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09/01/2014 | FRANCE | N°12/10185

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 09 janvier 2014, 12/10185


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 09 JANVIER 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/10185



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2012 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2009f01042





APPELANTE



Madame [V] [D] épouse [K]

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représentée par Me

Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0066

Assistée de Me Gilles TOSCANO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1438





INTIMEE



SA CREDIT DU NORD

[Adresse 1]

[Localité 1]

...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 09 JANVIER 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/10185

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2012 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2009f01042

APPELANTE

Madame [V] [D] épouse [K]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0066

Assistée de Me Gilles TOSCANO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1438

INTIMEE

SA CREDIT DU NORD

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Christophe BORE de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assistée de Me Loren MAQUIN-JOFFRE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, présidente

Madame Caroline FÈVRE, conseillère

Madame Muriel GONAND, conseillère

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, présidente et par Madame Joselita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

****************

Selon une convention en date du 3 septembre 2004, la société Ital Fruit France, représentée par Madame [V] [D] épouse [K], a ouvert un compte courant dans les livres du Crédit du Nord.

Par acte sous seing privé en date du 18 octobre 2004, la société Ital Fruit France et le Crédit du Nord ont signé une convention de cession de créances professionnelles.

Dans le même temps, le Crédit du Nord a consenti à la société Ital Fruit France une facilité de caisse par découvert en compte courant et une ligne de crédit de trésorerie permanente qualifiée de crédit de campagne de 100.000 euros sous la forme d'un effet de commerce à échéance à un mois, à chaque fois renouvelé.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juin 2009, le Crédit du Nord a dénoncé toutes les conventions liant les parties avec un préavis de 60 jours et a clôturé le compte de la société Ital Fruit France le 31 août 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 septembre 2009 renouvelée le 28 septembre 2009, le Crédit du Nord a mis en demeure la société Ital Fruit France de lui payer les sommes dues ainsi que Monsieur et Madame [K] en leur qualité d'avalistes du dernier effet à échéance au 31 août 2009 impayé.

Par jugement en date du 8 octobre 2009, le tribunal de commerce de Paris a ouvert le redressement judiciaire de la société Ital Fruit France et le Crédit du Nord a déclaré sa créance pour les sommes de 55.756,73 euros au titre du solde débiteur du compte courant, de 100.000 euros au titre d'un billet à ordre impayé, de 156.716,35 euros au titre des cessions de créances Dailly.

Autorisé par le juge de l'exécution, le Crédit du Nord a fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens immobiliers appartenant à Madame [V] [D] épouse [K].

Par acte d'huissier en date du 10 novembre 2009, le Crédit du Nord a fait assigner Madame [V] [D] épouse [K] en paiement du dernier effet émis par la société Ital Fruit France impayé en sa qualité d'avaliste.

Par jugement en date du 2 septembre 2010, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Ital Fruit France.

Par jugement en date du 29 mai 2012, le tribunal de commerce de Créteil a dit valable l'engagement donné par Madame [V] [D] épouse [K] à la société Ital Fruit France, condamné Madame [V] [D] épouse [K] à payer au Crédit du Nord la somme de 100.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2009 et capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil à compter du 10 novembre 2009, ordonné l'exécution provisoire, condamné Madame [V] [D] épouse [K] à payer au Crédit du Nord la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

La déclaration d'appel de Madame [V] [D] épouse [K] a été remise au greffe de la cour le 5 juin 2012.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 12 septembre 2013, Madame [V] [D] épouse [K] demande de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que, faute de signature manuscrite du souscripteur ou émetteur, l'effet dont le paiement lui est réclamé en qualité d'avaliste ne vaut pas comme lettre de change ou billet à ordre et que son prétendu aval ne saurait, par conséquent, non plus valoir comme tel,

- réformer le jugement déféré pour le surplus en ce qu'il est entré néanmoins en condamnation à son encontre sur la base d'un prétendu engagement de nature et qualification juridique non précisées,

et à la cour, statuant à nouveau, de :

- dire que l'effet litigieux étant nul et le prétendu aval non valable comme tel, la disqualification dudit aval en un engagement d'un autre type ne pourrait en toute hypothèse n'être qu'une disqualification en cautionnement, mais qu'un tel cautionnement serait lui-même nul faute de contenir les mentions manuscrites d'ordre public prévues par la loi,

- dire qu'un tel aval nul ne saurait davantage être disqualifié en engagement d'un autre type, y compris en promesse de porte fort,

- débouter le Crédit du Nord de son appel incident et de toutes prétentions,

- condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 25 janvier 2013, le Crédit du Nord demande de :

- débouter Madame [K] de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que l'effet de commerce contesté est une lettre de change,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit valable l'engagement personnel donné par Madame [K] à la société Ital Fruit France,

- à titre principal, le déclarer recevable et bien fondé en son appel incident,

- condamner Madame [K], dans les mêmes termes que le jugement déféré, mais sur le fondement des dispositions de l'article L.511-21 du code de commerce,

- subsidiairement, dire que la lettre de change contestée constitue un commencement de preuve par écrit de la créance du Crédit du Nord envers la société Ital Fruit France,

- dire que l'aval de Madame [K] vaut comme promesse de se porter fort de l'exécution de l'engagement de la société Ital Fruit France à rembourser le Crédit du Nord du montant du crédit de campagne et la condamner, dans les mêmes termes que le jugement déféré, mais sur le fondement des dispositions de l'article 1120 du code civil,

- confirmer le jugement déféré en ses autres dispositions,

- à titre plus subsidiaire, confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- en tout état de cause, condamner Madame [K] à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 octobre 2013.

