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08/01/2014 | FRANCE | N°12/00317

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 08 janvier 2014, 12/00317


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 08 Janvier 2014



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00317



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 Décembre 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 10/10240





APPELANTE

S.A.S. COMO WAGRAM

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud MOQUIN, avoca

t au barreau de PARIS, P0082 substitué par Me Montaine GUESDON VENNERIE, avocate au barreau de PARIS, P0082





INTIMÉE

Madame [B] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparante en personne, assistée d...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 08 Janvier 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00317

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 Décembre 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 10/10240

APPELANTE

S.A.S. COMO WAGRAM

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud MOQUIN, avocat au barreau de PARIS, P0082 substitué par Me Montaine GUESDON VENNERIE, avocate au barreau de PARIS, P0082

INTIMÉE

Madame [B] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparante en personne, assistée de Me Daniel KNINSKI, avocat au barreau de la SEINE-SAINT-DENIS, BOB64

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Novembre 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Monsieur Jacques BOUDY, conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris en formation de départage du 15 décembre 2010 ayant :

- condamné la SAS COMO WAGRAM à régler à Mme [B] [V] les sommes suivantes :

7 405,86 € d'indemnité compensatrice de préavis et 740,58 € de congés payés afférents

2 772,21 € d'indemnité de licenciement

22 217,58 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté toutes plus amples demandes de Mme [B] [V]

- débouté la SAS COMO WAGRAM de ses demandes indemnitaires reconventionnelles pour inexécution du préavis de démission et préjudice commercial

- ordonné la délivrance des bulletins de paie et des documents de rupture conformes («qualification de prise d'acte de rupture aux torts de l'employeur»)

- condamné la SAS COMO WAGRAM aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de la SAS COMO WAGRAM reçue au greffe de la cour le 10 janvier 2012 ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 6 novembre 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SAS COMO WAGRAM qui demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes Mme [B] [V] et de la condamner reconventionnellement à lui payer les sommes indemnitaires de 7 258,26 € pour inexécution du préavis, 6 000 € pour préjudice commercial consécutif à la brusque rupture du contrat de travail ainsi que 2 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 6 novembre 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de Mme [B] [V] qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ses dispositions sur l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement et la remise des documents sociaux conformes

- l'infirmer pour le surplus en condamnant la SAS COMO WAGRAM à lui payer les sommes de 40 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 3 000 € de rappel de salaires sur la période novembre 2006/janvier 2007 (+ 300 €)

- dire que les sommes lui étant allouées produiront des intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l'article 1154 du code civil

- condamner en tout état de cause la SAS COMO WAGRAM à lui verser la somme complémentaire de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Mme [B] [V] a été initialement embauchée par la SAS SMART DISTRIBUTION en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 1er juillet 2003 en qualité de vendeuse, catégorie employé-échelon 10 de la convention collective nationale des services de l'automobile, moyennant un salaire fixe ou de base de 1 070 € bruts mensuels et une part variable sous forme de commissions sur objectifs.

Le contrat de travail de l'intimé a été transféré le 1er novembre 2006 à la SAS COMO WAGRAM qui a fait l'acquisition à la même époque d'éléments d'actifs du fonds de commerce de la SAS SMART DISTRIBUTION, transfert s'opérant selon les dispositions de l'article L.122-12 du code du travail alors applicable (pièce 2 de la salariée).

Le salaire de base de Mme [B] [V], hors commissions sur ventes, était de 1 220 € bruts mensuels au vu des bulletins de paie établis par la SAS COMO WAGRAM en novembre et décembre 2006 avant la rupture du lien contractuel.

Sur la rupture du contrat de travail et son imputabilité

Aux termes d'un courrier daté du 12 janvier 2007 adressé à la SAS COMO WAGRAM, Mme [B] [V] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de celle-ci en lui reprochant divers manquements à ses obligations tant légales, contractuelles que conventionnelles.

Au soutien de sa prise d'acte, Mme [B] [V] précise que la société appelante lui a imposé de manière unilatérale des modifications de son contrat de travail concernant ses horaires de travail dans leur répartition hebdomadaire et en volume - passage de 151,67 heures à 169 heures mensuelles avec une convention de forfait -, que l'on a «tenté» de lui imposer le respect d'un nouveau règlement intérieur qui ne lui a jamais été communiqué lors de la proposition de modification de son contrat de travail par voie d'avenants, qu'il a été également «tenté» de lui imposer une nouvelle clause contractuelle de mobilité géographique beaucoup plus étendue que celle d'origine, que pour avoir refusé les projets d'avenant lui étant soumis avec insistance il a été décidé en décembre 2006 de lui retirer son véhicule de service, décision s'analysant en une sanction déguisée, qu'il est établi «sans aucune contestation» que ses ventes à compter du 1er novembre 2006 lui ont été réglées dans des conditions «totalement différentes» s'agissant tant de l'assiette de commissionnement que du nombre de véhicules à commercialiser, et que les primes représentant 10% de sa rémunération ont été brutalement supprimées.

La SAS COMO WAGRAM conteste avoir modifié unilatéralement le contrat de travail initial de l'intimée dans l'un de ses éléments déterminants.

Tant le contrat de travail initial du 1er juillet 2003 que l'avenant du 23 février 2006 conclus avec la SAS SMART DISTRIBUTION stipulent une durée annuelle de travail de 1 607 heures représentant en moyenne 35 heures sur la semaine avec la possibilité donnée à l'employeur de demander à la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires dans la limite du contingent applicable.

Il est admis que les heures supplémentaires imposées par un employeur dans la limite du contingent dont il dispose légalement ou conventionnellement, quand celles-ci répondent aux nécessités du service, n'entraînent pas une modification du contrat de travail du salarié qui ne peut en principe s'y opposer sous peine d'insubordination.

