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14/01/2014 | FRANCE | N°12/15140

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 14 janvier 2014, 12/15140


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 14 JANVIER 2014



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/15140



Décision déférée à la Cour : Sentence finale rendue à Paris, le 14 juin 2012 par le tribunal arbitral composé de Messieurs [B] [Z] [Q], [J] [L], arbitres, et M. Jacques WERNER, président







DEMANDERESSE AU RECOURS :



S.A.S CEGELEC

prise en la personne de ses représentants légaux



[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me Jean REINHART de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat au barreau...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 14 JANVIER 2014

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/15140

Décision déférée à la Cour : Sentence finale rendue à Paris, le 14 juin 2012 par le tribunal arbitral composé de Messieurs [B] [Z] [Q], [J] [L], arbitres, et M. Jacques WERNER, président

DEMANDERESSE AU RECOURS :

S.A.S CEGELEC

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Jean REINHART de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030 et Me Emmanuel ABRESCO, avocat au barreau de PARIS

DÉFENDERESSES AU RECOURS :

S.A.S. SIEMENS

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0018

assistée de Me Jacques PELLERIN, Me Jean-Pierre GRANDJEAN et de Me Olivier MORIN, avocats plaidant du barreau de PARIS, toque : K 112

Société SIEMENS AKTIENGESELLSCHAFT (Siemens AG) société de droit allemand

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 1]

ALLEMAGNE

représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0018

assistée de Me Jacques PELLERIN, Me Jean-Pierre GRANDJEAN et de Me Olivier MORIN, avocats plaidant du barreau de PARIS, toque : K 112

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 novembre 2013, en audience publique, le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur ACQUAVIVA, Président

Madame GUIHAL, Conseillère

Madame DALLERY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame PATE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur ACQUAVIVA, président et par Madame PATE, greffier présent lors du prononcé.

Dans le cadre d'un appel d'offres pour la réalisation d'un système de tri de bagages pour les aéorogares 2 E et 2F de l'aéroport [1] lancé en mai 1999 par l'établissement public Aéroport de Paris (ADP), Alsthom Services SA à laquelle a succédé CEGELEC SAS (CEGELEC) a conclu le 4 août 1999, un accord préliminaire portant sur la formation d'un consortium avec les sociétés MANNESMANN DEMATIC AG et MANNESMANN DEMATIC SA aux droits desquelles viennent respectivement la société de droit allemand SIEMENS AG et la société SIEMENS SAS (ci-après collectivement SIEMENS) et deux sociétés de droit danois CRISPLANT A/S et CRISPLANT Sud . Cet accord préliminaire a fait l'objet d'un avenant le 15 décembre 1999 et a été suivi d'un accord consortial conclu entre les parties le 30 mars 2000.

Le 5 juillet 2000, Alsthom Services (CEGELEC) a obtenu le marché de réalisation du tri bagages pour un montant HT de 216.493.263 €.

La mise en service effective n'est intervenue que le 31 août 2007.

C'est dans ces conditions que le 19 septembre 2008, CEGELEC, considérant que SIEMENS avait méconnu ses obligations au titre de l'accord consortial, a, en vertu de la clause compromissoire y figurant, introduit une procédure d'arbitrage devant la Cour internationale d'arbitrage de la CCI et désigné M. [B] [Z] [Q] en qualité d'arbitre.

Le 22 décembre 2008, SIEMENS a désigné M.[J] [L] en qualité d'arbitre.

Tous deux ont effectué une déclaration d'acceptation et d'indépendance et ont désigné le 5 mars 2009, M. [D] [N] en qualité de président, lequel a effectué une déclaration d'acceptation et d'indépendance le 19 mars suivant.

Un acte de mission a été signé le 27 octobre 2009.

CEGELEC réclamait la condamnation de SIEMENS à lui verser

57. 687.504 € tandis que cette dernière demandait celle de CEGELEC à lui verser

40.668.342 €.

Par une sentence finale rendue à Paris, le 14 juin 2012, le tribunal arbitral statuant à la majorité de ses membres, s'est déclaré incompétent pour juger du litige du contrat du 2 mai 2001, a dit que les sociétés SIEMENS paieront 9. 351.306 € à CEGELEC, que cette dernière paiera aux sociétés SIEMENS la somme de 13.841.844 €, ces deux sommes avec intérêts au taux légal et que CEGELEC remboursera à SIEMENS 226.000 US$ à titre de frais de l'arbitrage ainsi que 2.180.988 € à titre de contribution aux frais de représentation. M. [Q] a émis une opinion dissidente.

