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19/12/2013 | FRANCE | N°11/16083

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 19 décembre 2013, 11/16083


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 19 DÉCEMBRE 2013



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/16083



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - 7ème CHAMBRE - RG n° 2010083272





APPELANTE



Société KONINKLIJKE EDUARD VAN LEER B.V, Société de droit néerlandais, prise en la personne de

son représentant légal domicilié es-qualité audit siège

Ayant son siège social

152-154, Jodenbreestaat

1011NS AMSTERDAM



Représentée par Me Christian VALENTIE, avocat au barre...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 19 DÉCEMBRE 2013

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/16083

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - 7ème CHAMBRE - RG n° 2010083272

APPELANTE

Société KONINKLIJKE EDUARD VAN LEER B.V, Société de droit néerlandais, prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité audit siège

Ayant son siège social

152-154, Jodenbreestaat

1011NS AMSTERDAM

Représentée par Me Christian VALENTIE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2441

Représentée par Me Emmanuelle BOURETZ de l'AARPI VIVIEN'Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R210

INTIMÉE

SARL [E] agissant en la personne de son gérant en exercice y domicilié en cette qualité

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 1]

Assignée à personne habilitée et n'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 octobre 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseillère faisant fonction de Présidente, chargée d'instruire l'affaire et Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseillère

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

La société de droit néerlandais Koninklijke Eduard Van Leer B.V. (La société KEvL) est spécialisée dans l'import-export de bois et de pâtes à papier.

Au cours de l'année 2004, elle s'est rapprochée de la société de droit français [E], courtier dans le commerce de la pâte à papier et de papiers, et elle lui a confié le démarchage des clients français. Les relations contractuelles entre les parties se sont déroulées sans incident entre 2004 et 2007.

Le 23 novembre 2010, la société KEvL a fait assigner la société [E] en paiement devant le tribunal de commerce de Paris. Elle a exposé à cette fin que par plusieurs courriers électroniques, la société [E] l'a informée des besoins de différents clients français et anglais et que, sur la base des ces informations, elle a fait livrer 2 200 tonnes de pâte à papier dans des entrepôts situés à Anvers, prenant à sa charge l'intégralité des frais de transport et de stockage. Cependant, aucune demande ne s'étant concrétisée, elle a alors dû écouler à perte le stock de pâte à papier. Elle a indiqué qu'à la suite d'une réunion tenue à l'occasion du salon des professionnels du marché de la pâte à papier, en novembre 2008, au cours de laquelle, la société [E] a reconnu sa part de responsabilité et s'est engagée à prendre en charge la moitié des pertes constatées à l'issue de la vente du stock, elle lui a adressé douze factures correspondantes et quatre notes de frais qui n'ont pas été payées, puis le 7 octobre 2009, une mise en demeure qui est demeurée vaine.

Par jugement en date du 11 mai 2011, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté la société KEvL de ses demandes de dire et juger que la société [E] a manqué à ses obligations contractuelles et professionnelles ;

- débouté la société KEvL de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamné la société KEvL aux dépens.

Vu l'appel interjeté par la société KEvL le 1er septembre 2011 contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées le 1er décembre 2011 par la société KEvL, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondée la société KEvL en son appel ;

En conséquence,

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

En conséquence, statuant à nouveau,

- dire et juger que la société [E] a laissé croire à la société KEvL qu'elle se trouvait en présence de marchés confirmés en vue de la vente de pâte à papier en France ;

- dire et juger que la société [E] a manqué à ses obligations contractuelles en fournissant des informations inexactes à la société KEvL ;

- dire et juger que cette faute contractuelle a conduit la société KEvL à procéder à la livraison de 2 200 tonnes de pâtes à papier à Anvers ;

- dire et juger que la société [E] devra supporter les conséquences de la faute qu'elle a commise dans l'exercice de son activité ;

- condamner la société [E] à verser à la société KEvL la somme de 297.085,50 dollars, soit la somme de 224 180,57 euros en réparation du préjudice subi, somme à laquelle s'ajoutent les intérêts légaux qui ont commencé à courir depuis le 7 octobre 2009, avec capitalisation ;

- condamner la société [E] à verser à la société KEvL la somme de 20 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner aux entiers dépens.

La société KEvL expose que la société [E] n'a pas respecté les obligations contractuelles qui s'imposaient à elle en qualité de courtier. Elle soutient à ce sujet que la société [E] a commis une faute manifeste en lui laissant croire que les marchés avec les sociétés françaises avaient été confirmés, que ces ventes présentaient un caractère définitif, et en la laissant procéder à la livraison de la pâte à papier à Anvers.

Elle insiste sur le fait que la société [E] lui avait assuré par écrit que de nombreuses sociétés françaises, clairement identifiées, étaient intéressées et se portaient acquéreur ferme de 2 200 tonnes de papier ; et que les informations communiquées ne faisaient nullement état de « marchés potentiels avec des clients français dans les rapports de nature commerciale » ou qu'elles constitueraient des « informations de nature commerciale ».

L'appelante soutient que la société [E] doit être condamnée à réparer le préjudice qu'elle a subi, pour un montant total équivalent à la moitié des pertes subies, soit la somme de 224 180,57 euros, à laquelle s'ajoutent les intérêts légaux qui ont commencé à courir depuis le 7 octobre 2009, avec capitalisation.

