Madame [T],
* 111 876, 96 € à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance du statut protecteur de Madame [T],
* 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
le tout, avec exécution provisoire et intérêts au taux légal.
*****
Par conclusions visées au greffe le 19 novembre 2013, au soutien de ses observations orales, auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, l'association Cosem Miromesnil conclut à la confirmation du jugement déféré et sollicite
2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la demande de requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et du préjudice financier subi par Madame [T]
Considérant que Madame [T] soutient que sa démission, notifiée le 22 novembre 2005, doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat et de ses agissements de harcèlement moral ;
que le Cosem Miromesnil s'y oppose, contestant les agissements reprochés par Madame [T] et soutenant que les sanctions prononcées à son égard étaient parfaitement justifiées ;
Considérant que Madame [T] dénonce, en premier lieu, la dégradation de ses conditions de travail ;
qu'elle a relaté, dans sa lettre du 10 août 2004, en réponse à l'avertissement du 4 août 2004, les raisons de son changement de bureau par les dimensions de ce dernier et le bruit de la climatisation, ces inconvénients ne permettant pas un examen clinique correct ;
qu'elle verse aux débats l'attestation de Madame [Y], médecin exerçant au sein de Cosem Miromesnil, qui confirme la dégradation des conditions de travail au sein du Cosem Miromesnil, et notamment la surchauffe d'un cabinet et son caractère bruyant ;
que Madame [T] s'est également plainte à la direction du Cosem Miromesnil, dans sa lettre du 14 septembre 2005, de son affectation dans un bureau sans téléphone, sans accès au Vidal sur l'ordinateur, ne disposant que d'un Vidal papier de 2002 ;
qu'elle a signalé sur le cahier des réclamations les problèmes de mauvais fonctionnement du robinet d'un des cabinets qui inondait tant les occupants que l'imprimante ;
que le Cosem Miromesnil qui conteste dans ses écritures la réalité des manquements dénoncés ne verse aux débats aucune pièce établissant que les conditions matérielles d'exercice du travail de Madame [T] étaient parfaitement conformes au bon exercice de l'art médical et au bon accueil des patients ;
que plusieurs attestations de médecins du Cosem Miromesnil confirment la dégradation des conditions de travail au sein du Cosem Miromesnil ( attestations [B], [R], ) ;
Considérant qu'ensuite Madame [T] fait état de brimades répétées subies par elle dont elle s'est plainte dans sa lettre du 10 août 2004, relatant des propos tenus devant les patients le 29 juillet 2004 par la responsable opérationnelle avec une intonation qui l'a profondément choquée ;
qu'elle s'est plainte, dans sa lettre du 14 septembre 2005, d'avoir été traitée par téléphone par Madame [G], assistante opérationnelle, de petite gamine capricieuse ;
qu'une patiente, Madame [M], atteste avoir été choquée par l'incorrection avec laquelle la responsable administrative s'est adressée à Madame [T], le 25 ou 26 août 2004, (chiffre difficilement lisible ) devant les patients, nombreux, ce jour là, dans la salle d'attente ;
que le docteur [Y], consoeur de Madame [T], atteste de la volonté de brimade de l'équipe dirigeante du Cosem Miromesnil ;
que Madame [Q] infirmière, confirme qu'en dépit de la grande disponibilité de Madame [T] envers ses patients, cette dernière a été maltraitée et mal considérée par la hiérarchie du Cosem Miromesnil ;
Considérant que Madame [T] s'est vu notifier sur une période de 10 mois, entre août 2004 et juin 2005, 5 avertissements, le premier pour un changement de cabinet de consultation et les 4 autres pour des retards ;
qu'il appartient à la cour de dire si, conformément à l'article L 1333 - 1 du code du travail, ces avertissements étaient justifiés par les manquements de la salariée et constituaient des sanctions proportionnées audits manuqements ;
que Madame [T] a contesté 3 de ces avertissements de sorte que les deux autres au terme desquels il lui était reproché :
- le 20 décembre 2004, la tenue de propos inadmissibles envers la responsable du centre qui la sensibilisait sur son retard, indiquant qu'elle ' lui courait sur le haricot '