Le 8 août 2012, CEGELEC a formé un recours en annulation de la sentence laquelle lui a été notifiée le 23 juillet 2012.

Cette sentence a été revêtue de l'exequatur par ordonnance du 30 juillet 2012.

Par conclusions signifiées le 4 octobre 2013, CEGELEC sollicite l'annulation de la sentence arbitrale et l'infirmation de toute ordonnance d'exequatur qui aurait été rendue sur cette sentence, le rejet de la demande reconventionnelle de SIEMENS tendant à sa condamnation pour procédure abusive et l'allocation d'une somme de

100.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle invoque, en premier lieu, l'irrégularité de la constitution du tribunal arbitral (1520 2° du code de procédure civile) motif pris de ce que l'un des arbitres n'a pas satisfait à son obligation de révélation.

En second lieu, elle soulève le non-respect du principe de la contradiction ( 1520 4°), faisant valoir que le tribunal s'est fondé sur une méthode de répartition globale de responsabilité non discutée entre les parties et non adoptée dans leurs écritures.

En troisième lieu, elle invoque la contrariété de la sentence à l'ordre public international (1520 5°) faute de motivation quant à la détermination du taux de responsabilité mis à la charge de chacune des parties à l'arbitrage.

Par conclusions signifiées le 9 octobre 2013, SIEMENS demande de déclarer CEGELEC irrecevable et mal fondée en son recours en annulation de la sentence, de l'en débouter et de la condamner à verser 100.000 € à chacune des deux sociétés à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que la même somme à chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI :

Sur le premier moyen d'annulation pris de la composition irrégulière du tribunal arbitral (Article 1520 2° du code de procédure civile)

CEGELEC dit que M.[J] [L], arbitre désigné par SIEMENS, a manqué à son obligation de révélation en taisant le fait qu'il a été collaborateur au sein du cabinet BREDIN PRAT, de M [O] [X], conseil de SIEMENS et que ces liens professionnels non dévoilés sont de nature à provoquer dans son esprit un doute raisonnable quant à l'impartialité et à l'indépendance de cet arbitre.

À cet égard, la recourante fait valoir que Maître [X], nommé en 1988, associé et responsable du département contentieux et arbitrage du cabinet BREDIN PRAT a été le responsable et formateur de M.[L] alors avocat stagiaire dans ce département et que ces deux spécialistes reconnus de l'arbitrage qui appartiennent aux mêmes réseaux (notamment comme membres de l'Institut d'Arbitrage International, du Comité français de l'arbitrage, et de la 'Chambre de Commerce International') entretiennent des liens forts depuis 20 ans.

Elle soutient que cette absence de révélation l'a conduite à nourrir un doute raisonnable sur les raisons de cette nomination alors que ces liens ne peuvent pas être étrangers à la nomination de M.[L] dont le curriculum vitae ne fait pas apparaître d'expérience significative dans des marchés de travaux tels que celui opposant les parties. Enfin elle ajoute que l'articulation et la chronologie des faits sont de nature à susciter dans son esprit un doute raisonnable quant à la volonté de transparence qui a pu animer Siemens et ses conseils lors de l'introduction de l'arbitrage, puisque le conseil de la société Siemens a d'abord été présenté comme étant le cabinet Clifford Chance Europe LLP représentée par les seuls Maîtres [F] [S] et [G] [P] et que Maître [X] n'apparaît pour la première fois dans la procédure que plus d'un an après la déclaration d'indépendance de Maître [L] du 12 décembre 2008, comme simple cosignataire d'un courriel du 25 janvier 2010.

Elle en conclut qu'elle a non seulement été trompée sur l'indépendance et l'impartialité de l'un des arbitres mais qu'elle a aussi manifestement été privée d'exercer son droit de récusation.

Considérant qu'il appartient à l'arbitre de révéler toute circonstance susceptible d'être regardée comment affectant son impartialité afin de permettre à la partie d'exercer, à bref délai, s'il y a lieu, son droit de récusation ;

Considérant que tant les liens professionnels au sein du cabinet BREDIN PRAT dans les années 1987-1989, que le fait que les deux avocats entretiennent des relations au sein de plusieurs associations sont des éléments notoires dont la recourante n'allègue pas qu'elle les auraient appris postérieurement à l'arbitrage ;

Qu'à cet égard, CEGELEC soutient vainement que la présence de Me [X] dans la procédure arbitrale lui aurait été révélée tardivement en cours de procédure, étant observé, en tout état de cause qu'une lettre du 19 septembre 2008 faisant état du dépôt de sa requête en arbitrage, a été adressée par ses soins à ce conseil dont le nom figure dans nombre de documents à la procédure ;

