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09/01/2014 | FRANCE | N°12/01653

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 09 janvier 2014, 12/01653


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 09 Janvier 2014

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01653



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Décembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section Encadrement RG n° 10/01716





APPELANTE

SA EDA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Marie-Sylvaine CAPIN-SIZAIRE, avoca

t au barreau de PARIS, toque : C2255





INTIMES

Monsieur [Z] [V]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne

assisté de Me Montaine GUESDON VENNERIE, avocat au barreau de...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 09 Janvier 2014

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01653

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Décembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section Encadrement RG n° 10/01716

APPELANTE

SA EDA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Marie-Sylvaine CAPIN-SIZAIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2255

INTIMES

Monsieur [Z] [V]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne

assisté de Me Montaine GUESDON VENNERIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0082

SARL CIG

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice LABEY, Président de chambre

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Melle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [Z] [V] a été engagé par la société EDA en 1990 pour y occuper les fonctions de chefd'agence sur le site de [Localité 1] moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 223,00 €.

La société EDA a pour activité la location de véhicules qu'elle exerce sous l'enseigne ADA.

Le fond de commercé du site de [Localité 1] a été mis en location gérance le 1er mai 2009 au bénéfice de la société Sud Location et le contrat de travail de monsieur [V] transféré par application des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail.

Le 31 mars 2010 son contrat de travail a de nouveau été transféré au sein de la société CIG, nouveau locataire gérant du site de [Localité 1].

Le 30 juillet 2010, monsieur [V] a pris acte de la rupture de son

contrat de travail par lettre en recommandé adressée aux sociétés Sud Location, CIG et EDA dans les termes suivants :

" ...Non seulement je ne suis toujours pas payé de mes salaires depuis le 1er avril 2010 mais en outre je n'ai plus aucune fonction ni travail.

Ces manquements à vos obligations d'employeur sont particulièrement graves et me causent des préjudices financiers, moraux et professionnels très sérieux. Je ne peux plus continuer à poursuivre l'exécution de mon contrat de travail. Cette situation est très éprouvante.

Je suis contraint de vous notifier la prise d'acte de la rupture de mon contrat de travail et de saisir le conseil de prud'hommes pour obtenir votre condamnation à me payer les salaires dus, le préavis et les congés payés, l'indemnité de licenciement outre la réparation de mes préjudices.

Vous devrez me remettre sans délai mon attestation Pôle Emploi et mon certificat de travail. A défaut de les recevoir, je serai amené à les réclamer sous astreinte devant la formation des référés du conseil de prud'hommes de Créteil déjà saisie de demande en paiement de mes salaires et congés payés. En outre, vous êtes tenu de me régler les heures supplémentaires effectuées depuis le 1er mai 2009. Je vous rappelle à cet égard que j'assumais 43 heures de travail par semaine et que vous vous êtes sciemment abstenu de me payer les heures supplémentaires...";

Monsieur [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil le 19 août 2010 aux fins d'obtenir la condamnation solidaire des société EDA et CIG à lui verser et remettre les sommes et les documents suivants sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

' 6 669,00 € d'indemnité compensatrice de préavis

' 666,90 € de congés payés afférents

' 12 100,52 € d'indemnité conventionnelle de licenciement

' 2 491,69 € de rappel de salaire pour heures supplémentaires

' 249,17 € de congés payés afférents

' 50 000,00 € de dommages intérêts pour licenciements sans cause réelle et sérieuse

' 15 000 € dé dommages intérêts pour trvail dissimulé

' 5 000,00 € d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

' Bulletins de paie des mois avril à juillet

' Certificat de travail

' Attestation Pôle emploi

' Une astreinte de 100 euros par document et par jours de retard

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la SA EDA du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Créteil le 1er décembre 2011 qui a :

Requalifié la rupture du contrat de travail dont a pris l'initiative monsieur [V] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence ;

Condamné son employeur la société CIG à lui verser les sommes suivantes :

'6 669,00 € d'indemnité compensatrice de préavis

'666,90 € de congés payés afférents

'12 100,52 € d'indemnité conventionnelle de licenciement

'26 676,00 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

'1 237,48 € d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé par dissimulation d'emploi