- le 28 juin 2005, un retard à l'arrivée de sa consultation le 10 juin 2005, retard s'ajoutant à d'autres posant des problèmes de gestion des consultations,
peuvent être considérés comme justifiés, ces sanctions étant proportionnées aux manquements dénoncés ;
qu'en effet, Madame [T] qui conteste ces avertissements dans le cadre de la présente instance ne verse aux débats aucune pièce sur les faits dénoncés ;
que la tenue de propos agressifs à l'égard d'un membre de la direction du Cosem Miromesnil devant les patients et le retard de près d'une heure dans la prise de sa consultation pouvaient justifier le prononcé des avertissements, compte tenu notamment de l'impact du retard des consultations sur le travail des employés chargés du nettoyage et de la surveillances des locaux, comme en atteste Madame [X], directrice du Cosem Miromesnil ;
que les 3 autres avertissements des 4 août 2004, 18 février et 22 mars 2005 ont été contestés par lettres par Madame [T] ;
que, s'agissant du changement de cabinet, les explications de Madame [T] sur les mauvaises conditions d'auscultation au sein du cabinet 109 ne sont pas contredites par des pièces probantes de sorte que la sanction infligée à Madame [T] paraît excessive, compte tenu de l'absence de pièce sur les perturbations apportées au bon fonctionnement du dispensaire du fait de ce changement décidé par Madame [T] dans un souci de meilleure pratique de ses soins ; que s'il est certain qu'elle aurait du se munir de l'autorisation du Cosem Miromesnil pour effectuer ce changement de cabinet, les circonstances de ce changement ne justifiaient pas la notification d'une telle sanction disciplinaire ;
que les faits ayant donné lieu aux 2 avertissements des 18 février et 22 mars 2005 contestés par Madame [T] ne sont étayés par aucune pièce objective établissant les heures d'arrivée de Madame [T] et le nombre de clients en attente et par aucune attestation relatant les faits dénoncés avec précision ;
que les 3 attestations produites par le Cosem Miromesnil qui dénoncent les problèmes de ponctualité de Madame [T] et le fait que se consultations finissaient en retard, ne sont pas précises sur les dates et la durée de ces retards ;
que, dans ces conditions, ces deux avertissements n'étaient pas justifiés ;
Considérant en conséquence que, sur la période 2004, 2005, seuls deux avertissements étaient justifiés, étant ajouté que Madame [T] établit par la production de plusieurs attestations tant de ses confrères que de ses patients qu'elle était un médecin consciencieux, attentif et attaché à la qualité de soins qu'elle dispensait ;
que le Cosem Miromesnil ne produit aucune attestation et aucune plainte de patient mécontent des temps d'attente avant les consultations, mais seulement deux attestations de ses salariées Mesdames [C] et [V] qui font état du mécontentement de certains patients en raison de retards dans deux attestations peu cicrconstanciées et faisant état de faits non datés ;
que les messages électroniques produits n'établissent que des retards dans la prise de déjeuner de Madame [T] et le fait que le Docteur [T] a examiné un enfant en dehors de l'heure de consultation normale ;
Considérant que Madame [T] dénonce encore la diminution du nombre de ses patients en produisant plusieurs attestations de ces derniers certifiant avoir été refoulés à l'accueil alors qu'ils demandaient à être reçus par elle, l'un d'entre eux indiquant s'être vu proposer au téléphone de choisir un médecin traitant alors que le docteur [T] avait été choisi en cette qualité ;
que pour autant, ces patients étaient venus consulter sans rendez -vous de sorte qu'il ne peut être reproché aux hôtesses accueil d'avoir ponctuellement indiqué que le docteur [T] n'était pas disponible ;
que le prétendu détournement de clientèle n'est pas prouvé, le Cosem Miromesnil ne pouvant être critiqué quand il a proposé à certains patients qui ne pouvaient accéder à la consultation surchargée de Madame [T] d'être reçus par un autre médecin ;
que, de même, le centre était en droit de fixer la durée moyenne de rendez - vous du docteur [T] dans un souci de bonne organisation des consultations, étant rappelé le nombre très important de médecins pratiquant dans ce dispensaire ( un peu plus de 200 ) ;