Il ne peut dès lors être reproché à la SAS COMO WAGRAM d'avoir fait travailler Mme [B] [V] à compter de novembre 2006 sur une base passant de 151,67 heures à 169 heures mensuelles, ce qui en soi ne constitue pas une modification de son contrat de travail, cette dernière ne discutant même pas le fait qu'elle ait pu exécuter certains mois des heures supplémentaires au service de son précédent employeur comme l'évoque la société appelante dans ses conclusions (page 17).

En contrepartie de cette augmentation demandée de son temps de travail, Mme [B] [V] a perçu une rémunération, hors commissions sur ventes, d'un montant supérieur après intégration des majorations prévues pour heures supplémentaires dans la tranche comprise entre la 35ème et la 39ème heure en semaine - mode de calcul, page 19 des écritures de l'appelante.

Aucun élément ne vient en outre corroborer l'affirmation de la salariée selon laquelle elle se serait vu imposer à la fin de l'année 2006 une «convention de forfait à laquelle il (lui) était loisible de refuser d'adhérer».

Il ne peut être valablement reproché à la SAS COMO WAGRAM d'avoir «tenté d'imposer (à la salariée) le respect d'un règlement intérieur» qui procède du pouvoir disciplinaire de l'employeur appelé à s'exercer dans le respect des textes en vigueur, règlement intérieur qui n'existait pas selon l'appelante contestant en avoir appliqué un dès novembre 2006 à l'insu de son personnel.

Manque tout autant de pertinence et de sérieux le grief tiré d'une tentative de modification de la clause de mobilité géographique figurant au contrat initial de juillet 2003, dans la mesure où la SAS COMO WAGRAM n'a fait que soumettre à l'intimée deux projets d'avenant successifs courant décembre 2006 dont aucun n'a été retourné par elle dûment signé.

En l'absence d'un accord préalable donné par Mme [B] [V] sur ce point, seules les dispositions contractuelles arrêtées à l'origine avec la SAS SMART DISTRIBUTION avaient vocation à se poursuivre entre les parties et, contrairement à ce qu'affirme l'intimée, il n'est pas établi que l'appelante serait en quelque sorte passée en force en lui imposant de manière unilatérale une modification de la clause de mobilité géographique.

C'est de manière tout aussi péremptoire que M. [B] [V] prétend que l'appelante, dès le 1er novembre 2006, lui aurait imposé sans son agrément un nouveau mode de calcul de la part variable de sa rémunération constituée de commissions sur le chiffre d'affaires réalisé, qu'il s'agisse de l'assiette de commissionnement ou du nombre de véhicules à vendre en termes d'objectif.

Sur ce point, la SAS COMO WAGRAM démontre, pièces à l'appui (16-17-20), en l'absence d'un accord de la part de Mme [B] [V], lui avoir appliqué de novembre 2006 à janvier 2007 le mode de calcul de sa rémunération variable tel que résultant de l'avenant «Rémunération Conseiller Commercial VN» conclu avec la SAS SMART DISTRIBUTION le 23 février 2006, en sorte qu'il convient d'ores et déjà de confirmer le jugement critiqué en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement d'un rappel de rémunération variable (3 000 € + 300 €).

Ce même avenant prévoit par ailleurs le versement de primes trimestrielle et annuelle sous certaines conditions de performance, primes qui ont bien été réglées à Mme [B] [V] à l'échéance convenue au vu du dernier bulletin de paie de janvier 2007 dont les mentions y figurant ne sont pas contestées, alors même qu'il n'est présenté aucune demande en paiement d'un rappel de primes au titre de l'exécution du contrat de travail.

S'agissant enfin du véhicule de service, la lettre du 13 décembre 2006 émanant de la SAS COMO WAGRAM qui entendait «remettre en cause cet avantage en nature et (le) dénoncer» est conforme aux dispositions contractuelles dans le respect d'un délai de préavis de 3 mois.

Pour l'ensemble de ces raisons, infirmant la décision déférée sur l'imputabilité de la rupture et ses conséquences indemnitaires, la prise d'acte de Mme [B] [V] sera jugée infondée et produira les effets d'une démission, de sorte qu'elle sera déboutée de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail (indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, indemnité de licenciement, dommages-intérêts pour licenciement abusif).

Sur les demandes indemnitaires reconventionnelles de la SAS COMO WAGRAM

La prise d'acte non justifiée par Mme [B] [V] de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'une démission, après infirmation de la décision querellée, la cour la condamnera à payer à la SAS COMO WAGRAM l'indemnité compensatrice de préavis sur le fondement de l'article L.1237-1 du code du travail à concurrence de la somme de 7 258,26 € représentant l'équivalent de deux mois de salaires, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

La cour la confirmera en ce qu'elle a rejeté la réclamation de la SAS COMO WAGRAM au titre d'un préjudice commercial non spécialement démontré (6 000 €).

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Aucune circonstance d'équité ne commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et Mme [B] [V] sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris en ses seules dispositions sur le rappel de rémunération variable (demande de Mme [B] [V]) et les dommages-intérêts pour préjudice commercial (demande reconventionnelle de la SAS COMO WAGRAM) ;

L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,

DIT ET JUGE infondée la prise d'acte par Mme [B] [V] de la rupture de son contrat de travail et que cette même prise d'acte produit les effets d'une démission ;

En conséquence,

DÉBOUTE Mme [B] [V] de ses demandes indemnitaires liées à la rupture du contrat de travail, et la condamne reconventionnellement à payer à la SAS COMO WAGRAM la somme de 7 258,26 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt ;

REJETTE la réclamation de Mme [B] [V] aux fins de délivrance de documents sociaux conformes ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [B] [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/00317
Date de la décision : 08/01/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°12/00317 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-08;12.00317 ?
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