Dit que ces sommes sont opposables à la société EDA qui devra, en tant que de besoin, lesgarantir au bénéfice de monsieur [V] conformément aux dispositions de l'article L144-7 du code du commerce ;

Fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de monsieur [V] à la somme de 2 223,00 €

Ordonné la délivrance par la seule société CIG, des documents suivants :

'Lès bulletins de paies d'avril à juillet 2010 ainsi que celui relatif aux créances àcaractère salariale consécutives à la rupture du contrat de travail

'Une attestation destinée Pôle Emploi

'Un certificat de travail

Assorti la délivrance de chacun des documents d'une astreinte de 15 € par jours de retards passé le délai de 15 jours à compter de la notification du présent jugement ;

Condamné la seule société CIG au versement d'une indemnité de 1000,00 euros d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetté toute autre demandes;

Condamné la société CIG aux dépens;

Vu les conclusions en date du 14 novembre 2013, au soutien de ses observations orales, par lesquelles la SA EDA demande à la cour de:

Infirmer le jugement du Conseil des Prud'hommes de Créteil du 1er décembre 2011 danstoutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il a jugé que les condamnations étaientopposables à la société EDA et prononcé la garantie d'EDA au bénéfice de Monsieur[V] conformément aux dispositions de l'article L144-7 du code de commerce

Débouter Monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre d'EDA

Condamner Monsieur [V] au paiement d'une somme de 1.000 euros au titre del'article 700 du Code de Procédure Civile,

Le Condamner aux entiers dépens.

Vu les conclusions en date du 14 novembre 2013, au soutien de ses observations orales, par lesquelles M. [Z] [V] demande à la cour de:

Vu la Convention Collective Nationale du Commerce des services de l'automobile,

Vu les pièces versées au débat,

Vu l'article L. 144-7 du Code de Commerce

- Déclarer la société EDA irrecevable et mal fondée en son appel.

En conséquence, l'en débouter en toutes fins qu'il comporte.

- le Déclarer recevable et bien fondé en son appel partiel incident.

Y faire droit

- Confirmer le jugement rendu le 1er décembre 2011 en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat par Monsieur [Z] [V] produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence,

- Condamner solidairement les sociétés CI G et EDA à lui payer à les sommes suivantes :

* 6.669,00 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

* 666,90 € bruts au titre des congés payés y afférents

* 12.100,52 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

* 2.491,69 € bruts au titre des rappels de salaire sur heures supplémentaires

* 249,17 € bruts au titre des congés payés y afférents

* 50.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 15.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé

- Dire que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes.

- Ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article 2254 du Code de Procédure Civile.

- Condamner solidairement la société EDA et CI G à lui remettre l'ensemble des

documents de fin de contrat (certificat de travail, attestation Pôle Emploi, reçu pour solde de tout compte) outre les bulletins de salaire correspondant pour les mois d'avril, mai, juin et juillet 2002

sous astreinte de 100 € par document et par jour de retard à compter de la décision à intervenir.

- Condamner solidairement les sociétés EDA et CIG à lui payer la somme de

3.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

Régulièrement convoquée à l'audience du 14 novembre 2013, la société CIG a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les heures supplémentaires :

Considérant qu' en application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que c'est au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande que le juge forme sa conviction;

Qu'ainsi, il appartient à Mr [V] de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande;

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à compter du 1er avril 2010 le salarié assumait seul les horaires d'ouverture de l'agence de [Localité 1] ; que les horaires de l'agence étaient les suivants:

- 8:30 à 12:00 et de 14:00 à 18:30 du lundi au vendredi,

- de 9:00 à 12:00 le samedi

Considérant, au regard du décompte produit pour l'année 2010 pour les semaines 14 à 30, que le salarié satisfait à son obligation d'étayer sa demande; qu'en sens inverse, la société CIG, défaillante, ne produit aux débats aucun élément; qu'en conséquence, il convient de retenir un temps de travail de M. [V] à hauteur de 43 heures par semaine, d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de demande et de faire droit à la demande du salarié quant aux heures supplémentaires ;

Considérant que la dissimulation systématique depuis avril 2010 des heures supplémentaires effectuées qui ne figurent pas sur les bulletins de paie, caractérise l'intention frauduleuse de l'employeur ; Qu'il convient donc de faire application de l'article 8221-5 du code du travail et de condamner la société CIG à payer une indemnité pour travail dissimulé égale à six mois de salaire soit 13 338 € ;