La société [E], à laquelle l'acte d'appel a été signifié par assignation du 27 octobre 2011, a constitué avoué le 8 novembre 2011, mais n'a pas déposé de conclusions. La société KEvL l'a fait assigner le 17 avril 2012, en raison de la cessation des fonctions de son avoué, afin qu'elle constitue avocat dans les 15 jours. Par le même acte elle lui a redélivré copie de ses conclusions. L'intimée n'a pas constitué avocat et ne s'est pas fait représenter.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il résulte des échanges par courriers électroniques entre M. [E], dirigeant de la société [E], et MM. [L] et [U], respectivement directeur général et responsable des ventes de la société KevL, qu 'entre le 19 décembre 2007 et le 16 avril 2008, M. [E] a communiqué à la société KEvL des intentions de commandes importantes des sociétés Arjo (1 500 tonnes), de la société Bolloré (5 000 tonnes) ainsi que d'un client anglais (100 tonnes). Par ailleurs, par un courrier électronique du 22 avril 2008, M. [L] a précisé à M. [E] que la société KEvL avait « agi selon votre volonté » et à partir des informations que ce dernier avait données au cours des entretiens et des réunions précédentes, tiré des conclusions sur les besoins des clients, en prépayant 1 100 tonnes qui seraient livrées, pour le marché français, début mai 2008 et, il l'interrogeait sur la nécessité de commander 1 100 autres tonnes pour une livraison fin mai, début juin. Par courrier du 22 mai suivant, M. [U] a adressé à M. [E] le détail des livraisons qui devaient être effectuées à l'entrepôt d'Anvers, entre le mois de juin et la fin du mois de juillet. En réponse à l'inquiétude exprimée par M. [U] en raison de ce que peu de commandes fermes lui étaient parvenues, M. [E] lui a transmis, toujours par voie électronique, le 30 mai 2008, un message d'un responsable de la société ArjoWiggins, l'informant d'une intention de s'engager « à 1 000 tonnes par mois dans le sud du Royaume-Uni et entre 1 000 et 1 500 tonnes dans le nord de l'Europe ». Enfin, un compte rendu de réunion le 2 juin 2008, entre MM [E], [L] et [U], permet de constater que M. [E] a assuré ses interlocuteurs de « réelles possibilités basées sur des contacts, histoire, etc. » pour sept clients et un montant total de 1 800 tonnes et qu'il a indiqué que des échantillons avaient été adressés à la société Arjo qui représentait un potentiel de 2 000 tonnes de commandes.

Ces échanges confortent les indications délivrées par MM [L] et [U] dans des attestations des 24 octobre 2011 et selon lesquelles, lors de la réunion du 2 juin 2008, M. [E] a « (') confirmé qu'il n'y avait aucun doute possible concernant les clients français identifiés par lui et concernant les quantité respectives de pâte à papier à vendre à chacun desdits clients (...) ». Ces deux personnes énoncent une liste de sept clients dont les commandes annoncées s'établissaient entre 50 et 350 tonnes. Cette liste, ainsi que les prévisions correspondantes, étaient rappelées dans un courrier électronique adressé le 23 juin 2008 par M. [L] à M. [E], s'alarmant de ce que les commandes n'arrivaient pas.

Il résulte de cet ensemble de pièces que la société [E] a bien, ainsi que le soutient la société KevL, annoncé à celle-ci qu'elle allait recevoir des commandes importantes de pâte à papier, et qu'en l'assurant de la certitude de ces commandes, elle l'a incitée à constituer des stocks d'un volume équivalent pour y répondre, alors que celles-ci n'ont pas été passées. La société [E] a ainsi commis une faute envers la société KEvL en la conduisant à procéder à des achats de pâte à papier qu'elle n'a pu ensuite écouler qu'avec une perte financière.

Il s'en déduit que le jugement qui a rejeté la demande de réparation de la société KEvL doit être infirmé.

Sur le préjudice

La société KEvL fait valoir que compte tenu de la part de la responsabilité qu'elle admet être la sienne dans la constitution des stocks excessifs de pâte à papier, son préjudice s'établit à la moitié des pertes constatées à l'issue de la vente du stock des marchandises.

Il résulte des factures produites par la société KevL, des connaissements, ainsi que des calculs effectués par la société sur la base de ces connaissements, que le préjudice subi par la mévente de la pâte à papier commandée par elle, à la suite des assertions de la société [E], est de 297 085, 50 dollars, soit, selon les taux de change applicables à la date de chaque facture, de 224 180, 57 euros.

La société [E] sera donc condamnée à payer cette somme à la société KevL et il convient de préciser qu'elle produira intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 7 octobre 2009.

Sur les frais irrépétibles

La résistance et l'inertie de la société [E] dans la présente procédure contraint la société KEvL a exposer des frais non compris dans les dépens pour faire valoir ses droits. Il est justifié en conséquence et compte tenu de l'ensemble de ce qui précède de condamner la société [E] à verser à la société KEvL la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, en dernier ressort, et par arrêt réputé contradictoire,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société [E] à verser à la société KEvL la somme de 224.180, 57 euros à titre de dommages-intérêts ;

DIT que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 octobre 2009 et que ces intérêts se capitaliseront dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil ;

CONDAMNE la société [E] à verser à la société KEvL la somme de 20.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

REJETTE toute demande autre, plus ample ou contraire de la société KEvL ;

CONDAMNE la société [E] aux dépens d'appel qui seront recouvrés dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

E.DAMAREYC.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/16083
Date de la décision : 19/12/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°11/16083 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-19;11.16083 ?
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