Qu'en conséquence, le moyen pris de l'irrégularité de la constitution du tribunal arbitral ne peut qu'être écarté ;

Sur le second moyen d'annulation pris de la violation du principe de la contradiction (article 1520 4°du code de procédure civile)

CEGELEC dit qu'alors même que la question d'une répartition des responsabilités entre les parties ne lui était pas posée, chacune recherchant l'indemnisation de son propre préjudice, le tribunal arbitral a appliqué une méthode de détermination des responsabilités dont les parties n'ont jamais débattu et dont elles n'ont eu connaissance qu'à la lecture de la sentence. Elle reproche ainsi au tribunal arbitral de s'être fondé sans discussion préalable contradictoire sur une méthode globale de responsabilité non adoptée par elles dans leurs écritures.

Considérant que le principe de la contradiction impose que chaque partie soit mise à même de débattre contradictoirement des faits de la cause et que rien de ce qui sert à fonder le jugement de l'arbitre ne doit échapper au débat contradictoire des parties;

Considérant que l'indemnisation du préjudice de chacune des parties impliquait nécessairement l'appréciation des fautes commises par elles ; que s'agissant de la responsabilité des parties quant aux retards et autres dommages encourus, le tribunal arbitral relève (paragraphe108) «Pour déterminer la responsabilité des Parties, le tribunal arbitral avait le choix entre une méthode globale, et une méthode

séquentielle.» ; qu'analysant les deux méthodes le tribunal arbitral observe : « Au lieu d'une décision globale mûrie à l'aune de l'expérience, la méthode séquentielle aboutit à une série de décisions mécaniques dont le résultat peut être surprenant.(...) Elle ne peut prendre en considération des facteurs qui transcendent l'ensemble du chantier. Notre cas est exemplaire à ce propos. Le tribunal arbitral a constaté l'interférence récurrente de Cegelec dans les fonctions de Siemens rendant la tâche de Project Manager de celui-ci considérablement plus difficile.(...) Cette interférence traversa plusieurs phases du TBE, et son effet ne pouvait être compris qu'en considérant le déroulement de l'ensemble du chantier. Le tribunal a en conséquence jugé préférable d'adopter la méthode globale » ;

Considérant qu'en optant ainsi pour la méthode dite globale, les arbitres auxquels il incombait de fixer le préjudice subi tout au long du marché de travaux, ont opéré un choix entre deux méthodes sans violer le principe de la contradiction, peu important à cet égard que les parties aient adopté s'agissant de l'indemnisation de leur préjudice, des approches différentes ;

Qu'en conséquence, le moyen pris de la violation du principe de la contradiction est écarté ;

Sur le troisième moyen d'annulation pris de la contrariété de la sentence à l'ordre public international (article 1520 5°du code de procédure civile)

CEGELEC soutient que le taux de responsabilité 70/30 mis à la charge de chacune des parties à l'arbitrage retenu par le tribunal arbitral, de même que l'application systématique et péremptoire d'une décote de 45% sur le montant des indemnités demandées ne sont pas motivés et que cette absence de motivation dissimule une violation grave des droits de la défense.

Considérant qu'hors les cas définis à l'article 1520 du code de procédure civile de violation du principe de la contradiction ou de l'ordre public international, le contenu de la motivation de la sentence internationale échappe au contrôle du juge de l'annulation ;

Considérant que les arbitres ont développé notamment dans les paragraphes l09 et 110 , 46 à 62 ainsi que 64 à 107 et 111 de la sentence les motifs de leur décision ;

Que CEGELEC n'allègue pas précisément en quoi la sentence méconnaîtrait les droits de la défense ou l'ordre public international ;

Que, sous couvert de la violation de l'ordre public international , la recourante invite la cour à une révision au fond de la sentence interdite au juge de l'annulation ;

Que ce moyen doit donc être écarté et le recours rejeté ;

Sur la demande de dommages-intérêts de SIEMENS

Considérant que l'abus par CEGELEC de son droit d'ester en justice n'étant pas établli, la demande de dommages-intérêts est rejetée ;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile:

Considérant que CEGELEC qui succombe est déboutée de sa demande et paie à ces deux sociétés SIEMENS la somme globale de 100.000 € ;

PAR CES MOTIFS:

REJETTE le recours ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE la société CEGELEC SAS aux dépens et à payer à la société SIEMENS SAS et à la société SIEMENS AG la somme globale de

100.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/15140
Date de la décision : 14/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°12/15140 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-14;12.15140 ?
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