Sur la rupture du contrat de travail :

Considérant qu'il n'est pas discuté par les parties qu'à compter du 1er avril 2010, la société CIG s'est substituée à la société SUD LOCATION en qualité de locataire gérant du fonds de commerce et est devenue le nouvel employeur de M. [Z] [V] en application de l'article 1224-1 du code du travail;

Considérant qu'en cas de manquement grave de l'employeur à ses obligations contractuelles, la rupture du contrat de travail dont a été contraint de prendre l'initiative le salarié produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si le manquement est établi ; que dans le cas contraire si le manquement n'est pas avéré ou insuffisamment grave, cette rupture produit les effets d'une démission;

Considérant qu'il est constant que Monsieur [Z] [V] n'a obtenu le versement de ses salaires qui n'étaient pas payés depuis le mois d'avril 2010 qu'aux termes d'une procédure prud'homale engagée en référé;

Que la carence de l'employeur de M. [Z] [V] , la société CIG, dans le versement des salaires constitue un manquement grave justifiant la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné son employeur, la société CIG, au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur l'appel en garantie de la société EDA :

Considérant que l'article L 144-7 du code du commerce dispose : " jusqu'à la publication du contrat de location-gérance et pendant un délai de six mois à compter de cette publication, le loueur du fonds est solidairement responsable avec le locataire gérant des dettes contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds";

Que sur le fondement de l'article susvisé, les premiers juges ont condamné la SA EDA à garantir le salarié du bénéfice des condamnations prononcées;

Considérant qu'en application de l'article L 144-7 du code de commerce, le bailleur est solidairement responsable de toutes les conséquences résultant d'une rupture du contrat de travail imputable au locataire gérant, de sorte que le bailleur doit garantir non seulement les créances de salaire mais également l'ensemble des dommages et intérêts alloués au salarié ; qu'en effet, la rédaction dudit article, en ce qu'elle vise " les dettes contractées" n'induit aucune exclusion pour des dettes issues de contrat de travail étant précisé que le contrat de travail constitue un élément nécessaire à l'exploitation du fonds;

Considérant, par ailleurs, que la société EDA n'établit aucun élément permettant d'exclure le bénéfice de la garantie au motif que le salarié ne serait pas un créancier de bonne foi; que le fait que la société EDA ait été informée de la situation difficile du salarié au regard de l'attitude du locataire gérant est sans incidence sur la légitimité de la prise d'acte de rupture du contrat de travail initiée par Monsieur [Z] [V] ;

Considérant, en conséquence, qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que les condamnations étaient opposables à la société EDA et a prononcé la garantie de cette société au bénéfice du salarié en application des dispositions de l'article L 144-7 du code de commerce; que la garantie sera étendue à la condamnation prononcée par le présent arrêt au titre des heures supplémentaires, à l'exécution de l'indemnité pour travail dissimulé ;

Sur les autres demandes :

Considérant que le bailleur ne peut être tenu à émettre des bulletins de salaire et les documents de fin de contrat ; qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société CIG seule sur ce chef de demande à délivrer l'ensemble des documents de fin de contrat;

Considérant qu'il n'apparaît pas équitable que M. [Z] [V] conserve la charge de ses frais irrépétibles selon les modalités reprises au dispositif du présent arrêt;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE recevable l'appel interjeté par la SA EDA ;

INFIRME le jugement déféré uniquement en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [V] de sa demande en paiement au titre des heures supplémentaires et sur le montant de l'indemnité pour travail dissimulé ;

CONFIRME le jugement pour le surplus.

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la SARL CIG à payer à Monsieur [Z] [V] la somme de 2491,69 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;

DIT de la SA EDA sera tenue à garantie le montant de ladite condamnation au profit de M. [Z] [V] en application des dispositions de l'article L 144-7 du code de commerce.

COMDAMNE la SARL CIG à payer à M. [V] la somme de 13 338 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

DIT que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées.

CONDAMNE solidairement la SARL CIG et la SA EDA à payer à M. [Z] [V] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE solidairement la SARL CIG et la SA EDA aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

L. CAPARROS P. LABEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 12/01653
Date de la décision : 09/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°12/01653 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-09;12.01653 ?
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