que la cour considère que le comportement du Cosem Miromesnil dans la gestion des rendez - vous du docteur [T] ne peut être considéré comme fautif mais qu'elle constate un manque de concertation à ce sujet avec l'appelante alors que des bonnes pratiques dans l'orientation des clients auraient dû être mises en place contradictoirement avec les médecins du centre ;
Considérant enfin que le Cosem Miromesnil était en droit de refuser de réorganiser le temps de travail de Madame [T] en ne satisfaisant pas à sa demande de modification d'horaire, sans qu'aucun abus dans l'exercice de ce droit ne soit démontré par Madame [T] ;
que Madame [T] ne conteste pas avoir été reçue, suite à sa demande de changement d'horaire, par la direction du Cosem Miromesnil ;
qu'elle a signé, le 7 juillet 2005, un avenant par lequel elle acceptait le principe d'une vacation le vendredi de 14h 30 à 18 h 30 ;
Considérant qu'il résulte des explications qui précèdent que Madame [T] démontre la réalité de la dégradation de ses conditions de travail pendant les années précédant sa démission ;
qu'elle établit également la réalité des brimades qu'elle dénonce, et notamment le caractère injustifié de 3 des avertissements notifiés entre 2004 et 2005 ;
Considérant que la preuve est ainsi faite que le Cosem Miromesnil a manqué à son obligation de garantir la sécurité de Madame [T] dans l'exercice de son travail et a ainsi violé l'article L 4121 - 1 du code du travail ;
Considérant que Madame [T] fait également la preuve par les nombreuses attestations de ses amis et collègues de travail qu'elle a mal vécu les brimades et les sanctions multiples injustifiées ;
qu'elle a confié son incompréhension et ses difficultés à supporter ces conditions de travail à ses proches qui en attestent ;
qu'elle verse aux débats le certificat médical de son psychiatre qui atteste, le 23 janvier 2006, d'un suivi de Madame [T] pour des troubles anxieux réactionnels ayant justifié une prise en charge psychothérapique et médicamenteuse et qui écrit que ces troubles se sont aggravés ces deux dernières années ;
qu'elle produit un certificat d'arrêt de travail du 1er septembre 2005 pour troubles anxieux ;
que le Cosem Miromesnil ne verse pas aux débats de pièce justifiant que les brimades envers Madame [T] étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le fait que Madame [T] ait ponctuellement été en retard, soit dans la prise de consultation, soit à la fin de ses consultations, étant insuffisant à justifier les brimades dénoncées ;
qu'il en résulte que la réalité des agissements répétés du Cosem Miromesnil ayant pour effet une dégradation des conditions de travail de Madame [T] et l'altération de sa santé est démontrée, au sens de l'article L 1152 - 1 du code du travail ;
Considérant en conséquence que la cour estime que la démission de Madame [T], motivée dans sa lettre du 22 novembre 2005 par la dégradation de ses conditions de travail et les pressions morales qui lui sont imposées, est la conséquence des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité et du harcèlement moral subi par l'appelante, de sorte qu'il sera fait droit à la demande de requalification de cette démission en licenciement, lequel est sans cause réelle et sérieuse, compte tenu de l'absence de toute procédure et de toute lettre de licenciement ;
que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que Madame [T] comptait 12 ans et 4 mois d'ancienneté au sein du Cosem Miromesnil ;
qu'il lui sera alloué, en application des articles L 122 - 9 et R 122 - 2 du code du travail (ancienne codification), l'indemnité légale de licenciement calculée sur la base d'un salaire mensuel moyen de 2 151, 48 €, soit un dixième par mois par année d'ancienneté à laquelle s'ajoute un quinzième de mois par année d'ancienneté au delà de 10 ans calculée comme suit :
- 1/ 10 e de 2 151, 48 € pendant 12 ans et 4 mois soit :(215,14 € x 12 = 2 581,68 €) + (17,92 x 4 = 71, 68 € ) = 2 653, 36 €
- 1/15 ème de 2 151,48 € pendant 2 ans et 4 mois : ( 143,43 x 2 = 286, 86 €) + (11,95 x 4 = 47,80 ) = 334,66 €
total : 2 988,02 € ;