CELA ETANT

LA COUR

Considérant que Madame [V] [K] soutient que l'effet impayé, dont il lui est demandé le paiement, n'est pas une lettre de change en l'absence de signature du tireur, ce qui entraîne la nullité de son aval ; que le droit cambiaire, lequel est un droit formaliste et d'exception, ne peut pas s'appliquer ; que l'aval d'un effet nul ne peut pas constituer un commencement de preuve, ni d'un cautionnement en l'absence des mentions prescrites à peine de nullité part les articles L.313-7 et L.313-8 du code de la consommation, ni de rien d'autre ; qu'elle reproche aux premiers juges d'avoir estimé qu'elle s'était engagée personnellement à payer la dette de la société Ital fruit France, sans qualifier son engagement, sur la base de la commune intention des parties résultant des 47 précédents effets avalisés, lesquels ont tous été réglés par leur inscription en compte courant à leur échéance ; qu'elle prétend que l'effet litigieux est nul de même que l'aval qui ne constitue ni un cautionnement, ni une promesse de porte-fort ;

Considérant que le Crédit du Nord fait valoir que l'effet en cause constitue une lettre de change ayant été signée par le tireur par l'apposition de son cachet commercial dans la configuration particulière des rapports cambiaires existant entre les parties tenant à la double qualité de tireur et de tiré de la société Ital Fruit France et de la signature de l'effet par Madame [K], en sa qualité de gérante pour le tiré et le tireur et en sa qualité d'avaliste, de sorte qu'il ne fait pas de doute que la société Ital Fruit France a librement consenti au paiement de la lettre de change à son bénéfice, comme elle l'a fait 47 fois auparavant ; qu'il en déduit que l'effet valant lettre de change, l'aval est valable et doit produire tous ses effets ; que, subsidiairement, il estime que l'engagement de Madame [K] vaut comme commencement de preuve par écrit d'une promesse de payer la dette du tiré ; que c'est un engagement personnel et autonome constituant une promesse de porte-fort prévue par l'article 1120 du code civil; que Madame [K] doit l'indemniser du préjudice qu'il a subi constitué par le montant de la dette impayée ;

Considérant qu'en application de l'article L.511-1 du code de commerce, la lettre de change doit contenir la signature de celui qui émet la lettre dénommé tireur ; que cette signature est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit ; que le titre dans lequel cette signature fait défaut ne vaut pas comme lettre de change ;

Considérant qu'il est acquis que l'effet litigieux ne comporte aucune signature manuscrite du tireur, mais seulement le cachet commercial de la société Ital Fruit France; que ce cachet ne constitue pas un procédé non manuscrit de signature et ne peut valoir signature de l'effet comme il est exigé par l'article précité ; que d'ailleurs la plupart des 47 effets précédents ont été signés par la société Ital Fruit France en qualité de tireur et de tiré ;

Considérant que c'est, en conséquence, à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'effet en cause ne valait pas lettre de change ; que l'appel incident du Crédit du Nord de ce chef est mal fondé ; qu'il n'y a pas d'aval cambiaire valable de cet effet ;

Considérant qu'il n'est pas contesté par les parties que la mention d'aval apposée par Madame [K] sur la lettre de change invalidée ne vaut pas cautionnement en l'absence des mentions manuscrites exigées par les articles L.313-7 et L.313-8 du code de la consommation ;

Considérant que la mention manuscrite d'aval accompagnée de sa signature a été apposée par Madame [K], qui est la gérante de la société Ital Fruit France, pour obtenir le renouvellement du crédit de campagne de 100.000 euros accordée à sa société par le Crédit du Nord, chaque mois depuis 46 mois, comme elle l'a fait depuis plus de trois ans ; qu'elle constitue un engagement personnel de sa part, par lequel elle promet au Crédit du Nord que la société, qu'elle dirige, payera sa dette à l'échéance convenue fixée au 31 août 2008 ; qu'elle s'est ainsi portée fort de l'engagement pris par la société Ital Fruit France et s'est engagée accessoirement à satisfaire à l'engagement principal, si la société n'y satisfait pas conformément aux dispositions de l'article 1120 du code civil ; que cet engagement pris par le dirigeant de l'entreprise, qui sait ce qu'il fait et pourquoi il le fait, n'est soumis à aucun formalisme particulier ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société Ital Fruit France n'a pas réglé la somme de 100.000 euros au Crédit du Nord, qui a mis à sa disposition cette somme dans le cadre d'un crédit renouvelé chaque mois depuis plusieurs années ; que le résultat promis par Madame [K] n'a pas été obtenu ;

Considérant qu'ainsi Madame [K], qui s'est engagée personnellement à ce que la société Ital Fruit France paye sa dette de 100.000 euros, doit indemniser le Crédit du Nord de sa créance impayée ; qu'il convient de la condamner à payer cette somme à la banque avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2009 jusqu'à parfait paiement ;

Considérant que Madame [K] est ainsi mal fondée en son appel et sera déboutée de toutes ses demandes ; que le jugement déféré sera confirmé ;

Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge du Crédit du Nord le montant de ses frais irrépétibles en cause d'appel ; qu'il convient de condamner Madame [K] à lui payer la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que Madame [K], qui succombe, supportera les dépens de la présente instance ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne Madame [V] [D] épouse [K] à payer au Crédit du Nord la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Madame [V] [D] épouse [K] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 12/10185
Date de la décision : 09/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°12/10185 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-09;12.10185 ?
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