Considérant qu'il convient, au vu de la moyenne de ses salaires, de son âge au moment du licenciement , de son ancienneté et de la date à laquelle elle a retrouvé un nouvel emploi, d'allouer à Madame [T], sur le fondement de l'article L 1235 - 3 du code du travail, la somme de 15 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
qu'en application de l'article L 1235 - 4 du même code le Cosem Miromesnil sera condamné à rembourser à Pôle Emploi les indemnités versées à Madame [T] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt, dans la limite de 3 mois d'indemnités ;
Considérant qu'en réparation du préjudice moral subi du fait des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité et du harcèlement moral dont elle a été la victime, il convient d'allouer à l'appelante la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;
que la demande d'indemnisation supplémentaire en réparation de son préjudice matériel lié à ses nouvelles conditions de travail n'est pas justifiée, ce préjudice étant suffisamment réparé par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui vient de lui être allouée ;
Sur la demande d'indemnisation en raison de la méconnaissance par le Cosem Miromesnil du statut protecteur de délégué du personnel de Madame [T]
Considérant que Madame [T] a été élue déléguée du personnel suppléante le 28 octobre 2005 ;
qu'elle justifie par la production de 3 attestations qu'elle s'est présentée aux élections sur demande de ses collègues de travail de sorte que les allégations de l'employeur sur sa prétendue manoeuvre destinée à se voir assurer une protection avant de donner sa démission seront écartées ;
Considérant que par suite de la requalification de la démission en licenciement, il convient de constater que le licenciement de Madame [T] est intervenu sans autorisation de l'inspecteur du travail, en contravention avec l'article L 425 - 1 du code du travail (ancienne codification) ;
qu'il est constant qu'à défaut de respect de la procédure de protection liée au statut de délégué du personnel, le salarié protégé est en droit de se voir allouer une indemnisation correspondant à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de rupture du contrat jusqu'à l'expiration de la période de protection ;
que Madame [T] qui pouvait bénéficier du statut protecteur de délégué du personnel pendant 4 ans et 6 mois à compter de son élection du 28 octobre 2005 est bien fondée à solliciter, à titre d'indemnisation de la violation de son statut protecteur, une somme équivalant à 52 mois de salaire, soit 2 151, 48 x 52 = 111 876, 96 € ;
Sur le surplus des demandes
Considérant que le Cosem Miromesnil qui succombe sera condamné à payer à Madame [T] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que la condamnation au paiement de l'indemnité de licenciement portera intérêts au taux légal à compter de la réception par le Cosem Miromesnil de la convocation devant le bureau de conciliation ;
que le surplus des condamnations de nature indemnitaire portera intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;
Considérant que la demande d'exécution provisoire est sans objet, le présent arrêt étant exécutoire de plein droit ;
PAR CES MOTIFS
- Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
- Requalifie en licenciement la démission formalisée par Madame [E] [T] le 28 novembre 2005 ;
- Dit que ce licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
- Condamne l'association Cosem Miromesnil à payer à Madame [T] les sommes suivantes :
* 2 988, 02 € à titre d'indemnité de licenciement,
* 15 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
* 111 876, 96 € à titre d'indemnité en raison de la méconnaissance du Cosem Miromesnil du statut de délégué du personnel de Madame [T],
* 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonne le remboursement par l'association Cosem Miromesnil à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Madame [T] du jour du licenciement jusqu'au prononcé de l'arrêt, dans la limite de 3 mois d'indemnités ;
- Dit que la condamnation au paiement de l'indemnité de licenciement portera intérêts au taux légal à compter de la réception par le Cosem Miromesnil de la convocation devant le bureau de conciliation et que le surplus des condamnation portera intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes
- Condamne le Cosem Miromesnil aux dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT FF